L’Essentiel : Monsieur [O] [Y] a été inscrit au FICP suite à un non-paiement de son découvert de 180 euros. En avril 2023, le Crédit Agricole lui réclame 13 672,36 euros pour un incident de paiement. Malgré la demande de remboursement de son avocat, la banque refuse, affirmant que Monsieur [Y] est responsable des prélèvements. En octobre 2023, il assigne la banque en justice, demandant le remboursement, la suppression de son inscription au FICP, ainsi que des intérêts. La banque, de son côté, demande le rejet des demandes et réclame 14 817,27 euros pour le solde débiteur. Le tribunal déboute Monsieur [Y].
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Contexte du LitigeMonsieur [O] [Y] détient un compte à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc, avec une autorisation de découvert de 180 euros. En mars 2023, il est informé de son inscription au FICP en raison d’un non-paiement de son découvert. Demandes de Remboursement et Refus de la BanqueEn avril 2023, le Crédit Agricole met Monsieur [Y] en demeure de régler une somme de 13 672,36 euros liée à un incident de paiement. En mai, son avocat demande le remboursement de cette somme, mais la banque refuse, arguant que Monsieur [Y] est à l’origine des prélèvements. Assignation en JusticeMonsieur [Y] assigne la banque en octobre 2023, demandant le remboursement des prélèvements, la suppression de son inscription au FICP, ainsi que des intérêts et des frais de justice. Il maintient ses demandes lors des conclusions de décembre 2024. Arguments de Monsieur [Y]Monsieur [Y] soutient que plusieurs débits ont été effectués sans autorisation, dépassant le découvert autorisé. Il affirme avoir demandé un rejet des prélèvements par mail avant leur exécution et que la banque aurait dû agir en conséquence. Réponse de la BanqueLa Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc demande le rejet des demandes de Monsieur [Y] et réclame un montant de 14 817,27 euros pour le solde débiteur de son compte. Elle argue que les paiements contestés ont été autorisés et que l’opposition n’a pas été faite dans les délais requis. Clôture de l’Instruction et AudiencesL’instruction est clôturée en décembre 2024, et l’affaire est plaidée en audience, avec une mise en délibéré prévue pour janvier 2025. Décision du TribunalLe tribunal conclut que Monsieur [Y] n’a pas prouvé que les opérations étaient non autorisées et déboute ses demandes. Il condamne également Monsieur [Y] à payer 14 817,27 euros à la banque pour le solde débiteur, ainsi que des frais de justice. L’exécution provisoire de la décision est ordonnée. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de validité du consentement pour les opérations de paiement selon le Code monétaire et financier ?Le consentement pour les opérations de paiement est régi par les articles L. 133-7 et L. 133-8 du Code monétaire et financier. Selon l’article L. 133-7, le consentement est donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement. Il peut être donné par l’intermédiaire du bénéficiaire ou d’un prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement. En l’absence d’un tel consentement, l’opération ou la série d’opérations de paiement est réputée non autorisée. L’article L. 133-8 précise que l’utilisateur de services de paiement ne peut révoquer un ordre de paiement une fois qu’il a été reçu par le prestataire de services de paiement du payeur, sauf disposition contraire. Il est également stipulé que, pour les prélèvements, le payeur peut révoquer l’ordre de paiement au plus tard à la fin du jour ouvrable précédant le jour convenu pour le débit des fonds. Ainsi, le consentement est essentiel pour la validité des opérations de paiement, et son absence peut entraîner la non-autorisation des opérations contestées. Quelle est la portée de la responsabilité des prestataires de services de paiement en cas d’opérations non autorisées ?La responsabilité des prestataires de services de paiement est encadrée par les articles L. 133-18 à L. 133-24 du Code monétaire et financier. Ces articles établissent un régime spécial de responsabilité applicable en cas d’opérations de paiement non autorisées ou mal exécutées. En vertu de l’article L. 133-18, le prestataire de services de paiement est responsable des opérations de paiement non autorisées, sauf s’il peut prouver que le payeur a donné son consentement. De plus, l’article L. 133-19 stipule que le prestataire doit rembourser le montant de l’opération non autorisée sans délai, sauf en cas de fraude de la part du payeur. La jurisprudence de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 27 mars 2024 confirme que seul ce régime spécial est applicable, excluant tout autre régime de responsabilité du droit national. Ainsi, la responsabilité des prestataires de services de paiement est strictement encadrée par ces dispositions, et leur obligation de remboursement est conditionnée par la preuve du consentement du payeur. Comment la banque doit-elle réagir face à des opérations inhabituelles sur un compte ?La banque a une obligation de vigilance face aux opérations inhabituelles sur un compte, notamment en vertu de l’article L. 561-2 du Code monétaire et financier. Cet article impose aux établissements de crédit de mettre en place des procédures de vigilance pour détecter les opérations suspectes. En cas d’opérations manifestement inhabituelles, la banque doit s’interroger sur la légitimité de ces opérations et, le cas échéant, alerter le titulaire du compte. Dans le cas présent, il est mentionné que Monsieur [Y] a lui-même augmenté le plafond de sa carte à 16 000 euros, ce qui pourrait justifier une attention particulière de la banque. Cependant, la banque ne peut être tenue responsable si le titulaire du compte a donné son consentement à des opérations qui dépassent le découvert autorisé, à moins qu’il n’y ait eu une demande d’opposition clairement formulée. Ainsi, la banque doit agir avec prudence et diligence, mais elle n’est pas responsable des opérations autorisées par le titulaire du compte, même si elles sont inhabituelles. Quelles sont les conséquences d’une demande d’opposition sur un prélèvement ?La demande d’opposition sur un prélèvement est régie par l’article L. 133-8 du Code monétaire et financier. Cet article stipule que le payeur peut révoquer l’ordre de paiement au plus tard à la fin du jour ouvrable précédant le jour convenu pour le débit des fonds. En cas de prélèvement, si l’opposition est faite dans ce délai, le prélèvement ne peut être effectué. Cependant, si l’opposition est formulée après que l’ordre de paiement a été reçu par le bénéficiaire, l’ordre devient irrévocable. Dans le cas de Monsieur [Y], sa demande d’opposition a été faite le 4 novembre 2022 à 10h48, alors que les débits contestés avaient déjà été effectués le 3 et 4 novembre. Ainsi, la banque n’était pas en mesure de bloquer ces prélèvements, car l’opposition a été faite après que les opérations avaient été authentifiées et exécutées. Les conséquences d’une opposition tardive peuvent donc entraîner la validation des prélèvements effectués, rendant la demande de remboursement non fondée. Quelles sont les implications de la décision de justice sur les frais et dépens ?Les implications de la décision de justice sur les frais et dépens sont régies par les articles 696 et 700 du Code de procédure civile. L’article 696 stipule que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge. Dans le cas présent, Monsieur [Y] a été débouté de ses demandes, ce qui entraîne sa condamnation aux dépens de la procédure. De plus, l’article 700 prévoit que le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme pour couvrir les frais exposés et non compris dans les dépens. Le tribunal a décidé de condamner Monsieur [Y] à verser 1 400 euros à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE au titre de l’article 700. Ces articles visent à garantir que la partie qui succombe dans ses demandes supporte les frais de la procédure, contribuant ainsi à l’équité entre les parties. Ainsi, la décision de justice a des conséquences financières directes pour la partie perdante, qui doit assumer les frais de la procédure et les frais irrépétibles. |
à
la SCP AKCIO BDCC AVOCATS
la SELARL MAS
TRIBUNAL JUDICIAIRE Par mise à disposition au greffe
DE NIMES
**** Le 17 Janvier 2025
Troisième Chambre Civile
N° RG 23/05177 – N° Portalis DBX2-W-B7H-KFXT
JUGEMENT
Le tribunal judiciaire de Nîmes, Troisième Chambre Civile, a dans l’affaire opposant :
M. [O] [Y]
né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2]
représenté par la SELARL MAS, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant
à :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC inscrite au RCS DE MONTPELLIER sous le n° 492 826 417, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par la SCP AKCIO BDCC AVOCATS, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant
Rendu publiquement le jugement contradictoire suivant, statuant en premier ressort après que la cause a été débattue en audience publique le 20 Décembre 2024 devant Chloé AGU, Juge, statuant comme juge unique, assistée de Corinne PEREZ, Greffier, et qu’il en a été délibéré.
N° RG 23/05177 – N° Portalis DBX2-W-B7H-KFXT
Monsieur [O] [Y] est titulaire du compte numéro [XXXXXXXXXX01] ouvert dans les livres de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc bénéficiant initialement d’une autorisation de découvert à hauteur de 180 euros.
Pra courrier du 28 mars 2023, le CREDIT AGRICOLE DU LANGUEDOC a informé Monsieur [Y] de son inscription au FICP du fait du non paiement du découvert en compte.
Par courrier du 18 avril 2023, le CREDIT AGRICOLE l’a mis en demeure d’avoir à régler une somme de 13 672,36 euros suite à l’incident non régularisé du 7 novembre 2022.
Par courrier du 23 mai 2023, le Conseil de Monsieur [O] [Y] a sollicité auprès de la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE le remboursement de la somme prélevée.
Par courrier du 14 juin 2023, le CREDIT AGRICOLE a refusé le remboursement en ce que Monsieur [Y] était à l’origine des demandes de prélèvement.
Par acte en date du 9 octobre 2023, Monsieur [O] [Y] a assigné la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC devant le Tribunal Judiciaire de Nîmes aux fins principales de la condamner au titre de sa responsabilité contractuelle à lui payer la somme de 13 672, 36 euros correspondant au montant des prélèvements débités à tort sur son compte bancaire, dire que cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter de la lettre de mise en demeure du 23 mai 2023, de la condamner à faire le nécessaire auprès du Fichier FICP pour supprimer l’inscription effectuée au titre de l’incident de paiement constitué par le découvert en compte ouvert au nom de Monsieur [O] [Y] sous astreinte de 100 euros par jour de retard et la condamner à 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 3 décembre 2024, Monsieur [O] [Y] maintient ses demandes et sollicite que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC soit déboutée de ses demandes.
Il expose notamment que :
-plusieurs débits ont été enregistrés à partir du 18 octobre 2022 engendrant un découvert en compte non autorisé de 13 242,71 euros;
-la date de valeur des débits de 2 280,73 euros, 3 250,64 euros, 2 180,10 euros ou 4 006,39 euros est le 7 novembre 2022 ;
-or, il a adressé un mail au Crédit agricole en date du 4 novembre 2022 pour faire opposition et demandant de rejeter ces prélèvements venant de la société CRIPTO ;
-il a déposé plainte ;
-la banque n’a pas tenu compte de ce mail car elle a laissé débiter les différentes opérations ;
-la faute est d’autant plus avérée que la banque aurait du rejeter les prélèvements au-delà de l’autorisation de découvert ;
-les opérations sont manifestement inhabituelles alors le banquier aurait du s’alarmer ;
malgré sa demande de rejet clairement formulée le 4 novembre, la banque a laissé les prélèvements s’opérer.
En réplique, le demandeur précise que :
-les articles L. 333-7 à 333 – 8 du Code monétaire et financier ne visent pas l’opposition en cas de fraude ;
-l’opposition est en l’espèce justifiée par la fraude : le banquier a demandé à Monsieur [Y] de déposer une plainte, ce qu’il a fait ;
-dès le 4 novembre 2022, Monsieur [O] [Y] écrivait à la banque ;
-les opérations n’ont été enregistrées que le 5 novembre 2022 avec une date de valeur au 07 novembre 2022 ;
-la date de valeur est, pour les opérations litigieuses ainsi qu’il ressort du relevé de compte produit par la banque elle-même, le 7 novembre ;
-la date de l’opération est également le 07 novembre comme le mentionne le relevé colonne de gauche ;
-la banque avait toutes les raisons de rejeter ces débits : elle était informée d’une fraude, les paiements étaient de montants élevés et dépassaient de plus de 13.000 euros le découvert autorisé ;
-le fait que le titulaire du compte ait demandé à augmenter son plafond n’exonère absolument pas la banque de sa responsabilité.
****
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 6 décembre 2024, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC demande au tribunal de :
-débouter le demandeur de ses demandes ;
*à titre reconventionnel :
-condamner Monsieur [Y] à 14 817,27 euros au titre du solde débiteur du compte [XXXXXXXXXX01] ;
-condamner Monsieur [Y] à 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Elle expose notamment que :
-l’irrévocabilité de l’ordre ou de l’engagement de payer donné au moyen d’une carte de paiement est consacrée en matière de carte comme pour tous autres instruments de paiement ;
-le titulaire de la carte ne peut plus révoquer son ordre une fois que celui-ci ait été reçu par le bénéficiaire c’est à dire dès composition de son code secret sur le terminal de paiement ;
-ce n’est que le 4 novembre à 10h48 qu’il a indiqué à la banque qu’il était victime d’une fraude ;
N° RG 23/05177 – N° Portalis DBX2-W-B7H-KFXT
– il a uniquement sollicité le rejet du prélèvement mais n’a révoqué aucun ordre de virement et n’a pas fait opposition à sa carte qui aurait été injustifiée en application de l’aricle L133-17 du code monétaire et financier ;
-elle produit l’historique des autorisations sur le compte du demandeur démontrant que -les paiements litigieux ont été effectués non le 5 novembre mais les 3 et 4 novembre 2022 à 9h27 et 9h58 avant l’opposition au prélèvement ;
-à partir du 5 novembre 2022, au lendemain du message, seul un prelèvement a été tenté mais refusé ;
-les opérations sont des paiements par carte effectués par le titulaire du compte, authentifiés par Monsieur [Y] et non des prélèvements ;
-l’ordre de paiement était irrévocable sauf opposition pour perte, vol, détournement ou toute utilisation non autorisée de son instrument de paiement ou des données liées, ce qui n’était pas le cas en l’espèce ;
-elle n’a donc pas commis de faute ;
-au contraire, elle n’a pas manqué d’alerter le demandeur du risque de fraude auquel il s’était exposé en ce qu’il a augmenté lui-même le plafond carte à 16 000 euros la veille de son message d’opposition ;
-son solde a atteint un solde débiteur bien supérieur au montant du découvert autorisé ;
-les nombreux courriers adressés sont restés sans effet ;
-elle est ainsi fondée à solliciter la somme de 14 817,27 euros arrêtée provisoirement au 3 mai 2024.
En réplique le défendeur expose notamment que :
-l’action en responsabilité intentée par Monsieur [Y] à la suite d’opérations qu’il prétend non-autorisées sera rejetée car fondée sur le droit de responsabilité de droit commun et non sur les textes spéciaux prévus à cet effet ;
-il existe bien un décalage entre la demande de paiement et la comptabilisation du règlement sur le compte qui peut dépendre notamment du mode de paiement ;
-le délai peut être influencé par les week-ends, les jours fériés, le fournisseur bancaire du destinataire ;
-c’est bien la date des opérations qui compte et non la date de valeur.
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L’instruction a été clôturée le 6 décembre 2024 par ordonnance du juge de la mise en état du 15 novembre 2024.
L’affaire, plaidée à l’audience du 20 décembre 2024 a été mise en délibéré au 17 janvier 2025.
Sur les demandes principales
Le demandeur forme une demande à hauteur de 13 672,36 euros correspondant au montant des prélèvements débités sur son compte bancaire.
Aux termes de l’article L 133-7 du Code monétaire et financier, le consentement est donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement.
Le consentement peut être donné par l’intermédiaire du bénéficiaire ou d’un prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement mentionné au 7° du II de l’article L. 314-1.
En l’absence d’un tel consentement, l’opération ou la série d’opérations de paiement est réputée non autorisée.
Le consentement peut être retiré par le payeur tant que l’ordre de paiement n’a pas acquis un caractère d’irrévocabilité conformément aux dispositions de l’article L. 133-8.
Le consentement à l’exécution d’une série d’opérations de paiement peut aussi être retiré, avec pour effet que toute opération postérieure est réputée non autorisée.
Aux termes de l’article L133-8 I et II du Code monétaire et financier,
I. – L’utilisateur de services de paiement ne peut révoquer un ordre de paiement une fois qu’il a été reçu par le prestataire de services de paiement du payeur sauf disposition contraire du présent article.
II. – Lorsque l’opération de paiement est initiée par le bénéficiaire ou par le payeur qui donne un ordre de paiement par l’intermédiaire du bénéficiaire, le payeur ne peut révoquer l’ordre de paiement après avoir transmis l’ordre de paiement au bénéficiaire ou donné son consentement à l’exécution de l’opération de paiement au bénéficiaire.
Lorsque l’opération de paiement est initiée par un prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement mentionné au 7° du II de l’article L. 314-1, le payeur ne peut révoquer l’ordre de paiement après avoir donné son consentement à ce que le prestataire de services de paiement fournissant le service d’initiation de paiement initie l’opération de paiement.
Toutefois, en cas de prélèvement et sans préjudice du droit à remboursement mentionné à l’article L. 133-25, le payeur peut révoquer l’ordre de paiement au plus tard à la fin du jour ouvrable précédant le jour convenu pour le débit des fonds.
Aux termes d’une jurisprudence de la chambre commerciale de la cour de cassation du 27 mars 2024, lorsque la responsabilité d’un prestataire de services de paiement est recherchée en raison d’une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée, seul est en effet applicable le régime spécial de responsabilité défini aux articles L. 133-18 à L. 133-24 du Code monétaire et financier, qui transposent les articles 58, 59 et 60, paragraphe 1, de la Directive n° 2007/64/CE, à l’exclusion de tout régime alternatif de responsabilité résultant du droit national.
A titre préliminaire, il y a lieu de rappeler que si Monsieur [Y] fonde son action sur la responsabilité civile de droit commun, il n’y a pas lieu de rejeter son action en ce qu’en vertu de son pouvoir de requalification tiré de l’article 12 du code de procédure civile, la juridiction peut requalifier le fondement juridique de la demande et l’examiner ainsi sur le fondement des articles L 133-18 du Code monétaire et financier et suivants applicables en l’espèce.
Il résulte de la pièce du demandeur portant le numéro 13 qu’il a contesté plusieurs transactions.
Il est constant que Monsieur [Y] a adressé un courriel à sa banque le 4 novembre à 10h48: “bonjour, je vous demande de faire opposition au prélèvement venant de la société CRIPTO (…)”. Il apparaît ainsi que cette demande vise seulement des prélèvements et non des paiements par carte bancaire.
De plus, c’est à juste titre que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE fait observer qu’en application de l’article L133-8 du Code monétaire et financier, lorsque l’opération de paiement est faite par le titulaire de la carte, ce dernier ne peut plus révoquer son ordre une fois reçu par le bénéficiaire. En effet, il apparaît à la lecture de la pièce 3 de la défenderesse “historique des authentifications de l’ACS serveur avec authentification par Securipass + information sur les dates + information sur les adresses IP” qu’il s’agit en réalité de paiements par carte bancaire effectués par Monsieur [Y] qui ont été authentifiés selon la procédure SECUR PASS. Ainsi, l’ordre est irrévocable sauf en cas d’opposition fondée.
Enfin, la juridiction constate au vu des pièces numéro 2 et 3 de la défenderesse que les sommes contestées ont manifestement fait l’objet d’un paiement par carte bancaire avant le 4 novembre 2022 à 10h48, date du courriel de contestation de Monsieur [Y] en ce que le dernier montant de 4 006,39 euros a été réglé le 4 novembre 2022 à 9h58. En effet, Monsieur [Y] s’est rapproché de la banque pour faire opposition le 4 novembre à 10h48 donc postérieurement aux débits contestés.
C’est à juste titre que la défenderesse fait observer que c’est bien la date des opérations qu’il convient de prendre en considération et non la date de valeur qui est nécessairement postérieure.
De plus, il apparaît que sa demande est rédigée ainsi : “bonjour, je vous demande de faire opposition au prélèvement venant de la société CRIPTO (…)” et dès lors vise seulement des prélèvements et non des paiements par carte bancaire.
En tout état de cause, c’est à juste titre que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE fait observer qu’en application de l’article L133-8 du Code monétaire et financier, lorsque l’opération de paiement est faite par le titulaire de la carte, ce dernier ne peut plus révoquer son ordre une fois reçu par le bénéficiaire. Ainsi, l’ordre est irrévocable sauf en cas d’opposition fondée.
Par ailleurs, il ne peut pas être fait grief à la banque de ne pas s’être alarmée face au fonctionnement du compte en ce qu’il apparaît que Monsieur [Y] a lui-même augmenté le plafond de sa carte à 16 000 euros le 3 novembre 2022 et que le jour même un conseiller de la banque défenderesse a pris soin de l’alerter du risque de fraude.
Enfin, il ne peut être fait grief à l’établissement bancaire de ne pas bloquer les prélèvements lorsque le découvert autorisé est dépassé.
Dans ces conditions il ne peut être imputée à la défenderesse une faute et ainsi, le demandeur sera débouté de l’ensemble de ses demandes.
N° RG 23/05177 – N° Portalis DBX2-W-B7H-KFXT
Sur la demande reconventionnelle
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC forme une demande reconventionnelle à hauteur de
14 817,27 euros arrêtée au 3 mai 2024 au titre du solde débiteur du compte numéro [XXXXXXXXXX01].
Aux termes de la convention d’ouverture de compte souscrite par Monsieur [O] [Y] auprès de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC, le découvert autorisé était de 180 euros.
Il apparaît que l’établissement bancaire a adressé plusieurs courriers à Monsieur [Y] pour qu’il régularise la sitation et ce notamment en date des 9 janvier 2023, 22 mai 2023 et 12 février 2024 mais en vain.
Il apparaît qu’au 3 mai 2024, le solde débiteur est en effet de 14 817,27 euros.
Dans ces conditions, il sera fait droit à la demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC à hauteur de 14 817,27 euros.
Sur les demandes accessoires
1) Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du Code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Monsieur [O] [Y], qui succombe à l’instance, sera condamné aux entiers dépens de la présente procédure.
2) Sur les frais irrépétibles
L’article 700 du Code de procédure civile prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
En l’espèce, il convient de condamner Monsieur [Y] à payer à la défenderesse la somme de 1 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
3) Sur l’exécution provisoire
En vertu de l’article 514 du Code de procédure civile les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
En l’espèce il sera rappelé que l’exécution provisoire de la décision est de droit.
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
Condamne Monsieur [O] [Y] à payer la somme de 14 817,27 euros à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC au titre du solde débiteur du compte numéro [XXXXXXXXXX01] ;
Déboute Monsieur [O] [Y] de ses demandes ;
Condamne Monsieur [O] [Y] à payer la somme de 1 400 euros à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne Monsieur [O] [Y] aux dépens ;
Rappelle que l’exécution provisoire de la décision est de droit.
Le Greffier, Le Président,
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