Saisies:attribution et contestation des créances : Questions / Réponses juridiques

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Saisies:attribution et contestation des créances : Questions / Réponses juridiques

En vertu d’un jugement du Tribunal Judiciaire de Toulouse en date du 26 août 2022, des créanciers, à savoir un vendeur et une victime, ont procédé à deux saisies-attribution sur les comptes d’un débiteur et de son épouse, pour un montant total de 39.239,76€. Les débiteurs ont contesté cette saisie, arguant que le titre exécutoire ne leur avait jamais été signifié. Les créanciers ont répliqué en affirmant que les débiteurs n’avaient jamais effectué de paiement. Le tribunal a confirmé la validité du titre exécutoire et a rejeté la demande de cantonnement de la saisie, validant ainsi les saisies-attribution.. Consulter la source documentaire.

Sur la validité du titre exécutoire et les diligences du commissaire de justice

En vertu de l’article 654 al 1er du code de procédure civile, il est stipulé :

“Si la signification à personne s’avère impossible, l’acte peut être délivré soit à domicile, soit à défaut de domicile connu, à résidence.

L’huissier de justice doit relater dans l’acte les diligences qu’il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l’impossibilité d’une telle signification”.

De plus, l’article 656 al 1 du même code précise que :

“Si personne ne peut recevoir la copie de l’acte et s’il résulte des vérifications faites par l’huissier de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, la signification est faite à domicile”.

Il est donc essentiel que les diligences du commissaire de justice soient documentées de manière précise.

Dans le cas présent, les débiteurs contestent avoir reçu la signification du jugement du 26 août 2022. Ils soutiennent que leurs contradicteurs ont reconnu n’avoir reçu la grosse du jugement qu’en juin 2024, alors que la signification est réputée avoir eu lieu le 7 septembre 2022.

Cependant, il est important de noter que la signification d’une décision de justice ne nécessite pas que le commissaire de justice soit en possession de la grosse de cette décision, une simple copie étant suffisante.

Les arguments des débiteurs concernant l’absence de signification ne sauraient prospérer, car l’authenticité des actes diligentés par le commissaire de justice est présumée jusqu’à preuve du contraire.

Ainsi, la validité et l’opposabilité du titre exécutoire à ces débiteurs ne seront pas remises en cause.

Sur le montant de la créance

Il est établi que les débiteurs ont été condamnés au paiement des sommes suivantes par le jugement du 26 août 2022 :

– 18.967,85€ au principal
– 1.500€ en réparation du préjudice moral
– 4.400€ en application de l’article 700 du code de procédure civile
– aux entiers dépens.

L’article 695 du code de procédure civile énonce que :

“Les dépens afférents aux instances, actes et procédures d’exécution comprennent :

1° Les droits, taxes, redevances ou émoluments perçus par les greffes des juridictions ou l’administration des impôts à l’exception des droits, taxes et pénalités éventuellement dus sur les actes et titres produits à l’appui des prétentions des parties ;

2° Les frais de traduction des actes lorsque celle-ci est rendue nécessaire par la loi ou par un engagement international ;

3° Les indemnités des témoins ;

4° La rémunération des techniciens ;

5° Les débours tarifés ;

6° Les émoluments des officiers publics ou ministériels ;

7° La rémunération des avocats dans la mesure où elle est réglementée y compris les droits de plaidoirie ;

8° Les frais occasionnés par la notification d’un acte à l’étranger ;

9° Les frais d’interprétariat et de traduction rendus nécessaires par les mesures d’instruction effectuées à l’étranger à la demande des juridictions dans le cadre du règlement (UE) 2020/1783 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relatif à la coopération entre les juridictions des Etats membres dans le domaine de l’obtention des preuves en matière civile et commerciale (obtention des preuves) (refonte) ;

10° Les enquêtes sociales ordonnées en application des articles 1072, 1171 et 1221 ;

11° La rémunération de la personne désignée par le juge pour entendre le mineur, en application de l’article 388-1 du code civil ;

12° Les rémunérations et frais afférents aux mesures, enquêtes et examens requis en application des dispositions de l’article 1210-8”.

Les débiteurs contestent devoir la somme de 715,54€, qui correspond au coût total des assignations délivrées en référé et au fond, ainsi que les actes de signification.

Cependant, ces sommes relèvent des frais et débours tarifés, fixés par décret, et sont donc dues par les débiteurs.

Concernant la somme de 7.338,18€ mentionnée dans le décompte du commissaire de justice, il s’agit des frais d’expertise, qui sont également dus par les débiteurs, car ils ont succombé à l’instance au fond et ont été condamnés aux entiers dépens.

Les moyens soulevés par les débiteurs seront donc rejetés.

Sur les saisies-attribution

Les débiteurs évoquent des “saisies conservatoires”, régies par l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution, qui stipule :

“Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement.

La mesure conservatoire prend la forme d’une saisie conservatoire ou d’une sûreté judiciaire”.

Cependant, il est clair que la contestation des débiteurs porte sur des saisies-attribution et non sur des saisies conservatoires.

L’article 12 du code de procédure civile précise que :

“Le juge (…) doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée”.

Ainsi, il sera statué sur les demandes concernant les saisies-attribution.

Conformément aux articles L. 211-1 et R. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire peut saisir les créances de son débiteur.

Dans cette affaire, les saisies-attribution mises en œuvre apparaissent régulières, d’autant plus que les débiteurs ont acquiescé à ces mesures par acte du 19 août 2024.

Sur la demande de cantonnement de la saisie

L’article L211-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose :

“L’acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires.

Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation.

La notification ultérieure d’autres saisies ou de toute autre mesure de prélèvement, même émanant de créanciers privilégiés, ainsi que la survenance d’un jugement portant ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ne remettent pas en cause cette attribution”.

Étant donné l’effet attributif des actes de saisie, et puisque ni le montant de la créance du saisissant ni la dette du tiers saisi ne sont sérieusement contestables, les saisies-attribution seront validées.

La banque, en tant que tiers saisi, devra payer les sommes déjà saisies au profit des créanciers.

Sur la demande d’exemption des intérêts de retard

L’article L313-3 du code monétaire et financier stipule :

“En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l’intérêt légal est majoré de cinq points à l’expiration d’un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision.

Cet effet est attaché de plein droit au jugement d’adjudication sur saisie immobilière, quatre mois après son prononcé.

Toutefois, le juge de l’exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant”.

Dans cette affaire, les débiteurs ayant succombé dans leurs demandes et n’ayant pas justifié de leur situation financière, la demande d’exemption sera rejetée.

Sur le montant de la créance de Monsieur [Y]

Le jugement du 26 août 2022 a condamné les débiteurs in solidum avec un autre débiteur, mais à concurrence de 10% des sommes dues pour ce dernier.

Les créanciers ont poursuivi séparément ce débiteur, ce qui a permis d’apurer la créance.

Le bénéfice de la solidarité n’ayant pas été exercé, il est établi que ce débiteur n’est plus redevable d’aucune somme.

Le décompte des sommes dues par les débiteurs a été régulièrement ajusté, et le moyen soulevé sera rejeté.

Sur les demandes de dommages intérêts

L’article L213-6 du Code de l’organisation judiciaire dispose :

“Le Juge de l’exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageable des mesures d’exécution forcées ou des mesures conservatoires”.

De plus, l’article L121-3 du code des procédures civiles d’exécution précise que :

“Le Juge de l’exécution a le pouvoir de condamner le débiteur à des dommages intérêts en cas de résistance abusive”.

Les débiteurs étant déboutés de l’ensemble de leurs prétentions, toute demande sur ce fondement sera rejetée.

Sur les demandes annexes

Au regard de la nature de l’affaire, de son contexte et de la durée du contentieux, il convient de condamner solidairement les débiteurs à la somme de :

– 3.000€ au bénéfice des créanciers en application de l’article 700 du code de procédure civile
– 2.000€ au bénéfice de l’autre débiteur en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu’aux entiers dépens, y compris les frais de commissaire de justice.

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire rendu en premier ressort, déclare les débiteurs irrecevables en toutes leurs demandes concernant une quelconque saisie conservatoire, les déboute de l’ensemble de leurs demandes concernant les saisies-attribution, valide les saisies-attribution pratiquées, et rejette toutes les demandes complémentaires.

Le jugement est exécutoire de plein droit, le délai d’appel et l’appel n’ayant pas d’effet suspensif.


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