Contrat d’assurance : opposabilité des conditions générales et limites de la garantie perte d’exploitation

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Contrat d’assurance : opposabilité des conditions générales et limites de la garantie perte d’exploitation

L’Essentiel : Le 10 mars 2022, la société L’Homme a interjeté appel d’un jugement du tribunal de commerce de Rennes, qui avait débouté ses demandes d’indemnisation contre Hübener Versicherungs-AG, son assureur, suite à la fermeture de son établissement due à la pandémie de Covid-19. Dans ses écritures, L’Homme a contesté l’opposabilité des conditions générales de son contrat et a demandé une expertise judiciaire pour évaluer ses pertes. En réponse, Hübener a soutenu que ces conditions étaient applicables et que les pertes d’exploitation n’étaient pas couvertes. La cour a confirmé le jugement initial, déboutant L’Homme de toutes ses demandes.

Contexte de l’affaire

Le 10 mars 2022, la société L’Homme a interjeté appel d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes le 24 février 2022. Ce jugement avait débouté la société de ses demandes d’indemnisation à l’encontre de Hübener Versicherungs-AG, son assureur, suite à la fermeture de son établissement en raison des mesures gouvernementales liées à la pandémie de Covid-19.

Demandes de la société L’Homme

Dans ses écritures notifiées le 25 novembre 2022, la société L’Homme a demandé à la cour d’infirmer le jugement du tribunal de commerce, arguant que les conditions générales de son contrat d’assurance n’étaient pas opposables. Elle a également sollicité la reconnaissance de la garantie pour pertes d’exploitation, ainsi qu’une expertise judiciaire pour évaluer les dommages financiers subis depuis le 14 mars 2020.

Réponse de Hübener Versicherungs-AG

Par ses conclusions notifiées le 10 octobre 2024, Hübener Versicherungs-AG a demandé à la cour de confirmer le jugement initial en toutes ses dispositions. Elle a contesté les demandes de L’Homme, soutenant que les conditions particulières du contrat avaient été signées et qu’elles faisaient référence aux conditions générales, qui étaient donc applicables.

Arguments des parties

La société L’Homme a fait valoir qu’elle n’avait pas reçu ni accepté les conditions générales, tandis que Hübener Versicherungs-AG a affirmé que ces conditions avaient été signées et étaient en vigueur. L’assureur a précisé que les pertes d’exploitation n’étaient couvertes que si elles résultaient d’un dommage matériel garanti, ce qui n’était pas le cas dans cette situation.

Décision de la cour

La cour a confirmé le jugement du tribunal de commerce, statuant que les conditions générales étaient opposables à L’Homme. Elle a également jugé que les pertes d’exploitation ne pouvaient pas être indemnisées, car elles n’étaient pas liées à un sinistre matériel prévu par le contrat. En conséquence, la société L’Homme a été déboutée de toutes ses demandes, y compris celles relatives aux frais irrépétibles.

Conséquences financières

La cour a condamné la société L’Homme à payer 4 000 euros à Hübener Versicherungs-AG au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens. Cette décision a été rendue publiquement et contradictoirement, marquant la fin de la procédure d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure à suivre pour la signification des conclusions en appel selon l’article 911 du code de procédure civile ?

L’article 911 du code de procédure civile stipule que :

« La déclaration d’appel est faite par un acte d’huissier de justice, qui doit être signifié à la partie adverse.

Cette signification doit être effectuée dans un délai d’un mois suivant l’expiration du délai de trois mois prévu à l’article 908.

En l’absence de signification, la déclaration d’appel peut être déclarée caduque. »

Dans le cas présent, l’appelant, Monsieur [F] [R], n’a pas respecté cette obligation de signification de ses conclusions dans le délai imparti.

Il a donc été constaté que la déclaration d’appel était caduque, conformément aux dispositions de l’article 911.

Quelles sont les conséquences de la caducité de la déclaration d’appel selon le code de procédure civile ?

La caducité de la déclaration d’appel entraîne plusieurs conséquences, notamment :

1. La perte de l’effet suspensif de l’appel, ce qui signifie que la décision de première instance devient définitive.

2. L’impossibilité pour l’appelant de poursuivre la procédure d’appel, sauf à former une nouvelle déclaration d’appel, sous réserve de respecter les délais et les formes prescrites.

3. La charge des dépens est laissée à l’appelant, comme le précise l’ordonnance rendue dans cette affaire.

L’article 908 du code de procédure civile précise que :

« L’appel doit être interjeté dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision.

Le non-respect de ce délai entraîne la caducité de la déclaration d’appel. »

Dans cette affaire, l’appelant n’a pas respecté le délai de signification, ce qui a conduit à la caducité de sa déclaration d’appel.

Quels sont les délais de réponse à un avis de caducité selon la jurisprudence ?

La jurisprudence et le code de procédure civile prévoient des délais spécifiques pour répondre à un avis de caducité.

En général, la partie concernée doit répondre dans un délai de 15 jours suivant la réception de l’avis.

Dans le cas présent, Maître [K] [C] TRIQUET n’a pas répondu à l’avis de caducité dans le délai imparti, ce qui a contribué à la confirmation de la caducité de la déclaration d’appel.

L’article 914 du code de procédure civile indique que :

« La partie qui reçoit un avis de caducité doit faire connaître sa position dans un délai de 15 jours.

À défaut, la caducité est constatée. »

Ainsi, l’absence de réponse dans le délai imparti a eu pour effet de rendre la caducité de la déclaration d’appel définitive.

5ème Chambre

ARRÊT N°-01

N° RG 22/01677 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SRXS

(Réf 1ère instance : 2021F00175)

S.A.S. L’HOMME

C/

Société HÜBENER VERSICHERUNGS AG

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 08 JANVIER 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 13 Novembre 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 08 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

S.A.S. L’HOMME

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Guillaume PRAT de la SELARL GUILLAUME PRAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

INTIMÉE :

Société HÜBENER VERSICHERUNGS AG Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 4]

[Localité 1] – ALLEMAGNE

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Eloïse MARINOS de la SELAS BYRD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

La société L’Homme exploite un fonds de commerce de club libertin situé à [Adresse 5] à [Localité 2], sous l’enseigne ‘[6]’.

Afin d’assurer son activité, la société L’Homme s’est rapprochée de son courtier M. [B] [Z], qui lui-même a pris contact avec la société Aleade, mandataire en France de la société Hübener Versicherungs-AG.

La société L’Homme a souscrit une police d’assurance multirisque professionnelle auprès de la société Hübener Versicherungs-AG.

Après la parution des mesures gouvernementales pour lutter contre la propagation du Covid-19, la société L’Homme a interrogé la société Aleade sur la possibilité de percevoir une indemnité au titre de ses pertes d’exploitation suite à la fermeture administrative de son établissement.

Par courrier du 28 mai 2020, la société Aleade a répondu par la négative.

La société L’Homme a assigné la société Hübener Versicherungs-AG devant le tribunal de commerce de Rennes.

Par jugement du 24 février 2022, le tribunal de commerce de Rennes a :

– dit et jugé que les conditions générales du contrat d’assurance souscrit par la société L’Homme auprès de la société Hübener Versicherungs-AG lui sont opposables,

– dit et jugé que l’interdiction d’accès aux locaux n’est pas liée à une raison matérielle et que ladite interdiction ne résulte pas d’événements ou de catastrophes naturelles,

– débouté la société L’Homme de ses demandes indemnitaires, au titre de la perte d’exploitation, à l’encontre de la société Hübener Versicherungs-AG,

– condamné la société L’Homme à payer à la société Hübener Versicherungs-AG la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la société Hübener Versicherungs-AG du surplus de ses demandes, fins et conclusions,

– débouté la société L’Homme de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– condamné la société L’Homme aux entiers dépens,

– liquidé les frais de greffe à la somme de 69,59 euros tels que prévus aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.

Le 10 mars 2022, la société L’Homme a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 25 novembre 2022, elle demande à la cour de :

– débouter la société Hübener Versicherungs-AG de ses demandes, fins et conclusions,

– dire et juger recevable et bien fondé son appel interjeté,

– infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes du 24 février 2022 (RG n°2021F00175) en ce qu’il :

* a dit et jugé que les conditions générales du contrat d’assurance souscrit par elle auprès de la société Hübener Versicherungs-AG lui sont opposables,

* a dit que l’interdiction d’accès aux locaux n’est pas liée une raison matérielle et que ladite interdiction ne résulte pas d’événements ou de catastrophes naturelles,

* a dit et jugé que la garantie perte d’exploitation alléguée par elle ne trouve pas à s’appliquer,

* l’a déboutée de ses demandes indemnitaires au titre de la perte d’exploitation à l’encontre de la société Hübener Versicherungs-AG,

* l’a condamnée à payer à la société Hübener Versicherungs-AG la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* l’a déboutée de toutes ses demandes, fins et conclusions,

* l’a condamnée aux entiers dépens,

Statuant de nouveau

– dire et juger qu’aucune condition générale relative au contrat d’assurance multirisques Lieux et Loisirs de Nuit du contrat police n° HV1304-HOM-35-1777 ne lui est opposable,

– dire et juger que les conditions générales (pièce 1 versée par la société Hübener Versicherungs-AG) ne sont pas les dispositions générales visées dans les conditions particulières du contrat d’assurance multirisques Lieux de Loisirs de Nuit du contrat police n° HV1304-HOM-35-1777, ne lui sont pas opposables et n’ont aucun effet à son égard,

– dire et juger que seules les conditions particulières du contrat d’assurance multirisque Lieux et Loisirs de Nuit du contrat police n° HV1304-HOM-35-1777 lui sont opposables,

– dire et juger que la garantie ‘dommages financiers, 6, pertes de marge brute et/ou de la valeur vénale des éléments incorporels du fonds’ : 200 000 euros, garantie souscrite par elle, est applicable,

– dire et juger qu’elle a subi des dommages financiers/pertes d’exploitation compte tenu de la fermeture imposée de l’établissement ‘[6]’ depuis le 14 mars 2020 par l’arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19,

En conséquence,

– ordonner une expertise judiciaire contradictoire comptable et désigner tel expert qu’il plaira au tribunal avec pour mission de déterminer les dommages financiers/pertes d’exploitation subis à compter du 14 mars 2020,

– condamner la société Hübener Versicherungs-AG à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de provisions à valoir sur les dommages financiers/pertes d’exploitation subies,

– condamner la société Hübener Versicherungs-AG à lui payer la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Hübener Versicherungs-AG aux entiers dépens

Par dernières conclusions notifiées le 10 octobre 2024, la société Hübener Versicherungs-AG demande à la cour de :

À titre principal

– confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes en toutes ses dispositions,

En conséquence,

– débouter la société L’Homme de toutes ses demandes,

À titre subsidiaire

Si par l’extraordinaire la cour infirmait le jugement et statuait à nouveau :

– débouter la société L’Homme de sa demande de provision à hauteur de 100 000 euros car non seulement l’appelante ne définit pas la période d’indemnisation considérée, mais ne justifie pas d’une quelconque perte financière en l’état d’un seul bilan antérieur à la période d’inactivité,

– débouter la société L’Homme de sa demande d’expertise,

À titre infiniment subsidiaire

Subsidiairement, si la cour infirmait le jugement et statuait à nouveau en ordonnant la désignation d’un expert :

– prendre acte de ce qu’elle émet ses plus expresses protestations et réserves quant à la demande d’expertise judiciaire de la société L’Homme,

– condamner la société L’Homme, demanderesse à la mesure d’expertise, à en supporter les frais,

En tout état de cause

– débouter la société L’Homme de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens,

Et rejetant toutes prétentions contraires, comme irrecevables et en tout cas non fondées,

– condamner la société L’Homme à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens avec distraction au profit de l’avocat soussigné aux offres de droit.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 24 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au soutien de son appel, la SAS L’Homme indique qu’elle a dû fermer son établissement après la publication des décisions gouvernementales prises dans le cadre de la lutte contre le Covid-19.

Elle expose que :

– les conditions particulières font état en page 3 sur 7 des conditions générales ‘Ala’,

– elle n’a pas reçu ni accepté les dispositions générales ‘Ala’,

– les conditions générales versées aux débats par l’assureur ne sont pas celles visées par le contrat souscrit,

– ces conditions générales lui sont inopposables.

Elle fait référence aux conditions particulières qui prévoient une garantie ‘dommages financiers’sans condition restrictive d’application et qui n’est pas soumise à l’existence préalable d’un sinistre matériel.

En réponse, la société Hübener Versicherungs-AG souligne que les conditions particulières ont été signées et paraphées par la société L’Homme et que ces conditions particulières font référence aux dispositions générales de manière précise.

Elle signale que les conditions générales sont intitulées ‘Police d’assurance Multirisque Discothèques, Bowlings, Restaurants, Bars et Lieux de loisirs de nuit-Avenir et Loisirs Assurances’ alors que les conditions particulières sont dénommées ‘Conditions Particulières Multirisque Lieux de Loisirs de Nuit’ démontrant que les conditions générales produites sont les conditions applicables au cas présent.

Elle avance que les conditions particulières précisent que seules les pertes d’exploitation consécutives à un dommage matériel garanti par la police ont vocation à être indemnisées, notamment par le tableau récapitulatif de l’ensemble des garanties.

Elle conteste le fait que la garantie sur les pertes d’exploitation soit mobilisable sans condition.

L’assureur rappelle que le contrat est une police à périls dénommés et qu’un dommage non indiqué au sein des conditions générales n’a pas vocation à être couvert.

La société Hübener Versicherungs-AG explique les clauses de la police sur les conséquences qui vont être prises en charge à la suite d’un des 11 dommages garantis et sur la façon dont l’indemnité d’assurance sera calculée en fonction des préjudices et de la situation de l’exploitant postérieurement au sinistre.

Elle déclare que les pertes d’exploitation correspondent à la perte de marge brute (soit la différence entre le chiffre d’affaires et les charges variables) et/ou des éventuels frais supplémentaires d’exploitation.

Elle détaille les hypothèses permettant la mobilisation de la garantie selon que le sinistre est subi directement par l’assuré ou dans le voisinage de l’assuré en précisant que ces hypothèses ne correspondent pas à la situation de la société L’Homme.

L’assureur écrit que la garantie sur les pertes d’exploitation n’est pas une garantie autonome et sans condition.

En préliminaire, la cour rappelle qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes de ‘dire et juger’ ou ‘prendre acte’ qui ne constituent pas des prétentions susceptibles d’entraîner des conséquences juridiques au sens de l’article 4 du code de procédure civile, mais uniquement la reprise de moyens développés dans le corps des conclusions qui ne doivent pas, à ce titre, figurer dans le dispositif des écritures des parties.

– Sur le contrat.

Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Il n’est pas contesté ni contestable que les conditions particulières du contrat ont été paraphées et signées par la SAS L’Homme le 25 avril 2013.

L’article 1 de ces conditions particulières dénommées ‘Dispositions particulières’ indique :

– le présent contrat est régi par le code des assurances, et l’ensemble indissociable constitué

– des dispositions générales Ala,

– des présentes conditions particulières,

– des éventuelles annexes ci-jointes,

– le souscripteur reconnaît par l’envoi et la signature du présent document avoir reçu, pris connaissance et ‘accepter’ expressément les dispositions générales ci-jointes’.

La signature de la société assurée tend à supposer qu’elle a reçu et pris connaissance des conditions générales du contrat sans qu’il ne soit nécessaire que ces conditions générales soient paraphées et signées.

Si tel n’était pas le cas, la société L’Homme n’explique pas les raisons pour lesquelles elle a apposé sa signature sur cette page contenant l’article 1 précité.

Ces conditions particulières sont intitulées Conditions Particulières Multirisques Lieux de Loisirs de Nuit alors que les conditions générales sont dénommées Police d’assurance Multirisque Discothèques, Bowlings, Restaurants, Bars et Lieux de Loisirs de Nuit. La similitude des intitulés pour un établissement de nuit démontre que les conditions générales sont applicables.

C’est par une juste appréciation que les premiers juges ont relevé que les conditions particulières reprenaient toutes les conditions tenant aux protections mécaniques des lieux assurés et tenant aux moyens d’alarme à mettre en place, ainsi que les dispositions de maintenance de locaux, et qui sont également développées dans les conditions générales.

Ainsi il convient de juger que les dispositions générales produites par l’assureur sont opposables à l’assurée.

– Sur les pertes d’exploitation.

Le contrat souscrit par la société L’Homme est un contrat à périls dénommés. Seuls les dommages limitativement prévus par le contrat ont vocation à être couverts.

Ce contrat garantit, en son article 2, 11 types de sinistre soit :

– l’incendie et les événements annexes,

– les dégâts des eaux et gel,

– les événements climatiques,

– les catastrophes naturelles,

– les attentats,

– les dommages électriques,

– le vol,

– le vol de fonds et valeurs,

– les dommages par vandalisme,

– le bris de glaces et enseignes,

– les marchandises réfrigérées.

Force est de constater qu’une épidémie et/ou une pandémie (qui ne peuvent être analysée comme une catastrophe naturelle) ne sont pas citées dans cette liste. Il en est de même de la fermeture de l’établissement dans le cadre d’une décision gouvernementale qui ne peut être assimilée à un des dommages précités.

L’article 2/12, sous le titre ‘la protection de votre responsabilité’ indique:

– Responsabilité du propriétaire, locataire ou occupant d’immeuble

Sont garantis :

Les conséquences pécuniaires des responsabilités que l’assuré encoure et définies ci-après, dans la mesure où elles résultent d’un incendie, d’une implosion, d’une explosion (…) indemnisable au titre du présent contrat et atteignant les biens professionnels (…).

Puis l’article 2/13 sous le titre ‘la protection de vos biens ‘prévoit :

PERTES D’EXPLOITATION

Sont garantis

Le versement d’une indemnité correspondant à la perte de marge brute résultant pendant la période d’indemnisation de :

– la perte du chiffre d’affaires causée par l’interruption ou la réduction des activités déclarées,

– frais supplémentaires d’exploitation consécutivement engagés, avec l’accord préalable de l’agent de souscription, lorsque l’assuré se trouve dans l’impossibilité totale ou partielle de poursuivre son activité à la suite :

– d’un dommage matériel indemnisé au titre du présent contrat,

– de dommages matériels directs non assurables à l’ensemble des biens garantis par le contrat ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance, ou n’ont pu être prises,

– d’une impossibilité d’accès à ses locaux professionnels (y compris en cas d’interdiction par les autorités compétentes), par suite d’incendie ou d’explosion, d’événements naturels survenus dans le voisinage, catastrophes naturelles.

La simple lecture du contrat permet ainsi de dire que les pertes d’exploitation se rattachent à la protection des biens de l’assuré et à un événement garanti par le contrat.

La garantie ‘protection financière’ incluant les pertes d’exploitation et la valeur vénale du fonds du commerce fait partie du paragraphe ‘protection de votre activité’ qui découle toujours de la survenance d’un dommage matériel garanti par la police.

La clause sur les pertes d’exploitation est claire et compréhensible. Elle ne distingue pas les deux chefs de préjudices indemnisables composant tous deux la perte de marge brute indemnisable et ne rattache pas aux seuls frais supplémentaires d’exploitation les dommages nécessaires à la mise en jeu de la garantie qui sont listés. Cette clause est une seule et même phrase composée de retours à la ligne avec des tirets. La garantie ‘frais supplémentaires’ n’est pas indépendante de la perte de chiffre d’affaires initiale.

En outre, l’article 2/13 précité limite la garantie des pertes d’exploitation à un nombre de cas très précis tels que la conséquence d’un dommage matériel indemnisé par le contrat, la conséquence de dommages matériels directs non assurables et la conséquence d’une impossibilité matérielle d’accès.

C’est par une juste appréciation que les premiers juges ont dit que l’interdiction administrative de recevoir de la clientèle dans l’établissement de l’assurée est liée à l’arrêté gouvernemental pour lutter contre la propagation du Covid-19 (qui ne rend pas impossible matériellement l’accès aux locaux assurés) et non pas à une raison matérielle ou à un événement ou une catastrophe naturelle.

En outre, l’arrêt de l’activité de la société appelante ne résulte pas d’un sinistre subi par le voisinage de l’assurée.

La garantie sur les pertes d’exploitation ne peut, comme l’indique la SAS L’Homme, s’appliquer par la seule preuve d’une perte d’exploitation puisque cette garantie n’est pas autonome et ne peut dépendre du seul fait de l’assuré en fonction de ses bonnes ou moins bonnes capacités de gestion.

En conséquence, la garantie n’est pas mobilisable.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté la société L’Homme de ses demandes indemnitaires.

Succombant en appel, la SAS L’Homme est déboutée de sa demande en frais irrépétibles et est condamnée à payer à la société Hübener Versicherungs-AG la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, étant par ailleurs précisé que les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute la SAS L’Homme de sa demande en frais irrépétibles ;

Condamne la SAS L’Homme à payer à la société Hübener Versicherungs-AG la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS L’Homme aux dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


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