Nos Conseils:
– Vérifiez toujours les clauses de forclusion dans les contrats que vous signez, et assurez-vous de bien comprendre les délais et conditions pour agir en cas de litige. |
→ Résumé de l’affaireMme [U] [X], propriétaire d’un fonds de commerce, a assigné la société FIDUCIAL EXPERTISE en justice pour défaut de conseil lors de la vente du fonds de commerce, ce qui aurait entraîné un contrôle fiscal et un redressement. La société a contesté l’action en se basant sur une clause de forclusion dans la lettre de mission signée par Mme [U] [X]. Le juge de la mise en état a déclaré l’action recevable, mais la société a fait appel. Les parties ont des positions divergentes sur l’objet de la mission de la société FIDUCIAL EXPERTISE et sur l’applicabilité de la clause de forclusion. La décision finale reste à être rendue par la cour.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’appel de Poitiers
RG n°
24/00168
N° RG 24/00168
N° Portalis DBV5-V-B7I-G6XC
S.A. FIDUCIAL EXPERTISE
C/
[X]
Loi n° 77 – 1468 du 30/12/1977
Copie revêtue de la formule exécutoire
Le aux avocats
Copie gratuite délivrée
Le aux avocats
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 11 JUIN 2024
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 janvier 2024 rendue par le Juge de la mise en état de SAINTES
APPELANTE :
S.A. FIDUCIAL EXPERTISE
N° SIRET : 552 108 722
[Adresse 4]
[Localité 5]
ayant pour avocat postulant Me Stéphanie PROVOST-CUIF de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Adeline LAVAULT, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
Madame [U] [X] née [O]
née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 7] (88)
[Adresse 2]
[Localité 3]
ayant pour avocat postulant et plaidant Me Olivier DUNYACH de la SCP ELIGE LA ROCHELLE-ROCHEFORT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 02 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller qui a présenté son rapport
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. et Mme [X] étaient propriétaires d’un fonds de commerce de bar-hôtel-restaurant situé à [Localité 8] ainsi que des murs dans lesquels ils exploitaient ledit fonds de commerce.
M. [M] [X] est décédé en [Date naissance 6] 1993.
Il en est résulté une indivision composée de Mme [U] [X], épouse survivante, et ses deux enfants, M. [P] [X] et Mme [T] [X].
Mme [U] [X] a poursuivi l’exploitation du fonds de commerce.
Une lettre de mission avait été régularisée entre la société FIDUCIAL EXPERTISE et Mme [U] [X], portant sur une mission de comptabilité, surveillance et établissement de comptes annuels et notamment sur une mission d’établissement et de déclaration annuelle des résultats. Cette lettre de mission rédigée pour la période du 01/01/1994 au 31/12/1994 prévoyait un renouvellement chaque année par tacite reconduction.
A compter du 1er janvier 2005, le fonds de commerce a été donné en location-gérance à la société MECC ayant pour associé-gérant, M. [P] [X], fils de Mme [U] [X].
En septembre 2017, l’indivision [X] a cédé le fonds de commerce au locataire-gérant, la S.A.R.L. MECC.
En 2019, Mme [U] [X] a fait l’objet d’un contrôle fiscal portant sur les années 2016 et 2017, qui a eu pour conséquence un redressement.
Mme [U] [X], par l’intermédiaire de la société FIDUCIAL EXPERTISE, a contesté l’analyse de l’administration et l’avis d’imposition émis.
Le 25 octobre 2021, la DGFIP a confirmé son avis et rejeté le recours exercé.
Soutenant que ce serait dans le cadre d’une méconnaissance par l’expert-comptable de son devoir de conseil lors de la vente du fonds de commerce que le sinistre serait survenu puisque la société FIDUCIAL EXPERTISE lui aurait conseillé cette opération sur la base d’une exonération fiscale et que, par suite de ce conseil erroné, elle aurait subi un contrôle de la DGFIP, suivi d’un redressement fiscal, Mme [U] [X] a, par acte d’huissier en date du 20 mars 2023, fait assigner la SA FIDUCIAL EXPERTISE devant le tribunal de SAINTES, aux fins de voir, selon ses dernières écritures :
– Condamner la société FIDUCIAL EXPERTISE à lui payer la somme de 124.490,00 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de conseil,
– Condamner la société FIDUCIAL EXPERTISE à lui payer la somme de 10.000,00 euros à titre de préjudice moral,
– Condamner la société FIDUCIAL EXPERTISE à lui payer la somme de 5.000,00 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– La condamner aux entiers dépens.
La société FIDUCIAL EXPERTISE a saisi d’un incident de forclusion le juge de la mise en état en soutenant que les demandes présentées par Mme [U] [X] seraient manifestement tardives au regard des stipulations contractuelles liant les parties, prévoyant un délai de 3 mois pour agir à son encontre à compter de la connaissance du préjudice, délai auquel Mme [U] [X] ne se serait pas tenue, de sorte que son action serait irrecevable.
Par ordonnance contradictoire en date du 10 janvier 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de SAINTES a statué comme suit :
‘DÉCLARE recevable l’action intentée par Mme [U] [X] à l’encontre de la SA FIDUCIAL EXPERTISE ;
RENVOIE l’affaire à l’audience de mise en état du 6 mars 2024 à 9H30 ;
CONDAMNE la SA FIDUCIAL EXPERTISE à payer à Mme [U] [X], la somme de 1500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SA FIDUCIAL EXPERTISE aux dépens de l’incident’
Le premier juge a notamment retenu que :
– la responsabilité de la SA FIDUCIAIRE EXPERTISE est recherchée pour défaut de conseil sur les conséquences fiscales découlant de la vente du fonds de commerce.
-le devoir de conseil auquel est tenu l’expert-comptable dépasse le cadre strict de ses obligations contractuellement convenues, en les prolongeant.
– selon l’article 2224 du code civil, les actions personnelles et mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit à connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, d’où il ressort que l’action de Mme [U] [X] n’est pas prescrite.
– la forclusion tirée de l’article 20 inscrit dans la lettre de mission régularisée entre les parties sera en conséquence rejetée.
LA COUR
Vu l’appel en date du 23/01/2024 interjeté par la société SA FIDUCIAL EXPERTISE
Vu l’article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 05/04/2024, la société SA FIDUCIAL EXPERTISE a présenté les demandes suivantes:
‘Vu l’article 122 du code de procédure civile,
Vu la jurisprudence citée,
Vu la lettre de mission,
Il est demandé à la cour de bien vouloir :
– Infirmer l’ordonnance du 10 janvier 2024 en ce qu’elle :
DÉCLARE recevable l’action intentée par Mme [U] [X] à l’encontre de la SA FIDUCIAL EXPERTISE ;
CONDAMNE la SA FIDUCIAL EXPERTISE à payer à Mme [U] [X] la somme de 1500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile » ;
CONDAMNE la SA FIDUCIAL EXPERTISE aux entiers dépens de l’incident.
Statuant à nouveau,
– Déclarer irrecevable comme forclose l’action de Mme [X] à l’encontre du cabinet FIDUCIAL EXPERTISE
– Condamner Mme [X] à verser au cabinet FIDUCIAL EXPERTISE une
somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile – Condamner Mme [X] aux entiers dépens’.
A l’appui de ses prétentions, la société SA FIDUCIAL EXPERTISE soutient notamment que :
– suivant lettre de mission en date du 20 décembre 1993 renouvelée chaque année par tacite reconduction, Mme [X] a confié au cabinet FIDUCIAL EXPERTISE une mission d’établissement de ses déclarations fiscales.
– courant 2017, Mme [X] a souhaité céder le fonds de commerce à la société MECC. L’acte de cession du fonds du commerce rédigé par un notaire a été signé le 25 septembre 2017 au prix de 90 000 €. Cette cession du fonds de commerce a entraîné la réintégration dans le patrimoine privé de Mme [X] de l’immeuble figurant à l’actif de l’indivision [X], ce pour une valeur de 350 000€.
La plus-value à court terme et moyen terme constatée à l’occasion de cette opération de cette cession a été placée sous un régime d’exonération.
– une lettre de mission avait été conclue entre FIDUCIAL EXPERTISE et la société MECC pour l’établissement de ses déclarations fiscales.
En parallèle, FIDUCIAL EXPERTISE poursuivait sa mission confiée depuis 1993 d’établissement des déclarations fiscales de Mme [X].
– en 2019, Mme [X] a fait l’objet d’un contrôle fiscal qui s’est soldé par une proposition de rectification notifiée le 18 juin 2019 aux termes de laquelle l’administration fiscale a considéré que la plus-value réalisée lors de la cession du fonds en 2017 devait être réintégrée aux revenus imposables de Mme [X].
– Mme [X] s’est vu notifier un rappel d’impôts et de prélèvements sociaux de 121 328 €, outre des intérêts de retard à hauteur de 2 911 € et des majorations de 10% d’un montant de 8 505 €, résultant de la réintégration de l’immeuble dans son patrimoine privé et sa réclamation contentieuse n’a pas abouti.
– aucune pièce ne démontre par ailleurs que FIDUCIAL EXPERTISE aurait eu en l’espèce une mission spécifique au titre de cette cession de fonds de commerce.
Or, le devoir de conseil de l’expert comptable est limité à la mission qui lui a été confiée
– aucune mission spécifique n’a été confiée à la société FIDUCIAL EXPERTISE au titre de l’opération de cession du fonds, et aucun honoraire complémentaire ou exceptionnel ne lui a été facturé en 2017.
– FIDUCIAL EXPERTISE n’a pas été mandatée pour assister Mme [X] lors de cette opération de cession.
– l’acte de cession du fonds du commerce a été rédigé par un notaire, professionnel tenu à un devoir d’information et de conseil.
– FIDUCIAL EXPERTISE est intervenue pour établir après la clôture de l’exercice le bilan au titre de l’exercice 2017 au cours duquel était intervenue la cession, bilan faisant alors état d’une plus-value exonérée qui fera l’objet de discussions par la suite avec l’administration fiscale.
– la forclusion objet du présent débat est fixée dans les « modalités générales de collaboration de FIDUCIAL EXPERTISE » qui ont vocation à s’appliquer à toutes les missions éventuellement confiées à FIDUCIAL EXPERTISE..
– les conditions générales annexées à la lettre de mission du 20 décembre 1993 comportent une clause de forclusion qui prévoit que :
« Toute demande de dommages et intérêts ne pourra être produite que pendant une période de cinq ans commençant à courir le premier jour de l’exercice suivant celui au cours duquel est né le sinistre correspondant à la demande. Celle-ci devra être introduite dans les trois mois suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre’.
Cette clause est valide, s’agissant d’un délai de forclusion et non d’un délai de prescription.
– la clause a pour seule conséquence de réduire le délai d’action à un délai raisonnable de réactivité du client de sorte qu’il n’est pas démontré que la clause litigieuse crée une situation de déséquilibre significatif entre les obligations des parties.
Elle est parfaitement opposable à Mme [X] qui a signé la lettre de mission.
– le point de départ du délai de 3 mois se situe au jour où la demanderesse a eu connaissance de l’existence d’un préjudice engendré par une faute supposée de l’expert-comptable
– par son assignation délivrée le 20 mars 2023, Mme [X] entend mettre en cause la responsabilité de FIDUCIAL EXPERTISE au titre d’un redressement fiscal qui lui a été notifié le 18 juin 2019. Une réclamation
contentieuse a été adressée le 12 mai 2021 à laquelle l’administration fiscale a répondu le 25 octobre 2021.
Par courrier du 25 novembre 2021, Mme [X] a mis en cause la responsabilité de FIDUCIAL EXPERTISE en exprimant sans ambiguïté le grief reproché à son expert-comptable. Or, elle se devait d’agir à compter de cette date avant le 25 février 2022.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 21/03/2024, Mme [U] [X] a présenté les demandes suivantes :
‘Confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de SAINTES le 10 janvier 2024.
Condamner la société FIDUCIAL EXPERTISE à payer à Mme [U] [X] la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamner la société FIDUCIAL EXPERTISE aux dépens’.
A l’appui de ses prétentions, Mme [U] [X] soutient notamment que :
– la société FIDUCIAL EXPERTISE s’appuie sur une lettre de mission non datée qui indique au titre des modalités générales que toute demande de dommages et intérêts devra être introduite dans les 3 mois suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre.
– ce délai de 3 mois n’a pas été respecté puisque Mme [X] a tenté de trouver un accord amiable avant d’agir en justice.
– la lettre de mission qui portait sur la tenue de la comptabilité au titre de l’année 1994 est manifestement obsolète et n’avait plus d’objet en 2016-2017.
– cette lettre de mission avait pour objet une assistance de comptabilité dans le cadre de la gestion du fonds de commerce et elle prévoyait d’ailleurs une mission comptable complète ainsi qu’une mission fiscale.
– cette lettre de mission n’avait plus d’objet et elle n’a aucune vocation à s’appliquer au litige actuel.
– Mme [X] recherche la responsabilité de la société FIDUCIAL EXPERTISE sur un défaut de conseil lors de la vente du fonds de commerce puisque la société FIDUCIAL EXPERTISE lui a conseillé cette opération sur la base d’une exonération fiscale dont Mme [X] n’était en réalité pas en droit de bénéficier.
– le litige actuel ne concerne en rien la gestion du fonds de commerce et la lettre de mission derrière laquelle la société FIDUCIAL EXPERTISE cherche à se retrancher.
– la société FIDUCIAL EXPERTISE ne peut contester avoir conseillé et assisté la S.A.R.L. MECC et Mme [X] lors des opérations de cession du fonds de commerce.
Dans le cadre de cette intervention, elle avait un devoir de conseil qu’elle n’a pas assuré,
Il appartenait à la société FIDUCIAL EXPERTISE de lui soumettre une lettre de mission spécifique au moment de la vente du fonds de commerce
À défaut de lettre de mission acceptée et signée par Mme [X], aucune clause de forclusion ne peut lui être opposée.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l’ordonnance de clôture en date du 08/04/2024.
Sur la forclusion de l’action de Mme [X] :
L’article 1134 ancien du code civil dispose que :
« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi. »
Le principe de ces dispositions est repris désormais aux articles 1103 du code civil : ‘ les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits,’ et 1104 du code civil ‘les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi’.
En l’espèce, la lettre de mission du 20 décembre 1993 comporte en article 20 une clause de forclusion qui prévoit que :
‘ Toute demande de dommages et intérêts ne pourra être produite que pendant une période de cinq ans commençant à courir le premier jour de l’exercice suivant celui au cours duquel est né le sinistre correspondant à la demande. Celle-ci devra être introduite dans les trois mois suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre’.
Cette lettre de mission prévoyait un renouvellement chaque année par tacite reconduction et portait sur une mission de tenue de comptabilité, d’établissement et déclaration annuelle des résultats et sur une mission sociale.
En l’espèce, l’action engagée par Mme [X] n’est pas relative à la mission générale confiée à l’expert comptable à partir du 1er janvier 1994, mais à l’intervention de celui-ci lors de la vente du fonds de commerce, un défaut de conseil lui étant reproché pour avoir conseillé cette opération sur la base d’une exonération fiscale dont Mme [X] n’était en réalité pas en droit de bénéficier.
Or, à compter du 1er janvier 2005, le fonds de commerce a été donné en location-gérance à la société MECC ayant pour associé-gérant, M. [P] [X], et la mission générale exercée au bénéfice de Mme [X] a alors pris fin.
S’y est tacitement substitué un contrat verbal portant sur une ‘mission de conseils et de participation à l’établissement de vos comptes annuels’, selon la note d’honoraire en date du 1er septembre 2017.
L’existence du nouveau contrat entre Mme [X] et la société la SA FIDUCIAL EXPERTISE se déduit de l’inadaptation à la nouvelle situation de la mission stipulée dans la lettre de mission du 20 décembre 1993, qui portait sur la comptabilité d’une entreprise, avec mission sociale et établissement des bulletins de paie et tenue du livre de paie, alors que la mise en location-gérance de l’affaire faisait que la prestation fournie à Mme [X] ne portait plus que sur l’établissement de ses propres comptes, c’est-à-dire essentiellement de sa déclaration fiscale personnelle, au titre des redevances qu’elle percevait désormais de la location-gérance.
Elle se déduit également du montant même des honoraires désormais dûs, très inférieurs , soit 577,96 € TTC facturés à la seule Mme [X] pour la période du 01/04/2017 au 31/03/2018,contre 13860 Francs pour la période du 01/01 au 31/12/1994, facturés dans le cadre de l’activité de bar-hotel-restaurant de Mme [X] au titre de la large mission initiale.
Or la clause dont se prévaut l’appelante, instituant un délai de forclusion de trois mois pour rechercher sa responsabilité, était stipulée dans la convention conclue en 1994 qui a pris fin entre les parties en 2005, et aucun élément ne permet de retenir que le contrat verbal, différent, qui y a succédé, aurait repris cette stipulation.
Il y a lieu de retenir en conséquence et par substitution de motifs que le délai de forclusion prévu à la première lettre de mission n’a pas lieu à s’appliquer en l’espèce, dans le cadre de l’action en responsabilité exercée par Mme [X] à l’occasion de la vente du fonds de commerce.
En l’absence de forclusion, les dispositions de l’article 2224 du code civil s’appliquent, selon lesquelles ‘les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour ou le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer’.
En l’espèce, une réclamation contentieuse a été adressée le 12 mai 2021 par Mme [X] à laquelle l’administration fiscale a répondu le 25 octobre 2021.
Par courrier du 25 novembre 2021, Mme [X] mettait en cause la responsabilité de la SA FIDUCIAL EXPERTISE, puis délivrait son assignation le 20 mars 2023 au titre du redressement fiscal qui lui a été notifié le 18 juin 2019.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a rejeté la forclusion, et a déclaré recevable l’action intentée par Mme [U] [X] à l’encontre de la SA FIDUCIAL EXPERTISE.
Sur les dépens et l’application de l’article 699 du code de procédure civile:
Il résulte de l’article 696 du code de procédure civile que ‘ La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. (…).’
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d’appel seront fixés à la charge de la société SA FIDUCIAL EXPERTISE.
Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile :
La somme allouée au titre des frais de première instance a été justement appréciée, l’ordonnance entreprise devant être confirmée sur ce point.
Il est équitable de condamner la société SA FIDUCIAL EXPERTISE à payer à Mme [U] [X] la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
CONFIRME l’ordonnance entreprise.
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
Y ajoutant,
CONDAMNE la société SA FIDUCIAL EXPERTISE à payer à Mme [U] [X] la somme de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
CONDAMNE la société SA FIDUCIAL EXPERTISE aux dépens d’appel sur incident.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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