Expertise judiciaire et mise en cause d’un bureau d’études dans un contexte de désordres immobiliers

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Expertise judiciaire et mise en cause d’un bureau d’études dans un contexte de désordres immobiliers

L’Essentiel : Le 29 octobre 2021, le président du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes a ordonné une expertise judiciaire à la demande de Monsieur [N] [O] et Madame [D] [P] épouse [O], désignant Monsieur [C] [Z] comme expert. Le 23 avril 2024, les opérations d’expertise ont été déclarées communes et opposables à plusieurs parties, dont la SAS SOFRAT et son assureur, la SA AXA FRANCE IARD. Le 14 octobre 2024, ces dernières ont assigné la SAS SOLENG, invoquant des contradictions dans les recommandations des bureaux d’études. Lors de l’audience du 3 décembre 2024, la SAS SOLENG n’a pas comparu.

Ordonnance d’expertise judiciaire

Par ordonnance du 29 octobre 2021, le président du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes a ordonné une expertise judiciaire à la demande de Monsieur [N] [O] et Madame [D] [P] épouse [O], désignant Monsieur [C] [Z] comme expert. Cette décision a été prise dans le cadre de l’affaire enregistrée sous le numéro 21/00928.

Extension des opérations d’expertise

Le 23 avril 2024, les opérations d’expertise ont été déclarées communes et opposables à plusieurs parties, dont la SAS SOFRAT et son assureur, la SA AXA FRANCE IARD, ainsi qu’à d’autres sociétés impliquées dans le projet immobilier. Cette demande a été formulée par la société PROMOBAT.

Assignation de la SAS SOLENG

Le 14 octobre 2024, la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD ont assigné la SAS SOLENG devant le tribunal, demandant que les opérations d’expertise soient rendues communes et opposables à cette dernière. Elles ont justifié leur demande en invoquant des contradictions dans les recommandations des bureaux d’études impliqués dans le projet.

Audience et absence de la SAS SOLENG

Lors de l’audience du 3 décembre 2024, la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD ont soutenu leur demande, tandis que la SAS SOLENG, bien que régulièrement assignée, n’a pas comparu ni constitué avocat. Le tribunal a renvoyé à l’assignation et aux écritures déposées pour plus de détails.

Motifs de la décision

Le tribunal a statué sur la demande d’ordonnance commune en se basant sur l’article 145 du code de procédure civile, qui permet d’ordonner des mesures d’instruction avant tout procès en cas de motif légitime. La société PROMOBAT a été impliquée dans la construction d’un ensemble immobilier, et un mur s’est effondré, justifiant ainsi la demande d’expertise.

Décision du tribunal

Le juge a déclaré les opérations d’expertise communes et opposables à la SAS SOLENG, ordonnant également la communication des pièces et notes de l’expert à cette société. Un délai supplémentaire a été imparti à l’expert pour déposer son rapport, et une provision a été fixée pour sa rémunération.

Dépens à la charge de la SAS SOFRAT et de la SA AXA FRANCE IARD

Le tribunal a décidé de laisser les dépens à la charge de la SAS SOFRAT et de la SA AXA FRANCE IARD, en l’absence de partie succombante. La décision a été prononcée le 10 janvier 2025, avec des instructions précises concernant la consignation des frais et la communication des documents.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 145 du code de procédure civile dans le cadre de l’expertise judiciaire ?

L’article 145 du code de procédure civile stipule que :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. »

Cet article permet à une partie de demander des mesures d’instruction, comme une expertise, avant même qu’un procès ne soit engagé, si elle peut justifier d’un motif légitime.

Dans l’affaire en question, la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD ont invoqué cet article pour justifier leur demande de rendre les opérations d’expertise communes et opposables à la SAS SOLENG.

Elles ont démontré qu’il existait une probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel, notamment en raison de l’effondrement d’un mur et des contradictions entre les recommandations de différents bureaux d’études.

Ainsi, la décision du juge des référés de rendre l’expertise opposable à la SAS SOLENG s’inscrit dans le cadre de l’article 145, car il a reconnu l’existence d’un motif légitime.

Comment l’article 472 du code de procédure civile s’applique-t-il en cas de non-comparution d’une partie ?

L’article 472 du code de procédure civile dispose que :

« Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. »

Cet article établit que même en l’absence d’une partie, le juge peut rendre une décision sur le fond de l’affaire.

Dans le cas présent, la SAS SOLENG n’a pas comparu ni constitué avocat lors de l’audience.

Malgré cela, le juge a examiné la demande de la SAS SOFRAT et de la SA AXA FRANCE IARD, en s’assurant que celle-ci était régulière et fondée.

Cela montre que le système judiciaire permet de statuer même en l’absence d’une partie, tant que les conditions de recevabilité et de fond sont respectées.

Quelles sont les implications de l’article 696 du code de procédure civile concernant les dépens ?

L’article 696 du code de procédure civile stipule que :

« Les dépens sont à la charge de la partie qui succombe. »

Cet article précise que les frais de justice, appelés dépens, doivent être supportés par la partie qui perd le procès.

Dans l’affaire en question, le juge a décidé de laisser les dépens à la charge de la SAS SOFRAT et de la SA AXA FRANCE IARD, en l’absence de partie succombante.

Cela signifie qu’aucune des parties n’a été déclarée perdante dans cette instance, ce qui a conduit à une décision de ne pas imputer les frais à l’une ou l’autre des parties.

Cette disposition vise à garantir l’équité dans le partage des frais de justice, en évitant que l’une des parties ne soit pénalisée par des coûts supplémentaires en cas de décision favorable ou défavorable.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français

Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 10 janvier 2025
MINUTE N° 25/______
N° RG 24/01060 – N° Portalis DB3Q-W-B7I-QNVT

PRONONCÉE PAR

Elisa VALDOR, Juge,
Assistée de Alexandre EVESQUE, greffier, lors des débats à l’audience du 3 décembre 2024 et de Fabien DUPLOUY, greffier, lors du prononcé

ENTRE :

S.A.S. SOFRAT
dont le siège social est sis [Adresse 7]

représentée par Maître Sophie TOURAILLE de la SELEURL SELARLU SOPHIE TOURAILLE AVOCAT, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : R070

S.A. AXA FRANCE IARD
dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Maître Sophie TOURAILLE de la SELEURL SELARLU SOPHIE TOURAILLE AVOCAT, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : R070

DEMANDERESSES

D’UNE PART

ET :

S.A.S. SOLENG
dont le siège social est sis [Adresse 2]

non comparante ni constituée

DÉFENDERESSE

D’AUTRE PART

ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort.

**************

EXPOSE DU LITIGE

Par ordonnance du 29 octobre 2021 rendue dans l’affaire enregistrée sous le numéro de répertoire général 21/00928, le président du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes, statuant en référé, a, sur la demande de Monsieur [N] [O] et Madame [D] [P] épouse [O], ordonné une expertise judiciaire au contradictoire de la SARL PROMOBAT et désigné pour y procéder Monsieur [C] [Z].

Par ordonnance du 23 avril 2024 rendue dans l’affaire enregistrée sous le numéro de répertoire général 24/00174, les opérations d’expertise ont, à la demande de la société PROMOBAT, été rendues communes et opposables à la SAS SOFRAT et son assureur la SA AXA FRANCE IARD, la SMA SA en qualité d’assureur de la société ECOTECH INGENIERIE et à la SARL UNION BATISSEURS FRANCILIEN et son assureur, la SMA SA.

Par acte de commissaire de justice délivré le 14 octobre 2024, la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD ont fait assigner devant le président du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes, statuant en référé, la SAS SOLENG, aux fins de lui voir :

rendre communes et opposables les opérations d’expertise confiées à Monsieur [C] [Z], – réserver les dépens.

Au soutien de ses prétentions, elles font valoir, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, que :

la société PROMOBAT a fait construire et rénover un ensemble immobilier situé [Adresse 4] ;les travaux ont été réalisés par corps d’état séparés, le maitre d’œuvre étant la société ECOTECH INGENIERIE assurée auprès de la SMA SA, et les lots démolitions, terrassements généraux et murs en infrastructures ayant été confiés à la société SOFRAT qui était assurée auprès de la société AXA FRANCE IARD ;le lot gros œuvre a été confié à la société UBF qui a fait intervenir le bureau d’études des sols SOLENG pour réaliser la mission G3 tandis que d’autres missions ont été confiées au bureau d’études GEOLIA ;le 23 juillet 2021, un mur d’un terrain voisin appartenant aux époux [O] s’est effondré ;il ressort une contradiction entre les recommandations de GEOLIA et celles de la société SOLENG ;elles justifient d’un motif légitime de voir le bureau d’études de sols SOLENG participer aux opérations d’expertise afin que le rapport lui soit rendu opposable dans l’hypothèse où l’expert judiciaire retiendrait une imputabilité dans la survenance des désordres allégués.
A l’audience du 3 décembre 2024, la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD, représentées par leur conseil, ont soutenu leur acte introductif d’instance et déposé les pièces telles que visées dans leur bordereau.

Bien que régulièrement assignée, la SAS SOLENG n’a pas comparu ni constitué avocat.

Conformément aux articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience ainsi qu’à la note d’audience.

La date du délibéré a été fixée au 10 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande d’ordonnance commune

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.

Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.

En l’espèce, la société PROMOBAT a fait construire et rénover un ensemble immobilier situé [Adresse 4] et le 23 juillet 2021, un mur d’un terrain voisin appartenant aux époux [O] s’est effondré.

C’est ainsi que par ordonnance du 29 octobre 2021, à la demande de Monsieur [N] [O] et Madame [D] [P] épouse [O], le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire au contradictoire de la SARL PROMOBAT et désigné pour y procéder Monsieur [C] [Z].

Par ordonnance du 23 avril 2024, les opérations d’expertise ont, à la demande de la société PROMOBAT, été déclarées communes et opposables à la SAS SOFRAT et son assureur la SA AXA FRANCE IARD, la SMA SA en qualité d’assureur de la société ECOTECH INGENIERIE et à la SARL UNION BATISSEURS FRANCILIEN et son assureur, la SMA SA.

La SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD justifient que la SAS SOLENG a réalisé une étude géotechnique pour justification des travaux des voiles par passes contre terre par passes alternées, par la production du dossier d’étude n°R21.05-Indice B.

L’expert judiciaire, Monsieur [C] [Z], n’a pas expressément donné son accord à la mise en cause de la société SOLENG mais dans la note aux parties n°15, a fixé un délai au 15 octobre 2024 pour l’aviser des éventuelles mises en cause envisagées et, par courrier du 27 septembre 2024, les demanderesses l’ont informé de leur intention d’attraire aux opérations d’expertise la société SOLENG.

La SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD justifient ainsi d’un motif légitime à rendre les opérations d’expertise communes et opposables à la SAS SOLENG.

Au regard de ces éléments, il sera donc fait droit à la demande, aux frais avancés de la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD, dans les termes du dispositif ci-dessous.

Sur les dépens

En l’absence de partie succombante au sens de l’article 696 du code de procédure civile, il y a lieu de laisser les dépens à la charge de la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés, statuant publiquement par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort ;

DECLARE communes et opposables à la SAS SOLENG, les opérations d’expertise ordonnées par l’ordonnance du 29 octobre 2021 désignant Monsieur [C] [Z] en qualité d’expert judiciaire ;

DIT que la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD, communiqueront sans délai à la SAS SOLENG, l’ensemble des pièces déjà produites par les parties ainsi que les notes rédigées par l’expert ;

DIT que l’expert devra convoquer la SAS SOLENG, à la prochaine réunion d’expertise au cours de laquelle elle sera informée des diligences déjà accomplies et invitée à formuler ses observations ;

IMPARTIT à l’expert un délai supplémentaire d’un mois pour déposer son rapport ;

FIXE à la somme de 1.500 (mille cinq cents) euros la provision complémentaire à valoir sur la rémunération de l’expert qui devra être consignée par la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD, entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 6] à EVRY-COURCOURONNES ([Courriel 8], Tél : [XXXXXXXX01] ou [XXXXXXXX05]), dans le délai de 6 semaines à compter de la délivrance par le greffe aux parties de la présente ordonnance, sans autre avis ;

DIT que, faute de consignation par la SAS SOFRAT et la SA AXA FRANCE IARD de la part de cette consignation lui revenant dans ce délai impératif, l’extension de la mission de l’expert à la SAS SOLENG sera caduque et privée de tout effet ;

INFORME la partie intéressée qu’elle pourra être invitée par l’expert à l’utilisation d’OPALEXE, outil de gestion dématérialisée de l’expertise ;

DIT que dans l’hypothèse où la présente décision est portée à la connaissance de l’expert après dépôt de son rapport, ses dispositions seront caduques ;

DIT qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération ;

LAISSE les dépens à la charge de la SAS SOFRAT et de la SA AXA FRANCE IARD.

Ainsi fait et prononcé par mise à disposition au greffe, le 10 janvier 2025, et nous avons signé avec le greffier.

Le Greffier, Le Juge des Référés,


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