La société Fiat Chrysler Automobiles a diffusé des spots publicitaires en 2014 utilisant une composition musicale contestée par M. [G], qui a assigné la société en justice pour atteinte à ses droits d’auteur. Le tribunal de grande instance de Lyon a débouté M. [G] de ses demandes en contrefaçon de droits patrimoniaux d’auteur, mais a jugé recevables ses demandes en contrefaçon de droits moraux d’auteur. M. [G] a fait appel de cette décision, mais la société Frame Communication a demandé la caducité de l’appel pour non-respect des délais. La cour d’appel a confirmé la caducité de l’appel et a condamné M. [G] à payer des indemnités à la société Frame Communication. M. [G] a ensuite formulé de nouvelles demandes, notamment une indemnisation de 50 000 euros et des mesures d’interdiction et de publication. La société FCA a demandé le rejet de ces demandes et une indemnisation pour procédure abusive. L’affaire est en attente de délibéré suite à des questions sur la recevabilité d’une pièce transmise par M. [G].
1. Il est essentiel de s’assurer de la recevabilité de son action en justice au moment où elle est formée. Il est donc important de prendre en compte les éléments justifiant cette recevabilité au moment de l’engagement de l’action, et non des documents postérieurs à celle-ci.
2. Pour prouver l’antériorité de ses droits d’auteur, il est nécessaire de produire des éléments probants et tangibles, tels que des enregistrements, des courriels ou des constats d’huissier, qui permettent d’établir clairement la date de création de l’œuvre revendiquée.
3. En cas de litige concernant des droits d’auteur, il est primordial de respecter les règles de procédure et de communication des pièces entre les parties. Tout manquement à ces règles peut être préjudiciable à la crédibilité de la demande et entraîner des conséquences financières, telles que des condamnations pour recours abusif ou des frais de justice supplémentaires.
Sur la recevabilité de l’action fondée sur les droits patrimoniaux de l’auteur
La cour a jugé que l’appelant était irrecevable dans sa demande d’action en contrefaçon, car il n’avait pas démontré de carence de la SACEM et n’avait pas informé l’organisme des actes de contrefaçon allégués. La recevabilité de l’action s’apprécie au moment où elle est formée, et les documents postérieurs à l’engagement de l’action ne peuvent être pris en compte.
Sur le bien-fondé de l’action fondée sur les droits moraux de l’auteur
La cour a conclu que l’appelant n’avait pas prouvé l’antériorité de sa création par rapport à l’œuvre utilisée par la société FCA dans sa publicité. En comparant les morceaux de musique en question, la cour a constaté qu’ils étaient identiques et que l’antériorité de l’œuvre utilisée par la société FCA était établie au 30 mai 2014. L’appelant n’avait pas fourni de preuves suffisantes pour justifier ses droits d’auteur.
Sur les autres demandes
L’intimée a soutenu que la procédure en appel était abusive, car l’appelant avait maintenu son action malgré les objections et n’avait pas apporté de preuves suffisantes. La cour a jugé que l’appelant avait agi avec légèreté et a condamné l’appelant à verser une somme de 2 500 euros à l’intimée pour recours abusif. L’appelant a également été condamné à payer des dépens et une somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Réglementation applicable
– Code de la propriété intellectuelle
– Statuts de la SACEM
– Code de procédure civile
Avocats
– SARL LORANG AVOCATS
– Me Olivier DESPLACES
– SELARL DESTREMAU ASSOCIES
Mots clefs
– Recevabilité de l’action
– Qualité à agir de la SACEM
– Carence de la SACEM
– Antériorité de l’action
– Irrecevabilité de l’appelant
– Droits moraux de l’auteur
– Preuves de création
– Antériorité de l’œuvre
– Similarité des morceaux de musique
– Acquisition des droits de diffusion
– Contrefaçon des droits moraux d’auteur
– Procédure en appel abusive
– Recours abusif
– Indemnisation
– Dépens
– Frais irrépétibles
Définitions juridiques
– Recevabilité de l’action: possibilité pour une action en justice d’être examinée par le tribunal
– Qualité à agir de la SACEM: capacité de la SACEM à agir en justice en tant qu’organisme de gestion collective des droits d’auteur
– Carence de la SACEM: défaut ou insuffisance de la SACEM dans l’exercice de ses fonctions
– Antériorité de l’action: fait pour une action d’avoir été engagée avant une autre
– Irrecevabilité de l’appelant: impossibilité pour l’appelant de faire appel d’une décision judiciaire
– Droits moraux de l’auteur: droits attachés à la personne de l’auteur d’une œuvre, tels que le droit au respect de l’intégrité de l’œuvre
– Preuves de création: éléments permettant de prouver la création d’une œuvre originale
– Antériorité de l’œuvre: fait pour une œuvre d’avoir été créée avant une autre
– Similarité des morceaux de musique: ressemblance entre deux morceaux de musique pouvant constituer une contrefaçon
– Acquisition des droits de diffusion: obtention des droits permettant de diffuser une œuvre
– Contrefaçon des droits moraux d’auteur: violation des droits moraux de l’auteur d’une œuvre
– Procédure en appel abusive: recours en appel intenté de manière abusive
– Recours abusif: recours intenté de manière abusive
– Indemnisation: compensation financière accordée à une partie lésée
– Dépens: frais de justice engagés par les parties à un procès
– Frais irrépétibles: frais non récupérables engagés par une partie dans le cadre d’une procédure judiciaire
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 19/03486 – N° Portalis DBVX-V-B7D-ML4S
Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON
Au fond du 19 mars 2019
( chambre 3 cab 03 C)
RG : 15/11927
[G]
C/
SARL FRAME COMMUNICATION
Société FIAT CHRYSLER AUTOMOBILES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 07 Mars 2024
APPELANT :
M. [J] [G]
né le 30 Mars 1981 à [Localité 6] (PUY-DE-DOME
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par la SARL LORANG AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 811
INTIMEES :
SARL FRAME COMMUNICATION
[Adresse 7]
[Adresse 1] (ITALIE)
Ordonnance de caducité partielle en date du 2 juin 2020
SASU FIAT CHRYSLER AUTOMOBILES anciennement dénommée FIAT FRANCE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Olivier DESPLACES, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 285
Et ayant pour avocat plaidant la SELARL DESTREMAU ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 27 Avril 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Novembre 2023
Date de mise à disposition : 07 Mars 2024
Audience tenue par Anne WYON, président, et Thierry GAUTHIER, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier
A l’audience, un des membres de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
– Anne WYON, président
– Olivier GOURSAUD, président
– Thierry GAUTHIER, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
La société Fiat Chrysler Automobiles (la société FCA) a diffusé à l’automne 2014 des spots publicitaires conçus par la société de droit italien Frame Communication visant à faire la promotion de l’un de ses modèles de voiture.
Le 28 août 2015, estimant être l’auteur de la composition musicale utilisée dans ce spot et faisant valoir que son utilisation avait porté atteinte à ses droits d’auteur, M. [G] a assigné la société FCA devant le tribunal de grande instance de Lyon.
La société Frame communication est intervenue volontairement à l’instance.
Par jugement du 19 mars 2019, le tribunal de grande instance de Lyon a :
– déclaré recevable l’intervention volontaire de la société Frame Communication ;
– déclaré irrecevables les demandes de M. [G] en contrefaçon de ses droits patrimoniaux d’auteur ;
– déclaré recevables les demandes de M. [G] en contrefaçon de ses droits moraux d’auteur ;
– débouté M. [G] de ses demandes en contrefaçon de ses droits moraux d’auteu;
– débouté M. [G] de sa demande d’expertise ;
– condamné M. [G] à payer à la société FCA et à la société Frame Communication une somme de 1 500 euros chacune en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [G] aux dépens, dont distraction au profit de Me ROSTAING-TAYARD, avocat, en application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile ;
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
Par déclaration transmise au greffe du 20 mai 2019, M. [G] a relevé appel de cette décision.
Par conclusions d’incident des 06 février et 17 mars 2020, la société Frame communication a sollicité le prononcé de la caducité de la déclaration d’appel, en raison de la violation de l’article 911 du code de procédure civile par l’appelant.
Par ordonnance du 02 juin 2020, le conseiller de la première chambre civile A, a :
– prononcé la caducité de la déclaration d’appel de M. [G] à l’égard de la société Frame Communication, pour défaut de signification des conclusions par l’appelant dans le délai imparti par l’article 911 du code de procédure civile,
– constaté que l’instance est éteinte à l’égard de la société Frame Communication depuis le 20 septembre 2019 et mis hors de cause cette dernière ;
– déclaré irrecevables les conclusions de la société FCA signifiées le 13 novembre 2019 en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de la société Frame Communication ;
– constaté que l’instance se poursuit entre M. [G] et la société FCA ;
– condamné M. [G] à payer à la société Frame Communication une indemnité de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’incident.
Par arrêt du 19 janvier 2021, la formation de jugement de la cour d’appel, saisie sur déféré de l’ordonnance du conseiller de la mise en état susvisé, a :
– confirmé la décision déférée,
Y ajoutant,
– condamné la société FCA et M. [G], in solidum, aux dépens du déféré qui seront recouvrés par le conseil de la partie adverse conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
– condamné M. [G] à payer à la société Frame Communication la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.
Dans ses conclusions déposées le 13 août 2019, M. [G] demande à la cour de :
– recevoir comme régulier et bien fondé son appel ;
– réformer le jugement en toutes ses dispositions ;
– statuant à nouveau :
(…)
– dire et juger que la société FCA s’est rendue coupable d’actes de contrefaçons de droits d’auteurs à son détriment, comme auteur de la composition musicale ayant servi à la société FCA ;
– condamner la société FCA à lui payer :
* 20 000 euros en indemnisation de l’atteinte à son droit de paternité sur son oeuvre « Day N day » ;
* 30 000 euros en indemnisation de l’atteinte au respect de son oeuvre ;
– interdire la diffusion sur internet du clip video et de la publicité litigieux reproduisant son oeuvre, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard constaté, passé un délai de 8 jours à compter de la signification de l’arrêt à venir ;
– l’autoriser à procéder à la publication de l’arrêt à intervenir dans trois revues ou site internet de son choix aux frais de la société FCA dans la limite de 10 000 euros HT par insertion ;
– ordonner la publication judiciaire de la décision à intervenir sur la page d’accueil des sites internet www.fcagroup.com et www.jeep.fr pendant une durée de un mois à compter de la première mise en ligne et dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l’arrêt, à titre de réparation complémentaire, avec publication en partie supérieure de la page d’accueil du site de façon visible et en toute hypothèse au-dessus de la ligne de flottaison, sans mention ajoutée, en police de caractère « times new roman », de taille 12, droits, de couleur noire et sur fond blanc, dans un encadré de 468 x 120 pixels, en dehors de tout encart publicitaire, le texte devant être précédé du titre « Communication judiciaire » en lettres capitales de taille 14, aux seuls frais de la société FCA, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard constaté ;
– condamner la société FCA à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;
– dire que la cour se réservera la faculté de liquider l’astreinte.
Dans ses conclusions déposées le 16 avril 2021, la société FCA demande à la cour de:
– (à titre principal) confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf à y ajouter en ce qui concerne le quantum des sommes allouées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– subsidiairement :
– débouter M. [G] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
– dire et juger que M. [G] ne rapporte pas la preuve de l’antériorité de sa création;
– dire et juger que si une telle antériorité serait rapportée, les éventuelles similitudes constatées entre les deux oeuvres ne pourraient résulter que d’une rencontre fortuite ;
– plus subsidiairement :
– dire et juger que M. [G] ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une contrefaçon ou d’un préjudice ;
– ramener en tant que de besoin les prétentions financières de M. [G] à de plus justes proportions sinon à une somme purement symbolique ;
– en toutes hypothèses, condamner M. [G] à lui payer :
* la somme de 10 000 euros à titre de procédure abusive ;
* la somme de 10 000 au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les entiers dépens, avec distraction au profit de son conseil.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 27 avril 2021.
Le 10 novembre 2023, M. [G] a déposé des conclusions « mises à jour », aux seules fins de régularisation des écritures, consécutivement à la modification des conditions juridiques d’exercice de son conseil.
Ces conclusions comportent le même dispositif que les précédentes, susvisées.
A l’audience, la cour a sollicité les observations des parties en délibéré en raison de ce que:
– l’appelant fait état dans ses écritures d’un CD-Rom joint au procès-verbal de commissaire de justice du 12 mai 2015, dont il se prévaut, sans que celui-ci ne figure dans le bordereau de communication de pièces et sans qui’l ait été matériellement joint au dossier déposé auprès de la cour ;
– l’intimé indique dans ses écritures n’avoir pas eu communication de ce CD-Rom, ce qui pose la question, à supposer qu’il soit versé à son dossier par l’appelant, de la recevabilité de cette pièce devant la cour.
Le 6 décembre 2023, le conseil de M. [G] a fait parvenir une clé USB qu’il présente comme une reproduction du contenu du CD-Rom susvisé.
Le 8 décembre 2023, le conseil de la société FCA indique qu’il n’est pas possible de déterminer si les fichiers transmis sur cette clé USB correspondent à ceux inscrits sur le CD-Rom.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se reporter aux conclusions des parties ci-dessus visées, pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l’action fondée sur les droits patrimoniaux de l’auteur
À titre infirmatif, l’appelant indique que, si la SACEM a qualité à agir au titre de l’action en contrefaçon afin de préserver les intérêts de ses membres, l’auteur peut agir personnellement en cas de carence de l’organisme de gestion collective.
Il fait valoir qu’il a sollicité la SACEM le 3 juillet 2019, qui lui a répondu par courriel du 15 juillet 2019 qu’elle ne souhaitait pas engager d’action.
À titre confirmatif, la société FCA indique que la carence de la SACEM ne peut être caractérisée que si l’appelant l’avait mise en demeure d’agir. Elle indique qu’il ne justifie d’aucune démarche antérieure à l’engagement de son action. Concernant le courriel de la SACEM, la société considère que celle-ci ne se contente pas d’indiquer qu’elle n’engagera pas d’action en contrefaçon mais qu’il n’y a pas lieu de le faire.
La société fait valoir en outre que la recevabilité de l’action doit s’apprécier au moment où elle est engagée. Elle indique que, en toute hypothèse, l’action de l’appelant ne pourrait être accueillie, en l’absence d’antériorité.
Sur ce,
La cour rappelle que la recevabilité d’une action s’apprécie au jour où elle est formée.
Dès lors, c’est de manière inopérante que l’appelant entend justifier de la recevabilité de son action par des documents (pièces C4 et C5, lettre de son conseil à la SACEM du 3 juillet 2019 et la réponse de celle-ci du 15 juillet 2019), établis postérieurement à l’engagement de son action, le 28 août 2015.
En outre, c’est par des motifs pertinents, qui répondent aux conclusions d’appel et que la cour adopte, que le tribunal, se fondant sur les dispositions de l’article L. 321-1 du code de la propriété intellectuelle et celles de l’article 1er des statuts de la SACEM, a retenu que l’auteur ayant adhéré à cet organisme est irrecevable, sauf carence de la société gestionnaire, à agir personnellement en défense de ceux-ci tandis que l’appelant ne justifiait aucunement d’une telle carence, et notamment d’avoir informé cet organisme des actes de contrefaçon qu’il allègue ou de l’avoir mise en demeure d’introduire une action visant à obtenir une indemnisation au titre de la contrefaçon.
L’appelant est dès lors irrecevable en cette demande, et le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur le bien-fondé de l’action fondée sur les droits moraux de l’auteur
À titre infirmatif, l’appelant soutient le caractère probant des constats d’huissier du 5 février 2015 et du 12 mai 2015 qu’il verse à son dossier.
Il écarte le rapport d’expertise de M. [I], produit par l’intimée, comme irrecevable, faisant valoir que l’auteur de ce rapport est un collaborateur de la personne qui, selon l’intimée, serait co-auteur de la musique.
Il fait valoir qu’en application de l’article L 111-2 du code de la propriété intellectuelle, l’existence d’une oeuvre aboutie n’est pas une condition de protection et que des actes matériels de conception ont été réalisés dès 2012, faisant état des échanges de courriels intervenus entre le 20 avril 2012 et le 13 février 2014.
Il indique que la musique enregistrée à la SACEM le 21 juin 2014, sous le titre « Day n Day », correspond à la musique diffusée sur youtube sous le titre « zouk instrumental logic pro 2014 », ce qu’établit un courriel du 13 février 2014. Il considère que le contenu de ce courriel est certain.
Il en déduit que des actes matériels de conception musicale ont été effectués à partir du 30 avril 2012 en tenant compte du courriel envoyé à miss.mbalea@live.fr, à tout le moins à compter du 13 février 2014, soit avant la diffusion du clip en octobre 2014.
Il fait valoir que l’intimée ne justifie pas de ce que M. [A] [W] – l’auteur du titre selon l’intimée – ait créé ni à quelle date il aurait créé le morceau, la seule référence produite datant de 2015. Il indique que la société ne produit aucun élément justifiant de l’antériorité de ses droits.
À titre confirmatif, l’intimée indique que l’appelant s’est contenté, préalablement au procès, de se prévaloir d’une antériorité liée à l’enregistrement de sa musique à la SACEM, le 21 juin 2014, jusqu’à ce qu’elle lui indique, par lettre du 25 février 2015,la mise en ligne du morceau utilisé sur youtube en mai 2014. Elle relève que ce n’est que lorsqu’il a été confronté à cette antériorité que l’appelant a prétendu justifier d’une antériorité datant de février 2014.
Elle précise que, lors de sa première prise de contact avec ses services, l’appelant ne s’est prévalu que d’un lien de diffusion de sa musique sur youtube du 12 juillet 2014, sous le nom de « zouc instrumental logic pro 2014 » tandis que l’assignation mentionnait également comme noms « day n day by jim music » et « day n day by def jim », en précisant que l’appelant a diffusé sur le site Soundcloud une composition sous ce nom mais qui n’a rien à voir avec celle prétendument contrefaite.
Elle conteste toute valeur probante au constat du 12 mai 2015 en, raison de la confusion et de l’imprécision des dates et mentions figurant sur le constat. Elle indique que le constat indique 5 à 6 dates différentes pour l’antériorité du morceau.
Elle soutient également que le procès-verbal a été établi à partir des appareils de l’appelant, ce qui ne permet pas de leur accorder de valeur probante, en ce qui concerne l’accès à la boîte mail, et de déterminer l’exactitude des dates indiquées dans le constat.
Elle conteste pour les mêmes raisons le caractère probant du courriel du 13 février 2014 invoqué par l’appelant. Elle indique en outre que le constat ne comporte aucune information sur sa réception par le destinataire ni sur le fichier audio attaché à ce courriel.
Sur ce,
Comme l’a rappelé le tribunal, l’article L. 111-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que l’oeuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l’auteur.
Par ailleurs, le demandeur à l’action en contrefaçon doit prouver l’antériorité de son oeuvre par rapport à celle qu’il prétend contrefaisante.
En l’espèce, le débat porte ainsi sur l’antériorité de la création invoquée par l’appelant, par rapport à l’oeuvre utilisée par la société FCA, lors de l’élaboration de la publicité pour l’un de ses véhicules.
A cet égard, la cour considère que la société FCA justifie de ce que la société Frame communication a acquis (pièce n° 17 de l’intimée), le 15 septembre 2014, auprès de « [C] » (dont la pièce n° 18 indique que ce pseudonyme correspond à M. [H] [A] [W]), les droits de diffusion d’une musique intitulée « piano Love R & B instrumental beat 3 words ». Il ressort des mêmes documents que cette acquisition a été réalisée dans la finalité d’utiliser ce morceau pour la publicité faisant la promotion du véhicule « Jeep renegade ».
Après consultation de la teneur de la publicité litigieuse, via le lien indiqué par l’appelant dans ses conclusions (p. 4 : https://www.dailymotion.com/video/x27da2m), et de celle du morceau que la société indique avoir utilisé pour la bande sonore de cette publicité (inscrit sur le CD-Rom déposé avec la pièce n° 21 de l’intimée), et sans qu’il soit besoin d’une plus ample mesure d’instruction, la cour constate que les deux morceaux sont identiques.
En outre, la société FCA justifie, par son procès-verbal établi par un commissaire de justice le 5 décembre 2019, que le morceau « piano Love R & B instrumental beat 3 words » a été mis en ligne sur le site Youtube, le 30 mai 2014, avec notamment l’indication du nom d’auteur « [C] ».
Il en résulte que la société FCA justifie suffisamment de ce que la publicité litigieuse utilise comme bande son un morceau de musique dont l’antériorité est établie au 30 mai 2014.
Il convient de relever que le moyen soulevé par l’appelant, concernant « l’absence d’identification par l’intimée du créateur » du morceau utilisé dans la publicité litigieuse est inopérant, puisque ce ne sont pas les droits de cet auteur, quel qu’il soit, qui sont en litige, ni même la régularité des conditions dans lesquelles la société intimée aurait fait l’acquisition des droits de diffusion correspondant, ce qui n’est au demeurant pas discuté par l’appelant.
L’appelant soutient pouvoir justifier de droit antérieurs.
A cet égard, le procès-verbal de commissaire de justice du 5 février 2015 qu’il produit (pièce E1) permet de constater sur la page Youtube (sous le nom « Dej Jim ») dont il dispose, qu’un morceau de musique intitulée « zouk instrumental logic pro 2014 » a été mis en ligne sur Youtube le 12 juillet 2014.
C’est ce morceau que l’appelant invoque comme support à sa demande de contrefaçon, indiquant toutefois que le morceau a toutefois eu plusieurs dénomination pour s’intituler également « Day n Day ».
D’ailleurs, l’appelant se prévaut ainsi de l’enregistrement du titre « Day n Day » auprès de la SACEM, le 21 juin 2014, dont il justifie (pièce A 1).
Au regard de la condition d’antériorité qu’exige la reconnaissance des droits d’auteurs de l’appelant, et préalablement à tout examen de l’existence d’une similarité des morceaux de musique litigieux, ces éléments produits par l’appelant, comme postérieurs à la mise en ligne du 30 mai 2014 dont justifie l’intimée, sont inopérants.
L’appelant soutient également pouvoir justifier d’avoir composé son oeuvre en février 2014 (p. 18 de ses conclusions).
Il se prévaut devant la cour de deux courriels (p. 17 et 18 de ses conclusions). Le premier, du 30 avril 2012, fait état, selon l’appelant, d’un morceau qu’il qualifie « d’actes matériels de conception ». Le second, du 13 février 2014 (évoqué également p. 12 des conclusions), a été envoyé à une association « mixart », et il indique qu’il comportait en pièce jointe le morceau déposé à la SACEM le 21 juin 2014.
Ensuite, en ce qui concerne le courriel du 13 février 2014, s’il paraît déterminant à la démonstration de l’appelant, qui s’y réfère à plusieurs reprises (par exemple comme date de sa création, p. 12 et 18, ou dans sa chronologie, p. 23), il n’est pas versé à son dossier.
Il soutient que l’existence de ce courriel a été constatée par le commissaire de justice, dans son procès-verbal de constat du 12 mai 2015 (pièce E 2).
Toutefois, le procès-verbal ne comporte aucune mention d’un tel courriel. Comme l’a relevé le tribunal, ce document fait seulement état d’un courriel du 13 février 2013, adressé à l’association mixart.
A cet égard, la lecture du jugement et l’examen de la pièce n° 8, produite par l’intimée en appel, permet de constater que, en première instance, l’appelant a versé à son dossier une liste de différents courriels adressés à la société mixarts le 13 février 2014.
Néanmoins, cette liste n’est plus produite par l’appelant en appel.
En outre, si la société intimée produit cette liste (pièce n° 8), c’est pour souligner son caractère insuffisamment probatoire.
La cour ne peut qu’abonder sur ce point puisque le document ne comporte pas l’indication de l’émetteur et que la seule production de cette liste ne saurait établir l’existence et le contenu des courriels qu’elle mentionne.
Il ne figure ainsi dans le dossier de l’appelant, aucun élément permettant de s’assurer de l’envoi du courriel du 13 février 2014 qu’il invoque et de son contenu.
Dès lors, c’est sans aucun justificatif que l’appelant fixe à cette date la création de son oeuvre.
A considérer encore les courriels du 13 février 2013, et du 30 avril 2012 dont il se prévaut, qui justifieraient alors d’une création antérieure, ils sont effectivement visés dans le procès-verbal du 12 mai 2015, le commissaire de justice indiquant qu’ils comportent chacune une pièce jointe intitulée « day n day by jim music.mp3 ».
Le commissaire de justice relève l’existence de ces courriels dans l’application courriel que comporte le téléphone mobile multifonction de l’appelant et qu’ils ont pour destinataire « [K] » (pour celui du 30 avril 2012) et « [Courriel 8] » (pour celui du 13 février 2013).
Toutefois, si le commissaire de justice indique avoir transféré les pièces jointes de ces courriels sur un CD-ROM, que l’appelant écrit avoir versé aux débats (conclusions, p. 18), la société intimée indique (conclusions p. 14) n’avoir « jamais pu obtenir copie » de ce CD-ROM, qui n’est au demeurant pas indiqué dans le bordereau de communication de pièces de l’appelant et ne figure pas au dossier déposé devant la cour.
Durant le délibéré, M. [G] a adressé une clé USB dont il indique qu’elle comporterait les fichiers figurant sur le CD-ROM et la société FCA a confirmé ne pas avoir eu connaissance du contenu du CD-ROM durant l’instruction.
Ainsi, outre le fait qu’il est impossible tant à l’intimée qu’à la cour de s’assurer de la correspondance et de l’origine de ces dossiers, leur production durant le délibéré ne saurait permettre de considérer qu’ils ont été produits et débattus contradictoirement.
Dès lors, cette clé USB ne peut qu’être écartée des débats et il ne peut être opéré à hauteur d’appel aucun constat résultant du contenu de ce CD-ROM, qui n’a pas été produit.
Il n’est ainsi pas démontré par l’appelant le contenu des courriels des 30 avril 2012, et 13 février 2013, visés par le procès-verbal de constat sur lequel il s’appuie pour établir l’antériorité de ses droits.
En outre, dans la mesure où l’appelant n’est pas en mesure de justifier de l’existence et de la teneur du morceau qu’il indique avoir joint à ces courriels, ni même au demeurant de celle du morceau adressé à la SACEM, la seule référence à la dénomination du morceau étant insuffisante, l’appelant indiquant lui-même avoir pu changer la dénomination d’un même morceau composé par ses soins, la comparaison à laquelle il invite la cour de procéder ne peut être réalisée.
Dès lors, il ne saurait être considéré que l’appelant justifie d’une création antérieure à celle dont s’est servie la société intimée pour réaliser la publicité litigieuse.
Comme l’a jugé le tribunal, il ne justifie pas de la contrefaçon de ses droits moraux d’auteur qu’il revendique et sa demande de ce chef ne pourra qu’être rejetée.
Sur les autres demandes
L’intimée soutient que la procédure en appel est abusive, l’appelant ayant persévéré dans son action alors que la position de son adversaire lui était connue et n’a pas varié, qu’il n’a pas apporté de preuve de l’antériorité de sa création ou de la connaissance que l’auteur de la composition utilisée dans le spot publicitaire incriminé aurait pu avoir de la création revendiquée par l’appelant. Elle indique en outre que la SACEM, sans aucune carence, dans sa lettre du 15 juillet 2019, a clairement indiqué qu’il n’y avait aucune contrefaçon. Il en déduit que l’appelant, à la suite de la décision de première instance n’a pu se méprendre sur l’étendue de ses droits et qu’il a dès lors maintenu la procédure d’appel avec une très grande légèreté, sinon avec une intention de nuire.
La cour considère que, aux termes de la procédure de première instance et en considération des termes du jugement, l’appelant a été suffisamment informé des difficultés que présentaient ses prétentions.
Elle constate que, à hauteur d’appel, les motifs du jugement, comme objection au bien-fondé de ses demandes, n’ont pas été sérieusement pris en compte et que, sur le plan probatoire, il présente un dossier dont il y a lieu de relever qu’une pièce essentielle, soit le CD-Rom établi par le commissaire de justice à la suite de ses constatations consignées dans le procès-verbal du 12 mai 2015, n’a pas été produit à la cour et n’a pas été communiqué contradictoirement à son adversaire.
Il sera en outre relevé la légèreté avec laquelle l’appelant a déplacé successivement la date d’antériorité de son oeuvre au cours de la procédure et que ses écritures la fixent à une date, soit le 19 février 2014, pour laquelle il n’est produit aucune pièce un tant soit peu tangible.
La cour ne peut en outre que relever, comme l’intimée, que la SACEM, dans sa réponse du 15 juillet 2019 (pièce C5 de l’appelant) à la lettre du conseil de l’appelant du 6 juillet 2019 (pièce C4 de l’appelant), indique avoir analysé la publicité litigieuse, qu’elle a comparé avec celle déposée par l’appelant (sous le titre « Day n Day »), pour considérer que les « développements respectifs (…) diffèrent fondamentalement sur les deux musiques qui ne peuvent être rattachées l’une à l’autre ».
S’il est entendu que ce seul fait n’établit pas, à lui seul, le tort de l’appelant à poursuivre la procédure d’appel, l’ensemble des circonstances susvisées conduit à retenir qu’elles sont de nature à faire dégénérer en faute le droit du demandeur d’ester en justice.
Dans ces conditions, il y a lieu de faire droit à la demande de l’intimée visant à la condamnation de l’appelant à l’indemniser au titre du recours abusif qu’il a engagé et l’appelant devra dès lors lui verser à ce titre la somme de 2 500 euros.
L’appelant, qui perd en son recours, devra en supporter les dépens, avec distraction au profit du conseil de l’intimée.
Par ailleurs l’équité commande de le condamner à payer à la société FCA la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter sa demande de frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y AJOUTANT,
Condamne M. [G] à verser à la société Fiat Chrysler Automobiles France la somme de 2 500 euros pour procédure abusive ;
Condamne M. [G] à supporter les dépens d’appel, avec distraction au profit de Me Desplaces, en application de l’article 699 du code de procédure civile
Condamne M. [G] à payer à la société Fiat Chrysler Automobiles France la somme de
6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et rejette sa demande au titre des frais irrépétibles.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE