Conflit de voisinage et construction illégale : Questions / Réponses juridiques

·

·

Conflit de voisinage et construction illégale : Questions / Réponses juridiques

Les consorts [M] ont assigné leurs voisins, Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y], pour la construction d’une extension illégale. Ils demandent sa démolition et des dommages pour préjudices subis. En réponse, les consorts [Y] et [I] affirment avoir obtenu une autorisation d’urbanisme et contestent les allégations de nuisances. Le tribunal, après examen, conclut que l’extension ne nécessitait pas de permis et que les preuves de nuisances sont insuffisantes. En conséquence, il déboute les consorts [M] de leurs demandes et les condamne à verser des frais aux consorts [Y] et [I].. Consulter la source documentaire.

Sur le défaut de permis de construire

L’article L. 480-13 du Code de l’urbanisme stipule que lorsqu’une construction a été édifiée conformément à un permis de construire :

1° Le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l’ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d’urbanisme ou des servitudes d’utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative.

Cependant, ce texte ne s’applique pas aux travaux réalisés à la suite d’une déclaration préalable (Cass. 3e civ., 12 avr. 2018, n° 17-16.645).

Ainsi, même si l’auteur des travaux a reçu une notification de non-opposition à déclaration préalable, le juge judiciaire doit vérifier si les travaux nécessitaient un permis de construire.

L’article R. 421-14 du Code de l’urbanisme précise que :

« Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l’exception des travaux d’entretien ou de réparations ordinaires :

a) Les travaux ayant pour effet la création d’une surface de plancher ou d’une emprise au sol supérieure à vingt mètres carrés ;

b) Dans les zones urbaines d’un plan local d’urbanisme, les travaux ayant pour effet la création d’une surface de plancher ou d’une emprise au sol supérieure à quarante mètres carrés ;

c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s’accompagnent d’un changement de destination. »

En l’espèce, la décision de non-opposition à déclaration préalable du maire de [Localité 6] a été prise sur la base d’une surface de plancher de 33,60 m². Les consorts [M] allèguent que la construction excède cette surface, mais ne fournissent que des photographies extérieures, insuffisantes pour prouver leur affirmation.

Il n’est donc pas établi que la construction réalisée nécessitait un permis de construire, et le moyen soulevé par les demandeurs est écarté.

Sur les troubles anormaux du voisinage

L’article 1253 du Code civil dispose que :

« Le propriétaire, le locataire, l’occupant sans titre, le bénéficiaire d’un titre ayant pour objet principal de l’autoriser à occuper ou à exploiter un fonds, le maître d’ouvrage ou celui qui en exerce les pouvoirs qui est à l’origine d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage est responsable de plein droit du dommage qui en résulte. »

Pour établir l’existence de troubles du voisinage, les consorts [M] doivent prouver que les nuisances subies dépassent les inconvénients normaux.

En l’espèce, les consorts [M] n’ont produit ni expertise ni constat d’huissier pour prouver les nuisances alléguées. Ils se contentent d’un constat d’huissier du 3 août 2023, qui indique que l’extension est visible depuis des lieux de passage, mais cela ne constitue pas un trouble excédant les inconvénients normaux.

Concernant la perte d’ensoleillement et les nuisances sonores, aucune preuve tangible n’a été fournie. Le constat d’huissier ne démontre pas l’existence de fracas ou de poussières anormaux durant la construction.

Ainsi, les consorts [M] ne rapportent pas la preuve des troubles anormaux du voisinage, et leur demande est rejetée.

Sur la demande de dommages-intérêts présentée par Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y]

L’article 1240 du Code civil stipule que :

« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Les troubles occasionnés par les défendeurs n’excédant pas les limites des troubles normaux du voisinage, les désordres relevés concernant l’aspect esthétique de l’extension ne justifient pas une demande de dommages-intérêts.

Les consorts [M] n’ayant pas prouvé que la procédure introduite était illégitime ou abusive, la demande de dommages-intérêts des défendeurs est également rejetée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Conformément à l’article 696 du Code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge.

Les consorts [M] ayant succombé à titre principal, ils doivent supporter la charge des dépens et seront condamnés à payer une somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Sur l’exécution provisoire

L’article 514 du Code de procédure civile précise que :

« Les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la décision rendue n’en dispose autrement. »

Ainsi, l’exécution provisoire de la décision est de droit, sauf mention contraire dans le jugement.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon