Contrat de prêt à la consommation : Analyse des motifs de la jurisprudence

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Contrat de prêt à la consommation : Analyse des motifs de la jurisprudence

Résumé de l’affaire

La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a consenti un crédit à Monsieur [G] [E] d’un montant de 25.000 euros, mais plusieurs échéances n’ont pas été honorées. La société a donc adressé une mise en demeure à Monsieur [G] [E] et l’a ensuite assigné en justice pour obtenir le paiement du solde du crédit, des intérêts et des frais judiciaires. L’affaire a été mise en délibéré pour le 30 juillet 2024, mais Monsieur [G] [E] n’a pas comparu à l’audience.

L’essentiel

Irrégularité de la procédure

A titre liminaire, il convient de rappeler que le contrat de prêt litigieux est soumis aux dispositions applicables aux crédits à la consommation telles que modifiées par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 puis recodifiées par l’ordonnance n°2016-301 du 16 mars 2016 applicable depuis le 1er juillet 2016.

En outre, en application des dispositions de l’article R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d’office toutes les dispositions du code de la consommation dans les litiges nés de son application. L’article 125 du code de procédure civile prévoit par ailleurs que le juge doit relever d’office les fins de non-recevoir ayant un caractère d’ordre public.

L’article L. 314-26 du code de la consommation précise que les dispositions des chapitres II et III et des sections II à VII du chapitre IV du code de la consommation sont d’ordre public.

Par ailleurs, il résulte de l’article 472 du code de procédure civile que si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Dans ce cas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Recevabilité de la demande en paiement

Il ressort des différentes pièces produites aux débats, et notamment de l’historique de compte retraçant l’ensemble des opérations depuis la conclusion du contrat de prêt, que le premier incident de paiement non régularisé fixant le point de départ du délai de deux ans prévu par l’article R. 312-35 du code de la consommation se situe le 4 octobre 2022.

L’assignation ayant été délivrée le 29 avril 2024, l’action en paiement engagée par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE est recevable.

Signature électronique

Il résulte de l’article 1366 du code civil que l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.

L’article 1367 in fine précise que lorsqu’elle est électronique, elle (la signature) consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.

En l’espèce, l’offre de prêt comporte la mention “signé electroniquement par le client le 14/12/2021”, sans indication du nom du signataire et sans numéro permettant de rattacher l’acte au fichier de preuve.

Le contrat, non valablement signé, a été partiellement exécuté.

Il y a lieu en conséquence de dire que la sociétéBNP PARIBAS PERSONAL FINANCE est déchue du droit aux intérêts compte-tenu de l’irrégularité affectant la signature électronique.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

30 juillet 2024
Tribunal judiciaire de Bobigny
RG n°
24/04096
TRIBUNAL DE PROXIMITE
DE MONTREUIL
62 rue Franklin
93100 MONTREUIL

Téléphone : 01 48 58 82 53
@ : civil.tprx-montreuil-sous-bois@justice.fr

REFERENCES : N° RG 24/04096 – N° Portalis DB3S-W-B7I-ZIY5

Minute :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

Monsieur [G] [E]

Copie Exécutoire délivrés à :

Me Floriane BOUST

Le

Jugement du 30 Juillet 2024

Jugement réputé contradictoire et en premier ressort rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité de Montruil-sous-Bois en date du 30 Juillet 2024;

par Madame Hélène DUBREUIL, statuant en qualité de juge des contentieux de la protection de Bobigny siégeant au tribunal de proximité de Montreuil-sous-Bois assistée de Madame Priscille AGABALIAN, greffier ;

Après débats à l’audience publique du 30 Mai 2024 tenue sous la présidence de Madame Hélène DUBREUIL,juge des contentieux de la protection de Bobigny siégeant au tribunal de proximité de Montreuil-sous-Bois, assistée de Madame Priscille AGABALIAN, greffier audiencier ;

ENTRE DEMANDEUR(S) :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, demeurant 1 boulevard Haussmann – 75009 PARIS

représentée par Me Floriane BOUST

D’UNE PART

ET DÉFENDEUR(S) :

Monsieur [G] [E], demeurant 23, rue des Ruffins – 93100 MONTREUIL

non comparant, ni représenté

D’AUTRE PART

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 14 décembre 2021, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a consenti à Monsieur [G] [E] un crédit N° 43931826939001 d’un montant en capital de 25.000 euros remboursable en 60 mensualités de 470,29 euros incluant les intérêts au taux débiteur de 4,87 %.

Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a adressé à Monsieur [G] [E] un courrier de mise en demeure visant la déchéance du terme en date du 5 octobre 2023.

Par acte d’huissier en date du 29 avril 2024, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait assigner Monsieur [G] [E] afin d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, sa condamnation au paiement des sommes suivantes :

22.852,64 euros correspondant au solde du crédit, avec intérêts conventionnels au taux de 4,98 % l’an à compter du 5 octobre 2023,subsidiairement le condamner à la somme de 18.692,41 euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2023,400 euros en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civileles entiers dépens de l’instance.
À l’audience du 30 mai 2024 à laquelle l’affaire a été appelée, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a maintenu les demandes contenues dans l’acte introductif d’instance. Elle a également pu émettre ses observations sur le respect des règles d’ordre public fixées par le code de la consommation.

Monsieur [G] [E], bien que régulièrement cité à étude, n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.

L’affaire a été mise en délibéré au 30 juillet 2024.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que le contrat de prêt litigieux est soumis aux dispositions applicables aux crédits à la consommation telles que modifiées par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 puis recodifiées par l’ordonnance n°2016-301 du 16 mars 2016 applicable depuis le 1er juillet 2016.

En outre, en application des dispositions de l’article R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d’office toutes les dispositions du code de la consommation dans les litiges nés de son application. L’article 125 du code de procédure civile prévoit par ailleurs que le juge doit relever d’office les fins de non-recevoir ayant un caractère d’ordre public.

L’article L. 314-26 du code de la consommation précise que les dispositions des chapitres II et III et des sections II à VII du chapitre IV du code de la consommation sont d’ordre public.

Par ailleurs, il résulte de l’article 472 du code de procédure civile que si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Dans ce cas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande en paiement du solde du prêt
Sur la recevabilité de la demande en paiement :

Il ressort des différentes pièces produites aux débats, et notamment de l’historique de compte retraçant l’ensemble des opérations depuis la conclusion du contrat de prêt, que le premier incident de paiement non régularisé fixant le point de départ du délai de deux ans prévu par l’article R. 312-35 du code de la consommation se situe le 4 octobre 2022.

L’assignation ayant été délivrée le 29 avril 2024, l’action en paiement engagée par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE est recevable.

Sur la signature électronique :

Il résulte de l’article 1366 du code civil que l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.

L’article 1367 in fine précise que lorsqu’elle est électronique, elle (la signature) consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.

En l’espèce, l’offre de prêt comporte la mention “signé electroniquement par le client le 14/12/2021”, sans indication du nom du signataire et sans numéro permettant de rattacher l’acte au fichier de preuve.

Le contrat, non valablement signé, a été partiellement exécuté.

Il y a lieu en conséquence de dire que la sociétéBNP PARIBAS PERSONAL FINANCE est déchue du droit aux intérêts compte-tenu de l’irrégularité affectant la signature électronique.

Sur le montant de la créance :

En raison de la déchéance du droit aux intérêts prononcée, l’emprunteur n’est tenu , en application de l’article L. 341-8 du code de la consommation, qu’au remboursement du capital restant dû, après déduction des intérêts préalablement réglés.

Le prononcé de cette déchéance exclut également le prêteur du bénéfice de l’indemnité de 8% du capital restant dû prévue aux articles L. 312-39 et D. 312-16 du code de la consommation.

En l’état compte tenu de l’incident de paiement non régularisé et de la mise en demeure du 5 octobre 2023, il convient de constater la résiliation du contrat de prêt avec déchéance du terme et exigibilité de l’intégralité de la dette.

La créance de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE s’établit donc comme suit :
capital emprunté depuis l’origine : 25.000 euros déduction faite des versements suivants :antérieurs à la déchéance du terme (suivant l’historique de compte) : 6307,59 eurospostérieurs à la déchéance du terme, suivant le décompte arrêté au 26 mars 2024 : 0 euros
soit un total restant dû de 18.692,41 euros, sous réserve des versements postérieurs et/ou non pris en compte dans le décompte.

Monsieur [G] [E] sera donc condamné à payer cette somme à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.

Sur les intérêts :

En application des dispositions de l’article 1231-6 du code civil, le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à demander à ce que la somme que l’emprunteur a été condamné à lui verser porte intérêts au taux légal, majoré de plein droit deux mois après que la décision de justice soit revêtue du caractère exécutoire.

L’article 23 de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil dispose en outre que les sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

Il en résulte que les dispositions de l’article 1231-6 du code civil doivent être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité.

En l’espèce, le crédit litigieux a été accordé pour un montant de 25.000 euros, à un taux d’intérêt débiteur de 4,87 %. En conséquence, au vu du taux d’intérêt légal actuel, les montants susceptibles d’être perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal majoré ne sont pas significativement inférieurs à ceux qu’il aurait perçus si le taux conventionnel était appliqué.

Dès lors, il convient de ne pas faire application des dispositions de l’article 1231-6 du code civil et de dire que la somme restant due en capital au titre du contrat de prêt litigieux portera intérêts au taux légal non majoré.

Sur les autres demandes

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

Monsieur [G] [E], partie perdante, devra supporter les dépens de la présente procédure. Il conviendra, en outre, de le condamner à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 400 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile dans sa version applicable au présent litige, l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Hélène DUBREUIL, juge des contentieux de la protection, statuant après débats tenus en audience publique, par jugement réputé contradictoire , rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE recevable l’action de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

CONDAMNE Monsieur [G] [E] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 18.692,41 euros au titre du contrat de crédit N° 43931826939001, avec intérêts à taux légal non majoré à compter de la signification de la présente décision ;

DÉBOUTE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE du surplus de ses prétentions ;

RAPPELLE qu’en cas de mise en place d’une procédure de surendettement, la créance sera remboursée selon les termes et conditions fixées dans la dite procédure ;

CONDAMNE Monsieur [G] [E] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [G] [E] aux dépens ;

RAPPELLE que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier

Le greffier Le juge des contentieux de la protection


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