Cession tacite de l’image des personnes

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Cession tacite de l’image des personnes

Accord tacite des personnes filmées ?

Des époux qui s’étaient mariés à la marie du XIXe arrondissement de Paris, se plaignaient de la diffusion sur la chaîne de télévision France 2 et en replay pendant 7 jours sur le site internet de la chaîne, d’une séquence filmée lors de cette célébration dans l’émission intitulée « MARIAGES — Mon mariage- Ma bataille ». Estimant que cette diffusion sans leur autorisation portait atteinte à leur droit au respect de la vie privée ainsi qu’à leur droit à l’image, les époux ont poursuivi la chaîne en responsabilité.

En défense, la chaîne TV faisait valoir que les époux avaient donné une autorisation tacite à la diffusion de ces images dès lors qu’ils n’ont pu ne pas s’apercevoir de la présence de caméras et ont accepté de répondre aux questions des journalistes. Cette autorisation tacite n’a pas été retenue par les juges.

Atteinte à la vie privée

En vertu de l’article 9 du Code civil, toute personne a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection, que toute personne dispose également en vertu du même texte, d’un droit exclusif sur son image, attribut de la personnalité, et sur l’utilisation qui en est faite, qui lui permet, en principe, de s’opposer à la diffusion de son image sans son autorisation et d’obtenir réparation du préjudice qui lui aurait été causé de ce fait.

S’agissant de l’atteinte alléguée à la vie privée, si les éléments de l’état civil (mariage) n’appartiennent pas à la sphère protégée de la vie privée, il en va différemment de la croyance religieuse. En l’espèce, il n’est pas contesté que dans les propos tenus par les époux sur les marches de la mairie et diffusés dans l’émission incriminée était précisée la religion de chacun des époux, de sorte que l’émission incriminée évoque des aspects de la vie privée des époux.

Responsabilité de la chaîne

En professionnel avisé le producteur se devait de solliciter effectivement des autorisations écrites des couples qui avaient été filmés. Par ailleurs, il ne saurait être déduit de la circonstance que les époux ont répondu aux questions du journaliste, non plus qu’ils ont fait des signes amicaux au caméraman, qu’ils ont donné leur accord à la diffusion de la séquence filmée. En  effet ceux-ci ne sont pas des professionnels des relations avec la presse et ont été surpris, dans l’émotion du jour de leur mariage, sans avoir pu réfléchir posément aux conséquences de la diffusion des images en cause, de sorte que leur acceptation de répondre aux questions des journalistes dans ces circonstances est d’autant moins de nature à établir leur acceptation de la diffusion de la séquence litigieuse qu’il leur avait été indiqué qu’il devraient formaliser ultérieurement une autorisation en ce sens.

En conséquence, faute que soit rapportée la preuve que les époux ont autorisé la diffusion de la séquence litigieuse, l’atteinte à leurs droits consacrés par l’article 9 du Code civil a été retenue.

Préjudice de l’atteinte au droit à l’image

Quant au préjudice, si la seule constatation de l’atteinte au droit au respect dû à la vie privée et à l’image ouvre droit à réparation, le préjudice étant inhérent à ces atteintes, il appartient toutefois au demandeur de justifier de l’étendue du dommage allégué, l’évaluation du préjudice étant appréciée de manière concrète, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes, ainsi que des éléments invoqués et établis. En l’espèce, les époux se prévalaient des difficultés qu’ils ont pu rencontrer s’agissant d’un mariage célébré dans l’intimité et alors que cette union était, pour des raisons religieuses, désapprouvée par une partie de la famille de la mariée, qu’ils soulignaient également l’atteinte portée à l’image de l’enfant mineur du demandeur ainsi que la large diffusion de l’émission en cause, l’image fixe de la demanderesse ayant été choisie pour illustrer l’émission et étant restée longtemps en ligne (3 500 euros de dommages-intérêts).


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