Conflit d’indemnisation lié à une contamination transfusionnelle par le virus de l’hépatite C

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Conflit d’indemnisation lié à une contamination transfusionnelle par le virus de l’hépatite C

L’Essentiel : En 1992, Mme [Y] découvre qu’elle est porteuse du virus de l’hépatite C, une contamination qu’elle attribue à des produits sanguins reçus lors de son accouchement en 1979. Après avoir demandé une expertise, le rapport déposé en 2004 confirme la responsabilité du Centre régional de transfusions sanguines. En 2011, l’ONIAM reconnaît la contamination et établit un protocole d’indemnisation. Cependant, AXA refuse de rembourser la somme versée à Mme [Y]. Après plusieurs procédures, le tribunal confirme la régularité du titre exécutoire et condamne AXA à payer les intérêts et les frais à l’ONIAM.

Découverte de la contamination

En 1992, Mme [Y] a appris qu’elle était porteuse du virus de l’hépatite C, une infection confirmée par un examen biologique en 1995. Elle a attribué sa contamination à des produits sanguins reçus lors de son hospitalisation le 22 mars 1979, pendant son accouchement.

Demande d’expertise et rapport

Pour établir la responsabilité, Mme [Y] a saisi la juridiction des référés afin d’ordonner une expertise. Le Professeur [E] a été désigné comme expert, et après plusieurs opérations contradictoires avec la société AXA, assureur du Centre régional de transfusions sanguines (CRTS), le rapport définitif a été déposé le 16 juin 2004.

Demande d’indemnisation

Le 3 janvier 2011, Mme [Y] a demandé une indemnisation amiable à l’ONIAM. Par des décisions en 2013 et 2014, l’ONIAM a reconnu que sa contamination était due à la transfusion de produits sanguins en 1979, ce qui a conduit à l’établissement d’un protocole transactionnel.

Refus de garantie par AXA

Le 18 avril 2016, l’ONIAM a demandé à AXA de rembourser la somme versée à Mme [Y], mais AXA a refusé de garantir cette demande. En réponse, l’ONIAM a émis un titre de recettes le 12 mars 2020 pour un montant de 27 552,90 €.

Contestation du titre par AXA

Le 17 novembre 2020, AXA a contesté le titre de recettes devant le tribunal. Le juge a confirmé la compétence du Tribunal judiciaire de Marseille et a débouté l’ONIAM de son exception d’incompétence.

Assignation de la CPAM

Le 18 avril 2024, l’ONIAM a assigné la CPAM des Bouches-du-Rhône, et les deux procédures ont été jointes le 9 septembre 2024. AXA a demandé l’annulation du titre de recettes, arguant qu’il était entaché d’illégalités internes et externes.

Arguments d’AXA

AXA a soutenu que le titre était irrégulier, notamment en raison de l’absence de preuve de la responsabilité de l’assuré et de la non-démonstration de l’origine transfusionnelle de la contamination. Elle a également évoqué la prescription de la créance.

Réponse de l’ONIAM

L’ONIAM a affirmé que le titre était régulier et que la créance était fondée sur des décisions antérieures. Il a produit des preuves de l’indemnisation de Mme [Y] et a contesté les arguments d’AXA concernant la prescription.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué en faveur de l’ONIAM, confirmant la régularité du titre exécutoire et la responsabilité d’AXA en tant qu’assureur du CRTS. AXA a été condamnée à payer les intérêts sur la somme due et à verser des frais à l’ONIAM.

Conclusion

Le jugement a été rendu le 30 janvier 2025, déboutant AXA de ses demandes et confirmant l’obligation de remboursement envers l’ONIAM, ainsi que le paiement des intérêts et des dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la régularité du titre exécutoire émis par l’ONIAM ?

Le titre exécutoire émis par l’ONIAM doit respecter certaines conditions de régularité, tant externes qu’internes.

Selon l’article L.212-1 du Code des relations entre le public et l’administration, toute décision prise par une administration doit comporter la signature de son auteur, ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.

Dans cette affaire, l’ordre à recouvrer produit aux débats est revêtu d’un timbre humide mentionnant « Pour le directeur et par délégation – la directrice adjointe de l’ONIAM [U] [I] [P] », suivi d’une signature.

Monsieur [N] [K], directeur de l’ONIAM, figure en tête de ce document comme étant l’ordonnateur.

Il en résulte que la décision contestée est considérée comme ayant été prise par l’auteur désigné, respectant ainsi les exigences de l’article L.212-1.

De plus, l’article L.1221-14 du Code de la santé publique précise que la transaction intervenue entre l’office et la victime est opposable à l’assureur, ce qui renforce la légitimité du titre émis par l’ONIAM.

Ainsi, le tribunal a jugé que le titre exécutoire n’encourt aucun grief de nullité relativement à sa régularité externe.

Quelles sont les implications de la prescription sur la créance de l’ONIAM ?

La question de la prescription est cruciale dans le cadre de la créance de l’ONIAM.

L’article 789 du Code de procédure civile stipule que le juge de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure et les incidents mettant fin à l’instance, jusqu’à son dessaisissement.

Dans cette affaire, la société AXA a soulevé la prescription, arguant que la date de consolidation de Madame [Y] a été fixée au 24 octobre 2002.

Elle soutient que l’ONIAM aurait dû agir dans un délai de 10 ans à compter de cette date pour émettre son titre exécutoire.

Cependant, l’ONIAM a démontré que la date de stabilisation de l’état de santé de Madame [Y] ne correspondait pas à la date de consolidation, et que la prescription ne pouvait donc pas être acquise avant la date d’indemnisation de la victime, soit le 26 juillet 2014.

L’article 1343-2 du Code civil précise que les intérêts dus pour au moins une année entière produisent eux-mêmes des intérêts.

Ainsi, le tribunal a conclu que la créance de l’ONIAM n’était pas prescrite au moment de l’émission du titre exécutoire le 12 mars 2020.

Comment la responsabilité de l’assureur est-elle engagée dans ce litige ?

La responsabilité de l’assureur, en l’occurrence la société AXA, est engagée en vertu des dispositions légales relatives à l’indemnisation des victimes de contaminations par transfusion sanguine.

L’article L.1221-14 du Code de la santé publique stipule que les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l’hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins sont indemnisées par l’ONIAM.

Cet article précise également que l’ONIAM peut rechercher le remboursement des sommes versées auprès des assureurs des structures ayant fourni les produits sanguins.

Dans cette affaire, l’ONIAM a indemnisé Madame [Y] et a émis un titre exécutoire à l’encontre de la société AXA, considérée comme l’assureur du Centre de transfusion sanguine de [Localité 4].

L’ONIAM a produit des éléments prouvant que le produit sanguin administré à Madame [Y] provenait bien de ce centre, et que la société AXA, en tant qu’assureur, était donc responsable des dommages causés.

L’article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades précise que, en cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination, il incombe à la partie défenderesse de prouver que la transfusion n’est pas à l’origine de la contamination.

Dans ce cas, la société AXA n’a pas réussi à apporter la preuve nécessaire pour renverser la présomption d’imputabilité, ce qui a conduit le tribunal à débouter AXA de ses demandes.

Quelles sont les conséquences financières pour la société AXA ?

Les conséquences financières pour la société AXA sont significatives, notamment en ce qui concerne le paiement des intérêts et des dépens.

L’article 1231-6 du Code civil stipule que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Dans cette affaire, la société AXA a été condamnée à payer à l’ONIAM la somme de 27 552,90 € en vertu du titre exécutoire n°2020-763, ainsi que des intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2020.

De plus, les intérêts échus, dus pour au moins une année entière, produiront eux-mêmes des intérêts, conformément à l’article 1343-2 du Code civil.

La société AXA a également été condamnée à payer à l’ONIAM la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile, qui prévoit la possibilité pour le juge de condamner la partie perdante à verser une somme à l’autre partie pour couvrir ses frais de justice.

Enfin, la société AXA devra supporter les dépens de l’instance, ce qui représente un coût supplémentaire pour elle dans le cadre de ce litige.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°25/58 du 30 Janvier 2025

Enrôlement : N° RG 20/10682 – N° Portalis DBW3-W-B7E-YEM2

AFFAIRE : S.A. AXA FRANCE IARD( la SELARL ABEILLE & ASSOCIES)
C/ L’ONIAM (la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS)

DÉBATS : A l’audience Publique du 28 Novembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente, juge rapporteur
BERTHELOT Stéphanie, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette

Vu le rapport fait à l’audience

A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 30 Janvier 2025

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BESANÇON Bénédicte, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

S.A. AXA FRANCE IARD inscrite au RCS de Nanterre sous le numéro 722 057 460, prise en la personne de son directeur général en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Maître Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

CONTRE

DEFENDEURS

LA CPAM, dont le siège social est sis [Adresse 1]

défaillant

L’ONIAM, dont le siège social est sis [Adresse 5]

représenté par Maître Patrick DE LA GRANGE de la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

EXPOSE DU LITIGE :

En 1992, Mme [Y] a découvert être atteinte par le virus de l’hépatite C, cette infection lui ayant été confirmée par un examen biologique réalisé en 1995.

Imputant sa contamination aux produits sanguins qu’elle aurait reçus lors de son hospitalisation le 22 mars 1979 pendant son accouchement en raison d’une anémie, Madame [Y] a saisi la juridiction des référés aux fins de voir ordonner une mesure d’expertise.

Le Professeur [E] a été désigné par ordonnance de référé du 09 juin 1997 ; plusieurs opérations d’expertises se sont déroulées au contradictoire de la société AXA, assureur du Centre régional de transfusions sanguines (CRTS) de [Localité 4] et l’expert a déposé son rapport définitif le 16 juin 2004.

Le 03 janvier 2011, Mme [Y] a saisi l’ONIAM d’une demande d’indemnisation amiable.

Par décisions des 06 octobre 2013 et 27 mai 2014, l’ONIAM a considéré que la contamination par le virus de l’hépatite C de Mme [Y] trouvait son origine dans la transfusion de produits sanguins reçus en 1979.

C’est dans ce contexte qu’un protocole transactionnel a été établi.

Par courrier simple en date du 18 avril 2016, l’ONIAM a sollicité le remboursement de cette somme auprès de la société AXA, considérant qu’elle était l’assureur du fournisseur des produits sanguins en cause, soit le Centre régional de transfusions sanguines (CRTS) de [Localité 4].

Par courrier en date du 4 mai 2016, la société AXA lui a opposé son refus de garantie.

C’est dans ce contexte que l’ONIAM a émis le titre N°2020-763 le 12 mars 2020, pour un montant de 27.552,90€.

Suivant exploit en date du 17 novembre 2020, la société AXA FRANCE IARD a saisi la juridiction de céans d’une demande de contestation du titre de recettes émis par l’ONIAM.

Par ordonnance d’incident du 07 avril 2022, le juge de la mise en état de la 3ème chambre a débouté l’ONIAM de son exception d’incompétence matérielle et territoriale, dit que le Tribunal judiciaire de Marseille était compétent pour connaître du présent litige et condamné l’ONIAM aux dépens de l’instance sur incident.

Suivant exploit en date du 18 avril 2024, l’ONIAM a assigné la CPAM des Bouches du Rhône.

Les deux procédures ont fait l’objet d’une ordonnance de jonction le 09 septembre 2024.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 16 octobre 2024, la SA AXA FRANCE IARD demande au tribunal de :
– Juger que le titre de recettes n°763 est entaché d’illégalité interne comme externe,
– Prononcer l’annulation du titre de recettes n°763 ;
– Débouter l’ONIAM de sa demande de condamnation reconventionnelle ;
– Débouter l’ONIAM de sa demande de condamnation de la Compagnie AXA au versement de la somme de 27 552.90 € assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts ;
– Débouter l’ONIAM de l’ensemble de ses demandes injustifiées ;
– Condamner l’ONIAM à lui verser la somme de 3 500€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir que le titre n°763 émis par l’ONIAM est entaché d’illégalités externes ; qu’il n’a démontré que tardivement dans le cadre de la présente instance avoir réglé cette somme à la victime en exécution du protocole transactionnel, alors il qu’il ne peut y avoir régularisation a posteriori du titre ; que cette communication tardive d’une preuve de l’indemnisation préalable ne purge pas la nullité du titre ; que le titre est irrégulier en ce qu’il mentionne comme ordonnateur le Directeur de l’ONIAM, M.[N] [K] ; que toutefois, ni ce titre, ni son bordereau ne comporte sa signature ; que si l’avis de sommes à payer litigieux comporte le nom, le prénom et la qualité du directeur, l’ordre à recouvrer est signé par Madame [P] ; que les nom, prénom et qualité ne figurent pas sur l’avis de sommes à payer ; que l’avis de sommes à payer litigieux est donc entaché d’un vice de forme l’ayant privé d’une garantie d’identification de l’auteur de la décision ; que le titre de recettes émis par le comptable de l’ONIAM ne précise pas les bases de la liquidation de la créance réclamée ; que le fait d’avoir annexé à l’envoi de l’avis de sommes à payer le protocole transactionnel ne permet pas de pallier l’obligation d’indiquer les bases de liquidation au sein même du titre.
Elle soutient de plus que le titre est entaché d’illégalités internes ; que l’existence même de la créance n’est pas établie dans la mesure où la responsabilité de l’assuré n’est pas démontrée ; que l’ONIAM ne démontre pas que la victime aurait été contaminée par un produit sanguin provenant de l’ex-centre de transfusion sanguine de [Localité 4] ; que le centre de transfusion sanguine à l’origine de la contamination n’ayant pu être identifié, l’ONIAM n’apporte dès lors pas la preuve qu’il serait lui-même garanti par une assurance couvrant les dommages subis par Madame [Y] ; que l’ONIAM ne démontre pas l’origine transfusionnelle de la contamination ; que de plus l’ONIAM ne base ses conclusions que sur l’enquête transfusionnelle dont elle a missionné l’EFS, qui ne permet ni de justifier de l’origine transfusionnelle de la contamination ni de l’absence d’antécédents médicaux de la victime ; qu’en outre dans son rapport d’expertise, le Docteur [E] indiquait que « la contamination VHC de cette patiente par la transfusion sanguine est possible, bien que non démontrée » ; que l’Expert a bien relevé des facteurs de risques nosocomiaux, à savoir l’accouchement du 22 mars 1979 avec déchirure périnéale et points de suture, et le curetage ; que l’enquête transfusionnelle produite aux débats ne peut démontrer l’administration des produits sanguins délivrés par l’ex-CTS dans la mesure où elle a été établie pour les besoins de la cause, et que cette enquête n’atteste que de la délivrance de produits sanguins et non de leur administration à la victime ; qu’il n’existe aucune preuve de la matérialité des transfusions ; que le Professeur [E] a considéré que « la nécessité du geste transfusionnel n’est pas établie (…) aucune donnée biologique ne permet de corroborer la nécessité de transfuser cette patiente ».
Elle soutient que le titre de recettes n°763 doit être annulé en ce qu’il porte sur une créance éteinte pour cause de prescription ; qu’en effet, la date de consolidation de Madame [Y] a été fixée au 24 octobre 2002 date à laquelle la stabilisation de son état a été acté dans les suites de la ponction de biopsie hépatique permettant d’établir son stade de fibrose à F2 ; que force est de constater que cette date de consolidation a été fixée par le rapport d’expertise judiciaire du Professeur [E], précisément visé par l’Office au sein de sa décision rectificative du 11 octobre 2013 ; que l’ONIAM connaissait donc parfaitement cette date de consolidation au moment de l’indemnisation de la victime, laquelle faisait courir le délai de prescription ; qu’il appartenait à l’ONIAM d’exercer son action à l’encontre de la société AXA, dans un délai de 10 ans à compter de la consolidation de Madame [Y] ; que l’ONIAM n’a toutefois émis son titre exécutoire que le 12 mars 2020, réceptionné le 23 septembre 2020.
Aussi, elle soutient que la demande de l’ONIAM à fin de condamnation reconventionnelle des sommes payées à la victime avec intérêt légal et capitalisation s’assimile à une action juridictionnelle qui doit être déclarée irrecevable.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 18 octobre 2023, l’ONIAM demande au tribunal de constater la régularité formelle du titre 2020-763 ; dire et juger qu’il est fondé à solliciter paiement de la somme de 27 552,90€ en remboursement de l’indemnisation versée à Mme [Y] ; débouter la société AXA de sa demande d’annulation ; à titre subsidiaire, condamner la société AXA à lui payer la somme de 27 552,90€ ; en toute hypothèse, la condamner à lui payer cette somme assortie des intérêts à compter du 24 août 2020 et ordonner la capitalisation desdits intérêts ; la condamner à lui payer la somme de 3 500€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Il fait valoir qu’il ressort de l’enquête transfusionnelle diligentée par l’EFS le 16 mars 2016 que le donneur à l’origine du concentré globulaire n°187618 fourni par le CRTS de [Localité 4] et administré à Madame [Y] le 23 mars 1979 n’a pas pu être identifié de sorte que le concentré globulaire administré n’a pas pu être innocenté ; que l’origine transfusionnelle de la contamination a dès lors été reconnue par décision amiable de l’ONIAM en date du 11 octobre 2013 ; qu’il a indemnisé Madame [Y] à hauteur de 27 552,90 € selon les termes du protocole transactionnel d’indemnisation définitive en date du 26 juillet 2014 ; que n’ayant pas engagé de procédure contentieuse pour recouvrer ses créances, il est parfaitement recevable à émettre un titre à l’encontre de la Société AXA.
Que s’agissant du bien-fondé du titre exécutoire, il ressort de l’enquête diligentée par l’EFS le 16 mars 2016 que le seul produit sanguin administré à Mme [Y] a été délivré par le CTS [Localité 4] le 23 mars 1979 ; que si la société AXA invoque l’absence de production par l’ONIAM du contrat d’assurance, il ne nie pas pour autant être l’assureur de ce CTS ; que c’est d’ailleurs en sa qualité d’assureur du CTS de [Localité 4] que la société AXA a participé aux opérations d’expertise du Docteur [E] ; qu’en tout état de cause, il verse aux débats le contrat d’assurance n°0409920 conclu par le CTS de [Localité 4] auprès de la Compagnie UAP aux droits de laquelle est venue AXA ; que sur la période du 09/03/1977 au 31/12/1984, la couverture assurantielle du CTS de [Localité 4] était garantie par AXA au titre de la police n°0409920 ; que dès lors la garantie du contrat d’assurance couvre donc bien la date à laquelle la transfusion en cause a eu lieu en 1979 ; que c’est à tort que la société AXA invoque l’acquisition de la prescription décennale ; qu’en effet, dans son rapport, l’expert a très clairement précisé que :
« Nous avons procédé ce jour du 4 ème accédit, à une nouvelle audition de la patiente, Madame [Y] [G], Il apparait ce jour qu’une 3 ème cure thérapeutique doive être prochainement entreprise au printemps 2003. La patiente ne peut donc pas être consolidée ce jour du 4 ème accédit. Il a été déterminé au plan des préjudices, et à titre provisoire à ce jour, une ITT cumulée de 16 jours d’une part, une période d’ITP à 25% (vingt cinq pour cent) du 8 juin 2021 au 30 avril 2002. Le QD et l’IPP ne pourront être évalués que lorsque la consolidation sera acquise.
A la charge des magistrats de nous saisir à nouveau lorsque les traitements seront terminés et que l’hépatologue traitant aura rédigé un certificat médical de consolidation.» ; qu’il apparait ainsi clairement que Madame [Y] devait débuter un nouveau traitement anti-VHC courant 2003, et ne pouvait être considérée comme consolidée en 2002 ; que pour procéder à une offre d’indemnisation, dans sa décision amiable en date du 11 octobre 2013, l’ONIAM a décidé de fixer la date de stabilisation de l’état de santé de Mme [Y] au 24 octobre 2002, date de la ponction de biopsie hépatique permettant d’établir son stade de fibrose F2 ; que contrairement aux affirmations de la société AXA, il ne s’agit pas d’une date de consolidation mais de stabilisation de l’état de santé de Madame [Y] ; que dès lors, en l’absence de consolidation du dommage, la prescription ne peut être acquise ; qu’en tout état de cause, le point de départ de la prescription ne peut être fixé avant la date d’indemnisation de la victime par l’ONIAM soit le 26 juillet 2014, puisque l’Office ne disposait pas, avant cela, d’un intérêt à agir dans le cadre de son recours subrogatoire ; qu’en conséquence, à la date de l’émission du titre le 12 mars 2020, la prescription décennale n’était pas acquise.
Il soutient que contrairement à ce qu’affirme à tort la société AXA, en se fondant sur une jurisprudence devenue obsolète, l’ONIAM bénéficie dans la présente action de la présomption d’imputabilité prévue à l’article 102 de la loi du 4 mars 2002 ; que par ailleurs, l’alinéa 6 de l’article L.1221-14 précise que « La transaction intervenue entre l’office et la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article est opposable à l’assureur, (…), ou, le cas échéant, au responsable des dommages » ; qu’il est donc bien fondé à rechercher la garantie d’AXA en sa qualité d’assureur du CTS de [Localité 4], responsable du dommage subi par Madame [Y] du fait de sa contamination transfusionnelle par le VHC.
Il indique que pour tenter de s’exonérer de sa garantie, la société AXA cite des conclusions du second rapport d’expertise, au cours duquel l’expert ne disposait pas encore du dossier médical complet de la victime concernant son hospitalisation à la maternité de la Belle-de-Mai du CHU de [Localité 4] en mars 1979 mentionnant la transfusion d’un concentré globulaire ; que le concentré globulaire administré le 23 mars 1979 est bien le concentré globulaire délivré par le CRTS de [Localité 4] au nom de Madame [Y] le 23 mars 1979, l’enquête transfusionnelle réalisée n’ayant recensé aucune autre délivrance de produits sanguins à son nom ; que dans ces conditions, la matérialité de la transfusion ne saurait être contestée.
S’agissant de la légalité interne du titre, l’ONIAM rappelle qu’il a communiqué l’attestation de paiement de la somme réclamée, établie par l’Agent comptable auprès de l’Office ; que l’ordre de recouvrer contesté comporte la signature apposée dans le cadre d’une délégation de signature faite à Madame [U] [I] [P] ; que Monsieur [N] [K] est bien l’auteur de l’acte même s’il n’en est pas le signataire ; qu’il est identifié comme tel sur l’ordre de recouvrer ; que dans la mesure où l’ordre de recouvrer mentionnait bien le nom, prénom, qualité et la signature du délégataire, la société AXA n’a été privée d’aucune garantie.
Il indique que le titre exécutoire indique clairement que la somme sollicitée correspond à celle versée en application du protocole d’indemnisation transactionnelle conclu avec Madame [Y] en raison de la substitution de l’ONIAM en application des dispositions de l’article L.1221-14 du Code de la santé publique ; que la créance de l’ONIAM, dont la loi, le jugement et le protocole suffisent à établir le bien-fondé et l’exactitude, ne commande aucune autre pièce justificative ; que le titre n°2020-763 détaille expressément le montant total de l’indemnisation versée à Mme[Y] dont le détail figure dans le protocole d’indemnisation transactionnelle.
Il fait valoir que dans l’hypothèse où le Tribunal annulerait le titre exécutoire émis par l’ONIAM en raison d’une irrégularité formelle sans toutefois prononcer la décharge du titre exécutoire, il pourra prononcer la condamnation du tiers responsable débiteur ; que les intérêts à valoir sur la créance doivent courir à compter du jour où la sommation de payer le principal est parvenue au débiteur, soit à compter du 24 août 2020.

La CPAM des Bouches du Rhône n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 octobre 2024 et l’affaire a été renvoyée à l’audience de plaidoirie du 28 novembre 2024.

MOTIFS :

Sur la prescription :

En application de l’article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal pour statuer sur les exceptions de procédure et les incidents mettant fin à l’instance. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu’ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge.

En l’espèce, la société AXA n’a pas saisi le juge de la mise en état de la fin de non recevoir dont il se prévaut, de sorte que le tribunal n’est pas compétent pour statuer de ce chef ; toutefois, il observé que si ce moyen est invoqué dans la motivation des conclusions de la société AXA, il n’est pas repris au dispositif, de sorte que le tribunal n’en est pas saisi.

Sur la régularité du titre exécutoire :

La société AXA sollicitant à titre principal l’annulation du titre exécutoire émis à son encontre, le tribunal examinera en premier lieu les critiques formulées à l’encontre de sa régularité externe.
Sur sa régularité externe :

-Sur l’effet de la transaction intervenue entre l’office et la victime :

L’article L.1221-14 du code de la santé publique dispose notamment que « (…) La transaction intervenue entre l’office et la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article est opposable à l’assureur, sans que celui-ci puisse mettre en œuvre la clause de direction du procès éventuellement contenue dans les contrats d’assurance applicables, ou, le cas échéant, au responsable des dommages, sauf le droit pour ceux-ci de contester devant le juge le principe de la responsabilité ou le montant des sommes réclamées.(…) »

L’ONIAM produit aux débats une attestation de paiement indiquant qu’a été réglée à Mme [Y] une somme de 27 552,90€ le 07 août 2014. Il est ainsi établi qu’antérieurement à l’émission du titre exécutoire à l’encontre de la société AXA le 12 mars 2020, l’ONIAM a indemnisé Mme [Y], de sorte que les dispositions légales susvisées ont été respectées et que l’ONIAM pouvait émettre un titre exécutoire pour obtenir le remboursement de cette somme.

– Sur la signature du titre :

Aux termes de l’article L.212-1 du code des relations entre le public et l’administration toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur, ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.

En l’espèce l’ordre à recouvrer exécutoire produit aux débats est revêtu d’un timbre humide comportant la mention « Pour le directeur et par délégation – la directrice adjointe de l’ONIAM [U] [I] [P] » suivi d’une signature. « [N] [K], directeur de l’ONIAM », figure en tête de ce document comme étant l’ordonnateur.

Or, Mme [U] [I] [P] a expressément reçu délégation de signature par décision du 18 juillet 2017.

Il en résulte que monsieur [K] doit être considéré comme étant l’auteur de la décision contestée au sens de l’article L.212-1 précité, dont l’objet est de permettre au public d’identifier les personnes ayant matériellement pris les décisions qui les concernent.

Dans ces conditions le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions sera écarté.

– Sur la motivation du titre :

La société AXA se prévaut encore d’une violation de l’article 24 du décret du 7 novembre 2012, lequel précise que toute créance liquidée faisant l’objet d’une déclaration ou d’un ordre à recouvrer indique les bases de sa liquidation.

Or la simple lecture de l’ordre à recouvrer se réfère expressément aux dispositions de l’article L.1221-14 du code de la santé publique, et mentionne que la somme de 27 552,90€ correspond à celle versée à Mme [G] [Y] en vertu d’un protocole transactionnel, de deux décisions de l’ONIAM des 11.10.2013 et 27.05.2014, et d’une police d’assurance N°0 409 920.

Il apparaît dans ces conditions que le titre exécutoire répond aux exigences de motivation en ce qu’il indique clairement les bases de la liquidation des sommes exigées de la compagnie AXA.

Le titre exécutoire n’encourt donc aucun grief de nullité relativement à sa régularité externe.

Sur sa régularité interne :

– Sur l’existence et le contenu du contrat d’assurance :

La société AXA conteste être l’assureur du CTS de [Localité 4], dont l’ONIAM a assumé l’obligation d’indemnisation.

Cependant l’ONIAM produit aux débats les conditions particulières de la police d’assurance conclu le 27 mai 1997 à effet du 03 mars 1977, entre la compagnie UAP et le Centre de transfusion sanguine de [Localité 4]. Ce contrat a été conclu pour une durée de un an avec tacite reconduction. Il était donc en vigueur au moment du traitement administré à Mme [G] [Y] à la date de son hospitalisation à la maternité de [Adresse 3] le 23 mars 1979.

Par ailleurs ce contrat indique en son article II, 3°), que la garantie de l’assureur est acquise à l’égard de tout receveur de sang, conformément aux articles 1382 et suivants du code civil, pour les dommages corporels ou matériels dont il pourrait être victime du fait, soit d’une transfusion ou injection de sang (ou de ses dérivés) fourni par le Centre (que la transfusion ou injection soit effectuée par le personnel du Centre ou par toute autre personne), soit d’une transfusion ou injection de sang frais effectuée par un médecin extérieur au Centre par prélèvement sur les donneurs envoyés par le Centre.

La société AXA, venant aux droits de la compagnie UAP, est donc bien l’assureur du CTS de [Localité 4] pour les activités pour lesquelles sa garantie est recherchée.

– Sur la preuve de la responsabilité du Centre de transfusion sanguine de [Localité 4] :

L’article L.1221-14 du code de la santé publique dispose que “Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l’hépatite B ou C ou le virus T-lymphotropique humain causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang réalisée sur les territoires auxquels s’applique le présent chapitre sont indemnisées au titre de la solidarité nationale par l’office mentionné à l’article L.1142-22 dans les conditions prévues à la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L.3122-1, aux deuxième et troisième alinéas de l’article L.3122-2, au premier alinéa de l’article L.3122-3 et à l’article L.3122-4, à l’exception de la seconde phrase du premier alinéa.

Dans leur demande d’indemnisation, les victimes ou leurs ayants droit justifient de l’atteinte par le virus de l’hépatite B ou C ou le virus T-lymphotropique humain et des transfusions de produits sanguins ou des injections de médicaments dérivés du sang. L’office recherche les circonstances de la contamination. S’agissant des contaminations par le virus de l’hépatite C, cette recherche est réalisée notamment dans les conditions prévues à l’article 102 de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Il procède à toute investigation sans que puisse lui être opposé le secret professionnel.

L’offre d’indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis du fait de la contamination est faite à la victime dans les conditions fixées aux deuxième, troisième et cinquième alinéas de l’article L.1142-17.

La victime dispose du droit d’action en justice contre l’office si sa demande d’indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans un délai de six mois à compter du jour où l’office reçoit la justification complète des préjudices ou si elle juge cette offre insuffisante.

La transaction à caractère définitif ou la décision juridictionnelle rendue sur l’action en justice prévue au précédent alinéa vaut désistement de toute action juridictionnelle en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle visant à la réparation des mêmes préjudices.

La transaction intervenue entre l’office et la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article est opposable à l’assureur, sans que celui-ci puisse mettre en œuvre la clause de direction du procès éventuellement contenue dans les contrats d’assurance applicables, ou, le cas échéant, au responsable des dommages, sauf le droit pour ceux-ci de contester devant le juge le principe de la responsabilité ou le montant des sommes réclamées. L’office et l’Établissement français du sang peuvent en outre obtenir le remboursement des frais d’expertise. Quelle que soit la décision du juge, le montant des indemnités allouées à la victime ou à ses ayants droit leur reste acquis.

Lorsque l’office a indemnisé une victime ou lorsque les tiers payeurs ont pris en charge des prestations mentionnées aux 1 à 3 de l’article 29 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, ils peuvent directement demander à être garantis des sommes qu’ils ont versées ou des prestations prises en charge par les assureurs des structures reprises par l’Établissement français du sang en vertu du B de l’article 18 de la loi n°98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire de produits destinés à l’homme, de l’article 60 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n°2000-1353 du 30 décembre 2000) et de l’article 14 de l’ordonnance n°2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine, que le dommage subi par la victime soit ou non imputable à une faute.

L’office et les tiers payeurs, subrogés dans les droits de la victime, bénéficient dans le cadre de l’action mentionnée au septième alinéa du présent article de la présomption d’imputabilité dans les conditions prévues à l’article 102 de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Les assureurs à l’égard desquels il est démontré que la structure qu’ils assurent a fourni au moins un produit sanguin labile ou médicament dérivé du sang, administré à la victime, et dont l’innocuité n’est pas démontrée, sont solidairement tenus de garantir l’office et les tiers payeurs pour l’ensemble des sommes versées et des prestations prises en charge.”

Par ailleurs l’article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative au droit des malades et à la qualité du système de santé précise qu’en “cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination par le virus de l’hépatite C antérieure à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n’est pas à l’origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Le doute profite au demandeur.”

En l’espèce, si l’expert [E] a considéré dans son rapport définitif que la contamination VHC de la patiente par la transfusion sanguine était possible bien que non démontrée, la lettre établie postérieurement par l’Établissement Français du Sang le 16 mars 2026 permet d’établir qu’il a été délivré au nom de Madame [G] [Y] le 23 mars 1979 un concentré globulaire N°187618 provenant de l’ex CRTS de [Localité 4], et précise que compte tenu de l’ancienneté, l’enquête auprès du donneur à l’origine de ce produit sanguin n’a pas pu être diligentée, de sorte que ce produit n’a pas pu être innocenté.

Si l’EFS indique n’avoir aucune confirmation de transfusion effective du produit sanguin, il y a lieu de rappeler que l’expert [E] avait indiqué que « la patiente aurait reçu 1 Concentré Globulaire N°187 618, dont la matérialité du geste transfusionnel n’est pas établie de façon précise ce jour du ler accédit, en l’absence du dossier hospitalier qui nous sera prochainement communiqué. Le Docteur [W][A] nous a confirmé avoir délivré cette Unité Sanguine, l’enquête transfusionnelle est en cours. ».

Or, une fois le dossier médical de la maternité communiqué à l’expert, ce dernier, dans son rapport définitif avait expressément retenu que « Le geste transfusionnel avait démontré la matérialité pour 1 Concentré Globulaire, le 23 mars 1979, n°187 618. En réalité la matérialité est établie pour 1 Concentré Globulaire (mais sans numéro) et par ailleurs l’ex-CRTS avait distribué 1 produit sanguin n°187 618 de façon nominative et le même jour. Le Docteur [M] [C] ci-présent nous indique avoir mis en évidence dans le dossier médical qu’il a consulté, le jour du geste transfusionnel, le 23 mars 1979, un poids d’hémoglobine à 8,50g et un hématocrite à 28%, ce qui rend très vraisemblable le geste transfusionnel à cette date et corroboré par l’indication portée sur les éléments du dossier (…) La transfusion d’un concentré globulaire, le 23 mars 1979, a été confirmée dans sa matérialité».

Dans le cadre de la présente instance, la société AXA ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe pour renverser la présomption légale instaurée au profit de la victime, que le produit sanguin utilisé n’a pas été à l’origine de la contamination par le virus de l’hépatite C.

C’est donc en vain que la société AXA conteste son obligation de garantir les dommages causés par son assuré.

Elle sera donc déboutée de l’intégralité de ses demandes.

Sur les autres demandes :

L’article 1231-6 du code civil dispose que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

La créance du tiers payeur, dont le paiement est poursuivi par subrogation dans le droit d’action de la victime, n’est pas indemnitaire et se borne au paiement d’une somme d’argent. Elle est donc soumise à ces dispositions.

Par ailleurs la demande de l’ONIAM au titre des intérêts ne se heurte pas au principe du non cumul de l’action juridictionnelle et de l’émission d’un titre, dès lors que les intérêts réclamés au titre de l’action ne sont pas visés dans le titre.

En conséquence la somme due par la société AXA en vertu du titre émis à son encontre produira des intérêts au taux légal à compter de la notification de l’ordre à recouvrer, le 23 septembre 2020. En application de l’article 1343-2 du code civil, ces intérêts produiront eux-mêmes des intérêts au taux légal dès lors qu’ils seront dus pour au moins une année entière.

La société AXA, qui succombe à l’instance, en supportera les dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de maître de la GRANGE, conformément à l’article 699 du code de procédure civile. Elle sera en outre condamnée à payer à l’ONIAM la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

DÉBOUTE la SA AXA FRANCE IARD de ses demandes ;

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD à payer à l’ONIAM les intérêts au taux légal sur la somme mise à sa charge en vertu du titre exécutoire n°2020-763, soit 27 552,90 €, à compter du 23 septembre 2020 ;

DIT que les intérêts échus, dus pour au moins une année entière, produiront eux-mêmes des intérêts ;

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD à payer à l’ONIAM la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de maître de la GRANGE.

AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 30 Janvier 2025

LE GREFFIER LE PRESIDENT


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