Responsabilité d’un prestataire de services dans un cadre ludique : enjeux de sécurité et preuve du préjudice

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Responsabilité d’un prestataire de services dans un cadre ludique : enjeux de sécurité et preuve du préjudice

L’Essentiel : Le 2 février 2020, une victime a chuté lors d’une activité d’escape game organisée par une entreprise, entraînant des blessures graves. Suite à cet incident, la victime a assigné l’organisateur de l’escape game et la CPAM de la Gironde pour obtenir une expertise médicale et une provision. Le tribunal a ordonné une expertise et a condamné l’organisateur à verser une provision. Par la suite, la victime a également assigné l’entreprise organisatrice pour inclure cette dernière dans les opérations d’expertise. En défense, l’organisateur et son assureur ont contesté les faits, tandis que la CPAM a soutenu la responsabilité de l’organisateur. Le tribunal a finalement débouté la victime.

Résumé des faits de l’affaire

Le 2 février 2020, une victime a chuté lors d’une activité d’escape game organisée par une entreprise, la SAS MELANIES, dans une salle non éclairée. Cette chute a entraîné des blessures graves, notamment une fracture et une entorse de la cheville. La victime a déclaré l’accident à son assureur peu après l’incident.

Procédures judiciaires engagées

Suite à l’accident, la victime a assigné la SAS CLOSED ESCAPE GAME et la CPAM de la Gironde devant le tribunal pour obtenir une expertise médicale et le paiement d’une provision. Le juge a ordonné une expertise et a condamné la SAS CLOSED ESCAPE GAME à verser une provision à la victime. Par la suite, la victime a également assigné la SAS MELANIES pour inclure cette entreprise dans les opérations d’expertise et demander une nouvelle provision.

Expertise et rapports

L’expert a déposé son rapport en juillet 2022, et en mars 2023, la victime a assigné la SAS MELANIES, la compagnie d’assurance THELEM ASSURANCES et la CPAM de la Gironde pour établir la responsabilité de la SAS MELANIES dans l’accident et obtenir réparation pour son préjudice.

Demandes de la victime

La victime a demandé au tribunal de déclarer la SAS MELANIES responsable de son préjudice, tant sur le fondement de la responsabilité contractuelle que délictuelle. Elle a également réclamé une indemnisation détaillée pour divers préjudices, ainsi que des intérêts et des frais de justice.

Défense de la SAS MELANIES et de l’assureur

En défense, la SAS MELANIES et la compagnie d’assurance ont contesté la matérialité des faits et ont soutenu que la victime n’avait pas prouvé l’existence d’un manquement de leur part. Ils ont également demandé le rejet des demandes de la victime et la condamnation de celle-ci à des frais de justice.

Position de la CPAM de la Gironde

La CPAM de la Gironde a également soutenu sa demande de reconnaissance de la responsabilité de la SAS MELANIES pour les préjudices subis par la victime, en demandant le remboursement des prestations versées.

Décision du tribunal

Le tribunal a finalement débouté la victime et la CPAM de leurs demandes, considérant que la victime n’avait pas apporté la preuve suffisante d’un manquement de la SAS MELANIES à ses obligations. La décision a également condamné la victime aux dépens, sans application de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la responsabilité contractuelle de la SAS MELANIES dans l’accident survenu à la victime ?

La victime soutient que l’accident est survenu dans le cadre de l’exécution d’un contrat de prestation de service conclu avec la SAS MELANIES, engageant ainsi la responsabilité contractuelle de cette dernière.

Selon l’article 1231-1 du Code civil, « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard apporté dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ».

Il appartient à la victime d’apporter la preuve d’un manquement de son co-contractant à ses obligations en lien avec le dommage allégué.

En l’espèce, la victime a produit des justificatifs d’achat de la réservation pour l’escape game, établissant ainsi l’existence d’un contrat. Cependant, elle n’a pas réussi à prouver que la chute s’est produite dans des conditions de sécurité défaillantes.

Les éléments médicaux attestent de la chute, mais les circonstances précises de celle-ci ne sont pas suffisamment établies. La seule attestation produite est celle du mari de la victime, dont les liens de proximité ne permettent pas de considérer ce témoignage comme probant.

Ainsi, la responsabilité contractuelle de la SAS MELANIES ne peut être retenue, car la victime n’a pas apporté la preuve d’un manquement à ses obligations de sécurité.

La SAS MELANIES peut-elle être tenue responsable sur le fondement de la responsabilité délictuelle ?

La victime et la CPAM de la Gironde soutiennent que la SAS MELANIES a engagé sa responsabilité délictuelle du fait des choses, en raison d’un escalier dépourvu d’éclairage, ce qui serait anormal au sens de l’article 1242 du Code civil.

Cependant, il est important de rappeler que le dommage est survenu dans le cadre d’un contrat de prestation de service. Par conséquent, la victime ne peut engager que la responsabilité contractuelle de son prestataire.

L’article 1242 du Code civil stipule que « on est responsable non seulement du dommage causé par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, et des choses que l’on a sous sa garde ».

En l’espèce, la victime n’a pas produit d’éléments suffisants pour établir que l’escalier était anormal ou que la SAS MELANIES avait manqué à ses obligations. L’état de l’escalier au moment de la chute reste inconnu, et l’attestation du mari de la victime est insuffisante pour établir son anormalité.

Ainsi, la responsabilité délictuelle de la SAS MELANIES ne peut pas être retenue, et la victime ainsi que la CPAM de la Gironde seront déboutées de l’intégralité de leurs demandes.

Quelles sont les conséquences de la décision sur les demandes d’indemnisation ?

La décision du tribunal a pour conséquence de débouter la victime et la CPAM de la Gironde de l’intégralité de leurs demandes d’indemnisation.

En effet, la victime a sollicité des réparations pour divers préjudices, mais n’a pas réussi à prouver la responsabilité de la SAS MELANIES dans l’accident.

Les frais de justice, y compris ceux liés à l’article 700 du Code de procédure civile, ne seront pas accordés à la victime, qui a succombé dans la procédure.

L’article 700 du Code de procédure civile stipule que « le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ».

Dans ce cas, le tribunal a décidé de ne pas faire application de cet article, laissant ainsi chaque partie à ses propres frais.

En conséquence, la victime devra également supporter les dépens de la procédure, ce qui souligne l’importance de la preuve dans les actions en responsabilité.

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 03 Février 2025
58G

RG n° N° RG 23/02838 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XT7K

Minute n°

AFFAIRE :

[R] [P]
C/
S.A.S. MELANIES
Compagnie d’assurance THELEM ASSURANCES
CPAM DE LA GIRONDE

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE
Me Elsa GREBAUT COLLOMBET
la SELAS JULIEN PLOUTON

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposiiton.

DÉBATS :

à l’audience publique du 02 Décembre 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
en premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDERESSE

Madame [R] [P]
née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 10] (ITALIE)
de nationalité Italienne
[Adresse 5]
[Localité 2]

représentée par Maître Julien PLOUTON de la SELAS JULIEN PLOUTON, avocats au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSES

S.A.S. MELANIES prise en la personne de son représentant légal demeuranrt es qualités audit siège
[Adresse 4]
[Localité 6]

représentée par Me Elsa GREBAUT COLLOMBET, avocat au barreau de BORDEAUX

THELEM ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal demeuranrt es qualités audit siège
[Adresse 7]
[Localité 3]

représentée par Me Elsa GREBAUT COLLOMBET, avocat au barreau de BORDEAUX

CPAM DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal demeuranrt es qualités audit siège
[Adresse 9]
[Localité 6]

représentée par Maître Bénédicte DE BOUSSAC DI PACE de la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE, avocats au barreau de BORDEAUX

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 2 février 2020, Mme [R] [P] a chuté alors qu’elle participait avec son mari à un escape game “Closed Escape” parcours AMY exploité par la SAS MELANIES à [Localité 6], [Adresse 4]. Selon elle, alors qu’elle pénétrait dans une salle totalement dépourvue d’éclairage, elle faisait une chute dans un escalier se trouvant immédiatement à l’entrée de cette salle et dont la présence n’était pas signalée. Elle présentait dans les suites de cette chute une fracture de la 5ème tête du métatarsien et une entorse grave de la cheville gauche avec avulsion de la malléole externe.

Elle déclarait le sinistre à son assureur la compagnie APRIL le 14 février 2020.

Par acte des 13 et 20 mai 2020, elle assignait la SAS CLOSED ESCAPE GAME et la CPAM de la gironde devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux afin d’obtenir la désignation d’un expert médical et le paiement d’une provision.

Par ordonnance du 5 octobre 2020, le juge des référés ordonnait une expertise médicale confiée au docteur [D] [S] et condamnait la SAS CLOSED ESCAPE GAME à payer à Mme [R] [P] une provision d’un montant de 5.000 € outre une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte d’huissier délivré le 26 avril 2021, Mme [R] [P] faisait assigner la SAS MELANIES devant le juge des référés pour voir déclarer commune à cette entreprise les opérations d’expertise et obtenir le versement d’une provision de 5.000 €. Par ordonnance du 11 octobre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux déclarait opposable à la SAS MELANIES les opérations d’expertise confiées au docteur [D] [S] et déboutait Mme [R] [P] de sa demande de provision.

L’expert a déposé son rapport d’expertise le 6 juillet 2022.

Par acte d’huissier délivré les 16 et 17 mars 2023, Mme [R] [P] a fait assigner la SAS MELANIES, la compagnie THELEM ASSURANCES et la CPAM de la Gironde pour voir reconnaître la responsabilité de la SAS MELANIES dans l’accident et obtenir la liquidation de son préjudice.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 8 janvier 2024, Mme [R] [P] demande au tribunal de :
A titre principal :
– déclarer la société SAS MELANIES entièrement responsable du préjudice subi par Madame [R] [P] au titre de son obligation contractuelle de sécurité.
A titre subsidiaire :
– déclarer la société SAS MELANIES entièrement responsable du préjudice subi par Madame [R] [P] au titre de la responsabilité du fait des choses.
En tout état de cause :
– débouter la SAS MELANIES et sa compagnie d’assurance THELEM ASSURANCES de ses demandes

– condamner solidairement la société SAS MELANIES et sa compagnie d’assurance THELEM ASSURANCES à verser à Madame [R] [P] la somme de 46 943,06 euros en réparation de son préjudice décomposés comme suit :
* Déficit fonctionnel temporaire partiel : 1 571,40 €
* Déficit fonctionnel permanent : 1 580,00 €
* Souffrance endurée : 4 000,00 €
* Pertes de gains professionnels : 35 871,10 €
* Dépenses de santé : 300,00 €
* Aide tierce personne : 3 178,00 €
* Frais divers : 442,56 €
– condamner solidairement la société SAS MELANIES et sa compagnie d’assurance THELEM ASSURANCES à payer à Madame [R] [P] sur la somme de 46 943,06 euros les intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation avec capitalisation, en application de l’article 1343-2 du Code civil.
– fixer la créance de la CPAM de la Gironde à hauteur de sa créance définitive
– déclarer le jugement à intervenir commun et opposable à la CPAM de la Gironde.
– condamner solidairement la société SAS MELANIES et sa compagnie d’assurance THELEM ASSURANCES à verser à Madame [R] [P] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

En défense, dans leurs conclusions n°2 notifiées par voie électronique le 16 avril 2024, la SAS MELANIES et la compagnie THELEM ASSURANCES demandent au tribunal de :
Vu l’article 9 du Code de procédure civile,
A titre principal,
– Constater que Madame [P] ne démontre pas la matérialité des faits à l’origine de son prétendu préjudice
– Constater que Madame [P] n’a pas entrepris la moindre démarche amiable auprès de la société MELANIES
– Constater l’absence d’anormalité de la marche
– Débouter Madame [P] ainsi que la CPAM DE LA GIRONDE de l’ensemble de leurs demandes formulées tant sur le fondement de la responsabilité contractuelle que sur le fondement de la responsabilité du fait des choses
A titre subsidiaire,
– Rejeter la demande formulée au titre de l’assistance par une tierce personne
– Réduire le droit à indemnisation de Madame [P] à hauteur de 50 % compte tenu de l’état pathologique antérieur
En tout état de cause ,
– Ecarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir
– Condamner Madame [P] à verser à la compagnie THELEM et à la société MELANIES une indemnité de 2000 € chacune sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile
– Laisser les dépens à la charge de Madame [P]

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 8 janvier 2024, la CPAM de la Gironde demande au tribunal de :
– déclarer la CPAM DE LA GIRONDE recevable et bien fondée en ses écritures, demandes, fins et prétentions ;

EN CONSEQUENCE,
– déclarer la SAS MELANIES responsable de l’accident dont a été victime Madame [R] [P] le 2 février 2020 et des préjudices qui en ont résulté pour la CPAM DE LA GIRONDE;
– déclarer que le préjudice de la CPAM DE LA GIRONDE est constitué par les sommes exposées dans l’intérêt de son assurée sociale, Madame [R] [P], à hauteur de la somme de 1.347,10 € ;
– Condamner in solidum la SAS MELANIES et THELEM ASSURANCES à verser à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 1.347,10 € en remboursement des prestations versées pour le compte de son assurée sociale ;
– condamner in solidum la SAS MELANIES et THELEM ASSURANCES à verser à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 449 € au titre de l’indemnité forfaitaire en application des dispositions des articles 9 et 10 de l’Ordonnance n°96-51 du 24 janvier 1996 ;
-déclarer que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal ;
– faire application des dispositions de l’article 1343-2 du Code Civil ;
– condamner in solidum la SAS MELANIES et THELEM ASSURANCES à verser à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre les entiers dépens ;
– dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit.

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 septembre 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 2 décembre 2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité

Mme [R] [P] et la CPAM de la Gironde fondent leur action à titre principal sur les dispositions des articles 1231-1 du code civil et la responsabilité contractuelle de la SAS MELANIES et à titre subsidiaire sur sa responsabilité délictuelle du fait des choses.

– Sur la responsabilité contractuelle de la SAS MELANIES

Mme [R] [P] soutient que l’accident est survenu dans le cadre de l’exécution du contrat de prestation de service conclu avec la SAS MELANIES et que celle-ci a engagé sa responsabilité contractuelle. Elle considère que celle-ci est débitrice à son égard d’une obligation de sécurité et qu’elle devait observer des règles de prudence et de surveillance tenant compte de la spécificité de son activité. Elle soutient qu’elle a chuté dans un escalier se trouvant dans une pièce dans laquelle aucun éclairage n’était installé et que la pièce se trouvait dans l’obscurité la plus totale. Elle considère dès lors que la SAS MELANIES, qui n’a pris aucune précaution pour éviter les chutes des clients et les avertir du danger a failli à ses obligations et doit être déclarée entièrement responsable de ses préjudices.

La CPAM de la Gironde développe à titre principal les mêmes observations.

Les défendeurs contestent toute responsabilité dans cet accident et font valoir que Mme [R] [P] procède par affirmation et ne rapporte aucun élément de nature à démontrer la réalité des faits prétendument à l’origine de son préjudice. Ils considèrent que les pièces produites n’ont aucune valeur probante quant à la démonstration d’une chute survenue le 2 février 2020. Ils rappellent que si l’intérêt de l’escape game est de plonger le joueur dans une ambiance angoissante se traduisant notamment par des espaces faiblement éclairés, aucun escalier ne se situe dans l’obscurité absolue, les marches étant signalées par des leds. Ils considèrent dès lors que Mme [R] [P] ne rapporte pas la preuve d’un défaut d’éclairage fautif à l’endroit où elle a prétendument chuté.

Il convient de constater que Mme [R] [P] a produit les justificatifs d’achat de la réservation effectuée pour deux personnes pour une séance d’escape game le 2 février 2020. Elle a donc conclu un contrat de prestation de service avec la SAS MELANIES qui est tenue à son égard d’une obligation de sécurité.

Selon l’article 1231-1 du code civil relatif à la responsabilité contractuelle, “le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard apporté dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure”.

Il est constant qu’en application de ces dispositions, il appartient à la victime d’apporter la preuve d’un manquement de son co-contractant à ses obligations en lien avec le dommage allégué.

En l’espèce, Mme [R] [P] fait état d’une chute dans un escalier non éclairé d’une salle de l’escape game exploité par la SAS MELANIE. Si l’existence d’une chute ne peut être sérieusement contestée au regard des éléments médicaux produits et notamment du certificat rédigé le 3 février 2020 par le service des urgences de l’hôpital [8], les circonstances de cette chute ne sont pas suffisamment établies. En effet, Mme [R] [P] n’a produit pour justifier de l’existence de son dommage qu’une attestation rédigée par son mari, M. [C] [E], qui participait avec elle à cet escape game. Or, les liens de proximité entre la victime et ce seul témoin ne permettent pas de retenir ce seul élément comme preuve du manquement de la SAS MELANIES. Il n’est produit aucun autre élément tendant à établir que la chute s’est effectivement produite dans un escalier se trouvant dans une des salle de l’escape game, que la pièce dans lequel se trouvait l’escalier était totalement noire et sans aucun éclairage, que l’escalier n’était pas à cette date pourvu des leds qui sont présents sur les photographies produites en défense et qu’aucun avertissement n’avait été prodigué par les responsables du site. Mme [R] [P] n’a produit ni attestation ni constat établis par un tiers et elle n’a présenté aucune réclamation à l’exploitant de la salle avant l’engagement d’une procédure judiciaire.

Il convient en outre de relever que tant la présentation de l’escape game que les commentaires du site Tripadvisor ou la page “facebook” du site ne laissent aucun doute sur les conditions dans lesquelles cet escape game, destiné à plonger le joueur dans une ambiance angoissante de style “maison hantée”, est susceptible de se dérouler. Le seul fait que les exploitants de la salle ou ces commentaires mentionnent que le joueur peut se retrouver dans le noir ne suffit pas à établir que l’escalier litigieux était plongé dans un noir total et qu’il a entraîné la chute de Mme [R] [P].

Mme [R] [P] ne rapporte donc pas la preuve qui lui incombe du manquement de la SAS MELANIES à ses obligations et la responsabilité contractuelle de cette dernière ne peut être retenue.

– Sur la responsabilité délictuelle de la SAS MELANIES

Mme [R] [P] et la CPAM de la Gironde soutiennent à titre subsidiaire que la SAS MELANIES a engagé sa responsabilité délictuelle du fait des choses, l’accident s’étant produit en raison d’un escalier dépourvu d’éclairage et donc anormal au sens des dispositions de l’article 1242 du code civil.

Il convient de rappeler que le dommage est survenu dans le cadre de l’exécution d’un contrat de prestation de service conclu entre Mme [R] [P] et la SAS MELANIES, de telle sorte que Mme [R] [P] ne peut engager que la responsabilité contractuelle de son prestataire. En tout état de cause, il n’est pas plus produit d’éléments tendant à établir que l’escalier était anormal au sens des dispositions de l’article 1242 du code civil qu’il n’en est produit pour établir le manquement de la SAS MELANIES à ses obligations. L’état de l’escalier au moment de la chute reste inconnu, la seule attestation du mari de la victime étant insuffisante à établir son anormalité.

Mme [R] [P] et la CPAM de la Gironde seront en conséquence déboutées de l’intégralité de leurs demandes.

Sur les autres demandes

Succombant à la procédure, Mme [R] [P] sera condamnée aux dépens.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais non compris dans les dépens. Elles seront déboutées de leur demandes forméers au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’est fait valoir aucun élément de nature à écarter l’exécution provisoire de droit du présent jugement.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Déboute Mme [R] [P] et la CPAM de la Gironde de l’intégralité de leurs demandes

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [R] [P] aux dépens ;

Rejette la demande tendant à voir écarter l’exécution provisoire.

Ainsi fait et jugé les an, mois et jour susdits.
Le jugement a été signé par Louise LAGOUTTE, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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