Caducité de l’appel et indivisibilité des parties dans le cadre d’une indemnisation suite à un accident.

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Caducité de l’appel et indivisibilité des parties dans le cadre d’une indemnisation suite à un accident.

L’Essentiel : Le 24 février 2019, Mme [D] [R] a été victime d’un accident de moto causé par M. [E] [Y], assuré par Generali Bike. Après l’accident, un expert a été mandaté, et Mme [R] a demandé une indemnisation pour elle-même et sa partenaire. En décembre 2021, elles ont assigné plusieurs parties devant le tribunal de Nîmes. Le jugement du 21 mars 2024 a débouté Generali IARD de sa demande d’exclusion d’indemnisation. En mai 2024, Generali a interjeté appel, mais celui-ci a été déclaré caduc en raison de la non-régularisation de l’appel envers certaines parties.

Exposé de l’incident

Le 24 février 2019, Mme [D] [R] a été victime d’un accident de moto lorsqu’elle a été percutée par la moto conduite par M. [E] [Y], assuré par la société Generali Bike. Suite à cet incident, un expert a été mandaté par l’assureur, et le rapport a été déposé le 29 janvier 2021. Le 4 mai 2021, Mme [R] a demandé une indemnisation pour elle-même et sa partenaire de PACS, Mme [F] [T] [O].

Procédures judiciaires

Les 17, 20, 21 et 24 décembre 2021, Mmes [R] et [O] ont assigné M. [U], la société Generali Bike, la communauté d’agglomération Nîmes Métropole, la CPAM de l’Hérault et la Mutuelle Nationale Territoriale devant le tribunal judiciaire de Nîmes. Le jugement du 21 mars 2024 a débouté Generali IARD et M. [U] de leur demande d’exclusion ou de limitation du droit à indemnisation. Le tribunal a également constaté les créances de la Mutuelle Nationale Territoriale et a condamné les défendeurs à verser diverses sommes à Mme [R] pour réparer son préjudice corporel.

Appel et caducité

Le 17 mai 2024, la société Generali IARD a interjeté appel du jugement, en intimant plusieurs parties, dont M. [U] et la CPAM de l’Hérault. Le greffier de la cour d’appel a ensuite demandé à l’appelante de signifier sa déclaration d’appel aux intimés non constitués. Les actes de signification ont été envoyés entre le 14 et le 16 août 2024. Le 13 septembre 2024, le conseiller de la mise en état a invité les parties à se prononcer sur la caducité de l’appel.

Arguments des parties

Les intimées ont soutenu que l’appel devait être déclaré caduc en raison de l’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, conformément à l’article 553 du code de procédure civile. Generali IARD a demandé une caducité partielle, arguant que seuls certains intimés n’avaient pas constitué avocat dans les délais. En réponse, le conseil de Mme [R] et de Mme [O] a affirmé que l’indivisibilité ne permettait pas une telle limitation.

Décision finale

Le conseiller de la mise en état a déclaré l’appel de Generali IARD caduc à l’égard de toutes les parties, en raison de la non-régularisation de l’appel envers la CPAM de l’Hérault et la Mutuelle Nationale Territoriale. En conséquence, l’appelante a été condamnée à supporter les dépens de l’instance caduque.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 553 du code de procédure civile concernant l’indivisibilité des appels ?

L’article 553 du code de procédure civile stipule que « en cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel de l’une produit effet à l’égard des autres même si celles-ci ne sont pas jointes à l’instance ; l’appel formé contre l’une n’est recevable que si toutes sont appelées à l’instance ».

Cet article établit donc que lorsque plusieurs parties sont impliquées dans un litige et que l’appel est formé contre l’une d’elles, cet appel n’est recevable que si toutes les parties sont également appelées à l’instance.

Cela signifie que si une partie n’est pas jointe à l’appel, celui-ci peut être déclaré caduc, car l’indivisibilité du litige nécessite que toutes les parties soient présentes pour garantir un jugement équitable et complet.

En l’espèce, la société Generali IARD a interjeté appel sans avoir régularisé son appel à l’encontre de la CPAM de l’Hérault et de la Mutuelle Nationale Territoriale, ce qui a conduit à la caducité de l’appel.

Quelles sont les conséquences de la caducité de l’appel selon le code de procédure civile ?

La caducité de l’appel entraîne plusieurs conséquences, notamment la nullité de l’appel et l’impossibilité pour l’appelant de faire valoir ses prétentions devant la cour d’appel.

L’article 902 alinéa 3 du code de procédure civile précise que « l’appel est déclaré caduc lorsque l’appelant ne justifie pas avoir respecté les délais de signification ou de constitution d’avocat ».

Dans le cas présent, la société Generali IARD n’a pas respecté les délais de signification de son appel à l’égard de certaines parties, ce qui a conduit à la déclaration de caducité de l’appel.

De plus, l’article 911-1 du même code stipule que « l’appelant supporte les dépens de l’instance caduque ». Cela signifie que la société Generali IARD devra assumer les frais liés à cette procédure, même si l’appel n’a pas été examiné sur le fond.

Comment le droit à indemnisation est-il affecté par la caducité de l’appel ?

Le droit à indemnisation est fondamentalement lié à la possibilité d’exercer un recours contre l’auteur de l’accident. L’article L.376-1 du code de la sécurité sociale précise que « lorsque la lésion dont l’assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l’assuré ou ses ayants droit conserve contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé ».

Dans le contexte de la caducité de l’appel, si l’appelant ne parvient pas à faire valoir ses droits en raison de la nullité de l’appel, cela peut avoir pour effet de priver les victimes de la possibilité d’obtenir réparation pour leurs préjudices.

En l’espèce, la caducité de l’appel de la société Generali IARD signifie que les décisions du tribunal judiciaire de Nîmes, qui ont accordé des indemnités à Mme [R] et à Mme [O], demeurent en vigueur.

Ainsi, les victimes conservent leur droit à indemnisation, tandis que l’assureur, en raison de la caducité, ne peut contester ces décisions.

COUR D’APPEL

DE [Localité 12]

1ère chambre

ORDONNANCE N° :

N° RG 24/01695 – N° Portalis DBVH-V-B7I-JGIQ

Jugement au fond, origine tribunal judiciaire de Nîmes, décision attaquée en date du 21 mars 2024, enregistrée sous le n° 21/05566

La Sa GENERALI IARD

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentant : Me Mathilde Chadeyron de la Selarl Abeille & Associés, avocate au barreau d’Aix-en-Provence

Représentant : Me Elodie Rigaud, avocate au barreau de Nîmes

APPELANTE

M. [C] [U]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Mme [D] [R]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Mme [T] [O]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentées par: Me Pascale Comte de la Scp Akcio Bdcc Avocats, avocate au barreau de Nîmes

COMMUNAUTE D’AGGLOMERATION NIMES METROPOLE

[Adresse 11]

[Localité 6]

CPAM DE L’HERAULT

[Adresse 4]

[Localité 7]

MUTUELLE NATIONALE TERRITORIALE – MNT

[Adresse 8]

[Localité 10]

assignée à personne le 14.08.2024

INTIMÉS

LE NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ

ORDONNANCE

Nous, Isabelle Defarge, conseillère de la mise en état, assistée de Audrey Bachimont, greffière, présente lors des débats tenus le 18 Novembre 2024 et du prononcé,

Vu la procédure en instance d’appel inscrite au répertoire général sous le numéro N°RG 24/01695 – N° Portalis DBVH-V-B7I-JGIQ,

Vu les débats à l’audience d’incident du 18 novembre 2024, les parties ayant été avisées que l’ordonnance sera prononcée par sa mise à disposition au greffe le 09 janvier 2025

EXPOSÉ DE L’INCIDENT

Le 24 février 2019 Mme [D] [R] circulant à moto a été percutée par la moto conduite par M. [E] [Y] assuré auprès de la société Generali Bike.

L’expert mandaté par l’assureur a déposé son rapport le 29 janvier 2021 et le 4 mai 2021 Mme [R] a demandé l’indemnisation de son préjudice ainsi que de celui de sa partenaire de PACS Mme [F] [T] [O].

Par actes délivrés les 17, 20, 21 et 24 décembre 2021 Mmes [R] et [O] ont fait assigner M. [U], la société Generali Bike, la communauté d’agglomération Nîmes Métropole, la CPAM de l’Hérault et la Mutuelle Nationale Territoriale devant le tribunal judiciaire de Nîmes qui par jugement réputé contradictoire du 21 mars 2024

a débouté la société Generali IARD et M. [U] de leur demande tendant à l’exclusion ou à la limitation du droit à indemnisation de Mmes [R] et [O],

a constaté que la créance de la Mutuelle Nationale Territoriale s’élève à

– 8 924,46 euros au titre des dépenses de santé

– 4 019,02 euros au titre des indemnités journalières,

les a condamnés solidairement à payer à Mme [D] [R] en réparation du préjudice corporel consécutif à l’accident du 24 février 2019 les sommes de

– 585,19 euros au titre des dépenses de santé actuelles,

– 9 414,58 euros au titre de l’assistance par tierce personne temporaire,

– 2 476,15 euros au titre des frais divers,

– 107,78 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels,

– 15 000 euros au titre des souffrances endurées,

– 5 904,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

– 1 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

– 30 375 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

– 2 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,

– 3 000 euros au titre du préjudice sexuel,

a ordonné le doublement des intérêts à l’égard de la société Generali IARD à compter du 4 août 2021 jusqu’au jour où le jugement sera devenu définitif,

a condamné solidairement la société Generali IARD et M. [U] à payer à Mme [T] [O] la somme de 1 500 euros,

les a condamnés in solidum à payer à Mmes [D] [R] et [T] [O] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

a ordonné l’exécution provisoire à hauteur de 50% des sommes allouées,

a débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Par déclaration du 17 mai 2024, la Sa Generali IARD a interjeté appel de ce jugement en intimant M. [E] [U], la communauté d’agglomération [Localité 12] Métropole, la CPAM de l’Hérault, Mmes [H] [R] et [T] [O] et la Mutuelle Nationale Territoriale.

Le 26 juin 2024, le greffier de la cour d’appel lui a enjoint d’avoir à procéder à la signification de sa déclaration d’appel à M. [U], la communauté d’agglomération Nîmes Métropole, la CPAM de l’Hérault et la Mutuelle Nationale Territoriale, intimés non constitués.

L’appelante a fait parvenir au greffe les actes de signification délivrés le 14 août 2024 à la Mutuelle Nationale Territoriale, la communauté d’agglomération [Localité 12] Métropole et à M. [U] et le 16 août à la CPAM de l’Hérault.

Le 13 septembre 2024, le conseiller de la mise en état a invité les parties à formuler leurs observations sur la caducité de l’appel à l’encontre de ces parties dans le délai de quinze jours en application des articles 902 alinéa 3 et 911-1 du code de procédure civile.

Selon conclusions d’incident notifiées le 24 septembre 2024, la Sa Generali demande au conseiller de la mise en état de limiter la caducité encourue à une caducité partielle.

Elle expose que seuls les tiers payeurs et M. [U], dont elle est l’assureur, n’ont pas constitué avocat dans les délais légaux et soutient que la jurisprudence permet, dans des conditions similaires, de limiter la caducité à une caducité partielle.

Par courrier notifié par RPVA le 26 septembre 2024, le conseil de Mme [R] et de Mme [O] réplique que l’indivisibilité à l’égard des différentes parties ne permet pas de limiter la caducité à une caducité partielle.

L’incident a été appelé à l’audience du 18 novembre 2024.

En application de l’article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Au soutien de leur demande de constatation de la caducité totale de l’appel, les intimées excipent des dispositions de l’article 553 du code de procédure civile aux termes duquel « en cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel de l’une produit effet à l’égard des autres même si celles-ci ne sont pas jointes à l’instance ; l’appel formé contre l’une n’est recevable que si toutes sont appelées à l’instance ».

Selon l’article L.376-1 du code de la sécurité sociale, lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l’assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l’assuré ou ses ayants droit conserve contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du présent livre ou du livre Ier.

Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l’assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre et le livre Ier, sauf recours de leur part contre l’auteur responsable de l’accident dans les conditions ci-après.

Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s’exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’elles ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel.

(‘)

La personne victime, les établissements de santé, le tiers responsable et son assureur sont tenus d’informer la caisse de la survenue des lésions causées par un tiers dans des conditions fixées par décret.

L’intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d’assuré social de la victime de l’accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques.

Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement.

A défaut du respect de l’une de ces obligations, la nullité du jugement sur le fond pourra être demandée pendant deux ans, à compter de la date à partir de laquelle ledit jugement est devenu définitif, soit à la requête du ministère public, soit à la demande des caisses de sécurité sociale intéressées ou du tiers responsable, lorsque ces derniers y auront intérêt. (‘)

Faute pour l’appelante d’avoir régularisé son appel à l’encontre de la CPAM de l’Hérault et de la Mutuelle Nationale Territoriale dans les délais prévus par la loi, la nullité encourue de l’arrêt rendu en l’absence de celles-ci, les empêchant de faire valoir leur recours subrogatoire, signe l’indivisibilité du litige à leur égard.

L’appel de Generali IARD sera en conséquence déclaré caduc à l’égard de toutes les parties.

L’appelante supportera les dépens de l’instance caduque.

PAR CES MOTIFS

La conseillère de la mise en état

Déclare caduc à l’égard de toutes les parties l’appel interjeté par la société Generali IARD le 17 mai 2024 à l’encontre du jugement réputé contradictoire du tribunal judiciaire de Nîmes en date du 21 mars 2024 ( n°RG 21/05566)

Laisse les dépens de l’instance à la charge de l’appelante.

La greffière La conseillère de la mise en état


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