Indemnisation d’un préjudice corporel : expertise et provisions accordées.

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Indemnisation d’un préjudice corporel : expertise et provisions accordées.

L’Essentiel : Le 10 mars 2019, à Kehl, [D] [A] a été percutée en tant que piéton par un véhicule assuré par AXA FRANCE IARD, entraînant un polytraumatisme. Hospitalisée jusqu’au 4 avril, elle a poursuivi sa réhabilitation jusqu’au 21 mai. Malgré plusieurs expertises, l’état de santé de [D] [A] est resté incertain, certains experts ne trouvant pas de séquelles. Le 3 avril 2023, elle a refusé l’offre d’indemnisation d’AXA, jugeant les préjudices sous-évalués, et a engagé une procédure judiciaire. Le tribunal a ordonné une expertise judiciaire et accordé une provision de 90 000 euros pour ses préjudices.

Accident de la circulation

Le 10 mars 2019, à Kehl (Allemagne), [D] [A] a été victime d’un accident de la circulation en tant que piéton, impliquant un véhicule conduit par [L] [O] et assuré par AXA FRANCE IARD. Suite à l’accident, [D] [A] a été transportée à la clinique d’Ebertplatz à Offenburg, où un polytraumatisme avec de multiples fractures a été diagnostiqué.

Hospitalisation et réhabilitation

Après son hospitalisation initiale jusqu’au 4 avril 2019, [D] [A] a poursuivi sa réhabilitation au centre de réadaptation à Morsbronn jusqu’au 21 mai 2019. Elle a subi deux opérations sous anesthésie générale et a continué sa rééducation en hospitalisation de jour après son retour à domicile.

Expertises médicales

La société AXA FRANCE IARD a commandé une expertise amiable contradictoire, réalisée par le Docteur [X] le 17 décembre 2019, qui a conclu à l’absence de consolidation de l’état de santé de [D] [A]. D’autres expertises ont suivi, dont celle du Docteur [S] qui a recommandé des bilans neuropsychologiques et ophtalmologiques. Les conclusions des experts ont varié, certains ne trouvant pas de séquelles imputables à l’accident.

Offre d’indemnisation et refus

Le 3 avril 2023, AXA FRANCE IARD a proposé une offre d’indemnisation définitive que [D] [A] a refusée, estimant que les préjudices subis avaient été sous-évalués. En conséquence, elle a assigné AXA FRANCE IARD et la caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin en référé pour obtenir une expertise et des provisions.

Procédure judiciaire

Lors de l’audience du 20 novembre 2024, les avocats des deux parties ont présenté leurs arguments. [D] [A] a demandé une expertise pour évaluer ses préjudices, tandis qu’AXA FRANCE IARD a contesté la nécessité de cette mesure. La caisse primaire d’assurance maladie n’a pas comparu, se déclarant défaillante.

Décision du tribunal

Le tribunal a ordonné une expertise judiciaire pour évaluer l’étendue des préjudices de [D] [A]. Il a également accordé une provision de 90 000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice, ainsi qu’une provision ad litem de 2 000 euros pour couvrir les frais d’instance. AXA FRANCE IARD a été condamnée aux dépens et à verser 1 500 euros à [D] [A] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions pour ordonner une expertise judiciaire selon l’article 145 du code de procédure civile ?

L’article 145 du code de procédure civile stipule que :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. »

Cette disposition implique que pour qu’une expertise judiciaire soit ordonnée, il faut démontrer un intérêt légitime à établir ou à préserver une preuve en vue d’un litige potentiel.

Il est important de noter que cette mesure d’instruction ne préjuge en rien de la recevabilité ou du bien-fondé des demandes qui pourraient être formées ultérieurement.

Dans le cas présent, [D] [A] conteste le rapport du Docteur [S] et justifie ainsi d’un motif légitime pour demander une expertise afin d’évaluer l’étendue de son préjudice.

L’absence de contestation de la part de la société AXA FRANCE IARD sur la nécessité d’une expertise renforce également la légitimité de cette demande.

Quelles sont les conditions pour accorder une provision selon l’article 835 du code de procédure civile ?

L’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile précise que :

« Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier. »

Cela signifie que pour qu’une provision soit accordée, il faut que l’obligation soit non sérieusement contestable.

Le juge des référés a la discrétion de fixer le montant de la provision, qui doit correspondre à la partie incontestable du préjudice allégué.

Dans cette affaire, [D] [A] demande une provision de 123.735,31 euros, correspondant à l’offre d’indemnisation de la société AXA FRANCE IARD.

Elle soutient que cette offre constitue une obligation non sérieusement contestable, ce qui est contesté par la société AXA FRANCE IARD.

Le juge devra donc examiner si l’offre d’indemnisation est effectivement incontestable pour accorder la provision demandée.

Comment se prononce le juge sur les dépens selon l’article 696 du code de procédure civile ?

L’article 696 du code de procédure civile stipule que :

« La partie perdante est en principe condamnée aux dépens. »

Cela signifie que, par défaut, la partie qui succombe dans ses prétentions doit supporter les frais de la procédure.

Dans le cas présent, la société AXA FRANCE IARD, ayant été déboutée de ses demandes, est condamnée aux dépens.

Cette disposition vise à garantir que la partie qui a raison dans un litige ne supporte pas les frais de la procédure, ce qui est une question d’équité.

Ainsi, le juge applique cette règle en condamnant la société AXA FRANCE IARD à payer les dépens, conformément à l’article 696.

Quelles sont les conditions pour accorder une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ?

L’article 700 du code de procédure civile dispose que :

« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. »

Pour qu’une indemnité soit accordée sur ce fondement, il faut que la partie qui en fait la demande ait exposé des frais qui ne sont pas couverts par les dépens.

Le juge doit également tenir compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

Dans cette affaire, le juge a décidé de condamner la société AXA FRANCE IARD à verser à [D] [A] une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700, considérant qu’il serait inéquitable de laisser [D] [A] supporter la totalité des frais qu’elle a dû exposer pour défendre ses intérêts.

Cette décision vise à compenser les frais non récupérables par le biais des dépens.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

RÉFÉRÉS

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 20 JANVIER 2025

N° RG 24/01493 – N° Portalis DB3R-W-B7I-ZSI2

N° de minute :

[D] [A]

c/

S.A. AXA FRANCE IARD, CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU BAS-RHIN

DEMANDERESSE

Madame [D] [A]
10A, Rue Klamm
67110 GUNDERSHOFFEN

représentée par Maître Michel BENEZRA de la SELEURL BENEZRA-AVOCAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C2266

DEFENDERESSES

S.A. AXA FRANCE IARD
313 Terrasses de l’Arche
92727 NANTERRE

représentée par Maître Lisa HAYERE de la SELEURL CABINET SELURL HAYERE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : A0845

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU BAS-RHIN
16 rue de Lausanne
67090 STRASBOURG

non comparante

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président : David MAYEL, Vice-président, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,
Greffier : Pierre CHAUSSONNAUD, Greffier

Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance réputée contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 20 novembre 2024, avons mis l’affaire en délibéré à ce jour :

Le 10 mars 2019, à Kehl (Allemagne), [D] [A] a été victime, en qualité de piéton, d’un accident de la circulation impliquant un véhicule conduit par [L] [O] et assuré auprès de la société AXA FRANCE IARD.

Le 10 mars 2019, [D] [A] a été transportée à la clinique d’Ebertplatz à Offenburg où il a été constaté un polytraumatisme avec de multiples fractures.

Elle est restée hospitalisée jusqu’au 4 avril 2019, à la clinique d’Ebertplatz, puis au centre de réadaptation à Morsbronn, jusqu’au 21 mai 2019.

A cette date, elle a pu regagner son domicile et poursuivre la rééducation initiée, en hospitalisation de jour.

Elle a subi deux opérations sous anesthésie générale.
La société AXA FRANCE IARD a diligenté une expertise amiable contradictoire, confiée au Docteur [X] qui a examiné [D] [A] le 17 décembre 2019 et qui a retenu, dans son rapport du 18 février 2020, l’absence de consolidation de l’état de santé de cette dernière.

La société AXA FRANCE IARD a missionné le Docteur [S] pour procéder à une nouvelle expertise médicale d’[D] [A].

Dans son rapport d’expertise du 12 octobre 2020, le Docteur [S] a estimé nécessaire de programmer un bilan neuropsychologique et ophtalmologique.

Le Docteur [E], ophtalmologue, a conclu à l’absence de poste de préjudice ophtalmologique imputable à l’accident dont [D] [A] a été victime.

Le Professeur [G], sapiteur neurologue, examinait Madame [A] le 30 mars 2021, et concluait à l’absence de toute séquelle neurologique physique ou cognitive imputable.

Le Docteur [S] examinait, à nouveau, [D] [A] le 19 septembre 2022 et déposait son rapport le 19 décembre 2022 et concluait ainsi :

« Date de consolidation médico-légale : 16 juin 2022
DFT :
* GTT du 10/03/2019 au 22/05/2019, du 17/07/2019 au 18/07/2019 et du 02/09/2019 au 03/09/2019
*GTP de classe IV du 23/05/2019 au 16/07/2019, du 19/07/2019 au 01/09/2019 et du 04/09/2019 au 05/11/2019
*GTP de classe III du 06/11/2019 au 06/05/2021, du 08/05/2021 au 03/03/2022 et du 05/03/2022 au 16/06/2022
Souffrances endurées : 6/7
Préjudice esthétique temporaire : 5/7 jusqu’au 22 mai 2019 puis 4/7 jusqu’au 5 novembre 2019 puis 3/7 jusqu’à la consolidation médico-légale
AIPP : 30%
Préjudice esthétique permanent : 3/7
Retentissement sur les activités d’agrément : oui
Besoins en aide humaine familiale : 2 heures par jour jusqu’au 9 novembre 2019, puis 1 heure par jour jusqu’au 31 décembre 2020 puis 4 heures par semaine jusqu’au 4 mars 2022
Frais futurs : la correction esthétique des cicatrices au niveau de l’épaule, la poursuite du soutien psychologique pendant deux ans après la consolidation, avec prise en charge des transports si la blessée n’est pas capable de conduire, la prise en charge au centre EMOI TC (prévue visiblement pour une année) et les transports en rapport
Sur le plan professionnel : la blessée a été reconnue en invalidité 2ème catégorie par l’organisme social, la reprise de l’activité professionnelle antérieure n’est pas envisageable et une procédure de licenciement était envisagée au moment de notre examen. Elle fait l’objet d’une reconnaissance de travailleur handicapé
Concernant les capacités professionnelles résiduelles, elle serait capable d’exercer en théorie une activité professionnelle à temps partiel à un poste sédentaire strict, sans effort physique, sans station debout prolongée et sans nécessité de mouvements d’accroupissement ou d’agenouillement. Elle souhaiterait obtenir le certificat de qualification professionnelle d’assistante médicale ».

Le 3 avril 2023, la société AXA FRANCE IARD adressait à [D] [A] une offre d’indemnisation définitive que cette dernière a refusée.

Insatisfaite des conclusions du Docteur [S], par actes de commissaire de justice du 13 juin 2024 et du 17 juin 2024, [D] [A] a fait assigner en référé, devant le président du tribunal judiciaire de Nanterre, la société AXA FRANCE IARD et la caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin, aux fins de désigner un expert et de condamner la société AXA FRANCE IARD à lui payer :
une provision d’un montant de 123.735,31 euros valoir sur l’indemnisation de son préjudice,une provision ad litem d’un montant de 4.000 euros,la somme de 3.000 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, les entiers dépens de la présente procédure.
[D] [A] demande également de déclarer l’ordonnance à intervenir commune à la caisse primaire d’assurance du Bas-Rhin.

A l’audience du 20 novembre 2024, le conseil d’[D] [A] a oralement soutenu son acte introductif d’instance.
A cette même audience, le conseil de la société AXA FRANCE IARD a soutenu les termes des conclusions déposées lors de cette audience, aux fins de :
Sur la demande d’expertise,
Donner acte à la Compagnie AXA FRANCE IARD de ses plus expresses protestations et réserves sur la mesure d’expertise sollicitée,Sur la demande de provision à valoir sur l’indemnisation définitive de [D] [A],
Débouter [D] [A] de sa demande provisionnelle à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices,Sur la demande de provision ad litem,
A titre principal,
Débouter [D] [A] de sa demande de provision ad litem,A titre subsidiaire,
Rapporter à de plus justes proportions la demande présentée par [D] [A] au titre de la provision ad litem,En tout état de cause,
Rapporter à de plus justes proportions la demande présentée par [D] [A] au titre des frais irrépétibles,Réserver les dépens.
Régulièrement assignée par remise de l’acte à personne morale, la caisse primaire d’assurance maladie de Paris n’a pas comparu à l’audience et ne s’est pas fait représenter. Elle a transmis, par lettre adressé au tribunal du 1er août 2024, des conclusions mais ne s’est pas présentée à l’audience pour les soutenir oralement de sorte qu’elle est défaillante.
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.

MOTIFS

Sur la demande d’expertise

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.

L’application de ce texte, qui subordonne le prononcé d’une mesure d’instruction à la seule démonstration d’un intérêt légitime à établir ou à préserver une preuve en vue d’un litige potentiel, n’implique aucun préjugé sur la recevabilité et le bien fondé des demandes formées ultérieurement, sur la responsabilité des personnes appelées comme partie à la procédure, ni sur les chances du procès susceptible d’être engagé.

En l’espèce, [D] [A] conteste le rapport du Docteur [S] du 19 septembre 2022 qui n’aurait pas évalué l’ensemble de ses préjudices.

[D] [A] verse aux débats le rapport d’expertise du Docteur [M] qui retient que le Docteur [S] aurait sous-évalué la réalité des séquelles au regard de son préjudice. C’est ainsi que le déficit fonctionnel permanent a été évalué par le Docteur [M] à un minimum de 44 % alors que le Docteur [S] évalue celui-ci à 30 %.

Elle verse aussi aux débats l’offre d’indemnisation définitive du 3 avril 2023 de la société AXA FRANCE IARD qu’elle a refusée.

Il convient de relever que la société AXA FRANCE IARD ne s’oppose pas à la mesure d’expertise, tout en formulant les protestations et réserves d’usage mais estime que l’expert à désigner doit être inscrit sur la liste de la cour d’appel de Colmar et que les opérations d’expertise doivent se dérouler au domicile de la victime afin d’appréhender son évolution dans son environnement habituel.

Bien qu’elle habite à GUNDERSHOFFEN (67110), [D] [A] demande une délocalisation et considère qu’un expert doit être inscrit sur la liste de la cour d’appel de Paris.

Par ces éléments, rendant vraisemblable l’existence d’un préjudice corporel ayant pour origine un accident de la circulation, [D] [A] justifie d’un motif légitime à voir ordonner une mesure d’expertise judiciaire afin d’évaluer l’étendue de son préjudice, selon les modalités prévues dans le présent dispositif.

A ce titre, il convient de donner à l’expert la mission figurant au dispositif de la présente décision et qui correspond à celle proposée par le groupe de travail dirigé par [V] [J] et adoptée de manière générale par les juridictions, sans qu’il apparaisse nécessaire d’entrer dans un débat opposant missions « AREDOC » et « ANEDOC ».

Par ailleurs, dès lors que c’est une juridiction de la cour d’appel de Versailles qui a été saisie et que la demanderesse est en capacité de se déplacer, rien ne s’oppose à la nomination d’un expert inscrit sur ladite cour.

L’expertise étant ordonnée à la demande d’[D] [A] et dans son intérêt probatoire, il conviendra de lui faire supporter la consignation des frais d’expertise.

Sur la demande de provision

Conformément à l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier. Le montant de la provision allouée en référé n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée. Le juge des référés fixe discrétionnairement à l’intérieur de cette limite la somme qu’il convient d’allouer au requérant, la provision n’ayant pas pour objet de liquider le préjudice de façon définitive mais d’indemniser ce qui dans ce préjudice est absolument incontestable.

En l’espèce, [D] [A] demande la condamnation de la société AXA FRANCE IARD de lui payer une provision d’un montant de 123.735,31 euros correspondant à l’offre définitive d’indemnisation formulée par cette dernière, le 3 avril 2023, qu’[D] [A] a en raison des préjudices subis qui ont été sous-évalués par le Docteur [S].
Elle estime que cette offre formulée par la société AXA FRANCE IARD constitue une obligation non sérieusement contestable
[D] [A] relève que l’offre d’indemnisation définitive du 3 avril 2023, « qui indiquait « MEMOIRE » au titre du déficit fonctionnel permanent après imputation en cascade de la pension d’invalidité » servie à [D] [A].

Elle fait remarquer que, depuis un revirement de jurisprudence opere par l’assemblee pleniere
de la Cour de cassation, le 19 janvier 2023, la pension d’invalidité calculée sur une base forfaitaire, ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.

Elle soutient qu’elle est bien fondée et recevable à solliciter une provision à valoir sur l’indemnisation du déficit fonctionnel permanent de 90 000 euros figurant dans l’offre définitive d’indemnisation.

La société AXA FRANCE IARD s’oppose au versement de toute provision.

Elle soutient que qu’[D] [A] ne peut soutenir que l’indemnité fixée par aux termes de son offre d’indemnisation amiable du 3 avril 2023 constitue une obligation non sérieusement contestable.

Elle considère que l’offre qu’elle a formulée, qui a été refusée par la victime, et fondée sur une évaluation des préjudices contestée par [D] [A], ne saurait justifier le versement d’une provision complémentaire, sachant qu’il a été versé 70 000 euros de provision.

Au vu de l’arrêt de la Cour de cassation du 19 janvier 2023, le déficit fonctionnel permanent doit être indemnisé indépendamment de la pension d’invalidité.

Sa date de naissance étant le 17 mai 1998, [D] [A] était âgée de 21 ans au moment de l’accident. Selon le référentiel Mornet, atteinte, selon le Docteur [S], d’un déficit fonctionnel de 30 %, elle aurait droit à être indemnisée à hauteur de 3.445 euros le point, soit : 3.445 euros X 30 = 103 350 euros.

La somme de 90 000 euros retenue par la société AXA FRANCE IARD dans son offre d’indemnisation définitive au titre du déficit fonctionnel permanent apparaît être le montant minimum auquel [D] [A] est en droit d’être indemnisée par provision et ce même si l’expert désigné retient un pourcentage de déficit fonctionnel permanent inférieur à 30 %.

Dans ces conditions, la société AXA FRANCE IARD sera condamnée à verser à [D] [A] la somme de 90 000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice, montant à hauteur duquel l’obligation n’apparaît pas contestable.

Sur la demande de provision ad litem

Si le juge des référés dispose du pouvoir d’accorder une provision pour frais d’instance sur le fondement de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, qui ne prévoit aucune restriction quant à la nature ou l’objet des provisions susceptibles d’être allouées, c’est nécessairement dans les conditions précisément et strictement définies par celui-ci.

Sur le fondement de ce texte, la provision pour frais d’instance peut être accordée sous deux conditions : la première est la justification du caractère non sérieusement contestable de la prétention au fond ; la seconde, la justification de la nécessité d’engager des frais pour lesquels la provision est demandée. Ces deux conditions sont cumulatives, nécessaires et ensemble suffisantes, toute autre considération étant indifférente.

En l’espèce, le droit à indemnisation d’[D] [A] n’est pas contesté et il est justifié par la présente décision que des frais d’expertise vont être engagés.

Dans ces conditions, la demande de provision apparaît justifiée et la société AXA FRANCE IARD sera condamnée à verser à [D] [A] la somme de 2 000 euros.

Sur les demandes accessoires

S’agissant de la demande de déclarer opposable l’ordonnance à intervenir à la Caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin, il y a lieu de rappeler que, si l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale impose à l’assuré victime d’une lésion d’appeler en déclaration de jugement commun les caisses de sécurité sociale auxquelles il est ou était affilié, le caractère commun du jugement résulte de l’assignation signifiée à ces mêmes organismes et n’a pas à être déclaré ou constaté par le tribunal dans son dispositif.
En effet, le demandeur ne dispose d’aucun intérêt à former une telle demande dès lors qu’elle ne vise pas à lui conférer des droits spécifiques, et il ne s’agit donc pas d’une prétention au sens de l’article 4 du code de procédure civile.

L’article 491 du code de procédure civile impose au juge des référés de statuer sur les dépens. L’article 696 du code de procédure civile énonce que la partie perdante est en principe condamnée aux dépens. La société AXA France IARD, succombant, est condamnée aux dépens.

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il doit à ce titre tenir compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut écarter pour les mêmes considérations cette condamnation.

En l’espèce, il serait inéquitable de laisser au demandeur la charge de la totalité des frais irrépétibles qu’il a dû exposer pour la défense de ses intérêts et il y aura lieu en conséquence de condamner la société AXA FRANCE IARD à payer à [D] [A] la somme de 1 500 euros au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

RENVOYONS les parties à se pourvoir sur le fond du litige,
Par provision, tous moyens des parties étant réservés,

ORDONNONS une expertise et DÉSIGNONS pour y procéder :

[U] [B]
101 avenue Henri Barbusse Hôpital d’instruction des armées Percy
92141 CLAMART
Tél : 01.41.46.62.82
Port. : 06.08.92.87.44 Mèl : [B][U]@hotmail.com

(expert inscrit sur la cour d’appel de Versailles sous la rubrique F-01.16 – Médecine physique et de réadaptation)

qui pourra se faire assister de tout spécialiste de son choix, dans une spécialité distincte de la sienne avec mission de :

Convoquer les parties et leurs conseils en les informant de leur droit de se faire assister par un médecin conseil de leur choix ;
2. Se faire communiquer par la victime, son représentant légal ou tout tiers détenteur, tous documents médicaux relatifs à l’accident, en particulier le certificat médical initial ;

Analyse médico-légale.

3. Fournir le maximum de renseignements sur l’identité de la victime, ses conditions d’activités professionnelles, son niveau scolaire s’il s’agit d’un enfant ou d’un étudiant, son statut exact et/ou sa formation s’il s’agit d’un demandeur d’emploi ;

4. À partir des déclarations de la victime imputables au fait dommageable et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités du traitement, en précisant autant que possible les durées exactes d’hospitalisation et de rééducation et, pour chaque période d’hospitalisation ou de rééducation, la nature et le nom de l’établissement, le ou les services concernés et la nature des soins ;

5. Indiquer la nature de tous les soins et traitements prescrits imputables à l’accident et, si possible, la date de la fin de ceux-ci ;

6. Retranscrire dans son intégralité le certificat médical initial et, si nécessaire, reproduire totalement ou partiellement les différents documents médicaux permettant de connaître les lésions initiales et les principales étapes de l’évolution ;

7. Prendre connaissance et interpréter les examens complémentaires produits ;

8. Recueillir les doléances de la victime en l’interrogeant sur les conditions d’apparition, l’importance des douleurs et de la gêne fonctionnelle et leurs conséquences ;

9. Décrire un éventuel état antérieur en interrogeant la victime et en citant les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles. Dans cette hypothèse :
o Au cas où il aurait entraîné un déficit fonctionnel antérieur, fixer la part imputable à l’état antérieur et la part imputable au fait dommageable ;
o Au cas où il n’y aurait pas de déficit fonctionnel antérieur, dire si le traumatisme a été la cause déclenchante du déficit fonctionnel actuel ou si celui-ci se serait de toute façon manifesté spontanément dans l’avenir ;

10. Procéder à un examen clinique détaillé (y compris taille et poids) en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime, en assurant la protection de son intimité, et informer ensuite contradictoirement les parties et leurs conseils de façon circonstanciée de ses constatations et de leurs conséquences ;

11. Analyser dans une discussion précise et synthétique l’imputabilité entre l’accident, les lésions initiales et les séquelles invoquées en se prononçant sur :
o la réalité des lésions initiales,
o la réalité de l’état séquellaire en décrivant les actes, gestes et mouvements rendus difficiles ou impossibles en raison de l’accident,
o l’imputabilité directe et certaine des séquelles aux lésions initiales,
et en précisant l’incidence éventuelle d’un état antérieur ;

Évaluation médico-légale.

12. Déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons médicales en relation certaine et directe avec l’accident, la victime a dû interrompre totalement ses activités scolaires ou professionnelles, ou ses activités habituelles ; Si l’incapacité fonctionnelle n’a été que partielle, en préciser le taux ; Préciser la durée des arrêts de travail au regard des organismes sociaux ; si cette durée est supérieure à l’incapacité temporaire retenue, dire si ces arrêts sont liés au fait dommageable ;

13. Décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées pendant la maladie traumatique (avant consolidation) du fait des blessures subies. Les évaluer selon l’échelle habituelle de sept degrés ;

14. Donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique temporaire (avant consolidation). Le décrire précisément et l’évaluer selon l’échelle habituelle de sept degrés ;

15. Décrire, en cas de difficultés éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l’autonomie et, lorsque la nécessité d’une aide temporaire avant consolidation est alléguée, indiquer si l’assistance d’une tierce personne constante ou occasionnelle a été nécessaire, en décrivant avec précision les besoins (niveau de compétence technique, durée d’intervention quotidienne) ;

16. Fixer la date de consolidation, qui est le moment où les lésions se fixent et prennent un caractère permanent tel qu’un traitement n’est plus nécessaire, si ce n’est pour éviter une aggravation ;

Si la date de consolidation ne peut pas être fixée, l’expert établira un pré-rapport décrivant l’état provisoire de la victime et indiquera dans quel délai celle-ci devra être réexaminée ;

17. Chiffrer, par référence au « Barème indicatif des déficits fonctionnels séquellaires en droit commun » le taux éventuel de déficit fonctionnel permanent (état antérieur inclus) imputable à l’accident, résultant de l’atteinte permanente d’une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation, le taux de déficit fonctionnel devant prendre en compte, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime mais aussi les douleurs physiques et morales permanentes qu’elle ressent, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après consolidation ; dans l’hypothèse d’un état antérieur, préciser en quoi l’accident a eu une incidence sur celui-ci et décrire les conséquences de cette situation ;

18. Donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique permanent ; le décrire précisément et l’évaluer selon l’échelle habituelle de sept degrés, indépendamment de l’éventuelle atteinte fonctionnelle prise en compte au titre du déficit ;

19. Lorsque la victime allègue un préjudice d’agrément, à savoir l’impossibilité de se livrer à des activités spécifiques de sport et de loisir, ou une limitation de la pratique de ces activités, donner un avis médical sur cette impossibilité ou cette limitation et son caractère définitif, sans prendre position sur l’existence ou non d’un préjudice afférent à cette allégation ;

20. Dire s’il existe un préjudice sexuel ; le décrire en précisant s’il recouvre l’un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la morphologie, l’acte sexuel (libido, impuissance ou frigidité) et la fertilité (fonction de reproduction) ;

21. Lorsque la victime allègue une répercussion dans l’exercice de ses activités scolaires ou professionnelles, recueillir les doléances, les analyser, les confronter avec les séquelles retenues, en précisant les gestes professionnels rendus plus difficiles ou impossibles ; dire si un changement de poste ou d’emploi apparaît lié aux séquelles ;

22. Perte d’autonomie après consolidation : indiquer, le cas échéant :
o si l’assistance d’une tierce personne constante ou occasionnelle est nécessaire, en décrivant avec précision les besoins (niveau de compétence technique, durée d’intervention quotidienne)
o si des appareillages, des fournitures complémentaires et si des soins postérieurs à la consolidation sont à prévoir ; préciser la périodicité du renouvellement des appareils, des fournitures et des soins ;
o donner le cas échéant un avis sur les aménagements du logement, du véhicule, et plus généralement sur l’aptitude de la victime à mener un projet de vie autonome ;

23. Établir un récapitulatif de l’évaluation de l’ensemble des postes énumérés dans la mission;

FAISONS INJONCTION aux parties de communiquer aux autres parties les documents de toute nature qu’elles adresseront à l’expert pour établir le bien fondé de leurs prétentions ;

DISONS que l’expert pourra se faire communiquer tant par les médecins que par les caisses de sécurité sociale et par les établissements hospitaliers concernés, tous les documents médicaux qu’il jugerait utiles aux opérations d’expertise ;

DISONS que l’expert ne communiquera directement aux parties les documents médicaux ainsi obtenus directement de tiers concernant la victime qu’avec son accord ; qu’à défaut d’accord de celle-ci, ces éléments seront portés à la connaissance des parties par l’intermédiaire du médecin qu’elles auront désigné à cet effet.

DISONS que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera son rapport en un exemplaire original sous format papier et en copie sous la forme d’un fichier PDF enregistré sur un CD ROM au greffe du tribunal judiciaire de Nanterre, service du contrôle des expertises, extension du palais de justice, 6 rue Pablo Neruda 92020 Nanterre Cedex (01 40 97 14 82), dans le délai de quatre mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),

DISONS que l’expert devra, dès réception de l’avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l’expiration d’un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera à une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d’éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu’à l’issue de cette première réunion il adressera un compte rendu aux parties et au juge chargé du contrôle,

Dans le but de limiter les frais d’expertise, nous invitons les parties, pour leurs échanges contradictoires avec l’expert et la communication des documents nécessaires à la réalisation de la mesure, à utiliser la voie dématérialisée via l’outil OPALEXE,

DISONS que, sauf accord contraire des parties, l’expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l’ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction,

DISONS que l’expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l’article 276 du code de procédure civile et rappelons qu’il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives,

DÉSIGNONS le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d’instruction et statuer sur tous incidents,

DISONS que l’expert devra rendre compte à ce magistrat de l’avancement de ses travaux d’expertise et des diligences accomplies et qu’il devra l’informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,

FIXONS à la somme de 2 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui devra être consignée par [D] [A] entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, dans le délai maximum de six semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis,

DISONS qu’il convient de privilégier le paiement par virement, la partie demanderesse devant solliciter les coordonnées de la régie par mail (avec une copie scannée de la décision) : regie.tj-nanterre@justice.fr,

DISONS que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet,

DISONS qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération,

CONDAMNONS, à titre provisionnel, la société AXA FRANCE IARD à payer à [D] [A] la somme de 90.000 euros, à valoir sur la réparation de son préjudice,

CONDAMNONS la société AXA FRANCE IARD à verser à [D] [A] la somme de 2 000 euros, à titre de provision ad litem,
CONDAMNONS la société AXA FRANCE IARD aux dépens,

CONDAMNONS la société AXA FRANCE IARD à payer à [D] [A] une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETONS les demandes plus amples ou contraires.

FAIT À NANTERRE, le 20 janvier 2025.

LE GREFFIER

Pierre CHAUSSONNAUD

LE PRÉSIDENT

David MAYEL, Vice-président


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