L’Essentiel : L’ADIE a accordé un microcrédit de 15 000 euros à Madame [V] [I] épouse [J] pour financer une activité de vente de boissons et salade bar. En raison d’un défaut de remboursement, l’ADIE a notifié la déchéance du terme du prêt le 15 juin 2023. Face à l’inaction de l’emprunteuse, l’ADIE a assigné Madame [V] devant le tribunal de Saint-Denis le 28 juin 2023. Le tribunal a finalement déclaré irrecevables les conclusions de la défenderesse, condamnant Madame [V] à rembourser 12 310,90 euros à l’ADIE, avec intérêts, et à payer les dépens de l’instance.
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Prêt accordé par l’ADIEL’Association pour le Droit à l’Initiative Economique (ADIE) a octroyé un microcrédit de 15 000 euros à Madame [V] [I] épouse [J] le 2 mars 2022, destiné à financer une activité professionnelle de vente de boissons et salade bar, avec un remboursement prévu sur 48 mois. Défaut de remboursement et mise en demeureMadame [V] [I] épouse [J] a manqué à ses obligations de remboursement. En conséquence, l’ADIE a notifié par courrier recommandé, le 15 juin 2023, la déchéance du terme du prêt, rendant ainsi la totalité de la somme exigible et a mis en demeure l’emprunteuse de régler les montants dus. Assignation en justiceFace à cette situation, l’ADIE a assigné Madame [V] [I] épouse [J] devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis le 28 juin 2023, en se fondant sur les articles 1103 et suivants ainsi que 2288 et suivants du code civil, pour obtenir le paiement des sommes dues. Demandes de l’ADIEDans ses conclusions notifiées le 5 juin 2024, l’ADIE a demandé au tribunal de débouter Madame [V] [I] épouse [J] de ses demandes, de la condamner à payer 12 310,90 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,45%, ainsi qu’une somme de 1 000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile, tout en sollicitant l’exécution provisoire du jugement. Arguments de l’ADIEL’ADIE a soutenu que le contrat permettait de prononcer la déchéance du terme sans mise en demeure préalable, précisant que son statut d’association à but non lucratif l’empêchait d’accorder de nouveaux microcrédits en cas d’impayés. Procédure et conclusions de la défenderesseL’ordonnance de clôture a été révoquée pour permettre à la défenderesse de conclure. Cependant, l’avocate de Madame [V] [I] épouse [J] n’a pas notifié de conclusions par voie électronique, malgré une demande de renvoi, et a déposé un dossier de plaidoiries non conforme. Irrecevabilité des conclusionsLe tribunal a soulevé d’office l’irrecevabilité des conclusions de la défenderesse, qui n’avaient pas été transmises par voie électronique, en vertu des règles de procédure civile. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré irrecevables les conclusions non datées et non transmises par voie électronique, a condamné Madame [V] [I] épouse [J] à payer 12 310,90 euros à l’ADIE avec intérêts, et a également condamné la défenderesse aux dépens de l’instance, tout en rejetant les demandes supplémentaires des parties. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences de la déchéance du terme dans le cadre d’un contrat de prêt ?La déchéance du terme est une disposition qui permet à un créancier d’exiger le remboursement immédiat de la totalité de la créance en cas de défaut de paiement par l’emprunteur. Selon l’article 1103 du Code civil, « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». Cela signifie que les parties sont tenues de respecter les termes du contrat, y compris les clauses relatives à la déchéance du terme. En l’espèce, l’ADIE a notifié à Madame [V] [I] épouse [J] la déchéance du terme en raison de ses impayés, conformément à l’article 2.2 du contrat, qui stipule que « l’ADIE s’est réservée le droit d’exiger immédiatement toutes les sommes dues en principal […] par l’Emprunteur au titre des Prêts, notamment pour des défauts de paiement d’une seule échéance ». Cette clause contractuelle permet à l’ADIE d’agir sans mise en demeure préalable, ce qui est conforme aux dispositions du Code civil. Ainsi, la déchéance du terme entraîne l’exigibilité immédiate de la totalité de la créance, ce qui justifie la demande de l’ADIE en paiement des sommes dues. Quels sont les effets de l’irrecevabilité des conclusions non transmises par voie électronique ?L’irrecevabilité des conclusions non transmises par voie électronique est régie par l’article 802 du Code de procédure civile, qui dispose que « Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office ». De plus, l’article 850 I du même code précise que « A peine d’irrecevabilité relevée d’office, en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe, les actes de procédure […] sont remis à la juridiction par voie électronique ». Dans le cas présent, les conclusions déposées par l’avocate de Madame [V] [I] épouse [J] n’ont pas été notifiées à la juridiction par voie électronique, ce qui constitue une violation des règles de procédure. Par conséquent, le tribunal a dû soulever d’office l’irrecevabilité de ces conclusions, entraînant leur exclusion des débats. Cela souligne l’importance de respecter les modalités de communication des actes de procédure, qui sont essentielles pour garantir le bon déroulement de la justice. Comment se justifie la demande de paiement des intérêts dans le cadre d’un prêt ?La demande de paiement des intérêts dans le cadre d’un prêt est fondée sur les dispositions du contrat et les articles du Code civil relatifs aux obligations de l’emprunteur. L’article 1902 du Code civil stipule que « l’emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, en même quantité et qualité, et au terme convenu ». Cela implique que l’emprunteur doit respecter les modalités de remboursement, y compris le paiement des intérêts convenus. Dans cette affaire, l’ADIE a demandé le paiement d’intérêts au taux contractuel de 7,45% à compter du 28 juin 2023, date à laquelle la déchéance du terme a été notifiée. Cependant, le tribunal a précisé que les intérêts de retard ne seraient dus qu’à compter de l’assignation, car l’ADIE n’a pas produit la preuve de réception de la mise en demeure délivrée le 15 juin 2023. Ainsi, la demande de paiement des intérêts est justifiée par le contrat, mais leur exigibilité dépend de la preuve de la mise en demeure, ce qui est un élément crucial dans l’appréciation des droits du créancier. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés pour la défense de ses droits. Cet article stipule que « le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par celle-ci pour la défense de ses droits ». Dans cette affaire, bien que l’ADIE ait demandé une indemnité de 1.000 euros en application de cet article, le tribunal a décidé de ne pas faire application des dispositions de l’article 700. Cette décision peut être justifiée par des considérations d’équité, notamment en tenant compte de la nature de l’ADIE en tant qu’association à but non lucratif. Ainsi, même si l’ADIE a gagné le procès, le tribunal a choisi de ne pas accorder d’indemnité, ce qui souligne l’importance de l’équité dans l’appréciation des demandes en justice. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS
MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/02230 – N° Portalis DB3Z-W-B7H-GMRI
NAC : 53B
JUGEMENT CIVIL
DU 26 NOVEMBRE 2024
DEMANDERESSE
L’Association pour le Droit à l’Initiative Economique (ADIE)
Prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Rep/assistant : Maître Amina GARNAULT de la SELAS AMINA GARNAULT, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Rep/assistant : Me Clément FOURNIER, avocat au barreau de LILLE
DÉFENDERESSE
Mme [V] [I] épouse [J]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Rep/assistant : Me Françoise NOGUES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Copie exécutoire délivrée le : 26.11.2024
CCC délivrée le :
à Maître Amina GARNAULT de la SELAS AMINA GARNAULT, Me Clément FOURNIER, Me Françoise NOGUES
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Le Tribunal était composé de :
Madame Sophie PARAT, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
LORS DES DÉBATS
L’affaire a été évoquée à l’audience du 14 Octobre 2024.
LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ
A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 26 Novembre 2024.
JUGEMENT : Contradictoire, du 26 Novembre 2024 , en premier ressort
Prononcé par mise à disposition par Madame Sophie PARAT, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :
L’Association pour le Droit à l’Initiative Economique (ci-après ADIE) a accordé le 2 mars 2022 à Madame [V] [I] épouse [J] un prêt microcrédit d’un montant de 15 000 euros, pour une durée de 48 mois.
Ce prêt était contracté en vue du financement d’une activité professionnelle de vente de boissons et salade bar.
Madame [V] [I] épouse [J] s’est montrée défaillante dans ses remboursements. L’ADIE lui a, par courrier recommandé du 15 juin 2023, notifié la déchéance du terme et par suite l’exigibilité anticipée du prêt, et l’a mise en demeure de régler les sommes dues.
C’est dans ce contexte que, par actes de commissaire de justice en date du 28 juin 2023, l’ADIE a fait assigner Madame [V] [I] épouse [J] devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis, au visa des articles 1103 et suivants et 2288 et suivants du code civil, afin de la voir condamner à lui payer les sommes dues au titre du prêt.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées électroniquement le 5 juin 2024, l’ADIE demande au tribunal de:
– débouter Madame [V] [I] épouse [J] de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner Madame [V] [I] épouse [J] à payer à l’ADIE la somme de 12 310,90 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,45% à compter du 15 juin 2023 jusqu’à parfait paiement au titre du prêt microcrédit propulse,
– la condamner au paiement de la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens de la présente instance;
– ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que l’article 2.2 du contrat souscrit permet de prononcer la déchéance du terme sans procéder à une mise en demeure préalable. Elle s’oppose à toute demande de délais de paiement, soulignant être une association à but non lucratif et non une société commerciale, que les impayés privent de trésorerie et donc de la possibilité d’accorder de nouveaux microcrédits.
L’ordonnance de clôture, initialement rendue le 6 novembre 2023, a été révoquée le 7 novembre 2023 pour permettre à la défenderesse, qui venait de constituer avocat, de conclure.
L’avocate de Madame [V] [I] épouse [J], malgré une demande de renvoi le 3 avril 2024, n’a jamais notifié de conclusions par la voie électronique.
Elle a pourtant déposé un dossier de plaidoiries contenant un jeu de conclusions assorti de pièces, non daté et auquel n’est jointe aucune preuve de notification électronique à la juridiction.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des moyens et arguments développés au soutien de leurs prétentions.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 octobre 2024. Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier au greffe le 14 octobre 2024.
Les conseils des parties ont été informés que le jugement serait mis à disposition au greffe à la date du 26 novembre 2024, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.
Sur le rejet des conclusions et pièces non transmises par la voie électronique
Aux termes de l’article 802 du code de procédure civile: “Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office.”
Aux termes de l’article 850 I du même code : “A peine d’irrecevabilité relevée d’office, en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe, les actes de procédure à l’exception de la requête mentionnée à l’article 840 sont remis à la juridiction par voie électronique.”
En l’espèce, il y a lieu de soulever d’office l’irrecevabilité des conclusions versées au dossier de plaidoiries par le conseil de la défenderesse, qui n’ont jamais été notifiées à la juridiction par la voie électronique, alors que la communication électronique est obligatoire en procédure écrite devant le tribunal judiciaire, et qui lui sont remises – en papier – après la clôture. La défenderesse a bénéficié de plusieurs renvois à la mise en état depuis qu’elle a constitué avocat, sans pour autant produire de conclusions dans les formes exigées par le code.
Sur la demande en paiement:
Selon l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Selon l’article 1902 du code civil, l’emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, en même quantité et qualité, et au terme convenu.
En l’espèce, il est suffisamment justifié par les pièces versées aux débats, de la conclusion entre l’ADIE et Madame [J] du contrat de prêt allégué, le microcrédit de 15 000 euros remboursable en 48 mensualités. Il est également suffisamment justifié de la notification à l’emprunteur de la déchéance du terme de ce prêt par suite d’impayés intervenus au titre du microcrédit dès le sixième mois de l’échéancier. Cette déchéance du terme a été prononcée conformément à l’article 2.2 du contrat, suivant lequel l’ADIE s’est réservée “le droit d’exiger immédiatement toutes les sommes dues en principal (majorées des intérêts échus mais non payés) et accessoires par l’Emprunteur au titre des Prêts, [notamment pour des] défauts de paiement d’une seule échéance au titre de tout prêt […] les créances de l’ADIE [étant alors] exigibles immédiatement […] de plein droit sans qu’il ne soit besoin de mise en demeure préalable ou d’autres formalités”.
Il sera fait droit aux demandes en paiement de l’ADIE, étant précisé néanmoins que les intérêts de retard ne seront dus qu’à compter de l’assignation, faute pour l’ADIE d’avoir produit la preuve de réception de la mise en demeure délivrée le 15 juin 2023 (seule la preuve de dépôt étant versée avec le courrier en pièce 3).
Sur les demandes annexes :
La défenderesse, qui perd son procès, sera condamnée aux dépens. En revanche, l’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal,
DECLARE irrecevables les conclusions non datées, non transmises par la voie électronique, communiquées au tribunal par la défenderesse dans son dossier de plaidoiries,
CONDAMNE Madame [V] [I] épouse [J] à payer à l’Association pour le Droit à l’Initiative Economique la somme de 12 310,90€ (douze mille trois cent dix euros et quatre-vingt-dix centimes), avec intérêts au taux contractuel de 7,45% à compter du 28 juin 2023 au titre du prêt microcrédit propulse;
CONDAMNE Madame [V] [I] épouse [J] aux dépens de l’instance;
DIT n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
REJETTE toutes les demandes plus amples ou contraires des parties ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit;
La Greffière La Présidente
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