L’Essentiel : Le 25 février 2010, une société anonyme spécialisée dans le crédit a accordé un prêt de 19 800 euros à un emprunteur pour financer l’acquisition d’une installation photovoltaïque. Le 1er décembre 2022, suite à une assignation de la société héritière, le juge a prononcé la résiliation du contrat de crédit et a condamné l’emprunteur à rembourser 6 929,53 euros, sans intérêts conventionnels. En appel, la cour a confirmé la résiliation, mais a demandé la production d’un bordereau de rétractation pour statuer sur la déchéance des intérêts. Faute de ce document, la déchéance a été prononcée.
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Contexte de l’affaireLe 25 février 2010, une société anonyme (SA) spécialisée dans le crédit, ayant pour nom groupe Sofemo, a accordé un prêt d’un montant de 19 800 euros à un emprunteur, destiné à financer l’acquisition d’une installation photovoltaïque. Ce crédit devait être remboursé en 180 mensualités avec un taux d’intérêt de 4,99 %. Décision du tribunal de première instanceLe 1er décembre 2022, suite à une assignation de la SA Cofidis, héritière des droits de la SA groupe Sofemo, le juge des contentieux de la protection a prononcé la résiliation du contrat de crédit. Il a également déclaré la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et a condamné l’emprunteur à rembourser la somme de 6 929,53 euros, en plus des intérêts légaux à partir de la signification du jugement. La demande de capitalisation des intérêts et d’autres demandes de la SA Cofidis ont été rejetées. Analyse des clauses contractuellesLe juge a constaté que le contrat de prêt contenait une clause résolutoire, mais qu’il n’y avait pas de clause précisant que le prêteur pouvait se passer d’une mise en demeure avant de prononcer la déchéance du crédit. En l’absence de preuve de réception de cette mise en demeure, la clause résolutoire n’a pas été jugée applicable. Cependant, les incidents de paiement non régularisés depuis janvier 2021 ont été considérés comme une inexécution grave du contrat, justifiant ainsi la résiliation. Appel de la SA CofidisLa SA Cofidis a interjeté appel de cette décision le 18 janvier 2023, demandant l’infirmation du jugement et la condamnation de l’emprunteur à verser une somme plus élevée, avec des intérêts au taux contractuel. En cas de non-acquisition de la déchéance, la SA Cofidis a également demandé la résolution judiciaire du contrat en raison des manquements de l’emprunteur. Décision de la cour d’appelLe 18 septembre 2024, la cour d’appel a confirmé la résiliation du contrat de crédit, mais a demandé à la SA Cofidis de produire le bordereau de rétractation pour statuer sur la déchéance des intérêts. L’affaire a été mise en délibéré pour une décision ultérieure. La SA Cofidis n’ayant pas fourni ce document, la cour a prononcé la déchéance du droit aux intérêts. Conclusion et répartition des dépensLa cour a confirmé le jugement initial concernant le montant dû par l’emprunteur, qui s’élevait à 6 929,53 euros, et a statué que ce montant porterait intérêt au taux légal à partir de l’assignation. La demande de la SA Cofidis sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée, et chaque partie a été condamnée à supporter ses propres dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de la clause résolutoire dans le contrat de crédit ?La clause résolutoire est une disposition contractuelle qui permet à une partie de mettre fin au contrat en cas d’inexécution par l’autre partie. Dans cette affaire, le juge des contentieux de la protection a constaté que le contrat de prêt contenait une clause résolutoire, mais qu’il ne mentionnait aucune clause expresse et non équivoque dispensant le prêteur d’adresser à l’emprunteur une mise en demeure préalable avant de prononcer la déchéance du terme du crédit. Ainsi, en l’absence de production du justificatif de réception de la mise en demeure, le juge a considéré que la clause résolutoire ne pouvait être considérée comme acquise. Cela souligne l’importance de respecter les formalités prévues dans le contrat pour que la clause résolutoire puisse être appliquée. Quelles sont les conséquences de l’irrégularité de l’offre de crédit sur le droit aux intérêts ?L’irrégularité de l’offre de crédit peut avoir des conséquences significatives sur le droit aux intérêts. Dans cette affaire, le juge a sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts l’irrégularité de l’offre de crédit, caractérisée par une discordance entre les échéances prévues au contrat et celles prélevées, ainsi qu’une variation du montant des échéances prélevées. Cette situation a faussé l’information du consommateur, ce qui est contraire aux dispositions du code de la consommation. En vertu des articles L311-15 et R311-7 du code de la consommation, le prêteur doit fournir un bordereau de rétractation. L’absence de ce formulaire a conduit à la déchéance du droit aux intérêts, ce qui a été confirmé par la cour. Comment la cour a-t-elle statué sur la demande de capitalisation des intérêts ?La demande de capitalisation des intérêts a été déboutée par le juge des contentieux de la protection, et cette décision a été confirmée par la cour. La cour a observé qu’il n’était formulé aucune critique à l’égard des dispositions du jugement relatives à la capitalisation des intérêts. Cela signifie que la cour a considéré que la capitalisation des intérêts n’était pas justifiée dans ce cas, ce qui est en accord avec les principes de droit civil. La capitalisation des intérêts est généralement soumise à des conditions strictes, et son application doit être clairement stipulée dans le contrat. Quelles sont les implications de la déchéance du droit aux intérêts pour l’emprunteur ?La déchéance du droit aux intérêts a des implications financières importantes pour l’emprunteur. Dans cette affaire, la cour a confirmé que la somme due par l’emprunteur, soit 6 929,53 euros, porterait intérêt au taux légal non majoré à compter de l’assignation délivrée. Cela signifie que l’emprunteur ne devra pas payer d’intérêts supplémentaires au taux contractuel, ce qui pourrait représenter une économie significative. Cependant, l’emprunteur reste tenu de rembourser le capital impayé, et la déchéance des intérêts ne l’exonère pas de ses obligations contractuelles. Il est donc crucial pour l’emprunteur de respecter les termes du contrat pour éviter de telles conséquences. Quelles sont les conséquences de l’absence de production du bordereau de rétractation ?L’absence de production du bordereau de rétractation a conduit à des conséquences juridiques significatives pour le prêteur. En vertu des articles L311-15 et R311-7 du code de la consommation, le prêteur est tenu de remettre ce formulaire à l’emprunteur. La cour a constaté que la SA Cofidis n’avait pas produit ce document, ce qui a entraîné la déchéance du droit aux intérêts. Cela souligne l’importance pour les prêteurs de respecter les obligations d’information et de documentation prévues par la loi. En conséquence, le prêteur ne peut pas revendiquer le paiement des intérêts conventionnels, ce qui peut avoir un impact sur sa rentabilité. Il est donc essentiel pour les prêteurs de s’assurer qu’ils respectent toutes les exigences légales pour protéger leurs droits. |
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°40
DU : 05 Février 2025
N° RG 23/00115 – N° Portalis DBVU-V-B7H-F6EB
Arrêt rendu le cinq Février deux mille vingt cinq
Sur APPEL d’une décision rendue le 1er décembre 2022 par le juge du contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Cusset
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Sophie NOIR, Conseiller
Madame Anne Céline BERGER, Conseiller
En présence de : Mme Valérie SOUILLAT, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
La société COFIDIS venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO à la suite d’une fusion-absorption en date du 1er octobre 2015
SA immatriculée au RCS de Lille Métropole sous le n° 325 307 106
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentants : Maître Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et Maître Xavier HELAIN de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau de LILLE
APPELANTE
ET :
M. [R] [V]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Non représenté, assigné à étude
INTIMÉ
DÉBATS :
Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, à l’audience publique du 05 Décembre 2024, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame DUBLED-VACHERON, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.
ARRET :
Prononcé publiquement le 05 Février 2025 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Valérie SOUILLAT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par jugement du 1er décembre 2022, et sur assignation de la SA Cofidis, le juge des contentieux la protection du tribunal judiciaire de Moulins a :
-prononcé la résiliation du contrat de crédit ;
-prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels entre la société Sofemo d’une part et M. [V] d’autre part ;
-condamné M. [V] à payer à la SA Cofidis venant aux droits de la société Sofemo la somme de 6.929,53 euros au titre du prêt affecté souscrit le 25 février 2010, outre intérêts au taux légal non majoré à compter de la signification du jugement ;
-débouté la SA Cofidis de sa demande de capitalisation des intérêts, de sa demande de clause pénale ainsi que de la demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le juge des contentieux de la protection a constaté que le contrat de prêt contient une clause résolutoire et ne mentionne aucune clause expresse et non équivoque dispensant le prêteur d’adresser à l’emprunteur une mise en demeure préalable avant de prononcer la déchéance du terme du crédit. À défaut de production du justificatif de réception de la mise en demeure adressée le 24 mars 2021 au débiteur, le juge a considéré que la clause résolutoire contenue au contrat ne pouvait être considérée comme acquise. En revanche il a jugé que les incidents de paiement non régularisés depuis janvier 2021 caractérisaient une inexécution suffisamment grave du contrat pour justifier sa résiliation.
Le juge des contentieux la protection a par ailleurs sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts l’irrégularité de l’offre du 25 février 2010 caractérisé selon ses termes, par une discordance entre les échéances prévues au contrat et celle prélevée ainsi qu’une variation du montant des échéances prélevées faussant l’information du consommateur.
La SA Cofidis a relevé appel de cette décision suivant déclaration enregistrée le 18 janvier 2023. M. [V] n’a pas constitué avocat. La déclaration d’appel lui a été signifiée par remise de l’acte en l’étude du commissaire de justice le 3 mars 2023.
Suivant conclusions signifiées le 7 avril 2023, la SA Cofidis, venant aux droits de la SA groupe Sofemo, demande à la cour :
-d’infirmer le jugement entrepris en ses dispositions critiquées dans la déclaration d’appel ;
Statuant à nouveau
-de condamner M. [V] à lui verser la somme de 16 641,14 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,99 % l’an à compter du jour de la mise en demeure du 20 octobre 2021 ;
A titre subsidiaire, si la cour estimait que la déchéance du terme n’était pas acquise, de constater les manquements graves et réitérés de M. [V] à son obligation contractuelle de remboursement du prêt et prononcer la résolution judiciaire du contrat sur le fondement des articles 1224 à 1229 du code civil,
-de condamner en conséquence M. [V] à lui payer la somme de 16 641,14 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir ;
-à titre infiniment subsidiaire, si la cour confirmait la déchéance du droit aux intérêts contractuels, de condamner solidairement (sic) M. [V] à lui verser la somme de 16 641,14 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 octobre 2021, sans suppression de la majoration de cinq points ;
En tout état de cause :
-de condamner M. [V] à lui payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de le condamner aux dépens de première instance et d’appel.
Par arrêt du 18 septembre 2024 la cour, statuant par défaut, a confirmé le jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation du contrat de crédit consenti par la SA Sofemo selon offre de crédit accepté le 25 février 2010 par M. [V]. Avant dire droit sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels la cour a invité la SA Cofidis à produire aux débats le bordereau de rétractation et à justifier de sa remise à Monsieur [V] et le cas échéant à conclure sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels encourue. L’affaire a été rappelée à l’audience du 5 décembre 2024 et mise en délibéré au 5 février 2025.
La SA Cofidis n’a pas déposé de nouvelles écritures.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2024.
Motivation :
Aux termes de sa décision la cour a rappelé que le litige restait soumis aux dispositions du code de la consommation dans sa rédaction et sa codification antérieures à l’entrée en vigueur de la loi N°210-737 du 1er juillet 2010.
Elle a jugé :
– que la clause résolutoire ne pouvait être considérée comme acquise.
-que le jugement devait être confirmé s’agissant de la résiliation du contrat ;
-que M. [V] devait être condamné au paiement du capital impayé restant dû au titre du contrat de prêt souscrit le 25 février 2010 ;
-que M. [V] avait connaissance du montant des échéances, la remise d’un tableau d’amortissement n’étant pas en l’espèce une obligation légale et ne pouvant être sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts ;
-que cependant le bordereau de rétractation prévu aux articles L311-15 et R 311-7 du code de la consommation applicables au contrat n’était pas produit, l’absence de ce formulaire faisant encourir au prêteur la déchéance du droit aux intérêts.
En conséquence, l’appelante a été appelée à faire valoir ses arguments sur ce point et à justifier de la remise du formulaire de rétractation.
Ainsi qu’indiqué supra, la SA COFIDIS n’a pas déposé de nouvelles écritures. Son conseil a adressé un message RPVA le 28 novembre 2024, pour indiquer que sa cliente n’était pas en mesure de produire le bordereau de rétractation et s’en rapportait donc sur une éventuelle cause de déchéance aux intérêts.
Sur ce :
Il convient en application des articles L311-15 et R 311-7 du code de la consommation applicables au contrat et en l’absence de justification de la remise du formulaire de rétractation de prononcer la déchéance du droit aux intérêts.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a limité la condamnation de M. [V] à la différence entre le montant effectivement débloqué (19 800 euros) et les règlements effectués par ce dernier (12 870,47 euros), soit 6 929,53 euros.
Le tribunal a justement rappelé que le prêteur demeurait fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure (en l’espèce à défaut de mise en demeure à compter de l’assignation), majoré de 5 points deux mois après le caractère exécutoire de la décision rendue.
Toutefois, et par de justes motifs que la cour adopte, le tribunal a écarté cette majoration dès lors que son application ferait perdre à la déchéance du droit aux intérêts ses caractères de dissuasion et d’efficacité.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
La cour observe qu’il n’est formulé aucune critique à l’égard des dispositions du jugement relatives à la capitalisation des intérêts et à la clause pénale.
La SA Cofidis échouant en son appel, il convient de laisser à chaque partie les dépens exposés en cause d’appel.
L’équité commande également de laisser à la charge de la SA Cofidis ses frais de défense.
La cour, statuant publiquement, par défaut et par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions par substitution partielle de motifs, sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts au taux légal non majoré ;
Statuant à nouveau,
Dit que la somme de 6 929,53 euros au paiement de laquelle M. [R] [V] est condamné portera intérêt au taux légal non majoré à compter de l’assignation délivrée le 21 juillet 2022 ;
Y ajoutant ;
Déboute la SA Cofidis de la demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Dit que chaque partie supportera la charge des dépens exposés en cause d’appel.
Le greffier La présidente
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