Responsabilité médicale : enjeux d’une prise en charge défaillante – Questions / Réponses juridiques

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Responsabilité médicale : enjeux d’une prise en charge défaillante – Questions / Réponses juridiques

Madame [E] a subi plusieurs interventions chirurgicales pour des lombalgies et gonalgies, entraînant une arthrite septique. Un collège d’experts a conclu à une infection nosocomiale liée à une opération de 2012 et à une prise en charge non conforme. Madame [E] a demandé l’annulation du rapport d’expertise et des indemnités pour son préjudice, chiffré à plus de 600.000 euros. La Fondation HÔPITAL a contesté cette demande, tandis que le docteur [P] a nié toute faute. Le tribunal a rejeté la demande d’annulation, condamnant le docteur à verser 5.000 euros pour préjudice moral et ordonnant une indemnisation de 56.380 euros à Madame [E].. Consulter la source documentaire.

Sur la demande d’annulation du rapport d’expertise

L’article 275 du code de procédure civile stipule que « les parties doivent remettre sans délai à l’expert tous les documents que celui-ci estime utile à l’accomplissement de sa mission. En cas de carence des parties, l’expert en informe le juge qui peut ordonner la production des documents, s’il y a lieu sous astreinte, ou bien, le cas échéant, l’autoriser à passer outre ou à déposer son rapport en l’état. La juridiction de jugement peut tirer toutes conséquences de droit du défaut de communication des documents à l’expert ».

Dans cette affaire, Madame [E] conteste la validité du rapport d’expertise en raison de la prise en compte de documents communiqués tardivement par la Fondation Hôpital [7]. Cependant, il est établi que ces pièces ont été discutées lors de la réunion d’expertise, et que Madame [E] a pu formuler ses observations à ce sujet.

De plus, le rapport d’expertise a été complété par un pré-rapport et des réponses aux dires de Madame [E], ce qui démontre que le contradictoire a été respecté. Par conséquent, la demande d’annulation du rapport d’expertise est rejetée.

Sur la demande de nouvelle expertise

La demande de nouvelle expertise est fondée sur l’argument que le rapport initial serait lacunaire. Toutefois, les experts ont examiné les causes du dommage et ont fourni des réponses détaillées aux questions posées. Ils ont également justifié leur évaluation des préjudices, ce qui ne laisse pas de place à une nouvelle expertise.

L’absence de mention expresse des références bibliographiques dans le rapport n’est pas un motif suffisant pour ordonner une nouvelle expertise, car les experts ont fourni une motivation sérieuse dans leur rapport. Ainsi, la demande de nouvelle expertise est également rejetée.

Sur les demandes à l’encontre du docteur [P] relatives au préjudice d’impréparation

L’article L1111-2 du code de la santé publique précise que « toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ».

Les experts ont constaté que l’information sur le risque infectieux n’a pas été correctement délivrée à Madame [E]. Le fait qu’elle soit infirmière ne l’exonère pas de l’obligation d’information du médecin. En conséquence, le défaut d’information a causé un préjudice moral d’impréparation, qui sera réparé à hauteur de 5.000 €.

Sur l’obligation d’indemnisation du dommage corporel

Selon l’article L 1142-1 I al 2 du code de la santé publique, « les établissements, services et organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère ».

Les experts ont conclu que l’infection nosocomiale était liée à l’intervention chirurgicale. La Fondation Hôpital [7] et le docteur [P] sont donc tenus d’indemniser Madame [E] pour les dommages subis, avec une répartition de 90 % pour la Fondation et 10 % pour le docteur.

Sur le montant de l’indemnisation

Le tribunal a évalué les préjudices de Madame [E] en tenant compte des frais médicaux, des pertes de gains professionnels, et des préjudices extra-patrimoniaux. Les frais médicaux s’élèvent à 42.221,38 €, tandis que les pertes de gains professionnels actuels ont été déboutées.

Les préjudices extra-patrimoniaux, incluant le déficit fonctionnel temporaire et permanent, ainsi que les souffrances endurées, ont été évalués à un total de 56.380 €. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, conformément à l’article 1231-6 du code civil.

Sur la demande de la CCSS des Hautes Alpes

La CCSS des Hautes Alpes a demandé le remboursement de ses débours, qui s’élèvent à 56.691,51 €. Le tribunal a fait droit à cette demande, en précisant que ces sommes correspondent aux frais médicaux et aux indemnités journalières versées à Madame [E].

Sur les demandes accessoires

Le tribunal a également accordé une indemnité forfaitaire de 1.162 € à la CCSS des Hautes Alpes, ainsi qu’une somme de 5.000 € à Madame [E] et 1.000 € à la CCSS, en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Les dépens seront supportés in solidum par le docteur [P] et la Fondation Hôpital [7].


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