L’Essentiel : La société Giralda a confié à la SAS SBE la réalisation de travaux d’électricité et de gros œuvre pour un immeuble à [Localité 5]. En novembre 2019, SBE a réclamé un paiement de 37’542,02 euros, que Giralda a refusé, invoquant des travaux non réalisés. Après une résiliation unilatérale des contrats par Giralda en février 2020, SBE a assigné Giralda en justice. Le tribunal a condamné SBE à verser des indemnités pour désordres contractuels. En appel, la cour a confirmé le jugement initial et a inscrit la créance de Giralda au passif de la liquidation judiciaire de SBE.
|
Contexte de l’affaireLa société civile de construction de vente [Localité 5] Giralda a confié à la SAS Société Bâtiment Electricité (SBE) la réalisation des lots électricité et gros œuvre pour un immeuble collectif à [Localité 5]. En novembre 2019, SBE a mis en demeure Giralda de payer 37’542,02 euros pour la situation numéro 4 du lot électricité, ce que Giralda a refusé, arguant que les travaux n’avaient pas été réalisés. Résiliation des contrats et assignationLe 24 février 2020, Giralda a résilié unilatéralement les contrats, accusant SBE d’abandon de chantier. En réponse, SBE a assigné Giralda devant le tribunal de commerce de Bordeaux le 25 juin 2020. Parallèlement, une expertise judiciaire a été ordonnée pour vérifier la solidité des ouvrages réalisés par SBE. Jugements et décisions judiciairesLe 16 février 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a condamné l’assureur dommages-ouvrage Albingia à verser 355’120,49 euros à Giralda pour le lot gros œuvre. Le 9 novembre 2021, le tribunal de commerce a débouté SBE de ses demandes et a condamné SBE à payer 70’182,84 euros HT à Giralda pour désordres contractuels, ainsi que 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Appel et liquidation judiciaireSBE a interjeté appel le 8 décembre 2021. Le 24 mai 2022, la cour d’appel a rejeté la demande de SBE visant à suspendre l’exécution provisoire du jugement. Le 18 octobre 2022, SBE a été placée en redressement judiciaire, suivi d’une liquidation judiciaire le 11 juillet 2023. Interventions et demandes des partiesLe 15 septembre 2023, la SELARL Firma, mandataire liquidateur de SBE, a demandé à la cour d’infirmer le jugement du 9 novembre 2021 et de condamner Giralda à payer 37’542,02 euros. Giralda a, de son côté, demandé la confirmation du jugement et a fixé sa créance au passif de la liquidation judiciaire de SBE. Arguments et motifs de la décisionLa cour a examiné les fins de non-recevoir soulevées par la SELARL Firma et a statué sur la recevabilité des demandes reconventionnelles de Giralda. Elle a également analysé la réalité des travaux effectués par SBE et a constaté que les prestations n’étaient pas conformes aux obligations contractuelles. Conclusion de la courLa cour a confirmé le jugement du tribunal de commerce, rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de Giralda, et a fixé à 2 000 euros la créance de Giralda au titre de l’article 700 du code de procédure civile, inscrite au passif de la liquidation judiciaire de SBE. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences de la résiliation unilatérale des contrats par la société [Localité 5] Giralda ?La résiliation unilatérale des contrats par la société [Localité 5] Giralda soulève plusieurs questions juridiques, notamment en ce qui concerne les obligations contractuelles et les conséquences de cette résiliation. Selon l’article 1217 du Code civil, « la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut : – refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ; Dans ce cas, la société [Localité 5] Giralda a invoqué un abandon de chantier pour justifier sa résiliation. Il est essentiel de déterminer si cette résiliation était justifiée. Si la société SBE a effectivement abandonné le chantier, cela pourrait constituer un manquement à ses obligations contractuelles, permettant à la société [Localité 5] Giralda de résilier le contrat. Cependant, si la société SBE a réalisé des travaux conformes, la résiliation pourrait être considérée comme abusive, entraînant des conséquences financières pour la société [Localité 5] Giralda. Comment la demande reconventionnelle de la SCCV [Localité 5] Giralda est-elle justifiée ?La demande reconventionnelle de la SCCV [Localité 5] Giralda repose sur l’article 70 du Code de procédure civile, qui stipule que « les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. » Dans cette affaire, la SCCV [Localité 5] Giralda a demandé la condamnation de la société SBE au titre du lot gros œuvre, en lien avec les travaux effectués pour le même immeuble. Il est établi que la société SBE était titulaire des deux lots, électricité et gros œuvre, ce qui crée un lien suffisant entre les demandes. Ainsi, la cour a jugé que la demande reconventionnelle était recevable, car elle se rapportait à la même opération de construction, même si les marchés étaient distincts. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?L’article 700 du Code de procédure civile prévoit que « la partie perdante peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » Dans le jugement du 9 novembre 2021, la société SBE a été condamnée à payer 5 000 euros sur le fondement de cet article. La SCCV [Localité 5] Giralda a également demandé des frais supplémentaires au titre de l’article 700, ce qui est courant dans les litiges commerciaux. La cour a confirmé cette disposition, en considérant que la société SBE, en tant que partie perdante, devait supporter les frais engagés par la SCCV [Localité 5] Giralda pour sa défense. Comment la liquidation judiciaire de la société SBE affecte-t-elle les créances de la SCCV [Localité 5] Giralda ?La liquidation judiciaire de la société SBE a des implications significatives pour les créances de la SCCV [Localité 5] Giralda. Selon l’article L641-9 du Code de commerce, « les créances sont déclarées au passif de la liquidation judiciaire. » Cela signifie que la SCCV [Localité 5] Giralda doit déclarer ses créances auprès du mandataire liquidateur pour être remboursée. Dans ce cas, la SCCV [Localité 5] Giralda a des créances qui résultent des sommes dues par la société SBE, y compris les 70 182,84 euros HT pour les désordres contractuels. La cour a ordonné que ces créances soient inscrites au passif de la liquidation judiciaire, ce qui permet à la SCCV [Localité 5] Giralda de récupérer une partie de ses pertes, sous réserve des actifs disponibles de la société SBE. Quelles sont les conséquences de l’appel abusif et vexatoire dans cette affaire ?La demande de dommages et intérêts pour appel abusif et vexatoire est régie par l’article 32-1 du Code civil, qui stipule que « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros. » Dans cette affaire, la SCCV [Localité 5] Giralda a demandé 10 000 euros de dommages et intérêts pour appel abusif. Cependant, la cour a rejeté cette demande, considérant que la SCCV [Localité 5] Giralda n’avait pas justifié son accusation d’abus. Il est important de noter que pour qu’une demande de ce type soit acceptée, il faut prouver que l’appel a été intenté dans une intention dilatoire ou vexatoire, ce qui n’a pas été démontré dans ce cas. Ainsi, la cour a confirmé que la demande de dommages et intérêts pour appel abusif était infondée. |
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
————————–
ARRÊT DU : 13 JANVIER 2025
N° RG 21/06696 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MOQN
S.A.S. SBE SOCIETE BATIMENT ELECTRICITE
c/
SCCV [Localité 5] GIRALDA
S.E.L.A.R.L. FIRMA
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 novembre 2021 (R.G. 2020F00568) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 08 décembre 2021
APPELANTE :
S.A.S. SBE SOCIETE BATIMENT ELECTRICITE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1] – [Localité 3]
Représentée par Maître Patrick TRASSARD de la SELARL TRASSARD & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
SCCV [Localité 5] GIRALDA, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au sièges social sis [Adresse 6] – [Localité 2]
Représentée par Maître Julie FORMERY de la SELARL ARPEGES CONTENTIEUX, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Stéphane BULTEZ, avocat au barreau de PARIS
INTERVENANTE :
S.E.L.A.R.L. FIRMA, prise en sa qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SAS SBE, domiciliée en cette qualité [Adresse 4] – [Localité 2]
Représentée par Maître Patrick TRASSARD de la SELARL TRASSARD & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 novembre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne-Sophie JARNEVIC, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Madame Anne-Sophie JARNEVIC,Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSE DU LITIGE
Par actes des 09 mars et 03 avril 2018, la société civile de construction de vente [Localité 5] Giralda a confié à la SAS Société Bâtiment Electricité (ci-après dénommée SBE) le lot électricité ainsi que le lot gros oeuvre dans le cadre de la réalisation d’un immeuble collectif situé à [Localité 5].
Par courriers recommandés des 27 novembre 2019, 10 janvier et 28 janvier 2020, la société SBE a mis en demeure la société [Localité 5] Giralda de lui payer la somme de 37’542,02 euros au titre de la situation numéro 4 du lot électricité.
La société [Localité 5] Giralda a refusé de régler la situation numéro 4 relative au lot électricité au motif que les travaux facturés n’auraient pas été réalisés.
Trois procès-verbaux de constat d’huissier ont été dressés à la demande des parties les 29 novembre 2019, 5 décembre 2019 et 17 février 2020.
Le 24 février 2020, la société [Localité 5] Giralda a résilié unilatéralement les contrats, invoquant un abandon de chantier de la part de la société SBE.
Par acte d’huissier de justice du 25 juin 2020, la société SBE a fait assigner la société [Localité 5] Giralda devant le tribunal de commerce de Bordeaux en paiement.
Dans le cadre d’une instance parallèle, par ordonnance rendue le 16 mars 2020, le président du tribunal judiciaire de Bordeaux a ordonné une mesure d’expertise judiciaire afin de faire vérifier la solidité des ouvrages réalisés par la société SBE dans le cadre du lot gros oeuvre. L’expert a déposé son rapport définitif le 07 décembre 2020.
Par jugement rendu le 16 février 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a condamné la société Albingia, assureur dommages-ouvrage, à payer la somme de 355’120,49 euros à la société [Localité 5] Giralda au titre du lot gros oeuvre.
Par jugement du 09 novembre 2021, le tribunal de commerce de Bordeaux a statué comme suit :
– déboute la société SBE de l’ensemble de ses demandes,
A titre reconventionnel,
– condamne la société SBE à payer à la société [Localité 5] Giralda la somme de 70’182,84 euros HT au titre des désordres contractuels et immatériels,
– condamne la société SBE à payer à la société [Localité 5] Giralda la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– déboute la société [Localité 5] Giralda de ses autres demandes,
– dit que l’exécution provisoire de droit,
– condamne la société SBE aux dépens.
Par déclaration au greffe du 08 décembre 2021, la société SBE a relevé appel de la décision.
Par ordonnance du 24 mai 2022, la première présidente de la cour d’appel de Bordeaux a débouté la société SBE de sa demande tendant à l’arrêt de l’exécution provisoire résultant du jugement.
Par jugement du 18 octobre 2022, le tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la société SBE et a désigné la société Ascagne AJ en qualité d’administrateur judiciaire et la société Laurent Mayon en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement du 11 juillet 2023, la société SBE a été placée en liquidation judiciaire et la SELARL Firma a été désignée es qualité de mandataire liquidateur.
Par ordonnance du 15 septembre 2023, le conseiller de la mise en état de la quatrième chambre civile de la cour d’appel de Bordeaux a donné acte de leur intervention volontaire à l’instance d’appel à la société Ascagne AJ, ès qualités, et à la société Firma, ès qualités, et a rejeté la demande de radiation de l’affaire du rôle.
L’affaire était initialement fixée à l’audience rapporteur du 07 février 2024. Elle a été renvoyée à l’audience du 25 novembre 2024.
Le 28 février 2024, la SELARL Firma est intervenue volontairement à la procédure.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières écritures notifiées par message électronique le 05 novembre 2024, auxquelles la cour se réfère expressément, le SELARL Firma es qualité de mandataire liquidateur de la société SBE Société Batiment Electricité demande à la cour de :
Vu le jugement du 9 novembre 2021,
Vu les pièces,
Vu les articles 1103, 1104 et 1217 du code civil,
Vu l’article L641-9 du code de commerce,
Vu les articles 31,32, 70 et 554 du code de procédure civile
Vu les pièces
– Déclarer recevable l’intervention volontaire de de la SELARL Firma ès qualité de liquidateur judiciaire de la société SBE,
– Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux du 9 novembre 2021,
Et statuant à nouveau,
– Déclarer recevables et bien fondées les demandes de la SELARL Firma ès qualité de liquidateur de la société SBE,
– Condamner en conséquence la SCCV [Localité 5] Giralda au paiement de la somme de 37’542,02 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2020,
– Déclarer irrecevables et infondés les demandes de la SCCV [Localité 5] Giralda,
– Condamner la SCCV [Localité 5] Giralda au paiement de la somme de 3’000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
– Juger qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans l’arrêt à intervenir, l’exécution forcée devra être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier de justice et que le montant des émoluments retenus en application de l’article A444-32 du code de commerce devra être supporté par le débiteur en sus de l’application de l’article 700.
– Débouter la SCCV [Localité 5] Giralda de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
Par dernières écritures notifiées par message électronique le 08 novembre 2024, auxquelles la cour se réfère expressément, la SCCV [Localité 5] Giralda demande à la cour de :
Vu les éléments ci-avant rappelés,
Vu les pièces versées aux débats selon bordereau numéroté de 1 à 38,
– Débouter la SAS SBE Société Batiment Electricité, représentée par son mandataire liquidateur, la SELARL Firma, de sa demande d’infirmation du jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux du 09 novembre 2021 (RG n° 2020F00568), ainsi que toutes autres demandes ;
Ce faisant, confirmer en tout point le jugement entrepris ;
Au regard de la liquidation judiciaire de la société SBE, fixer la créance de la SCCV [Localité 5] Giralda au passif de ladite liquidation judiciaire aux sommes suivantes :
70 182,84 euros HT au principal
5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile 1ère instance.
10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et vexatoire.
10 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile 1ère instance.
Aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 novembre 2024.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux derniers conclusions écrites déposées.
Sur les fins de non-recevoir
1 – En vertu des dispositions de l’article 123 du code de procédure civile, ‘les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu’il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.’
2 – Le tribunal de commerce n’a pas statué sur des fins de non-recevoir dans la mesure où la société SBE ne les reprenait dans son dispositif.
Celles-ci étant recevables en cause d’appel, la cour statuera sur ces nouvelles prétentions de la SELARL Firma, ès qualité de mandataire liquidateur de la société SBE.
– Sur le lien entre la demande reconventionnelle de la SCCV [Localité 5] Giralda et les prétentions originaires
3 – La SELARL Firma indique que la demande reconventionnelle en paiement de la SCCV [Localité 5] Giralda est formée au titre des travaux effectués dans le cadre du lot gros oeuvre, alors que la procédure initiée par la société SBE concernait le lot électricité. L’appelante soutient que cette demande n’a pas de lien suffisant avec les prétentions originaires.
4 – La SCCV [Localité 5] Giralda réplique que la société SBE était titulaire du lot électricité et du lot gros oeuvre et que le litige est relatif à 2 marchés distincts concernant la même opération.
Sur ce
5 – Selon l’article 70 code de procédure civile :
‘Les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.
Toutefois, la demande en compensation est recevable même en l’absence d’un tel lien, sauf au juge à la disjoindre si elle risque de retarder à l’excès le jugement sur le tout.’
6 – La SCCV [Localité 5] Giralda a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de la société SBE au titre du lot gros oeuvre.
Il est constant que la société SBE est intervenue pour le même ouvrage, un immeuble sis à [Localité 5], pour le lot électricité et le lot gros oeuvre. Ces marchés ont fait l’objet de deux actes d’engagement mais se rapportent à la construction du même immeuble. Dès lors, les conditions posées par l’article 700 du code de procédure civile sont remplies.
– Sur l’intérêt et la qualité à agir de la SCCV [Localité 5] Giralda
7 – La SELARL Firma relève que par jugement du 16 février 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a condamné l’assureur dommages-ouvrages de la SCCV [Localité 5] Giralda, la société Albingia, à lui verser la somme de 330 312 euros HT ; l’intimée a donc été désintéressée sur l’ensemble de ses demandes financières relatives au solde contractuel et aux dommages immatériels.
La SELARL Firma en conclut que les demandes de la SCCV [Localité 5] Giralda sont irrecevables.
8 – La SCCV [Localité 5] Giralda explique qu’elle a déduit du solde contractuel restant dû par la SAS SBE (591 987,32 euros) la somme de 355 120,49 euros TTC. Elle indique par ailleurs que le tribunal de commerce, dans la décision entreprise, a pris en compte la condamnation de l’assureur.
Sur ce
9 – Selon l’article 31 du code de procédure civile :
‘L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.’
Selon l’article 32 du code de procédure civile : ‘Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.’
10 – En page 8 du jugement, le tribunal de commerce de Bordeaux liste les sommes déjà accordées par le tribunal judiciaire dont le montant total s’élève à 330 312 euros HT. En page 9 du jugement, il relève : ‘En conséquence, reprenant les tableaux des évaluations de l’expert et en tenant compte de ses remarques ainsi que des sommes déjà accordées par le tribunal judiciaire et payées par la société Albingia (…)’.
Dès lors, si la société Albingia est subrogée dans les droits de son assuré à hauteur de la somme de 330 312 euros HT, la SCCV [Localité 5] Giralda est fondée à en réclamer, le cas échéant, le surplus au regard du solde contractuel.
Dès lors, les fins de non-recevoir soulevées par la SELARL Firma seront rejetées.
Sur la demande en paiement de la société SBE
11 – La SELARL Firma sollicite la condamnation de la SCCV [Localité 5] Giralda au paiement de la somme de 37 542,02 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2020. Elle soutient que les prestations de la société SBE au titre du lot électricité ont été réalisées comme en attestent le constat d’huissier du 5 décembre 2019 et le consuel du 6 décembre 2019.
12 – La SCCV [Localité 5] Giralda conteste la réalité des travaux. Elle indique que la société SBE a abandonné le chantier et que les contrats ont été résiliés. Par ailleurs, les comptes entre les parties s’établissent à son profit.
Sur ce
13 – L’article 1103 du code civil dispose : ‘Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.’
L’article 1353 du code civil dispose :
‘Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.’
En vertu des dispositions de l’article 1217 du code civil : ‘La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.’
14 – Le tribunal de commerce s’est fondé sur un constat du 29 novembre 2019 dressé par Maître [H], à la demande de la SCCV [Localité 5] Giralda, faisant ressortir que les travaux d’électricité ne sont pas achevés.
Or il ressort du constat établi le 5 décembre 2019 par la SCP Lacaze-Crespy à la demande de la société SBE que s’agissant des travaux électriques ‘ pour les 4 appartements du premier étage, les tableaux électriques sont en place (…), les équipements et les appareillages électriques sont en place, les colonnes techniques du premier niveau dans le couloir commun sont terminées’. Au deuxième étage, l’huissier de justice constate la présence des équipements électriques dans trois des quatre appartements. Au troisième étage, il relève la présence d’appareillage électrique et de caches de protection. Les éléments électriques en attente de réservation correspondent aux convecteurs et à l’interphone. Il constate au quatrième étage que ‘l’ensemble est encore une zone de chantier avec des matériaux d’approvisionnement, du matériel de chantier, des machines et des câbles électriques.’ Il relève également que ‘dans les gaines communes, le coffret électrique des appartements est bien en place et que l’ensemble est branché’.
L’installation électrique a par ailleurs reçu une attestation de conformité par ERDF le 25 novembre 2019, visée par le consuel le 6 décembre 2019.
S’il ressort de ces pièces que la société SBE a réalisé certains travaux d’électricité, en l’absence des compte-rendus des réunions de chantier et du calendrier prévisionnel prévu au CCAP, ces pièces n’étant pas versées au dossier, il n’est pas possible de déterminer si ces travaux étaient conformes à ceux prévus contractuellement. En effet, l’état d’avancement des travaux d’électricité est au coeur du litige entre les deux sociétés.
Or dans un courrier en date du 17 février 2020, le maître d’oeuvre Artech indique que la situation de travaux n°4 du lot électricité présentée par la société SBE n’est pas validée car elle n’est pas en cohérence avec l’état d’avancement du chantier. Il est mentionné des écarts entre les prestations réalisées et celles facturées. Au surplus, l’avancement constaté des travaux est de 25%.
Un constat d’huissier en date du 17 février 2020 dressé par Maître [H] à la demande de la SCCV [Localité 5] Giralda, mentionne l’enlèvement des tableaux de différentiel et des convecteurs posés courant décembre 2019. Un employé de la société SBE présent sur place a confirmé la dépose des équipements. Dans un courrier en date du 18 février 2020, le maître d’oeuvre évoque également la dépose des prises électriques, des sèche-serviettes et des luminaires par la société SBE.
Le 30 juillet 2020, le maître d’oeuvre transmet à la SCCV [Localité 5] Giralda une proposition de DGD SBE lot électricité, laquelle fait apparaître un solde en faveur de l’intimée d’un montant de 30 457,12 euros. Des devis et factures sont joints en annexe du courrier.
Ainsi, le devis de l’entreprise Drouchaud en date du 26 février 2020, accepté par la SCCV [Localité 5] Giralda, mentionne la reprise des réseaux pour un montant de 16 800 euros TTC (14 000 euros HT). Le maître d ‘oeuvre évoque également des pénalités ENEDIS, ainsi que le nettoyage du chantier et la remise en place des convecteurs enlevés par la société SBE. Il est également fait référence au ‘delta’ entre le marché conclu avec la nouvelle entreprise en charge de la fin des travaux d’électricité, dont le devis est produit, et le montant des travaux restant à réaliser la société SBE, soit 17 319,91 euros.
Dès lors, au regard des pièces versées au dossier, la société SBE ayant pris la décision de procéder à l’enlèvement des installations électriques en février 2020, il apparaît que la SELARL Firma échoue à démontrer la réalité des travaux dont elle sollicite le paiement. La décision du tribunal de commerce sera donc confirmée.
Sur la demande en paiement de la SCCV [Localité 5] Giralda
15 – La SELARL Firma expose que la sommes réclamée par la SCCV [Localité 5] Giralda au titre des travaux pour compte n’est pas justifiée. Par ailleurs, les pénalités de retard doivent être prévues contractuellement. Enfin, les dépenses liées à l’arrêt du chantier sont des dépenses indues.
16 – La SCCV [Localité 5] Giralda indique faire sienne l’argumentation développée par le tribunal.
Sur ce
17 – Selon l’article 1353 du code civil :
‘Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.’
18 – Le tribunal de commerce s’est appuyé sur le rapport d’expertise déposé transmis au tribunal judiciaire, lequel a condamné l’assureur dommages-ouvrage s’agissant du lot gros oeuvre du chantier.
L’expert relève ainsi : ‘En résumé, le problème structurel des balcons trouve son origine exclusive dans une réalisation fautive des ouvrages de maçonnerie et de béton armé’.
La SELARL Firma conteste non pas la faute mais le préjudice de la SCCV [Localité 5] Giralda tel qu’il a été chiffré par l’expert et le lien de causalité.
S’agissant des comptes entre les parties arrêtés au 22 octobre 2020, l’expert explique avoir établi ses tableaux en fonction des éléments communiqués par les parties.
L’appelante soutient que la somme relative aux travaux pour compte n’est pas justifiée, sans apporter de nouveaux éléments.
Dès lors, lors, il n’y a pas lieu de remettre en cause le chiffrage de l’expert.
Concernant les pénalités de retard, celles-ci sont généralement prévues au Cahier des Clauses Administratives Générales (CCAG).
Les pénalités de retard dans les marchés de travaux privés sont calculées en fonction des stipulations des CCAG. Pour les marchés privés, l’article 9.5 de la norme AFNOR NF P 003-001 sert de référence à l’entrepreneur pour déterminer le calcul et le montant des pénalités de retard ainsi que leur mode d’application.
Cette norme s’applique, qu’elle soit indiquée ou non sur le devis (sauf dispositions contraires qui devront alors être mentionnées explicitement sur le devis). Elle impose une pénalité de retard travaux égale à 1/1 000e du prix du chantier, sans pouvoir dépasser les 5% de son prix total.
C’est donc à bon droit que l’expert a indiqué que celles-ci s’élevaient à 5% du marché TTC.
L’appelante considère enfin que les dépenses liées à l’arrêt du chantier sont indues.
Celles-ci sont détaillées par l’expert en page 14 de son rapport : elles ont trait à l’étanchéité provisoire des balcons et aux frais consécutifs aux infiltrations venant des balcons.
Au demeurant, ces dépenses n’ont pas fait l’objet de dires ou d’observations de la part du conseil de la société SBE dans le cadre de l’expertise.
Le compte prorata, invoquée par l’appelante, a pour finalité de répartir les dépenses communes entre les entreprises intervenant sur un chantier. Or en l’espèce, il ne s’agit pas de dépenses communes mais de frais consécutifs à l’arrêt du chantier par la société SBE. Dès lors, les frais liés à l’arrêt du chantier n’ont pas à figurer au compte prorata.
Les arguments de la SELARL Firma sont donc inopérants.
Le tribunal a évalué à hauteur de 70% la responsabilité de la société SBE dans le sinistre du lot gros oeuvre et a fixé à 70 182,84 euros HT (100 261, 20 euros TTC) la somme à verser à la SCCV [Localité 5] Giralda. La décision sera confirmée de ce chef.
Sur la demande de dommages et intérêts pour appel abusif et vexatoire
19 – La SCCV [Localité 5] Giralda sollicite 10 000 euros de dommages et intérêts pour appel abusif et vexatoire .
20 – La SELARL Firma fait valoir que cette demande n’est pas justifiée.
Sur ce
21 – Selon l’article 32-1 du code civil : ‘Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.’
22 – La SCCV [Localité 5] Giralda ne justifie pas sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive. Il convient donc de la rejeter.
Sur les demandes accessoires
23 – Il convient de fixer à hauteur de 2 000 euros la créance de la SCCV [Localité 5] Giralda au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SELARL Firma sera également condamnée aux entiers dépens.
La créance de la la SCCV [Localité 5] Giralda sera inscrite au passif de la société SBE.
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 9 novembre 2021,
Y ajoutant,
Déclare recevables les prétentions de la SCCV [Localité 5] Giralda,
Rejette la demande de dommages et intérêts de la SCCV [Localité 5] Giralda pour procédure abusive,
Fixe à 2 000 euros la créance de la SCCV [Localité 5] Giralda, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au passif de la liquidation judiciaire de la société SBE,
Ordonne l’emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire de la société SBE.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
Laisser un commentaire