Demande d’expertise sur l’anomalie du kilométrage d’un véhicule

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Demande d’expertise sur l’anomalie du kilométrage d’un véhicule

Résumé de l’affaire

Monsieur [N] [E] a acheté un véhicule Renault Scenic à monsieur [X] [C] [G] pour 8 600 euros, mais a découvert une panne et une anomalie affectant le compteur kilométrique après avoir parcouru 200 kilomètres. Il a donc assigné monsieur [X] [C] [G] en justice pour résoudre la vente et obtenir une indemnisation. Monsieur [E] demande une expertise judiciaire pour prouver les faits et les désordres survenus, tandis que monsieur [X] [C] [G] conteste cette demande en arguant du caractère tardif de celle-ci et en contestant la qualification de professionnel de la vente automobile.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 août 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG n°
23/04741
N° RG 23/04741 – N° Portalis DBX6-W-B7H-X2WQ

INCIDENT
EXPERTISE

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
5EME CHAMBRE CIVILE

50A

N° RG 23/04741 – N° Portalis DBX6-W-B7H-X2WQ

Minute n° 2024 /00

AFFAIRE :

[N] [E]

C/

[X] [C] [G]

Grosse Délivrée
le :

à
Avocats :
Me Axelle DUTEN
Maître Pascal-henri MOREAU de la SELARL HONTAS ET MOREAU

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT

Le SIX AOÛT DEUX MIL VINGT QUATRE

Nous, Madame Myriam SAUNIER, Vice-Présidente ,
Juge de la Mise en Etat de la 5EME CHAMBRE CIVILE,

Isabelle SANCHEZ Greffier, lors des débats et Pascale BUSATO Greffier lors du prononcé :

DÉBATS
A l’audience d’incident du 4 juin 2024

Vu la procédure entre :

DEMANDEUR AU FOND
DEMANDEUR A L’INCIDENT

Monsieur [N] [E]
17 avenue du Lac
33450 IZON

représenté par Me Axelle DUTEN, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR AU FOND
DEMANDEUR A L’INCIDENT

Monsieur [X] [C] [G]
né le 31 Juillet 1972 à BORDEAUX (33000)
1 chemin de Corde
33370 POMPIGNAC

représenté par Maître Pascal-henri MOREAU de la SELARL HONTAS ET MOREAU, avocats au barreau de BORDEAUX

EXPOSE DU LITIGE

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Suivant certificat de cession du 13 octobre 2022, monsieur [N] [E] a acquis de monsieur [X] [C] [G] un véhicule Renault Scenic immatriculé DR-289-QZ, moyennant le prix de 8.600 euros, affichant un kilométrage de 105.215.

Exposant que le véhicule a subi une panne après avoir circulé 200 kilomètres, et avoir découvert une anomalie affectant le compteur kilométrique, par acte délivré le 31 mai 2023, monsieur [N] [E] a fait assigner monsieur [X] [C] [G] devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de résolution de la vente et d’indemnisation de ses préjudices.

Par conclusions spécialement adressées au juge de la mise en état le 23 avril 2024, monsieur [N] [E] a soulevé un incident de mise en état, lequel a été audiencé le 04 juin 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique les 23 avril et 03 juin 2024, monsieur [E] demande au juge de la mise en état d’ordonner une mesure d’expertise judiciaire, formule une proposition de mission, et sollicite que les dépens soient réservés.

Monsieur [E] soutient, sur le fondement des articles 145 et 789 5°) du code de procédure civile, que l’importance du désordre décrit constitue un motif légitime d’établir la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige. Il conteste le moyen relatif à la tardiveté de sa demande, intervenant en cours d’instance, exposant qu’il a sollicité monsieur [C] [G] dès le mois de novembre 2022, les désordres étant survenus quelques jours seulement après la vente, et qu’il lui a adressé des courriers par lettre recommandée en décembre 2022 et janvier 2023 par l’intermédiaire de son assurance de protection juridique, face auquel le vendeur est resté taisant le contraignant à engager la présente procédure. En réponse au défendeur, il fait valoir que l’expert sera en mesure de déterminer si le véhicule a fait l’objet d’interventions ou dégradations depuis la vente.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 mai 2024, monsieur [X] [C] [G] demande au juge de la mise en état de :

à titre principal, débouter monsieur [E] de sa demande d’expertise,à titre subsidiaire, si une mesure d’expertise est ordonnée, de ne pas confier à l’expert de mission visant à dire si le vendeur a agi en qualité de professionnel de la vente automobile, cette qualification ressortant de la seule compétence du tribunal. Monsieur [C] [G] fait valoir, à titre principal, le caractère tardif de la demande d’expertise sollicitée dans le cadre d’une procédure au fond deux ans après la vente, et non dans le cadre d’une procédure de référé qui aurait dû être diligentée dès la prétendue survenance des désordres. Il prétend qu’aucun élément ne permet de démontrer que le véhicule n’a pas fait l’objet d’interventions et dégradations depuis la vente, ni d’exclure une utilisation non conforme dont il n’a pas à subir les conséquences.
Subsidiairement, monsieur [C] [G] conteste l’un de points de mission proposés par le demandeur dès lors qu’il appartient au seul tribunal de juger de sa qualité lors de la vente.

MOTIVATION
Sur la demande d’expertise
En application de l’article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : 5° Ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction.
En l’espèce, monsieur [E] produit un document intitulé « CONFIDENTIEL RENAULT » sur lequel est mentionné le 22 novembre 2018 un kilométrage de 157.005 après une progression constante depuis la première intervention à 5 kilomètres le 12 février 2005, et le 26 septembre 2022 un kilométrage de 104.251. Il produit un second document établi par Carvertical qui indique fournir un rapport de l’historique du véhicule, mentionnant la même évolution du kilométrage.
Ces éléments, qui relèvent une anomalie dans le kilométrage du véhicule, caractérisent donc l’intérêt légitime de monsieur [E] qui justifient que soit ordonnée une expertise afin d’examiner le véhicule.

Les parties ayant la libre disposition de leurs choix procéduraux, il ne peut être fait grief à monsieur [E] de ne pas avoir sollicité une expertise dans le cadre d’une procédure de référé.
S’agissant du délai écoulé, celui-ci s’explique notamment par la tentative justifiée de règlement amiable entre le mois de novembre 2022 et le mois de janvier 2023, à laquelle aucune réponse n’a été apportée par le vendeur.
Enfin la mission confiée à l’expert visera notamment à déterminer si des interventions postérieures à la vente ont pu avoir un impact sur l’état du véhicule, et n’aura pas pour objet de soumettre à l’expert des points sur la qualité des parties, qui relève de l’appréciation du tribunal.

Sur les frais de la procédure d’incident
En application de l’article 790 du code de procédure civile, le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes formées par application de l’article 700.
En vertu de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, la procédure poursuivant son cours, il convient de réserver les dépens, lesquels suivront le sort de ceux de l’instance au fond.

PAR CES MOTIFS
Le juge de la mise en état, statuant par ordonnance contradictoire, susceptible de recours selon les modalités de l’article 795 du code de procédure civile, prononcée par mise à disposition au greffe,
Ordonne une expertise et commet pour y procéder monsieur [Y] [S], demeurant 41 rue Malleret Appartement 11 à BORDEAUX (33000) avec pour mission de :
Convoquer et entendre les parties, assistées le cas échéant de leurs conseils, et recueillir leurs observations ;Prendre connaissance de tous documents utiles, notamment relatifs à la mise en circulation de ce véhicule, son entretien, ses conditions d’utilisation, poses d’accessoires, et son achat, et de tout élément de comparaison utile ;Examiner le véhicule Renault Scenic immatriculé DR-289-QZ dans le garage au lieu de son stationnement, ou après déplacement dans tout garage de son choix permettant de procéder à un examen technique dans des conditions satisfaisantes ;Décrire l’état du véhicule, préciser le degré d’usure du véhicule au moment de la vente par rapport à la longévité habituelle de véhicules de même type ;Dire si le prix acquitté est conforme à celui habituellement pratiqué pour un véhicule du même type, de même âge et se trouvant dans un état identique ;Vérifier si les désordres dénoncés par le demandeur affectant le levier de vitesse et le compteur kilométrique existent, les décrire, en préciser la nature et la localisation ;Déterminer l’origine de ces désordres en précisant s’ils sont dus à un défaut de mécanique, la vétusté, des réparations inappropriées, un défaut d’entretien, une utilisation inadaptée du véhicule ou toute autre cause ;Déterminer la date d’apparition des désordres en précisant cette date par rapport à la date de la vente ;Déterminer si les désordres constatés pouvaient être décelés au moment de la vente par une personne profane en la matière faisant preuve d’un minimum d’attention, en précisant notamment si l’acheteur a eu connaissance avant la vente de pièces déterminant de façon précise l’état du véhicule qu’il envisageait d’acquérir ;Donner tous les éléments techniques et de fait permettant de déterminer si les désordres sont de nature à rendre le véhicule impropre à sa destination ou à son usage normal ;Dire si le véhicule a fait, avant et/ou après la vente litigieuse, l’objet de réparations, et dans l’affirmative en préciser la nature, l’opportunité et l’efficience ;Chiffrer le coût de la remise en état du véhicule suivant la méthodologie la plus adaptée à la reprise des désordres, conformément aux règles de l’art et aux règles en vigueur,Rechercher et indiquer les éléments d’imputabilité des désordres et d’appréciation de toute responsabilité, et fournir à la juridiction tous les éléments techniques et de fait lui permettant de déterminer les responsabilités encourues et d’évaluer les préjudices du fait de l’immobilisation prolongée du véhicule pouvant résulter des désordres, des éventuels travaux de remise en état ou de l’impossibilité d’y procéder, d’une éventuelle perte de valeur ;Plus généralement donner à la juridiction tous éléments d’information permettant de l’éclairer ;

Fixe à la somme de 2.500 euros la provision que le demandeur, monsieur [N] [E], devra consigner par virement sur le compte de la régie du tribunal judiciaire de Bordeaux (Cf code BIC joint) mentionnant le numéro PORTALIS (figurant en haut à gauche sur la première page de la présente ordonnance) dans un délai de deux mois à compter de la présente décision, faute de quoi l’expertise pourra être déclarée caduque, et ce à moins que cette partie ne soit dispensée du versement d’une consignation par application de la loi sur l’aide juridictionnelle, auquel cas les frais seront avancés par le Trésor,
Dit que l’expert pourra commencer ses opérations sur justification du récépissé du versement de la provision délivré par le régisseur à la partie consignataire, à moins que le magistrat chargé du contrôle lui demande par écrit de les commencer immédiatement en cas d’urgence,
Dit que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile,
Dit qu’il pourra s’adjoindre en cas de nécessité le concours d’un sapiteur de son choix, dans un domaine ne relevant pas de sa spécialité,
Dit que l’expert devra établir un pré-rapport dans un délai de TROIS MOIS à compter de l’avis de consignation,
Dit que l’expert devra déposer son rapport en deux exemplaires, au greffe du tribunal judiciaire dans les TROIS MOIS suivant le dépôt du pré-rapport, sauf prorogation accordée par le magistrat chargé du contrôle sur demande présentée avant l’expiration du délai fixé,
Désigne le juge de la mise en état de la 5ème chambre civile du tribunal judiciaire de Bordeaux pour suivre le déroulement de la mesure d’instruction,
Dit que l’expert devra accomplir personnellement la mission qui lui est confiée et répondre point par point et de façon claire, concise mais argumentée à chacune des questions qui lui sont posées,
Dit que l’expert devra préciser dans son rapport qu’il a remis un exemplaire de son rapport aux parties, et précise que les dires des parties, qui doivent concerner uniquement les appréciations techniques, l’expert ne pouvant être saisi de questions de nature purement juridiques, et les réponses faites par l’expert devront figurer en annexe du rapport d’expertise,
Réserve les dépens ;
Ordonne le renvoi du dossier à la mise en état continue du 05 mars 2025 pour conclusions du demandeur après le dépôt du rapport d’expertise ;
La présente décision a été signée par Madame Myriam SAUNIER , Juge de la mise en état, et par Madame Pascale BUSATO , Greffier.

LE GREFFIER, LE JUGE DE LA MISE EN ETAT,


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