Défaut de reddition des comptes dans l’édition musicale : la résiliation judiciaire

Notez ce point juridique

Le défaut de reddition des comptes emporte résiliation judiciaire du contrat d’édition musicale.

Selon son article L132-13,  » l’éditeur est tenu de rendre compte. L’auteur pourra, à défaut de modalités spéciales prévues au contrat, exiger au moins une fois l’an la production par l’éditeur d’un état mentionnant le nombre d’exemplaires fabriqués en cours d’exercice et précisant la date et l’importance des tirages et le nombre des exemplaires en stock.

Sauf usage ou conventions contraires, cet état mentionnera également le nombre des exemplaires vendus par l’éditeur, celui des exemplaires inutilisables ou détruits par cas fortuit ou force majeure, ainsi que le montant des redevances dues ou versées à l’auteur « .

En l’espèce, l’obligation de reddition de comptes annuelle figure à l’article XVII des contrats de cession et d’édition musicale des œuvres. Les contrats ne prévoient pas cependant les conséquences d’une absence de reddition des comptes. Pour autant, GETEVE PRODUCTIONS n’a produit aucune reddition de comptes

L’éditeur a ainsi manqué à son obligation de rendre compte annuellement.

Néanmoins, la reconstitution des comptes a postériori sur interpellation des ayants droit reflète la réalité d’une exploitation ayant généré des revenus conformes aux droits versés, de sorte que ce seul manquement ne saurait suffire à entraîner la résiliation des contrats de cession et d’édition des contrats de cession.

Au surplus, une telle résiliation et les restitutions en découlant serait de nature à remettre en cause les droits d’exploitation des autres titulaires de droits sur les films documentaires pour lesquels ces œuvres ont été composées, et qui ne sont pas à la cause.

En conséquence, il convient de prononcer la résiliation judiciaire des seuls contrats afférents à l’œuvre audiovisuelle  » les merveilles de la vie  » pour manquement de l’éditeur à son obligation d’exploitation suivie et permanente.

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne la succession de l’auteur-compositeur [C] [T], qui a cédé ses droits éditoriaux sur certaines de ses œuvres à la société TELE IMAGES EDITIONS, qui a ensuite été dissoute et a transmis son patrimoine à la société GETEVE PRODUCTIONS. La succession de [C] [T] a estimé que les œuvres n’étaient pas exploitées conformément aux contrats de cession et d’édition, et a demandé des justifications à GETEVE PRODUCTIONS. Après plusieurs mises en demeure restées sans réponse satisfaisante, la succession a assigné GETEVE PRODUCTIONS en justice pour inexécution contractuelle et résolution des contrats. Les parties ont des positions divergentes sur la prescription des demandes et sur le fond du litige, notamment en ce qui concerne les obligations d’exploitation des œuvres musicales de [C] [T]. La succession demande la résolution des contrats, des dommages et intérêts, ainsi que des frais de justice, tandis que GETEVE PRODUCTIONS conteste les accusations de manquements graves et soutient avoir assuré une exploitation conforme des œuvres.

Les points essentiels

Les montants alloués dans cette affaire:

Réglementation applicable

– Code civil
– Code de procédure civile
– Code de la propriété intellectuelle

Article 2224 du code civil:
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Le délai de prescription court en conséquence à compter de la date à laquelle les inexécutions reprochées ont pu être constatées.

Article 2233 du code civil:
La prescription ne court pas :
– à l’égard d’une créance qui dépend d’une condition, jusqu’à ce que la condition arrive
– à l’égard d’une action en garantie, jusqu’à ce que l’éviction ait lieu ;
– à l’égard d’une créance à terme, jusqu’à ce que ce terme soit arrivé.

Article 1383 du code civil:
L’aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques.

Article 4 du code de procédure civile:
L’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense. Toutefois l’objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Article 1229 du code civil:
La résolution met fin au contrat / La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Article L132-1 du code de la propriété intellectuelle:
Le contrat d’édition est le contrat par lequel l’auteur d’une oeuvre de l’esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l’oeuvre, à charge pour elle d’en assurer la publication et la diffusion.

Article L132-12 du code de la propriété intellectuelle:
L’éditeur est tenu d’assurer à l’oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Jean-marie GUILLOUX
– Maître Armelle FOURLON

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