Intervention d’un assureur dans une procédure d’expertise judiciaire

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Intervention d’un assureur dans une procédure d’expertise judiciaire

L’Essentiel : Le 18 décembre 2023, le Président du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné une mesure d’expertise à la demande de Monsieur [G] [S], confiée à Monsieur [Z] [U]. Le 30 septembre 2024, Monsieur [M] [W] a assigné la CRAMA pour que l’expertise soit déclarée commune. Lors de l’audience du 27 novembre 2024, Gan Assurances a demandé à intervenir, justifiant son intérêt en tant qu’assureur de Monsieur [W]. Le tribunal a accepté cette intervention et a déclaré les opérations d’expertise communes à la CRAMA, tout en laissant les dépens provisoirement à la charge de Monsieur [W].

Ordonnance de référé et mesure d’expertise

Le 18 décembre 2023, le Président du tribunal judiciaire de Rennes a prononcé une ordonnance de référé (RG 23/00082) à la demande de Monsieur [G] [S], ordonnant une mesure d’expertise confiée à Monsieur [Z] [U]. Cette décision a été prise en présence de la société Gan Assurances et de Monsieur [M] [W].

Assignation en référé

Le 30 septembre 2024, Monsieur [M] [W] a délivré une assignation en référé (RG 24/00694) contre la Caisse Régionale d’Assurances Mutuelles Agricoles (CRAMA) Bretagne Pays-de-la-Loire. Il a demandé que les opérations d’expertise ordonnées le 18 décembre 2023 soient déclarées communes et opposables à la CRAMA, tout en réservant les dépens.

Intervention de Gan Assurances

Lors de l’audience du 27 novembre 2024, la SA Gan Assurances a exprimé son souhait d’intervenir volontairement dans l’instance, se présentant comme l’assureur de Monsieur [W] au moment de l’ouverture de chantier. Son intervention a été jugée recevable, car elle justifiait d’un intérêt à agir en lien avec les prétentions du demandeur.

Demande d’appel en cause

Le tribunal a considéré qu’il était dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de permettre à l’expert d’accomplir sa mission en présence de toutes les parties concernées. Le demandeur et Gan Assurances ont sollicité la participation de la CRAMA aux opérations d’expertise, en vue d’un procès au fond. La CRAMA a formulé des réserves sur cette demande.

Décision sur les demandes annexes

Le juge a statué que la partie défenderesse à l’expertise ne pouvait pas être considérée comme perdante au sens des dispositions relatives aux dépens. Ainsi, les dépens ont été provisoirement laissés à la charge de Monsieur [W].

Conclusion de la décision

Le tribunal a reçu la société Gan Assurances en son intervention volontaire et a déclaré les opérations d’expertise communes à la CRAMA. Il a ordonné que Monsieur [W] communique toutes les pièces aux parties et a fixé une provision complémentaire de 2000 € à valoir sur la rémunération de l’expert. Les dépens ont été laissés provisoirement à la charge du demandeur à l’appel en cause, et toute autre demande a été rejetée.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’une intervention volontaire selon l’article 325 du Code de procédure civile ?

L’article 325 du Code de procédure civile stipule que l’intervention n’est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

Cette disposition implique que l’intervenant doit démontrer un intérêt à agir qui soit en rapport direct avec les prétentions des parties déjà en cause.

L’appréciation de cet intérêt et du lien suffisant relève du pouvoir souverain des juges du fond, ce qui signifie qu’ils ont une large latitude pour décider de la recevabilité de l’intervention.

Dans l’affaire en question, la société Gan Assurances a justifié son intérêt à agir en tant qu’assureur de Monsieur [W] au moment de la déclaration d’ouverture de chantier, ce qui établit un lien suffisant avec le litige en cours.

Ainsi, la cour a décidé de recevoir la société Gan Assurances en son intervention volontaire, considérant que ses prétentions se rattachent au présent litige.

Comment se justifie la demande d’appel en cause selon l’article 145 du Code de procédure civile ?

L’article 145 du Code de procédure civile permet à un tiers d’être mis en cause dans une instance si son intervention est justifiée par un motif légitime.

Cette disposition vise à garantir une bonne administration de la justice en permettant à toutes les parties concernées de participer aux opérations d’expertise.

Dans le cas présent, le demandeur et la société Gan Assurances ont sollicité la participation de la CRAMA Bretagne Pays-de-la-Loire aux opérations d’expertise, en raison de l’intérêt qu’ils ont à voir cette partie impliquée dans le litige.

Le demandeur a également produit des attestations d’assurances souscrites auprès de la CRAMA, renforçant ainsi la légitimité de sa demande.

La cour a donc fait droit à cette demande, permettant à la CRAMA de participer aux opérations d’expertise, ce qui est conforme à l’esprit de l’article 145.

Quelles sont les implications des dépens selon l’article 491 du Code de procédure civile ?

L’article 491 du Code de procédure civile précise que le juge des référés statue sur les dépens.

Cela signifie que le juge a la responsabilité de décider qui supportera les frais liés à la procédure, y compris les frais d’expertise.

Dans cette affaire, la partie défenderesse à l’expertise ne peut pas être considérée comme la partie perdante au sens des articles 696 et 700 du même code.

En conséquence, le juge a décidé de laisser provisoirement les dépens à la charge de Monsieur [W], ce qui indique que la décision sur les dépens peut être révisée ultérieurement en fonction de l’évolution du litige.

Cette approche vise à garantir une équité dans la répartition des frais entre les parties impliquées dans le litige.

RE F E R E

Du 17 Janvier 2025

N° RG 24/00694
N° Portalis DBYC-W-B7I-LFX6
54G

c par le RPVA
le
à
Me Christophe CAILLERE,
Me Edouard-jean COURANT,
Me Christophe DAVID

– copie dossier
– 2 copies service expertises

Expédition et copie executoire délivrée le:
à
Me Christophe CAILLERE,
Me Edouard-jean COURANT

Expédition délivrée le:
à
Me Christophe DAVID

Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES

OR D O N N A N C E

DEMANDEUR AU REFERE:

Monsieur [M] [W],
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Christophe CAILLERE, avocat au barreau de RENNES, substitué par Me NADALINI, avocat au barreau de RENNES

DEFENDEURS AU REFERE:

Société d’assurance CAISSE REGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE PAYS DE LOIRE dite GROUPAMA LOIRE BRETAGNE
agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Christophe DAVID, avocat au barreau de RENNES, substitué par Me MALAURIE, avocate au barreau de RENNES,

PARTIE INTERVENANTE :

société d’assurance GAN ASSSURANCES SA
assureur de Mr [W] [M],
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Edouard-Jean COURANT, avocat au barreau de RENNES, substitué par Me SALLIOU, avocate au barreau de RENNES

LE PRESIDENT: Béatrice RIVAIL, Présidente du tribunal judiciaire

LE GREFFIER: Graciane GILET, greffier, lors des débats et lors du prononcé par mise à disposition au greffe, qui a signé la présente ordonnance.

DEBATS: à l’audience publique du 27 Novembre 2024,

ORDONNANCE: contradictoire, prononcée par mise à disposition au Greffe des référés le 17 Janvier 2025, date indiquée à l’issue des débats

VOIE DE RECOURS: Cette ordonnance peut être frappée d’appel devant le greffe de la Cour d’Appel de RENNES dans les 15 jours de sa signification en application des dispositions de l’article 490 du code de procédure civile.
L’appel de cette décision n’est cependant pas suspensif de son exécution.

FAITS ET PROCÉDURE

Vu l’ordonnance de référé prononcée le 18 décembre 2023 (RG 23/00082) par le Président du tribunal judiciaire de Rennes, à la requête de Monsieur [G] [S] et au contradictoire notamment de la société anonyme Gan Assurances et Monsieur [M] [W], ayant ordonné une mesure d’expertise confiée à Monsieur [Z] [U].

Vu l’assignation en référé délivrée le 30 septembre 2024 (RG 24/00694), à la requête de Monsieur [M] [W], à l’encontre de la Caisse Régionale d’Assurances Mutuelles Agricoles (CRAMA) Bretagne Pays-de-la Loire, au visa des articles 1792-4-2,1792-4-3 et 2224 du code civil et 145 du code de procédure civile, aux fins de :
déclarer les opérations d’expertise consécutives à l’ordonnance de référés du 18 décembre 2023, précitée, communes et opposables à la CRAMA Bretagne Pays-de-la-Loire,réserver les dépens.
Lors de l’audience utile du 27 novembre 2024, par conclusions déposées à la barre, la SA GAN Assurances, représentée par son conseil, a indiqué vouloir intervenir volontairement à l’instance.

Á cette même audience, Monsieur [M] [W], pareillement représenté, a sollicité le bénéfice de son exploit introductif d’instance.

Dûment représentée, la Caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de Loire (GROUPAMA LOIRE BRETAGNE) a formulé à la barre, les protestations et réserves d’usage sur la demande d’appel à la cause formée à son encontre.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’intervention volontaire

Aux termes de l’article 325 du Code de procédure civile, l’intervention n’est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

L’appréciation de l’intérêt à agir de l’intervenant volontaire et du lien suffisant qui doit exister entre ses demandes et les prétentions originaires relève du pouvoir souverain des juges du fond.

En l’espèce, la société Gan Assurances entend être reçue en son intervention volontaire, soutenant être l’assureur de M. [W] au moment de la déclaration d’ouverture de chantier. La société Gan Assurances entend donc intervenir à la procédure en s’associant aux prétentions du demandeur.

La société Gan Assurances justifie donc d’un intérêt à agir à la présente instance tendant à l’appel à la cause d’une nouvelle partie dans le cadre des opérations d’expertise précitées. En outre, ses prétentions se rattachent par un lien suffisant au présent litige.

Elle sera donc reçue en son intervention volontaire.

Sur la demande d’appel en cause

Il convient, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de permettre à l’expert d’accomplir sa mission en présence de toutes les parties dont l’intervention est justifiée par un motif légitime au sens de l’article 145 du Code de procédure civile.

En application de l’article 331 alinéa 2 du précédent Code, un tiers “peut également être mis en cause par la partie qui a intérêt afin de lui rendre commun le jugement”.

En l’espèce, le demandeur et la société Gan Assurances sollicitent la participation de la CRAMA Bretagne Pays-de-la-Loire aux opérations d’expertise judiciaire ordonnées par l’ordonnance de référés du 18 décembre 2023, dans la perspective d’un procès au fond qu’ils envisagent d’intenter à l’encontre de la défenderesse.

Le demandeur verse aux débats les attestations d’assurances auxquelles il a souscrit auprès de la CRAMA pour les polices Multirisques professionnelle pour l’année 2016, Responsabilité civile professionnelle et responsabilité civile décennale pour l’année 2023 (ses pièces n°2 à 4).

La CRAMA ayant de plus formé les protestations et réserves d’usage sur cette demande, il convient dès lors d’y faire droit.

La présente décision ayant pour objet d’étendre la mission de l’expert à de nouvelles parties, il convient de mettre à la charge de Monsieur [M] [W] une consignation supplémentaire à valoir sur les frais d’expertise résultant de cette mise en cause.

Sur les demandes annexes

L’article 491 du code de procédure civile dispose, en second alinéa, que le juge des référés « statue sur les dépens ».

La partie défenderesse à une expertise ou à son extension, ordonnée sur le fondement de l’article 145 du même code, ne saurait être regardée comme la partie perdante au sens des dispositions des articles 696 et 700 dudit code.

Les dépens seront, en conséquence, provisoirement laissés à la charge de Monsieur [W].

PAR CES MOTIFS

Statuant en référé, par ordonnance contradictoire et en premier ressort, rendue par mise à disposition au greffe :

RECEVONS la société Gan Assurances en son intervention volontaire ;

DECLARONS communes à la CRAMA Bretagne Pays-de-la-Loire les opérations d’expertise ordonnées par le juge des référés aux termes de l’ordonnance rendue le 18 décembre 2023 (RG N°23/00082);

DISONS qu’elle sera tenue d’intervenir en la cause, d’être présente ou représentée aux opérations d’expertise ;

DISONS que Monsieur [W] lui communiquera sans délai l’ensemble des pièces déjà produites par les parties ainsi que les notes rédigées par l’expert ;

DISONS que l’expert devra convoquer la CRAMA Bretagne Pays-de-la-Loire à la prochaine réunion d’expertise au cours de laquelle elle sera informée des diligences déjà accomplies et invitée à formuler ses observations ;

FIXONS à la somme de 2000 € (deux mille euros) la provision complémentaire à valoir sur la rémunération de l’expert que Monsieur [W] devra consigner au moyen d’un chèque CARPA émis à l’ordre du régisseur du tribunal judiciaire de Rennes dans un délai de deux mois faute de quoi la présente décision sera caduque ;

LAISSONS provisoirement les dépens à la charge du demandeur à l’appel en cause;

REJETONS toute autre demande plus ample ou contraire.

La Greffière Le Juge des référés


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