1. Lors de l’acquisition d’une société, il est essentiel de mandater un audit financier complet pour vérifier les comptes et les méthodes comptables utilisées, afin d’éviter tout litige ultérieur sur la valorisation des actifs.
2. En cas de doute sur la méthode de valorisation des stocks d’une société cible, il est recommandé de poser des questions précises et détaillées sur cette méthode lors de l’audit, afin de s’assurer de sa conformité aux normes comptables en vigueur.
3. En cas de litige sur la garantie d’actif et de passif, il est important de fournir des preuves solides pour étayer ses revendications, notamment en s’appuyant sur des expertises comptables indépendantes et en respectant les termes du contrat de garantie.
La SAS Forlam a acquis l’intégralité du capital social de la SASU Vermigli pour 2,4 millions d’euros. Cependant, des irrégularités ont été relevées dans les comptes sociaux de Vermigli, notamment en ce qui concerne la valorisation et la dépréciation des stocks. Forlam a donc demandé des dommages et intérêts à hauteur de 1,680,000 euros pour dol et 610,677 euros au titre de la garantie d’actif et de passif. Le tribunal de commerce de Paris a débouté Forlam de ses demandes, mais cette dernière a fait appel. Sofico, de son côté, conteste les accusations de dol et de faute grave et demande à ce que les demandes de Forlam soient rejetées. La décision de la cour est attendue.
Motifs de la décision
La société Forlam a accusé la société Sofico et Madame [C] de dol, affirmant que ces derniers avaient intentionnellement fourni des comptes financiers inexacts pour obtenir un meilleur prix lors de la vente. Forlam a soutenu que les stocks étaient surévalués et que si la valorisation avait été correcte, l’EBITDA aurait été négatif, influençant ainsi le prix de vente basé sur un multiple de l’EBITDA. Forlam a également critiqué la méthode de valorisation des stocks, notamment en ce qui concerne les frais accessoires et la sous-activité non retraitée, ainsi que l’absence de dépréciation des stocks malgré l’absence de mouvement pour certains articles.
Réponse de Sofico
Sofico a nié toute tromperie, arguant que Forlam avait réalisé un audit financier complet et que les méthodes de valorisation des stocks étaient appropriées et conformes aux normes comptables. Sofico a également soutenu que les méthodes comptables utilisées étaient appliquées de bonne foi et que Forlam avait eu accès à toutes les informations nécessaires. En outre, Sofico a contesté l’argument selon lequel la valorisation des stocks était un facteur déterminant pour Forlam, notant que d’autres aspects financiers étaient également pris en compte dans la décision d’achat.
Conclusion du tribunal
Le tribunal a conclu que Forlam n’avait pas réussi à prouver l’existence de manoeuvres dolosives de la part de Sofico. Il a été noté que Forlam avait eu la possibilité de mener un audit approfondi et de poser des questions spécifiques sur la valorisation des stocks, ce qu’elle a fait. Le tribunal a également souligné que les méthodes de valorisation des stocks n’avaient pas varié au cours des années précédant la vente et que Forlam n’avait pas démontré que Sofico avait intentionnellement dissimulé des informations cruciales. En conséquence, la demande de Forlam basée sur le dol a été rejetée.
Sur la garantie
Forlam a également invoqué une garantie d’actif et de passif, affirmant que les déclarations de Sofico concernant les comptes étaient inexactes. Cependant, le tribunal a jugé que Forlam n’avait pas réussi à prouver que les déclarations étaient inexactes au-delà des critiques générales sur la méthode de valorisation des stocks. En l’absence de preuves convaincantes et compte tenu des réponses détaillées de Sofico, la demande de Forlam concernant la garantie a également été rejetée.
Demande reconventionnelle de Sofico
Sofico a demandé le paiement de 2700 euros pour une subvention que Forlam avait cessé de verser, en violation d’un engagement pris lors de l’acquisition. Le tribunal a accordé cette somme à Sofico, confirmant que Forlam avait manqué à ses obligations contractuelles en ce qui concerne le maintien de la subvention.
En conclusion, le tribunal a confirmé la décision de première instance, rejetant les allégations de Forlam et accordant à Sofico le paiement de la subvention non versée ainsi que des frais irrépétibles.
– Condamnation de la société Forlam à payer à la société Sofico 2700 euros à titre de dommages et intérêts.
– Condamnation de la société Forlam à payer à la société Sofico 30.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamnation de la société Forlam aux dépens.
– Déboutement de la société Sofico concernant la prise en charge des émoluments d’huissiers pour l’exécution forcée.
Réglementation applicable
– Article 1103 du Code civil
– Article 1104 du Code civil
– Article 1112-1 du Code civil
– Article 1130 du Code civil
– Article 1137 du Code civil
– Article 1138 du Code civil
– Article 1231-6 du Code civil
– Article 1231-3 du Code civil
– Article 1153 du Code civil
– Articles 514 et suivants du Code de procédure civile
– Article 700 du Code de procédure civile
– Articles 213-18, 213-30, 213-31 du Plan Comptable Général (PCG)
– Articles 3.1.3.a) et 3.1.4.7 de la Garantie
– Article 3.2.1. a) et b) de la Garantie
– Article 3.2.2.3 de la Garantie
– Article 3.2.4 de la Garantie
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Martine LEBOUCQ BERNARD de la SCP Société Civile Professionnelle d’avocats HUVELIN & associés
– Me Arnaud LARROUSSE de l’AARPI GATE AVOCATS
– Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES
– Me Philippe TORRE de la SELARL REINHART MARVILLE TORRE
Mots clefs associés
– SASU Vermigli
– Fabrication et distribution de grillages, clôtures, portails
– SAS SOFICO
– SAS Forlam
– Acquisition du capital social
– Lettre d’intention
– EBITDA comptable et retraité
– Protocole d’acquisition
– Convention de Garantie d’Actif et de Passif
– Comptes de référence
– Clause de garantie
– Contrat de prestations de services
– Commissaire aux comptes
– Valorisation et dépréciation des stocks
– Réclamation et non-recevoir
– Tribunal de commerce de Paris
– Dol et garantie d’actif et de passif
– Appel et conclusions
– Plan Comptable Général (PCG)
– Faute lourde
– Préjudice subi
– Frais irrépétibles
– Clause d’exclusion de garantie
– SASU Vermigli: Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle Vermigli
– Fabrication et distribution de grillages, clôtures, portails: Activités de production et de vente de grillages, clôtures et portails
– SAS SOFICO: Société par Actions Simplifiée SOFICO
– SAS Forlam: Société par Actions Simplifiée Forlam
– Acquisition du capital social: Processus d’acquisition des parts sociales d’une entreprise
– Lettre d’intention: Document exprimant la volonté des parties de négocier un contrat
– EBITDA comptable et retraité: Indicateur financier mesurant la rentabilité d’une entreprise avant déduction des charges financières, des impôts, de l’amortissement et de la dépréciation
– Protocole d’acquisition: Accord détaillant les modalités d’acquisition d’une entreprise
– Convention de Garantie d’Actif et de Passif: Accord garantissant l’état des actifs et des passifs d’une entreprise lors d’une transaction
– Comptes de référence: Comptes servant de base de comparaison pour évaluer la performance financière d’une entreprise
– Clause de garantie: Disposition contractuelle garantissant l’exécution d’une obligation
– Contrat de prestations de services: Accord détaillant les services à fournir par une partie à une autre
– Commissaire aux comptes: Professionnel chargé de vérifier la régularité et la sincérité des comptes d’une entreprise
– Valorisation et dépréciation des stocks: Evaluation et réduction de la valeur des stocks détenus par une entreprise
– Réclamation et non-recevoir: Actions permettant de contester une demande ou une plainte
– Tribunal de commerce de Paris: Juridiction compétente pour les litiges commerciaux à Paris
– Dol et garantie d’actif et de passif: Responsabilité pour tromperie et garantie de l’état des actifs et des passifs d’une entreprise
– Appel et conclusions: Recours et arguments finaux présentés devant un tribunal
– Plan Comptable Général (PCG): Cadre réglementaire définissant les règles comptables en France
– Faute lourde: Manquement grave à une obligation contractuelle ou légale
– Préjudice subi: Dommage subi par une partie à la suite d’un acte illicite
– Frais irrépétibles: Frais non récupérables engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire
– Clause d’exclusion de garantie: Disposition contractuelle excluant certaines garanties dans un contrat.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 9
ARRÊT DU 25 JANVIER 2024
(n° , 16 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/09072 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFZDH
Décision déférée à la Cour : Jugement du 8 avril 2022 – Tribunal de commerce de PARIS – RG n° 2021003893
APPELANTE
S.A.S. FORLAM, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LYON sous le numéro 443 828 009,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Martine LEBOUCQ BERNARD de la SCP Société Civile Professionnelle d’avocats HUVELIN & associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R285,
Assistée de Me Arnaud LARROUSSE de l’AARPI GATE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0695,
INTIMÉE
S.A.S. SOFICO, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de DRAGUIGNAN sous le numéro 967 801 507,
Dont le siège social est situé [Adresse 5],
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée de Me Philippe TORRE de la SELARL REINHART MARVILLE TORRE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 octobre 2023, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Sophie MOLLAT, présidente de chambre,
Madame Isabelle ROHART, conseillère,
Madame Alexandra PELIER-TETREAU, conseillère,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l’audience dans le respect des conditions prévues à l’article 804 du code de proécdure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL.
ARRÊT :
– contradictoire,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Sophie MOLLAT, présidente de chambre et par Madame Saoussen HAKIRI, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
Exposé des faits et de la procédure
La SASU Vermigli a pour objet social la fabrication, la distribution, l’achat, la vente ainsi que la pose de grillages, clôtures, portails ainsi que de tous articles, marchandises et matériels accessoires.
Son capital social était intégralement détenu parla SAS SOFICO.
La SAS Forlam intéressée par une opération d’acquisition de l’intégralité du capital social de la SASU Vermigli s’est rapprochée de la SAS SOFICO dont la dirigeante sociale est Mme [C].
Le ler juin 2018, la SAS Forlam a adressé à la SAS SOFICO une lettre d’intention concernant l’acquisition de la société Vermigli pour un prix de 2,4 millions d’euros sur la base d’hypothèses financières:
– EBITDA comptable de 100 K € environ pour 2017,
– EBITDA retraité de 340 K € environ pour 2017,
– Current trading en ligne,
– BFR stable.
Le 6 juin 2018, la SAS SOFICO a accepté cette offre, et le 16 octobre 2018, le Protocole d’acquisition de 100% du capital social de la société Vermigli par la société Forlam pour le prix de 2.4 millions d’euros était signé.
Des diligences ont été effectuées par la société Forlam confiées à la société EIGHT ADVISORY.
Le 3 janvier 2019, une fois les conditions suspensives levées, l’acquisition a été réalisée.
Cette acquisition était assortie de la signature d’une ‘Convention de Garantie d’Actif et de Passif’, signée le même jour accordée par la société Sofico portant d’une part sur les fausses déclarations ou les déclarations inexactes et d’autre part sur les suppléments de passif et les diminutions d’actif apparaissant postérieurement à l’acquisition par rapport aux comptes annuels 2017.
En particulier la clause de garantie visait :
– les comptes de référence comme ayant été préparés conformément aux principes comptables issus du plan comptable général français, et étant réguliers, sincères et donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de la société,
– les stocks dont le volume et la valorisation, ainsi que le volume et la valorisation des encours de production de la société tels que mentionnés dans les comptes de référence représentaient fidèlement l’état des stocks et encours à la date des Comptes de Référence.
Enfin, un contrat de prestations de services a été conclu entre la société Vermigli et la SAS SOFICO, agissant par Mme [C] et M. [U] [C], son époux.
La SAS Forlam a mis un terme à cette mission à la fin de l’année 2020.
Le 26 juin 2019, la société Forlam prenant acte que le mandat du commissaire aux comptes titulaire arrivait à expiration, a nommé en remplacement la société Orfis.
Le 7 mai 2020, dans le cadre de sa mission de certification des comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2019, le nouveau commissaire aux comptes relevait l’existence, selon lui, de certaines irrégularités au sein des comptes sociaux de la société Vermigli portant sur la valorisation et la dépréciation des stocks.
Le 15 juillet 2020, la société Forlam a ainsi notifié une réclamation conformément à l’article 3.2.4 de la garantie en faisant valoir :
– l’existence d’un coefficient de coûts d’approche et de stockage de x1,3 conduisant à une survalorisation systématique des stocks dans les comptes de référence, contraire au PCG,
– l’irrégularité, vis à vis du PCG, de l’intégration du coût de sous-activité pour déterminer les coûts de revient des stocks d’encours et de produits finis au sein de ces mêmes comptes de référence,
– l’absence de dépréciation des stocks.
La société SOFICO a répondu par une fin de non-recevoir le 11 septembre 2020.
Par acte en date du 29.12.2020 la SAS Forlam faisait assigner la société SOFICO devant le tribunal de commerce de Paris pour demander des dommages et intérêts d’un montant de 1.680.000 euros sur le fondement du dol et demander l’indemnisation de son préjudice à hauteur de 610.677 euros sur le fondement de la garantie d’actif et de passif après que la clause de plafonnement ait été jugé non écrite, et subsidiairement pour demander des dommages et intérêts compte tenu de l’inexactitude des déclarations de la société SOFICO;
Par jugement en date du 8.04.2022 le tribunal de commerce de Paris a:
débouté la SAS Forlam de ses demandes de dommages et intérêts sur le fondement du dol et de la garantie d’actif et de passif,
débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif,
condamné la SAS Forlam à payer à la SAS SOFICO la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, débouté pour le surplus,
condamné la SAS Forlam aux dépens.
La société Forlam a formé appel par déclaration d’appel en date du 6.05.2022.
Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 8.06.2023, la SAS Forlam demande à la cour de:
Vu le Protocole d’Acquisition et la Garantie,
Vu les articles 1103 et 1104 du Code civil,
Vu les articles 1112-1, 1130, 1137 et 1138 du Code civil,
Vu l’article 1231-6 du Code civil,
Vu les articles 514 et suivants du Code de procédure civile ;
Vu le Plan Comptable Général (PCG),
A TITRE PRINCIPAL:
– infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 8 avril 2022 en ce qu’il a débouté
Forlam de ses demandes au titre du dol, au titre de la Garantie, et au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et des dépens ;
– infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 8 avril 2022 en ce qu’il a condamné Forlam au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 8 avril 2022 en ce qu’il a condamné Forlam au paiement des entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 70,86 € dont 11,60 € de TVA;
S’agissant de la demande au titre du dol
– Juger qu’en appliquant de manière trompeuse les règles comptables figurant aux articles 213-18, 213-30, 213-31 du PCG, pour l’établissement des comptes sociaux de Vermigli, notamment pour les exercices clos en 2015, 2016 et 2017, Madame [C] (agissant en sa qualité de dirigeante de Sofico) a commis des man’uvres dolosives ;
– Juger que ces man’uvres dolosives commises par Madame [C] (agissant en sa qualité de dirigeante de Sofico) ont vicié le consentement de Forlam dans le cadre de l’Acquisition;
– Juger que les conditions permettant d’établir que Forlam a subi un dol de Sofico, agissant par sa dirigeante Madame [C], sont réunies ;
– Condamner en conséquence Sofico au paiement d’un montant de 1.680.000 euros à Forlam au titre du préjudice que cette dernière a effectivement et personnellement subi ;
S’agissant de la demande au titre de la Garantie
– Juger qu’en appliquant de manière trompeuse les règles comptables figurant aux articles 213-18, 213-30, 213-31 du PCG, pour l’établissement des Comptes de Référence, Madame [C] a en tout état de cause commis une faute lourde ;
– Juger qu’en conséquence de la faute commise par Madame [C], les déclarations et engagements de Sofico aux articles 3.1.3.a) et 3.1.4.7 de la Garantie sont inexacts ;
– Juger que Vermigli, en conséquence des fautes de sa dirigeante, a subi un préjudice d’un montant de 610.677 euros ;
– Juger que les conditions de mise en jeu de la Garantie par Forlam sont satisfaites ;
– Juger que la clause 3.2.2.3 dela Garantie relative au plafond est réputée non écrite compte tenu de la faute lourde commise par Madame [C] ;
– Condamner en conséquence Sofico au paiement d’un montant de 610.677 euros à Forlam au titre du préjudice effectivement subi par Vermigli ;
A TITRE SUBSIDIAIRE :
– Juger que les règles comptables figurant aux articles 213-18, 213-30, 213-31 du PCG n’ont pas été correctement appliquées par Vermigli, notamment pour l’établissement des Comptes de Référence ;
– Juger que les déclarations et engagements de Sofico aux articles 3.1.3.a) et 3.1.4.7 de la Garantie sont inexacts ;
– Juger que les conditions de mise en jeu de la Garantie par Forlam sont satisfaites ;
– Juger que le préjudice de Vermigli, résultant de l’inexactitude des déclarations et engagements précités, est d’un montant de 610.677 euros ;
– Condamner Sofico au paiement d’un montant de 440.000 euros à Forlam au titre du préjudice subi par Vermigli, compte-tenu de l’existence d’un plafond de garantie conformément aux stipulations de la Garantie, et condamner Sofico au paiement des intérêts moratoires au taux légal, en raison du retard dans le paiement d’un montant de 440.000 euros, et courant depuis l’assignation ayant introduit la présente action ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
– Condamner Sofico au paiement de la somme de 30.000 euros au titre des frais irrépétibles de l’instance sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner Sofico aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 20.04.2023, la société Sofico demande à la cour de:
Vu les articles 1137, 1103, 1153 et 1231-3 du Code civil,
Vu le Plan Comptable Général,
Vu également la jurisprudence et les pièces visées en fin d’acte,
CONFIRMER LA DECISION DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS EN CE QU’ELLE A:
– Dit et jugé que SOFICO n’a commis aucun dol à l’encontre de Forlam lors de l’acquisition;
– Dit et jugé que SOFICO n’a commis aucune faute dolosive ou faute grave dans la gestion de la valorisation des stocks de Vermigli ainsi que lors de l’Acquisition ;
– Dit et jugé que les termes de la GAP excluent la réparation du préjudice allégué par Forlam;
PAR CONSEQUENT:
– Constater que Forlam n’a pas demandé la nullité de la clause d’exclusion de garantie prévue à l’article 3.2.1. a) et b) de la GAP et par conséquent :
– Dire et juger que cette clause d’exclusion de garantie s’impose aux parties ;
– Rejeter l’ensemble des demandes formées par Forlam ;
INFIRMER LA DECISION DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS EN CE QU’ELLE N’A PAS
– Condamné Forlam à verser à SOFICO la somme de 2.700 euros ;
PAR CONSEQUENT
– Accueillir la demande formulée par SOFICO et condamner Forlam à lui payer la somme de 2700 euros
EN TOUT ETAT DE CAUSE
– Condamner Forlam au paiement d’une somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner Forlam aux entiers dépens ;
– Condamner Forlam à assumer le coût des émoluments d’huissiers dans le cadre de l’éventuelle exécution forcée de la décision à venir.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le dol
La société Forlam soutient l’existence d’un dol en exposant que:
– les manoeuvres dolosives sont constituées par le fait que Sofico et Madame [C] ont intentionnellement arrêté et approuvé des comptes certifiés irréguliers et inexacts présentant un compte de résultat artificiellement augmenté du fait des irrégularités commises concernant la valorisation des stocks, et les ont volontairement fournis à Forlam dans le but d’obtenir un meilleur prix,
– que les informations rédigées en annexe des états financiers sont mensongères puisqu’il y est indiqué par le commissaire aux comptes sur les comptes sociaux de 2015 à 2018 que le coût de la sous-activité est exclu de la valeur des stocks,
– qu’il ne peut être retenu comme l’a fait le tribunal qu’elle a fait réaliser un audit par EY et que cette dernière aurait dû procéder le cas échéant aux analyses nécessaires lui permettant de qualifier l’affirmation du CAC, dans la mesure où aux termes de sa lettre de mission EY avait pour sa mission concernant les stocks de faire un état des lieux des stocks (nature, délai de rotation etc…) et qu’elle n’avait donc pas pour mission de remettre en cause les comptes et les méthodes comptables utilisées.
Elle précise qu’elle a constaté que les stocks représentaient une part significative de l’actif de Vermigi et qu’ils étaient fortement valorisés et qu’elle a de ce fait procédé à des sondages sur la valorisation des stocks en posant la question de l’absence de dépréciation à laquelle la cédante a répondu en indiquant qu’il n’y avait pas de dépréciation des stocks car la gamme de produits était relativement stable et par nature les produits ne s’abîmaient pas, et précise qu’elle fait réaliser un inventaire physique par sa directrice administrative et financière.
– la valorisation des stocks avait un caractère déterminant dans sa volonté d’acquérir la société, puisque si la valorisation avait été correctement effectuée l’EBITDA aurait été négatif au 31.12.2017 et en conséquence la méthode d’évaluation du prix (un multiple de l’EBITDA – x7) aurait abouti à un prix négatif. Ce caractère déterminant découle de la garantie consentie concernant les stocks.
Elle critique le calcul s’appliquant à la valorisation des stocks et expose ainsi:
– Sur les frais accessoires d’achat et leur prise en compte dans la valorisation des stocks des matières premières, que chaque ligne de stock a été systématiquement majorée d’un coefficient fixe de coûts d’approche et de stockage de 30% au titre de frais « accessoires » alors que certaines catégories de coûts indirects ne doivent pas être prises en compte dans le coefficient de frais accessoires d’achat, conformément aux articles 213-30 et 213-31 du PCG et que selon le Commissaire aux comptes, la prise en compte des frais accessoires comptablement admis aurait dû se limiter en l’espèce aux frais de transport (dont le taux moyen est de 3%).
– Sur les frais accessoires et la sous-activité et leur prise en compte dans la valorisation des stocks
d’encours et de produits finis, selon le Commissaire aux comptes, la sous-activité n’a pas été retraitée pour déterminer les coûts de revient et les stocks d`encours et de produits finis alors que l’article 213-18 du PCG dispose que : « la quote-part des charges correspondant à la sous-activité n’est pas incorporable au coût de production » puisqu’il s’agit de charges fixes.
Elle souligne que le taux de sous-activité a été arbitrairement affecté aux différents postes de stock et ne ressort d’aucun calcul cohérent.
Elle explique que le Commissaire aux comptes considère qu’un ajustement comptable est nécessaire par rapport à la valorisation de ces stocks prenant en compte (i) la véritable quote-part des frais accessoires pouvant être incorporée aux stocks (3% et non 30%) et (ii) le retranchement nécessaire sur ces frais accessoires de la sous-activité estimée par Vermigli elle-même à 40,5% au titre de l’exercice 2019 et qui était incluse dans les coûts de production.
– sur la dépréciation des stocks, le Commissaire aux comptes a constaté qu’aucune dépréciation sur les stocks n`était intervenue au sein des comptes sociaux de Vermigli alors même qu’aucun mouvement n’avait été réalisé depuis plusieurs exercices pour certains articles, et que des produits finis avaient été réalisés pour des commandes spécifiques qui n’ont finalement pas abouties, qu’il recommande une analyse des articles pour déterminer le taux de rotation et évaluer le risque de dépréciation de ces stocks afin de chiffrer l`enjeu de l`ajustement qui serait alors nécessaire au sein de l’exercice 2019.
Elle expose que la valeur des stocks était surévalué en moyenne de 23% supérieure à sa valeur de revente et que des corrections des comptes ont été effectuées par le commissaire aux comptes pour un montant de 593.000 euros à l’ouverture de l’exercice 2019, liée aux stocks au 31.12.2018 et que les comptes sociaux clos au 31.12.2019 affichent une charge exceptionnelle de 592.715 euros.
La société Sofico conteste tout dol exposant que:
– Forlam a mis en oeuvre un audit financier complet de Vermigli
– l’évaluation des stocks et leur méthode de valorisation comptable faisaient partie des diligences à la charge de EIGHT ADVISORY
– il serait inique d’imputer à la cédante les négligences de l’auditeur de Forlam ou de ses contrôleurs internes
– il a été répondu à toutes les questions qui leur ont été posées et il a été fourni toute la documentation exigée et la société EY n’a jamais jugé bon demander des compléments d’informations quant à la détermination de la valorisation des stocks.
– aucune critique n’a été formulée par EY concernant les méthodes d’évaluation utilisées alors que contrairement à ce que prétend Forlam l’expert avait bien pour mission de porter un jugement sur les comptes et les méthodes comptables.
Elle indique que selon la jurisprudence le dol du cédant ne peut être retenu lorsque la surévaluation de certains éléments d’actif ne traduisait pas une volonté de celui-ci de tromper le futur acquéreur, mais tenait plutôt à une méconnaissance de sa part des règles comptables soulignant que les méthodes appliquées sont conformes au PCG et ont été appliquées en toute bonne foi, que le dol ne peut pas être non plus retenu lorsque la présentation d’une comptabilité non conforme résulte d’une pratique ancienne sans lien avec la cession des droits sociaux et enfin que la reconnaissance du dol est conditionnée au respect par le cessionnaire de son obligation de s’informer.
Elle ajoute que Forlam a étudié après l’acquisition, la méthode de valorisation des stocks avec précision en janvier 2019 et n’a eu aucune objection à cette méthode pendant plus d’un an.
Elle conteste le fait que la valorisation du stock ait été déterminante du consentement de Forlam, la lettre d’intention présentant les éléments déterminants du consentement et n’incluant pas le fait que la société devait présenter de forts ratios financiers, que l’EBIDTA n’avait donc pas un caractère déterminant, qu’en tout état de cause les charges exceptionnelles n’impactent pas l’EBIDTA et que surtout la valorisation des stocks n’est pas un critère déterminant dans le processus d’achat dans la mesure où Forlam n’a pas daigné prendre connaissance de la méthode de valorisation des stocks antérieurement à l’achat.
S’agissant des critiques articulées par la société Forlam sur la méthode de calcul de la valorisation des stocks elle réplique qu’il est certes indiqué dans l’annexe des comptes annuels de chaque exercice que La valeur brute des marchandises et des approvisionnements comprend le prix d’achat et les frais accessoires. Les produits fabriqués sont valorisés au coût de production comprenant les consommations, les charges directes et indirectes de production, les amortissements des biens concourant à la production. Le coût de la sous-activité est exclu de la valorisation des stocks, alors que la sous activité a été prise en compte de manière systématique dans la valorisation des stocks, mais qu’il est faux de soutenir que le commissaire aux comptes aurait certifié que le coût de la sous-activité était exclu de la valorisation des stocks dans la mesure où la mention susvisée figure dans l’annexe aux comptes annuels dans une partie standardisée et usuelle intitulée ‘règles et méthodes comptables’ qui est un document type, qui présente d’ailleurs la méthode de dépréciation des stocks alors que la société Vermigli ne procédait à aucune dépréciation.
Elle expose que la méthode de valorisation des stocks de matières premières et des produits finis est basée sur la prise en compte des coûts d’approche/coûts indirects de production et applique la méthode des coûts standards préétablis tel que définie à l’article 213-35 du PCG (les coûts standards retiennent les niveaux normaux d’utilisation de matières premières et de fournitures, de main-d’oeuvre, d’efficience et de capacité. lls sont régulièrement réexaminés et le cas échéant, révisés à la lumière des conditions actuelles), que les coûts standards retenus en amont et fixes d’un exercice sur l’autre sont comparés aux coûts réels en fin d’exercice et que cette comparaison doit permettre de réintégrer dans la valeur des stocks les écarts entre coûts réels et coûts standards, que concernant Vermigli les coûts d’approche ont toujours été calculés de la même manière.
Elle explique la méthode pour valoriser le coût de revient des stocks de Vermigli de la manière suivante :
– Chaque poste de coût, identique d’un exercice sur l’autre, est proratisé à son niveau réel d’utilisation en vue d’amener un élément de stock « dans l’état où il est et à l’endroit où il est » (art. 213-30 du Plan Comptable Général) ;
– L’impact de la sous-activité est évalué sur l’hypothèse de machines produisant 900 panneaux en 24 heures, fonctionnant 16 heures parjour et 220 jours par an soit 250.000 panneaux par an;
cette hypothèse est fixe d’un exercice sur l’autre ; il est à noter que sur les exercices 2018 et 2017 (établis sous la responsabilité de SOFICO), le montant de cet impact est respectivement de 177.367 euros et de 178.379 euros contre 308.407 euros en 2019 suivant la même méthode de calcul ;
– Enfin la somme des coûts constatés au point 1. et la sous-activité telle qu’évaluée au point 2. forment le total des coûts d’approche, intégrés année après année au coût de revient des stocks.
Elle explique que Vermigli a ainsi calculé la valorisation de ses stocks par l’application d’un coefficient variable d’un exercice sur l’autre selon les coûts constatés, qu’ainsi le coefficient calculé a été de 1,18 au 31.12.2017, et de 1.19 au 31.12.2018, que le coefficient de 1,3 a été calculé par Forlam et mise en oeuvre pour l’exercice 2019 par elle et non par la société Sofico mais s’explique par le fait qu’un loyer commercial était désormais réglé, et par une importante sous-activité due à une baisse du chiffre d’affaires de 11,6%.
Elle indique avoir précisé à Forlam que:
– sur le coefficient de frais accessoires appliqué : ce coefficient était appliqué par Vermigli selon la méthode des coûts standards prévisionnels, laquelle permet d’inclure certains postes de coûts dans la valorisation des stocks afin d’obtenir un niveau de valorisation en adéquation avec les coûts associés à l’achat / production de tels stocks.
Ce coefficient était variable d’un exercice sur l’autre en fonction des coûts constatés, contrairement à ce qu’avance le nouveau Commissaire aux comptes de Vermigli.
– sur la sous-activité : SOFICO n’a jamais masqué l’inclusion de la sous-activité dans le coût de revient des stocks, laquelle peut être incluse conformément à la méthode des coûts standards appliquée à proportion du volume d’activité réalisé.
– sur la dépréciation des stocks SOFICO a toujours maintenu qu’une dépréciation de stocks a lieu de s’appliquer dans l’hypothèse où il existe un risque de dégradation du produit à déprécier, influant sur sa valeur actuelle mais que dans le cas des produits vendus par Vermigli ceux ci étaient uniquement fabriqués à partir de fer ou d’aluminium et qu’il n’y a donc pas lieu de procéder à des dépréciations tant ces produits sont stables d’un exercice sur l’autre, ne se dégradent pas, ne se périment pas et gardent la même valeur et s’ils se dégradaient les produits étaient directement ferraillés et vendus au poids ainsi qu’il ressort du bordereau de suivi des déchets industriels tenu par l’entreprise.
Elle produit enfin un rapport du cabinet Borel commissaire aux comptes, concluant que la surévaluation si elle est réellement intervenue, ce qui reste à démontrer, ne s’est pas produite au cours des années 2016, 2017 et 2018.
Elle conteste en conclusion les calculs opérés et l’existence d’un préjudice de 611.000 euros et indique qu’en procédant à une simple application des principes généraux de valorisation l’écart dans la valorisation des stocks ne s’élèverait qu’à 94.730 euros contre un montant de près de 611.000 euros, inférieur au seuil de franchise.
Sur ce
L’article 1130 du code civil dispose que l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
L’article 1137 du code civil dispose que le dol est le fait pour le cocontractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manoeuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par le cocontractant d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.
Le dol suppose en conséquence, de la part de son auteur, un élément matériel s’agissant d’une manoeuvre destinée à tromper le cocontractant, cette manoeuvre pouvant résulter d’une dissimulation intentionnelle et un élément intentionnel s’agissant de l’intention de tromper.
Par ailleurs les tromperies doivent avoir provoquées une erreur déterminante du consentement du cocontractant victime qui sans elles n’aurait pas contracté.
Enfin le caractère déterminant s’apprécie in concreto et à ce titre il ressort de la jurisprudence constante que le dol est écarté lorsque celui qui s’en prétend victime aurait pu ou dû se renseigner par lui même, notamment lorsqu’il s’agit d’un professionnel averti disposant de moyens d’informations lui permettant d’apprécier les risques encourus.
En l’espèce la société Forlam pour soutenir l’existence d’un dol critique uniquement le calcul de valorisation des stocks de la société Vermigli et en déduit l’existence de manoeuvres dolosives de la part de la cédante, la société Sofico, en ce que les comptes ont été arrêtés en appliquant une méthode de valorisation des stocks qui présente un caractère inexact et irrégulier connu de la cédante.
En premier la cour souligne que la valorisation des stocks n’entre pas en compte dans le calcul de l’Ebitda qui est au regard même de la lettre d’intention, un élément essentiel pour la cessionnaire pour établir la valeur de la société.
En second lieu il résulte des conclusions même de la société Forlam que la méthode de valorisation des stocks de la société Vermigli n’a pas varié pendant les années précédant la cession.
Il résulte également des éléments versés aux débats que la société Forlam a mandaté la société Ernst and Young pour procéder à un audit des comptes de la société Vermigli. Dans le cadre de cet audit l’ensemble de la documentation comptable a été communiquée par la société objet de la cession aux auditeurs. La société Forlam ne caractérise aucune dissimulation de la part de la société Sofico ou de la société Vermigli concernant les documents et les données comptables de la société.
Par ailleurs les auditeurs avaient pour mission de répondre à la question des principaux composants des stocks: nature, méthode d’évaluation et de dépréciation, délai de rotation, politique d’achat, ainsi qu’il résulte de la lettre de mission signé par Forlam. Il relevait donc de leur mission de s’interroger sur la méthode d’évaluation contrairement à ce que soutient la société Forlam, et d’interroger la cédante.
Or il résulte de l’annexe A.1 récapitulant la liste des documents demandés et des questions posées par le bénéficiaire de la garantie aux garants que seules deux questions ont été posées concernant les stocks:
– la question 40 qui a consisté à demander un détail de la rotation des stocks et pourquoi aucune dépréciation n’était constatée
– la question 55 qui a consisté à demander la valeur des stocks à rotation lente.
auxquelles il a été répondu.
Aucune autre question n’a été posée et en particulier aucune question n’a pas été posée pour connaître la méthode de calcul de la valorisation des stocks et le processus de calcul réellement mis en place.
S’agissant des frais accessoires d’achat et leur prise en compte dans la valorisation des stocks des matières premières il ne peut donc être reproché à la société Sofico aucune dissimulation intentionnelle en l’absence de question concernant l’imputation des frais accessoires d’achat et compte tenu de la mise à disposition de l’ensemble de la documentation comptable permettant à la société E&Y de vérifier les méthodes appliquées.
S’agissant de la valorisation des produits finis, la société Forlam fait valoir les mentions de l’annexe qui décrit les méthodes de comptabilisation pour soutenir qu’elle n’avait aucun moyen de savoir que le coût de la sous activité était en réalité inclus dans l’évaluation des stocks.
L’annexe des comptes 2015, 2016 et 2017 qui rappelle les règles et méthodes comptables indique, pour chaque année, en effet que les produits fabriqués sont valorisés au coût de production comprenant les consommations, les charges directes et indirectes de production, les amortissements des biens concourant à la production et que le coût de la sous-activité est exclu de la valeur des stocks, alors que la société Sofico reconnaît que le coût de la sous-activité a été inclus dans l’évaluation des stocks.
Pour autant d’une part cette différence entre l’annexe et la méthode comptable appliquée, doit être qualifié d’erreur et non de tromperie, faute pour la société Forlam de rapporter la preuve de son caractère intentionnel.
Au contraire les éléments de l’espèce démontrent qu’il s’agit d’une erreur exempte de toute volonté de la part de la cédante de tromper la cessionnaire dans la mesure où l’erreur a perduré sur plusieurs exercices et où elle concerne les mentions standardisées de l’annexe.
Mais surtout il ne peut être raisonnablement soutenu par la société Forlam qu’elle a procédé à l’acquisition d’une société pour un montant de 2,4 millions d’euros en se suffisant des comptes annuels et des mentions de l’annexe pour établir la valeur de la société, alors qu’elle a mandaté une société pour procéder à des travaux de revue financière et que dans le cadre desdits travaux une mission particulière sur les stocks a bien évidemment été incluse. Il lui appartenait, au regard du caractère déterminant selon elle de la valorisation des stocks, de s’informer et de comprendre le détail du calcul et elle ne peut aujourd’hui reprocher à la société Sofico sa propre incurie à procéder à cette vérification.
En conséquence faute d’établir l’existence de manoeuvres dolosives de la part de la cédante la société Forlam échoue à caractériser l’existence de l’élément matériel du dol, la cour soulignant à titre surabondant que l’élément intentionnel n’est pas plus caractérisé ni même le caractère déterminant de l’information litigieuse pour la prétendue victime du dol.
Il y a donc lieu de confirmer la décision de première instance en ce qu’elle a débouté la société Forlam de son action fondée sur le dol.
Sur la garantie
La société Forlam rappelle la possibilité de cumul entre le dol et la garantie d’actif et de passif.
Elle expose disposer de deux garanties: une garantie d’exactitude des déclarations et une garantie des comptes de référence et soutient que seule la garantie des comptes de référence est soumise à une limitation de l’indemnisation.
Elle expose que les déclarations consenties par le garant à propos des comptes de référence sont inexactes indiquant que le préjudice subi par Vermigli est d’un montant de 610.677 euros correspondant à la différence entre le montant de valorisation des stocks figurant dans les comptes sociaux et celui qui aurait dû figurer.
Elle expose en tout état de cause que la faute lourde commise par Mme [C] est à l’origine du caractère inexact et trompeur de plusieurs déclarations dans la Garantie ce qui constitue un motif de déplafonnement de l’indemnisation au titre de la garantie et fait valoir que Madame [C] dirigeant et seule associée avait la responsabilité d’établir des comptes sociaux réguliers de Vermigli et est responsable des erreurs dans l’établissement de ceux ci.
Elle demande donc au titre de l’inexactitude des déclarations la somme de 610.677 euros et subsidiairement, s’il était fait application d’une limitation de l’indemnisation, la somme de 440.000 euros.
La société Sofico fait valoir qu’une éventuelle réclamation relative aux actifs corporels de Vermigli notamment sur les stocks, ne pourra donner lieu à un dédommagement qu’en présence d’un décaissement entraîné par le préjudice invoqué.
Elle expose que le déplafonnement de la garantie d’actif et de passif comme le réclame la société Forlam suppose l’existence d’une faute lourde qui est caractérisée par un comportement d’une extrême gravité confinant au dol, qui n’est pas établi en l’espèce et que les parties sont convenues de convention expresse de plafonner le montant global de l’éventuel dédommagement à une somme de 440.000 euros.
Elle expose ne pas avoir manqué à son obligation de déclaration.
Elle conteste toutes les critiques de la société Forlam et son appréciation de la valorisation des stocks telle que résultant du rapport d’Ernst and Young et du nouveau commissaire aux comptes.
Sur ce
L’article 3.2.1 du contrat de garantie intitulé ‘Principe’ dispose dans son premier alinéa:
a) Le Garant s’oblige par les présentes dans le cas où l’une quelconque des Déclarations serait inexacte ou incomplète ou non respectée, à indemniser le Bénéficiaire conformément au texte de la présente Convention, à hauteur de l’intégralité du Préjudice réel et effectif subi par la Société, sous réserve des précisions prévues ci-après.
Aux termes de la convention de garantie le cédant a effectué une déclaration quant aux actifs de la Société et au paragraphe 3.1.4.7 intitulé ‘Stocks’ dans les termes suivants:
Les stocks de la Société qui figurent dans les Comptes de Référence ne font l’objet d’aucune sûreté, nantissement ou privilège d’aucune sorte consentie à un tiers.
Le volume et la valorisation des stocks et des encours de production de la Société tels que mentionnés dans les Comptes de Référence représentent fidèlement l’état des stocks et encours à la date des Comptes de Référence.
Les stocks de la Société ont subi, depuis la date des Comptes de Référence, aucune variation autre que le cours normal des Affaires. Toute détérioration, dépréciation ou perte quelconque de la valeur commerciale des stocks ou des en-cours fait l’objet dans les Comptes de Référence de provisions normalement évaluées et calculées.
La société Forlam actionne la garantie en soutenant que la déclaration selon laquelle Le volume et la valorisation des stocks et des encours de production de la Société tels que mentionnés dans les Comptes de Référence représentent fidèlement l’état des stocks et encours à la date des Comptes de Référence est inexacte.
Elle fonde sa demande en se référant à la position de son commissaire aux comptes et au rapport qu’elle a demandé à la société Ernst ans Young d’établir.
La cour souligne en premier lieu que le rapport établi par EY qui avait été mandaté par la cessionnaire dans le cadre de l’acquisition de la société Vermigli présente, du fait même de la mission initialement confiée dont la question se pose de la réalisation en l’absence de toute investigation concernant les stocks, une critique d’impartialité qui impose de l’écarter.
En second lieu la société Sofico conteste les critiques de la société Forlam de façon argumentée:
– A la critique de la société Forlam qui soutient, s’agissant des frais accessoires d’achat et leur prise en compte dans la valorisation des stocks des matières premières, que chaque ligne de stock a été systématiquement majorée d’un coefficient fixe de coûts d’approche et de stockage de 30% au titre de frais « accessoires » alors que certaines catégories de coûts indirects ne doivent pas être prises en compte dans le coefficient de frais accessoires d’achat, conformément aux articles 213-30 et 213-31 du PCG et que selon le Commissaire aux comptes, la prise en compte des frais accessoires comptablement admis aurait du se limiter en l’espèce aux frais de transport (dont le taux moyen est de 3%),
Sofico réplique que ce coefficient était appliqué par Vermigli selon la méthode des coûts standards prévisionnels, laquelle permet d’inclure certains postes de coûts dans la valorisation des stocks afin d’obtenir un niveau de valorisation en adéquation avec les coûts associés à l’achat / production de tels stocks et que ce coefficient était variable d’un exercice sur l’autre en fonction des coûts constatés, contrairement à ce qu’avance le nouveau Commissaire aux comptes de Vermigli.
– A la critique de la société Forlam qui soutient, sur les frais accessoires et la sous-activité et leur prise en compte dans la valorisation des stocks d’encours et de produits finis, d’une part que selon le Commissaire aux comptes, la sous-activité n’a pas été retraitée pour déterminer les coûts de revient et les stocks d`encours et de produits finis alors que l’article 213-18 du PCG dispose que « la quote-part des charges correspondant à la sous-activité n’est pas incorporable au coût de production » puisqu’il s’agit de charges fixes et d’autre part que le taux de sous-activité a été arbitrairement affecté aux différents postes de stock et ne ressort d’aucun calcul cohérent.
Sofico réplique qu’elle n’a jamais masqué l’inclusion de la sous-activité dans le coût de revient des stocks, laquelle peut être incluse conformément à la méthode des coûts standards appliquée à proportion du volume d’activité réalisé.
Elle détaille la méthode de calcul de la sous activité exposant que chaque poste de coût, identique d’un exercice sur l’autre, est proratisé à son niveau réel d’utilisation en vue d’amener un élément de stock « dans l’état où il est et à l’endroit où il est » (art. 213-30 du Plan Comptable Général), que l’impact de la sous-activité est évalué sur l’hypothèse de machines produisant 900 panneaux en 24 heures, fonctionnant 16 heures parjour et 220 jours par an soit 250.000 panneaux par an, que cette hypothèse est fixe d’un exercice sur l’autre, qu’enfin la somme des coûts constatés au point 1. et la sous-activité telle qu’évaluée au point 2.forment le total des coûts d’approche, intégrés année après année au coût de revient des stocks.
-A la critique de Forlam qui explique que le Commissaire aux comptes considère qu’un ajustement comptable est nécessaire par rapport à la valorisation de ces stocks prenant en compte (i) la véritable quote-part des frais accessoires pouvant être incorporée aux stocks (3% et non 30%) et (ii) le retranchement nécessaire sur ces frais accessoires de la sous-activité estimée par Vermigli elle-même à 40,5% au titre de l’exercice 2019 et qui était incluse dans les coûts de production,
Sofico réplique que Vermigli a calculé la valorisation de ses stocks par l’application d’un coefficient variable d’un exercice sur l’autre selon les coûts constatés, qu’ainsi le coefficient calculé a été de 1,18 au 31.12.2017, et de 1.19 au 31.12.2018, que le coefficient de 1,3 a été calculé par Forlam et mise en oeuvre pour l’exercice 2019 par elle et non par la société Sofico mais s’explique par le fait qu’un loyer commercial était désormais réglé, et par une importante sous-activité due à une baisse du chiffre d’affaires de 11,6%.
A la critique de Forlam qui expose, sur la dépréciation des stocks, que le Commissaire aux comptes a constaté qu’aucune dépréciation sur les stocks n`était intervenue au sein des comptes sociaux de Vermigli alors même qu’aucun mouvement n’avait été réalisé depuis plusieurs exercices pour certains articles, et que des produits finis avaient été réalisés pour des commandes spécifiques qui n’ont finalement pas abouties, et recommande une analyse des articles pour déterminer le taux de rotation et évaluer le risque de dépréciation de ces stocks afin de chiffrer l`enjeu de l`ajustement qui serait alors nécessaire au sein de l’exercice 2019,
Sofico réplique qu’elle a indiqué à Forlam lors de l’audit qu’une dépréciation de stocks a lieu de s’appliquer dans l’hypothèse où il existe un risque de dégradation du produit à déprécier, influant sur sa valeur actuelle mais que dans le cas des produits vendus par Vermigli ceux ci étaient uniquement fabriqués à partir de fer ou d’aluminium et qu’il n’y a donc pas lieu de procéder à des dépréciations tant ces produits sont stables d’un exercice sur l’autre, ne se dégradent pas, ne se périment pas et gardent la même valeur et si ils se dégradaient les produits étaient directement ferraillés et vendus au poids ainsi qu’il ressort du bordereau de suivi des déchets industriels tenu par l’entreprise.
Enfin Sofico produit en réponse un courrier du cabinet Borel commissaire aux comptes, concluant que la surévaluation si elle est réellement intervenue, ce qui reste à démontrer, ne s’est pas produite au cours des années 2016, 2017 et 2018. Ce courrier s’oppose directement aux conclusions du nouveau commissaire aux comptes désigné par la société Forlam.
Au regard des arguments sérieux avancés par la société Sofico en réponse aux critiques exprimées par la société Forlamde sur la méthode de valorisation appliquée et en l’absence d’une expertise judiciaire qui aurait permis d’établir si la méthode appliquée avant la cession était conforme au plan comptable général et si elle permettait de déterminer la réelle valeur des stocks, il n’apparaît pas justifié de faire prévaloir l’avis du commissaire aux comptes de la société Forlam désigné à ces fonctions postérieurement à la cession sur l’avis de son prédécesseur dont les fonctions se sont terminées peu après la cession.
De telle sorte que Forlam, sur laquelle repose la charge de la preuve que les déclarations de Sofico sont inexacts échoue à rapporter cette preuve.
Il convient donc de confirmer la décision de première instance.
Sur la demande reconventionnelle de paiement de la somme de 2700 euros
La société Sofico demande la condamnation de Forlam à lui verser la somme de 2700 euros montant de la subvention accordée à une association sportive cycliste qu’elle s’était engagée aux termes du protocole d’acquisition à maintenir pendant trois ans et qu’elle a cessé de verser en 2020, qu’elle s’est substituée à la société Forlam dans cette obligation.
Forlam ne réplique pas.
Sur ce
L’article 7 du protocole de cession stipule que la société et l’acquéreur s’engagent à maintenir pendant un délai de trois années minimum à compter de la signature des présentes l’aide financière accordée par la société à l’association ‘La Roue d’Or de Brignoles’ à concurrence d’un montant annuel de 2700 euros.
Il ressort des pièces versées aux débats par la société Sofico s’agissant:
– de la facture de DiffuSport du 2.04.2021
– de l’email adressé le 12.05.2021 par Monsieur [P], directeur de Vermigli, à Monsieur [N] représentant de l’association Roue d’Or Brignoles aux termes duquel il indique que la subvention 2020 a été réglée fin 2019, qu’il refuse de régler la facture de Diffusport du 2.04.2021, et qu’il ne renouvelle pas le partenariat
– de l’email adressé par Monsieur [C] à Monsieur [Y] demandant à ce dernier de régler la facture
– des pièces 24, et 25 démontrant que la facture a été établie au nom de la société Sofico et réglée par elle,
que la preuve est rapportée qu’ compter de 2021 la subvention prévue à l’article 7 du protocole de cession a été versée par la société Sofico.
Or aux termes du protocole de cession la subvention à l’association la Roue d’Or de Brignoles devait se poursuivre pendant 3 années soit en 2020, 2021 et 2022.
La subvention a été versée en 2020.
Les pièces produites démontrent que la société Vermigli a refusé de la verser en 2021 et la société Forlam ne rapporte pas la preuve contraire.
Il convient en conséquence de condamner la société Forlam à payer à la société Sofico la somme de 2700 euros en remboursement de la subvention à l’association La Roue d’Or de Brignoles.
Sur les autres demandes
Il est inéquitable de laisser la société Sofico supporter les frais irrépétibles engagés et il y a lieu de lui allouer la somme de 30.000 euros à ce titre.
Les dépens sont laissés à la charge de la société Forlam mais il ne convient pas de prévoir à ce stade de la procédure qu’ils intégreront les frais déboursés en cas d’exécution forcée de la présente décision.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 8.04.2022 sauf en ce qu’il a débouté la société Sofico de sa demande de condamnation de la société Forlam à lui verser la somme de 2700 euros,
Et statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Forlam à payer à la société Sofico la somme de 2700 euros à titre de dommages et intérêts faute pour la société Forlam d’avoir respecté l’article 8 du protocole de cession,
Condamne la société Forlam à payer à la société Sofico la somme de 30.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Forlam aux dépens mais dit prématurée la demande de condamnation de la société Forlam d’avoir à assumer le coût des émoluments d’huissiers dans le cadre de l’éventuelle exécution forcée de la présente décision et en déboute la société Sofico.
Le Greffier La Présidente