Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 6
ARRET DU 04 OCTOBRE 2023
(n° ,6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/19778 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVFF
Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2021 -Tribunal de Commerce d’EVRY – RG n° 2019F01020
APPELANTS
Monsieur [S] [Z] [I] [E]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Monsieur [C] [P]
[Adresse 2]
[Localité 8]
Monsieur [K] [E]
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentés par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480
INTIMEE
La SOCIETE GENERALE,
immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 552 120 222, représentée par ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,venant aux droits et obligations de la banque CREDIT DU NORD selon traité de fusion-absorption intervenu le 15 juin 2022 et ayant pris effet au 1 er janvier 2023
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Loren MAQUIN-JOFFRE de la SELARL A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Marc BAILLY, Président de chambre et MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M.Marc BAILLY, Président de chambre,
M.Vincent BRAUD, Président,
MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par M.Marc BAILLY, Président de chambre, et par Mme Anaïs DECEBAL,Greffier , présent lors de la mise à disposition.
*
* *
La S.A.R.L. POM, ayant pour activité le commerce de vêtement, a été immatriculée le 27 mars 2015 entre M. [S] [E], gérant principal, et MM. [C] [P] et [K] [E], co-gérants.
Elle ouvert un compte dans les livres de la société Crédit du Nord – aux droit duquel vient la Société Générale – qui lui a consenti une facilité de trésorerie commerciale de 20 000 euros par avenant en date du 25 avril 2013.
M. [S] [E] s’est porté caution solidaire omnibus des obligations de la société POM dans la limite de la somme de 26 000 euros et pour une durée de 10 ans par acte en date du 25 avril 2013.
Par acte sous seing privé en date du 6 mai 2015, le Crédit du Nord a consenti à la société POM un prêt de financement de travaux d’un montant de 100 000 euros remboursable en 84 mensualités au taux d’intérêt nominal de 3,42 % garanti par le nantissement du fonds de commerce.
MM. [S] [E], [C] [P] et [K] [E] se sont portés cautions solidaires dans la limite de la somme de 130 000 euros et pour une durée de 108 mois par actes en date du 23 décembre 2014.
La société POM a fait l’objet d’un liquidation judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Créteil en date du 28 septembre 2016 et le Crédit du Nord a déclaré sa créance le 2 novembre 2016 pour 567,24 euros au titre du solde débiteur du compte courant et 84 012,72 euros au titre du prêt.
Sur l’assignation délivrée par le Crédit du Nord à M. [S] [E] le 23 décembre 2019 puis à MM. [C] [P] et [K] [E] le 16 janvier 2020 en exécution de leurs obligations de caution, le tribunal de commerce d’Evry, par jugement en date du 8 septembre 2021 a :
‘- Dit recevable la demande du CRÉDIT DU NORD SA à l’encontre de Monsieur [S] [E], Monsieur [K] [E] et Monsieur [C] [P], -Condamne Monsieur [S] [E] à payer la somme de 567,24 € au CREDIT DU NORD SA plus les intérêts capitalisés depuis la date du 6 juin 2019 au taux de 1 1 %, au titre du solde du compte de la S.A.R.L. POM,
-Condamne Monsieur [S] [E], Monsieur [K] [E] et Monsieur [C] [P] à payer la somme de 86.448,78 € au CREDIT DU NORD SA plus les intérêts capitalisés depuis la date du 6 juin 2019 au taux de 6,43 %, au titre du prêt,
-Condamne Monsieur [S] [E], Monsieur [K] [E] et Monsieur [C] [P] à payer solidairement à la société CREDIT DU NORD SA la somme de 4.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Déboute le CREDIT DU NORD SA dans sa demande de paiement des frais d’hypothèque,
– Déboute les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires,
– Ordonne l’exécution provisoire’.
Par déclaration au greffe en date du 15 novembre 2021, MM. [S] [E], [C] [P] et [K] [E] ont interjeté appel.
Par leurs seules conclusions en date du 11 février 2022, MM. [S] [E], [C] [P] et [K] [E] font valoir :
– que le jugement n’a pas motivé en quoi il a considéré que la rédactrice de la banque avait le pouvoir de déclarer la créance, de sorte qu’il doit être infirmé,
– que c’est pour financer l’ouverture d’un magasin à Thiais, alors que la société POM, qui avait connu une augmentation de capital le 30 mars 2015 et exploitait 6 autres enseignes de vente de vêtement ‘Café Coton’ que le prêt a été accordé le 6 mai 2015 soit 5 mois après que les cautionnements avaient été souscrits, qu’il leur appartient d’établir leurs ‘surface financière’ à la date du 23 décembre 2014 et qu’il ressort des fiches de renseignements que les engagements étaient manifestement disproportionnés alors que le tribunal n’a retenu que la valeur des biens immobiliers sans les charges de prêts,
– qu’ils soulèvent également la nullité des cautionnements comme étant la garantie d’une dette future, valable qu’à la condition que le montant garanti soit déterminé ou déterminable lors de l’engagement alors que tel n’était pas le cas en l’espèce, de sorte qu’ils demandent à la cour d’infirmer le jugement entrepris et de :
‘- Déclarer irrecevable et pour le moins mal fondé LE CREDIT DU NORD en ses demandes en paiement dirigées à l’encontre de Monsieur [S] [E], Monsieur [K] [E] et Monsieur [C] [P].
– Déclarer irrecevable la déclaration de créance effectuée par LE CREDIT DU NORD en date du 2 novembre 2016 au passif de la S.A.R.L. POM.
– Débouter LE CREDIT DU NORD de l’intégralité de ses demandes.
– Dire que les actes de caution de Monsieur [S] [E], Monsieur [K] [E] et Monsieur [C] [P] sont manifestement disproportionnés à leurs capacités
financières, tel qu’établi le 23 décembre 2014.
– Déclarer nuls et de nul effet les actes de cautionnement comme ayant été donnés pour une date future, en l’espèce l’acte de prêt en date du 6 mai 2015
– Condamner la SA CREDIT DU NORD à payer respectivement à chacun des défendeurs la somme de 8.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure
Civile.
-Voir ordonner la mainlevée des hypothèques judiciaires provisoires inscrites sur les biens des appelants’.
Par ses dernières conclusions en date du 13 avril 2023, la Société Générale demande à la cour de lui donner acte de ce qu’elle vient aux droits de la société Crédit du Nord et poursuit la confirmation du jugement et l’obtention d’une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles en exposant :
– qu’elle démontre que sa déclaration de créance est valable, les pouvoirs de Mme [V], déclarante, étant justifiés,
– que les cautionnements ne sont pas nuls dès lors que la limite de 130 000 euros n’est pas contradictoire lorsque le cautionnement est donné en garantie d’un prêt de 100 000 euros alors qu’il est usuel d’obtenir la garantie des accessoires d’un prêt, que la circonstance que le déblocage du prêt n’a pas été voisin de la souscription des cautionnements n’affecte pas leur validité, le cautionnement d’une dette future étant admis par une jurisprudence trentenaire,
– que la disproportion alléguée est imaginaire au regard des fiches de renseignements produites.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 mai 2023.
MOTIFS
C’est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a retenu qu’il est justifié que la déclarante pour le compte de la banque, Mme [V], disposait de la délégation de pouvoirs à cet effet comme cela ressort de l’attestation notariée du 12 avril 2022 mentionnant la délégation de pouvoir à elle accordée le 26 janvier 2021.
Les cautions sont d’autant moins fondées à critiquer la régularité de la déclaration des créances que celles-ci ont été admises par décisions du juge commissaire notifiées le 2 juin 2017, cette décision étant revêtue de l’autorité de la chose jugée quant au principe et au montant des créances.
De jurisprudence constante, le cautionnement d’une dette future est admis alors qu’en l’espèce, la dette cautionnée est décrite en ses éléments essentiels dès les actes de cautionnement comme étant un prêt de 100 000 euros remboursable en 84 mensualités au taux fixe de 3,420 %avce indemnité d’exigibilité anticipée de 3 % et que, par ailleurs, les mentions manuscrites par lesquelles les cautions se sont engagées en connaissance de cause de la nature et des limites de leurs obligations ne sont pas critiquées.
Il ressort de l’article devenu L 332-1 du code de la consommation que l’engagement de caution conclu par une personne physique au profit d’un créancier professionnel ne doit pas être manifestement disproportionné aux biens et revenus déclarés par la caution sous peine de déchéance du droit de s’en prévaloir.
La charge de la preuve de la disproportion incombe à la caution poursuivie qui l’invoque et celle-ci doit être appréciée à la date de l’engagement, en tenant compte de ses revenus et patrimoine ainsi que de son endettement global.
Aucune disposition n’exclut de cette protection la caution dirigeante d’une société dont elle garantit les dettes.
La banque n’a pas a vérifier les déclarations qui lui sont faites à sa demande par les personnes se proposant d’apporter leur cautionnement sauf s’il en résulte des anomalies apparentes.
Il incombe alors au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné, lors de sa conclusion, aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.
M. [S] [E] a certifiés exacts les renseignements figurant dans une fiche datée du 26 novembre 2014 selon laquelle :
– il est divorcé et vit avec Mme [M] avec un enfant à charge, a pour revenu 72.000 euros annuels outre 48.500 euros de revenus immobiliers,
– il est propriétaire de 7 biens immobiliers – le dernier à hauteur d’une moitié indivise – estimés à un total de 1 685 000 euros avec mentions de sommes restant dues au titre de prêt d’un total de 277 799,77 euros soit une valeur nette du patrimoine immobilier de
1 407 200,23 euros d’une épargne de valeurs mobilières d’un total de 75 067,12 euros.
Alors que M. [S] [E] n’apporte aucun élément de nature à démentir les éléments donnés à la banque auxquels elle était en droit de se fier, il apparaît, au contraire de ce qu’il prétend de manière singulière, manifeste que ses engagements n’étaient pas disproportionnés.
Il doit être observé que les conclusions de M. [S] [E] n’étayent pas la disproportion manifeste de son premier cautionnement donné le 25 avril 2013 au titre duquel il lui est demandé le paiement d’une somme de 567 euros qu’il conteste pourtant devoir au moyen du présent appel.
M. [K] [E] a certifié exacts les renseignements figurant dans une fiche datée du 24 novembre 2014 selon laquelle :
– il est divorcé et vit maritalement et avec un enfant à charge, a pour revenu 32 000 euros annuels tandis que Mme a pour revenus 20 000 euros issus de son emploi au ministère de la défense,
– il est propriétaire d’un appartement estimé à 200 000 euros ainsi que de la moitié d’une longère estimée à la somme de 180 000 euros et qu’il est débiteur de prêts, l’un, immobilier, au titre duquel reste due une somme de 82 000 euros et, l’autre, de financement d’une automobile sur lequel reste la somme de 20 000 euros à régler.
Alors que M. [K] [E] n’apporte aucun élément de nature à démentir les éléments auxquels la banque était en droit de se fier, il apparaît que son engagement n’était pas manifestement disproportionné eu égard à un patrimoine immobilier net de 298 000 euros.
M. [C] [P] a certifiés exacts les renseignements figurant dans une fiche datée du 26 novembre 2014 selon laquelle :
– il est marié sous le régime de la communauté légale depuis1986 avec deux enfants à charge, a pour revenu 30 000 euros annuels tandis que Mme a pour revenus 27 800 euros issus de son emploi à la Caisse d’Allocations familiales,
– il est propriétaire d’un bien estimé à la somme de 600 000 euros et du quart d’un autre bien estimé à la somme de 950 000 euros et débiteur de prêts immobiliers, l’un, au titre duquel reste due une somme de 100 000 euros et l’autre au titre duquel reste due une somme de 15 000 euros
Alors que M. [C] [P] n’apporte aucun élément de nature à démentir les éléments donnés auxquels la banque était en droit de se fier, il apparaît que son engagement n’était pas manifestement disproportionné.
Le jugement, non autrement critiqué sauf sur la mainlevée de mesures provisoires qu’il n’y a pas lieu d’ordonner compte tenu de ce qui précède mérite entière confirmation, les appelants doivent être condamnés aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à la Société Générale la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE recevable l’intervention volontaire de la Société Générale venant aux droits de la société Crédit du Nord ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, la Société Générale venant aux droits de la société Crédit du Nord ;
Y ajoutant,
CONDAMNE, in solidum, MM. [S] [E], [C] [P] et [K] [E] à payer à la Société Générale venant aux droits de la société Crédit du Nord somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE MM. [S] [E], [C] [P] et [K] [E] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Laisser un commentaire