L’Essentiel : Les époux [C] ont signé un contrat de construction avec la société [I] [L] le 27 mai 2021 pour une maison à Armaucourt. Un procès-verbal de réception, établi le 4 avril 2023, comportait des réserves. En avril 2024, ils ont assigné la société et sa caution, la CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIERE, pour obtenir des provisions pour préjudices financier et moral. Le tribunal a reconnu la responsabilité de la société et accordé une provision de 4 040,28 euros pour préjudice financier, tout en rejetant la demande de préjudice moral. La société a été condamnée aux dépens.
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Contexte du litigeLes époux [C] ont signé un contrat de construction avec la société [I] [L] le 27 mai 2021 pour la construction d’une maison à Armaucourt. Un procès-verbal de réception a été établi le 4 avril 2023, mais il comportait des réserves. Procédures judiciairesLe 2 et 4 avril 2024, les époux [C] ont assigné la société [I] [L] et sa caution, la CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIRE (CGI), devant le tribunal judiciaire de Nancy. Ils ont demandé une provision de 7 516,35 euros pour préjudice financier, 2 000 euros pour préjudice moral, ainsi qu’une indemnité de 1 200 euros selon l’article 700 du code de procédure civile. Arguments des époux [C]Les époux [C] ont initialement assigné la société [I] [L] pour lever les réserves du procès-verbal. Après l’assignation, le maître d’œuvre a repris les travaux, et un quitus de levée des réserves a été signé le 24 juin 2024. Ils justifient leur demande de provision pour préjudice financier par le fait que leur crédit immobilier n’a pas pu être débloqué intégralement, entraînant des intérêts intercalaires de 7 516,35 euros. Réponse de la société [I] [L]La société [I] [L] conteste les demandes des époux [C], arguant que ces derniers ne prouvent pas leur préjudice financier. Elle soutient que l’amortissement du prêt aurait dû commencer dès la signature du procès-verbal, indépendamment des réserves. Concernant le préjudice moral, elle affirme qu’aucune faute n’est prouvée. Position de la CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIERELa CGI demande le rejet des demandes des époux [C] et sollicite des dépens à leur charge. Elle argue que le juge des référés n’est pas compétent pour déterminer les conditions d’application de sa garantie, qui ne serait pas mobilisable en l’absence de défaillance du constructeur. Décision du tribunalLe tribunal a reconnu la responsabilité contractuelle de la société [I] [L] et a accordé aux époux [C] une provision de 4 040,28 euros pour préjudice financier, correspondant aux intérêts intercalaires. En revanche, leur demande de provision pour préjudice moral a été rejetée, faute de preuves. La société [I] [L] a été condamnée aux dépens et à verser 800 euros aux époux [C] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La demande de la CGI a également été rejetée. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur l’absence de comparution de la partie défenderesseL’article 472 du code de procédure civile stipule que si le défendeur ne comparaît pas, le juge statue néanmoins sur le fond. Il est précisé que le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. Dans cette affaire, M. [J] [E] a été assigné devant la chambre de proximité de Schiltigheim, conformément à l’article 659 du code de procédure civile, le 07 mars 2024. Le procès-verbal indique que le commissaire de Justice a rencontré la mère de M. [J] [E], qui a déclaré que son fils ne résidait plus à cette adresse et serait au Maroc, sans adresse précise. Les recherches effectuées n’ont pas permis de localiser M. [J] [E], et il n’a pas comparu à l’audience. Ainsi, le juge a pu statuer sur le fond de la demande, considérant que les recherches du commissaire de Justice étaient suffisantes pour établir l’absence de M. [J] [E]. Sur la demande principaleL’article 1103 du code civil énonce que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. En vertu de l’article 1892 du même code, le prêt de consommation est défini comme un contrat par lequel l’une des parties livre à l’autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l’usage. La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté peut, selon l’article 1217 du code civil, poursuivre l’exécution forcée de l’obligation ou demander réparation des conséquences de l’inexécution. Dans cette affaire, le premier incident de paiement non régularisé date du 05 octobre 2022, et l’emprunteur a été assigné le 07 mars 2024. La Caisse Régionale de Crédit Agricole Alsace Vosges a produit le contrat de prêt signé électroniquement, ainsi que des preuves de la consultation préalable du fichier national des incidents de remboursement. Il a été établi que M. [J] [E] n’a remboursé qu’une seule mensualité de 200,24€, le 05 septembre 2022. En conséquence, le lien contractuel entre la Caisse Régionale de Crédit Agricole Alsace Vosges et M. [J] [E] est suffisamment prouvé, et ce dernier sera condamné à payer les sommes dues. Sur la demande indemnitaire pour résistance abusiveL’article 1231-6 du code civil précise que les dommages et intérêts dus en raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent en intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier ait à justifier d’aucune perte. Cependant, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Alsace Vosges ne démontre pas l’existence d’un préjudice indépendant du retard de paiement. Ainsi, sa demande indemnitaire au titre de la résistance abusive sera rejetée, car elle ne peut pas prouver un préjudice distinct du retard. Sur les frais du procèsL’article 696 du code de procédure civile stipule que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge. De plus, l’article 700 du même code prévoit que le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme pour les frais exposés. Dans cette affaire, M. [J] [E] étant la partie perdante, il sera condamné à payer les dépens de l’instance, ainsi qu’une somme de 458€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Sur l’exécution provisoireL’article 514 du code de procédure civile dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire, sauf disposition contraire de la loi ou de la décision rendue. Dans ce cas, la décision rendue est exécutoire par provision, ce qui signifie qu’elle peut être exécutée immédiatement, même si elle est susceptible d’appel. Ainsi, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Alsace Vosges pourra procéder à l’exécution de la décision sans attendre l’issue d’un éventuel appel. |
DU : 26 Novembre 2024
RG : N° RG 24/00199 – N° Portalis DBZE-W-B7I-JA5Z
AFFAIRE : [V] [C], [F] [C] née [O] C/ S.A.S. [I] [L], S.A. CAISSE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANCY
CH. 9 REFERES
ORDONNANCE
du vingt six Novembre deux mil vingt quatre
COMPOSITION
PRESIDENT : Claude DOYEN,
GREFFIER : Anne-Marie MARTINEZ,
PARTIES :
DEMANDEURS
Monsieur [V] [C],
demeurant 8 bis rue du dauphin – 54760 ARMAUCOURT
représenté par Me Laurène ALEXANDRE, avocat au barreau de NANCY, avocat plaidant, vestiaire : 165
Madame [F] [C] née [O],
demeurant 8 bis rue du dauphin – 54760 ARMAUCOURT
représentée par Me Laurène ALEXANDRE, avocat au barreau de NANCY, avocat plaidant, vestiaire : 165
DEFENDERESSES
S.A.S. [I] [L],
dont le siège social est sis 7 Route de Cupigny – 10150 CRENEY PRES TROYES
représentée par Me Melina LAMRHARI, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant, vestiaire : 045, Me Olivier PLOTTON, avocat au barreau de l’AUBE, avocat plaidant
S.A. CAISSE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT
prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège,
dont le siège social est sis 6 Rue de la Pérouse – 75116 PARIS
représentée par Me Sophie FERRY, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant, vestiaire : 154, Me Claude VAILLANT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience de plaidoiries du 24 Septembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 19 Novembre 2024 prorogé au 26 Novembre 2024.
Et ce jour, vingt six Novembre deux mil vingt quatre, après délibéré, la présente décision a été rendue par mise à disposition au greffe.
Selon acte sous signature privée du 27 mai 2021, Monsieur [V] [C] et Madame [F] [O] épouse [C] (ci-après les époux [C]) ont conclu avec la société [I] [L] un contrat de construction d’une maison individuelle sur un terrain situé 1 grande rue à Armaucourt.
Le 4 avril 2023, les parties ont établi un procès-verbal de réception comprenant des réserves.
Par actes de commissaire de justice délivrés les 2 et 4 avril 2024, les époux [C] ont fait assigner la société [I] [L] et sa caution solidaire, la CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIRE (ci-après CGI), devant le président du tribunal judiciaire de Nancy statuant en référé.
Aux termes de leurs conclusions soutenues à l’audience du 24 septembre 2024, date à laquelle l’affaire a été retenue, les époux [C] sollicitent la condamnation de la société [I] [L] à leur verser une provision d’un montant de 7 516,35 euros au titre de leur préjudice financier.
Ils sollicitent encore la condamnation solidaire des défendeurs à leur verser :
une provision de 2 000 euros au titre de leur préjudice moral ;une indemnité de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils sollicitent enfin la condamnation solidaire des défendeurs aux dépens.
Les époux [C] exposent avoir initialement fait assigner la société [I] [L] pour obtenir la levée des réserves mentionnées dans ledit procès-verbal de réception.
Ils exposent encore qu’à la suite de la signification de l’assignation, le maître d’œuvre a repris les travaux de levée des réserves et qu’un quitus de levée des réserves a été régularisé le 24 juin 2024.
Au soutien de leur demande de provision au titre du préjudice financier, les époux [C] font valoir que le crédit immobilier souscrit pour le financement de la construction de leur maison n’ayant pu être intégralement débloqué en raison de l’absence de levée des réserves, ils justifient d’un préjudice financier à hauteur de 7 516,35 euros, somme qui correspond aux intérêts intercalaires réclamés par la banque.
En réponse au moyen opposé par la société [I] [L] et fondé sur l’absence de préjudice financier, les époux [C] soutiennent que ledit prêt n’ayant pu être intégralement débloqué qu’à compter du 2 juillet 2024, les sommes qu’ils ont réglées à la banque jusqu’à cette date correspondent à des intérêts intercalaires résultant du retard pris dans la livraison sans réserve de leur maison.
S’agissant de la période indemnisable, ils affirment que le constructeur s’étant engagé à réaliser les travaux dans un délai de 14 mois à compter de l’ouverture du chantier intervenue en février 2022, ils sont fondés à réclamer le remboursement des intérêts intercalaires qu’ils ont réglés entre avril 2023 et juillet 2024.
À l’appui de leur demande de provision au titre du préjudice moral, les époux [C] font valoir que le retard pris par la société [I] [L] pour lever les différentes réserves les a empêchés de finaliser les travaux d’aménagement de leur maison et les a contraints à relancer le constructeur à de très nombreuses reprises, par téléphone et par mail, et même à effectuer un aller-retour jusqu’au siège de ladite société située à Troyes.
En réponse au moyen opposé par la CGI et fondé sur l’absence de défaillance du constructeur pour actionner la caution, les époux [C] soutiennent que la garantie souscrite par la CGI est mobilisable dans la mesure où elle s’est portée caution solidaire du constructeur.
En défense, la société [I] [L] demande au juge des référés de constater que les demandes indemnitaires présentées par les époux [C] excèdent sa compétence et en conséquence de les renvoyer à mieux se pourvoir.
À titre subsidiaire, elle sollicite le rejet desdites demandes indemnitaires.
Pour s’opposer à la demande de provision au titre du préjudice financier, la société [I] [L] soutient que les époux [C] ne rapportent pas la preuve du préjudice financier qu’ils estiment avoir subi dans la mesure où il résulte des stipulations du prêt litigieux que l’amortissement aurait dû débuter dès la signature du procès-verbal, que celui-ci soit ou non assorti de réserve, dès lors que la somme garantissant la levée des réserves demeurait consignée.
Pour s’opposer à la demande de provision au titre du préjudice moral, la société [I] [L] affirme que les époux [C] n’administrent la preuve ni de la faute qu’elle aurait commise, ni du préjudice qui découlerait de cette faute.
La CGI demande le rejet des prétentions formulées par les époux [C] à son encontre.
Elle sollicite également la condamnation des époux [C] aux dépens et à lui verser une indemnité de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour s’opposer aux prétentions des époux [C], la CGI fait valoir que le juge des référés n’est pas compétent pour rechercher si les conditions d’application de la garantie de la CGI sont réunies et que de toutes les façons la garantie n’est pas mobilisable étant donné que la défaillance du constructeur n’est pas démontrée.
Sur la demande de provision à valoir sur la réparation du préjudice financier des époux [C]
Il résulte de l’article 835, alinéa 2, du code civil que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier.
En l’espèce, il résulte des stipulations du contrat de construction litigieux que les parties ont convenu que la durée de réalisation des travaux sera de 14 mois à compter de l’ouverture du chantier.
Il n’est pas contesté que l’ouverture du chantier ayant eu lieu au mois de février 2022, les travaux devaient s’achever en avril 2023 au plus tard.
La société [I] [L] produit à l’instance un quitus de levée de réserves signé par elle et les époux [C] en date du 24 juin 2024.
Il ressort des stipulations du contrat de prêt immobilier souscrit par les époux [C] avec la banque CAISSE D’ÉPARGNE GRAND EST EUROPE pour financer la construction de leur maison que la mise en amortissement du dossier ne pourra intervenir qu’après production du procès-verbal de réception des travaux sans réserve signé par les différentes parties et de la totalité des justificatifs correspondants au coût total de l’opération précisée dans la demande de crédit.
Les époux [C] produisent à l’instance un tableau d’amortissement établi par ladite banque en date du 2 juillet 2024 aux termes duquel l’établissement bancaire indique que l’amortissement du capital emprunté débutera le 5 août 2024.
Dans ces conditions, la responsabilité contractuelle de la société [I] [L] n’est pas sérieusement contestable.
Dès lors, elle sera condamnée à verser aux époux [C] une provision d’un montant de 4 040,28 euros à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice et correspondant aux intérêts intercalaires non contestables réclamés par leur banque entre avril 2023, date théorique d’achèvement desdits travaux, et juillet 2024, mois suivant l’établissement du procès-verbal de réception des travaux sans réserve.
Sur la provision à valoir sur la réparation du préjudice moral des époux [C]
Les époux [C] ne produisant à l’instance aucune pièce susceptible de prouver l’existence d’un préjudice moral imputable à la société [I] [L], leur demande de provision sera rejetée.
Sur les demandes accessoires
Sur les dépens
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la société [I] [L], partie perdante, sera condamnée aux dépens de l’instance.
Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile
La société [I] [L], condamnée aux dépens, devra payer aux époux [C] une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile, que l’équité commande de fixer à 800 euros.
Les époux [C] ne perdant pas leur procès, il n’y a pas lieu de prononcer une condamnation à leur égard sur ce fondement.
Dès lors, la demande d’indemnité formulée par la CGI au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
Statuant par ordonnance contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent,
CONDAMNONS la société [I] [L] à verser aux époux [C] une provision d’un montant de 4 040,28 euros (quatre mille quarante euros et vingt-huit centimes) à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice et correspondant aux intérêts intercalaires réclamés par leur banque entre les mois d’avril 2023 et de juillet 2024 ;
DÉBOUTONS les époux [C] de leur demande tendant à voir la société [I] [L] et la CGI condamnées solidairement à leur verser une provision d’un montant de 2 000 euros au titre du préjudice moral ;
CONDAMNONS la société [I] [L] à verser aux époux [C] une somme de 800 euros (huit cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETONS la demande d’indemnité formulée par la CAISSE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMONS la société [I] [L] aux dépens.
La greffière La présidente
Copie exécutoire délivrée à le
Copie délivrée à le
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