Conflit autour de la responsabilité liée à un véhicule défectueux : enjeux d’expertise et de réparation

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Conflit autour de la responsabilité liée à un véhicule défectueux : enjeux d’expertise et de réparation

Monsieur [Z] [K] a assigné Madame [B] et l’EURL MC AUTO devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux pour obtenir une expertise de son véhicule et le versement d’une somme de 10 296,62 euros, ainsi que 1 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il a acheté un véhicule PORSCHE PANAMERA d’occasion le 12 août 2023, avec une garantie MBP de trois mois, mais a rencontré des problèmes majeurs, notamment des défaillances sur les pneumatiques et un bruit anormal du moteur. Après avoir fait remorquer le véhicule, un devis de 10 086,62 euros a été établi pour des réparations. Un rapport d’expertise amiable a suggéré la responsabilité potentielle de Madame [B] et de l’EURL MC AUTO. L’affaire a été renvoyée pour échanges de conclusions et a été plaidoirie le 08 juillet 2024. Monsieur [Z] [K] a maintenu ses demandes, tandis que Madame [B] et l’EURL MC AUTO ont contesté les demandes et sollicité leur rejet.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 août 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG n°
24/00593
TRIBUNAL JUDICIAIRE

DE BORDEAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

50D

Minute n° 24/

N° RG 24/00593 – N° Portalis DBX6-W-B7I-Y4D5

6 copies

EXPERTISE

GROSSE délivrée
le 26/08/2024
à la SELARL BALLADE-LARROUY
la SAS MDO AVOCATS
la SELARL NADINE PLA AVOCATS

COPIE délivrée
le 26/08/2024
à

2 copies au service expertise

Rendue le VINGT SIX AOUT DEUX MIL VINGT QUATRE

Après débats à l’audience publique du 08 Juillet 2024

Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Par Sandra HIGELIN, Vice-Présidente au tribunal judiciaire de BORDEAUX, assistée de Karine PAPPAKOSTAS, Greffière lors des débats et de David PENICHON, Greffier lors du prononcé.

DEMANDEUR

Monsieur [E] [Z] [K]
né le 30 Novembre 1987 à [Localité 9] (PORTUGAL)
[Adresse 6]
[Localité 5]

Représenté par Maître Pierre DE OLIVEIRA de la SAS MDO AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

DÉFENDERESSES

Madame [R] [B]
[Adresse 7]
[Localité 4]

Représentée par Maître Nadine PLA-DEBRAY de la SELARL NADINE PLA AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

E.U.R.L. M.C. AUTO ayant pour nom commercial TRANSAKAUTO
Dont le siège social est :
[Adresse 2]
[Localité 3]
Prise en la personne de son(ses) représentant(s) légal(aux) domicilié(s) en cette qualité au dit siège

Représentée par Maître Pierre-olivier BALLADE de la SELARL BALLADE-LARROUY, avocat au barreau de BORDEAUX

I – FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Par actes des 13 et 15 mars 2024, Monsieur [Z] [K] a fait assigner Madame [B] et l’EURL MC AUTO devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux, afin, au visa des articles 145, 835 et 700 du code de procédure civile, de voir ordonner une expertise de son véhicule automobile et condamner les défenderesses à lui verser à titre provisionnel et in solidum la somme de 10 296,62 euros, outre 1 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Monsieur [Z] [K] expose qu’il a acquis le 12 août 2023 un véhicule de marque PORSCHE, modèle PANAMERA d’occasion auprès de Madame [B], par l’intermédiaire de TransakAuto sous le nom de l’EURL MC AUTO, pour le prix de 31 990 euros ; que le bon de réservation mentionne dans les frais de mise à la route et de courtage une garantie MBP de trois mois ; que le procès-verbal de contrôle technique du 10 août 2023 révélait une défaillance majeure sur les pneumatiques avant ; qu’il a réglé par virement bancaire la facture d’achat de deux pneus avant d’un montant de 200 euros, établie au nom de TransakAuto afin que la contre-visite du contrôle technique soit favorable ; que le jour de la réception du véhicule, après avoir parcouru seulement quelques kilomètres, il a dû faire appel à son assistance sur instructions de la société TransakAuto afin de faire remorquer le véhicule au sein de leur agence en raison du bruit anormal d’un claquement moteur ; que le garage a produit un devis à TransakAuto à hauteur de 10 086,62 euros pour le remplacement du VARIOCAM lequel serait à l’origine du bruit de claquement moteur ; qu’aux termes du rapport d’expertise amiable, il apparaît que Madame [B] est susceptible d’engager sa responsabilité au titre du désordre affectant le véhicule et que l’EURL MC AUTO est susceptible d’engager sa responsabilité au titre de la garantie MBP de trois mois ; que l’EURL MC AUTO n’était pas présente à la réunion d’expertise et qu’il est nécessaire de procéder à des démontages pour déterminer précisément l’origine du désordre et ses conséquences ; qu’il justifie ainsi d’un motif légitime à solliciter une expertise judiciaire.

Appelée à l’audience du 10 juin 2024, l’affaire a été renvoyée pour échanges de conclusions, puis retenue à l’audience de plaidoiries du 08 juillet 2024.

Les parties ont conclu pour la dernière fois :

– Monsieur [Z] [K], le 05 juillet 2024, par des écritures aux termes desquelles il maintient ses demandes,

– Madame [B], le 07 juin 2024, par des écritures dans lesquelles elle formule toutes protestations et réserves d’usage quant à la mesure d’instruction sollicitée et conclut au rejet de la demande de provision et de celle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– l’EURL MC AUTO, le 07 juin 2024, par des écritures dans lesquelles elle sollicite, à titre principal, le rejet des demandes de Monsieur [Z] [K] à son encontre et sa mise hors de cause, à titre subsidiaire, de prendre acte de ses protestations et réserves d’usage concernant la mesure d’expertise, et, en tout état de cause, de condamner Monsieur [Z] [K] au paiement d’une somme provisionnelle de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et réserver les dépens.

II – MOTIFS DE LA DÉCISION

La demande d’expertise

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, “s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé”.

Sur la mise hors de cause;de l’EURL MC AUTO

L’EURL MC AUTO conteste l’existence d’un motif légitime la concernant et sollicite sa mise hors de cause en faisant valoir qu’elle est intervenue à la vente non en qualité de vendeur mais de courtier ; que sa seule mission, en vertu du contrat de mandat confié, est de trouver un acquéreur pour son mandant ; que la notice d’information signée par Monsieur [Z] [K] précise bien qu’elle n’agit qu’en qualité d’intermédiaire et qu’il renonce à tous recours à son encontre dans le cadre de la transaction ; que seule Madame [B] est tenue des vices affectant le véhicule ; qu’elle ne saurait se voir non plus reprocher un manquement à toute autre obligation de livraison conforme, son contrat étant entièrement et exactement exécuté ; qu’en ce qui concerne la garantie MBP mise en avant par Monsieur [Z] [K], il s’agit d’une erreur de lecture du bon de livraison qui énonce clairement que l’acquéreur refuse toute garantie, les frais de mise à la route facturés à hauteur de 200 euros ne comprenant que les frais de dossier.

Monsieur [Z] [K] fait valoir que l’EURL MC AUTO crée volontairement la confusion en prétendant qu’il souhaiterait engager sa responsabilité sur le fondement des vices cachés ; qu’il soutient que son préjudice devra être indemnisé par l’EURL MC AUTO au titre de la garantie MBP laquelle couvre les coûts de réparation, de remplacement des pièces, de la main d’oeuvre suite à une panne, un incident mécanique sur le moteur, la boite de vitesses, le pont ou encore la transmission ; que cette garantie MBP ne fait pas l’objet d’une facturation dans la mesure où elle est offerte d’office à tous les acquéreurs et que seules les extensions sont à souscrire, ce qu’il a effectivement refusé.

Il ressort de ces explications et du bon de réservation que Monsieur [Z] [K] bénéficie de la garantie 3 mois MBP, laquelle n’implique pas de souscription formelle de la part de l’acheteur ; qu’à ce titre, le demandeur justifie d’un motif légitime à l’organisation d’une mesure d’expertise au contradictoire de l’EURL MC AUTO.

Par conséquent, il n’y a pas lieu de prononcer la mise hors de cause de l’EURL MC AUTO.

L’expertise

En l’espèce, Monsieur [Z] [K], par les pièces qu’il verse aux débats, justifie d’un intérêt légitime pour obtenir qu’une mesure d’instruction soit, dans les termes et conditions figurant au dispositif de la présente décision, ordonnée au contradictoire des parties défenderesses, sans aucune appréciation des responsabilités et garanties encourues.

L’expertise sera réalisée aux frais avancés du demandeur, qui a seul intérêt à voir la mesure menée à son terme.

La demande de provision

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés peut, lorsque l’obligation n’est pas sérieusement contestable, allouer au créancier une provision sur son préjudice.

En l’espèce, Monsieur [Z] [K] fait valoir le devis émis par la société Comptoir Automobile du reflet chiffrant les réparations à hauteur de 10 086,62 euros et la facture d’achat de deux pneus avant à hauteur de 210 euros à l’appui de sa demande de provision d’un montant de 10 296,62 euros dirigée contre Madame [B] et l’EURL MC AUTO.

A ce stade du litige, l’obligation pour Madame [B] et l’EURL MC AUTO de réparer le préjudice subi par Monsieur [Z] [K] se heurte à une contestation sérieuse.

Par conséquent, Monsieur [Z] [K] sera débouté de sa demande de provision.

Les autres demandes

Les dépens de l’instance seront provisoirement supportés par le demandeur, qui pourra ultérieurement les inclure dans son préjudice matériel. De ce fait, le demandeur ne peut prétendre à aucune indemnité par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de l’EURL MC AUTO les sommes, non comprises dans les dépens, exposés par elle dans le cadre de l’instance. Sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

III – DÉCISION

Le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux statuant par une ordonnance contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe et à charge d’appel;

Vu l’article 145 du code de procédure civile,

DIT n’y avoir lieu de mettre hors de cause l’EURL MC AUTO ;

ORDONNE une mesure d’expertise et désigne pour y procéder :

Monsieur [W] [H]

[Adresse 1]
courriel : [Courriel 8]

DIT que l’expert procédera à la mission suivante :

– convoquer et entendre les parties, se faire communiquer dans le délai qu’il lui appartiendra de fixer tous documents utiles à l’exercice de sa mission et notamment la citation, les documents relatifs à la mise en circulation du véhicule, aux contrôles techniques, à l’entretien et à l’achat du véhicule de Monsieur [Z] [K],

– donner aux juges tous éléments de nature à établir dans quelles conditions il a été fait acquisition de ce véhicule, préciser notamment si l’acheteur a eu communication de pièces déterminant de façon précise l’état du véhicule qu’il se proposait d’acquérir,

– dire à quelle date le véhicule litigieux a été mis en circulation, décrire l’état de la mécanique et de la carrosserie et préciser le degré d’usure du véhicule lors de son acquisition par rapport à la longévité habituelle de véhicules de même type,

– vérifier si les désordres allégués existent, dans ce cas, en préciser la nature, la localisation, l’importance et la date d’apparition, et dire s’ils sont de nature à rendre le véhicule impropre à son usage,

– donner aux juges du fond tous éléments techniques et de fait leur permettant de déterminer si le vice aujourd’hui constaté existait ou non lors de la vente, dans l’affirmative, donner aux juges du fond tous éléments techniques et factuels leur permettant de dire si ce vice était ou non décelable pour un profane et pouvait ou non être ignoré du vendeur au moment de la vente,

– dire si le véhicule a fait, avant ou/et après la vente litigieuse, l’objet de réparations et dans l’affirmative, en préciser la nature, l’opportunité et l’efficience,

– rechercher la cause des désordres, en indiquant si les désordres sont dûs à un vice de la mécanique, à la vétusté, à des réparations inappropriées, à un défaut d’entretien, à une utilisation inappropriée du véhicule ou à tout autre cause,

– dire si le prix acquitté est conforme à celui habituellement pratiqué pour un véhicule de même type, de même âge et se trouvant dans un état identique,

– en raison des désordres éventuellement constatés, donner son avis sur le prix actuel d’un tel véhicule, compte tenu du marché,

– donner son avis sur la nature, la durée et le coût des travaux, hors-taxes et TTC, propres à remédier aux désordres constatés, en donnant aux juges du fond tous éléments susceptibles de leur permettre de déterminer l’opportunité économique d’y recourir, et communiquer à cet égard aux parties, en même temps que son pré-rapport, des devis et estimations chiffrées,

– fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre, le cas échéant, à la juridiction compétente, de déterminer les responsabilités encourues et d’évaluer s’il y a lieu les préjudices subis,

– établir un pré-rapport et le communiquer aux parties en leur enjoignant de formuler, avant la date qu’il estimera nécessaire de fixer, et dans tous les cas dans le délai d’un mois suivant cette communication, toutes les observations utiles, et répondre aux observations qui auraient été formulées dans ce délai ;

DIT que l’expert ne pourra recueillir l’avis d’un autre technicien que dans une spécialité distincte de la sienne, et qu’il pourra recueillir des informations orales ou écrites de toutes personnes, sauf à ce que soient précisés leur nom, prénom, adresse, et profession ainsi que, s’il y a lieu, leur lien de parenté ou d’alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d’intérêt avec elles ;

FIXE à la somme de 2 500 euros la provision que le demandeur devra consigner par virement sur le compte de la Régie du tribunal judiciaire de Bordeaux (Cf code BIC joint) mentionnant le numéro PORTALIS (figurant en haut à gauche sur la première page de la présente ordonnance) dans le délai de 2 mois, faute de quoi l’expertise pourra être déclarée caduque ;

DIT que l’expert déposera son rapport dans le délai de quatre mois à compter de la consignation ;

DESIGNE le juge chargé du contrôle des expertises pour suivre le déroulement de la présente mesure d’instruction ;

DEBOUTE Monsieur [Z] [K] de sa demande de provision ;

DEBOUTE l’EURL MC AUTO de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que le demandeur conservera provisoirement la charge des dépens, sauf à en intégrer le montant dans son préjudice matériel et le déboute de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La présente décision a été signée par Sandra HIGELIN, Vice-Présidente, et par David PENICHON, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


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