La révélation de la relation sentimentale d’un couple de personnalités publiques sans que ces dernières ne l’ai révélé publiquement, tout comme le fait de spéculer sur l’évolution de leur relation et de leurs sentiments ainsi que sur leur recherche de logement, relèvent de l’intimité de la vie privée.
Cette atteinte est prolongée par l’utilisation de photographies, deux d’entre elles étant utilisées dans le cadre d’un photomontage, venant illustrer les propos tenus dans l’article de presse People quant à leur relation, la troisième la présentant avec son ex-mari et sa fille. La circonstance que les photographies litigieuses aient pu être initialement réalisées avec le consentement de l’intéressée est indifférente dès lors qu’elles sont ici détournées de leur destination initiale pour illustrer un article attentatoire à sa vie privée, sans que cela ne soit rendu nécessaire par un débat d’intérêt général ou un rapport avec l’actualité, ce qui porte également atteinte à son droit à l’image. Pour rappel, conformément à l’article 9 du code civil et à l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, toute personne, quelle que soit sa notoriété, a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection en fixant elle-même ce qui peut être divulgué par voie de presse. De même, elle dispose sur son image, attribut de sa personnalité, et sur l’utilisation qui en est faite d’un droit exclusif, qui lui permet de s’opposer à sa diffusion sans son autorisation. Ces droits doivent se concilier avec le droit à la liberté d’expression, consacré par l’article 10 de la même convention. Ils peuvent céder devant la liberté d’informer, par le texte et par la représentation iconographique, sur tout ce qui entre dans le champ de l’intérêt légitime du public, certains événements d’actualité ou sujets d’intérêt général pouvant justifier une publication en raison du droit du public à l’information et du principe de la liberté d’expression, ladite publication étant appréciée dans son ensemble et au regard du contexte dans lequel elle s’inscrit. Le droit à l’information du public s’agissant des personnes publiques, s’étend ainsi d’une part aux éléments relevant de la vie officielle, d’autre part aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifie une actualité ou un débat d’intérêt général. A l’inverse, les personnes peuvent s’opposer à la divulgation d’informations ou d’images ne relevant pas de leur vie professionnelle ou de leurs activités officielles et fixer les limites de ce qui peut être publié ou non sur leur vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir. Enfin, la diffusion d’informations déjà notoirement connues du public n’est pas constitutive d’atteinte au respect de la vie privée. |
Résumé de l’affaire :
Débats et AudienceL’audience du 9 octobre 2024 a été tenue publiquement par Gauthier DELATRON, sans opposition des avocats. Après avoir entendu les parties, il a rendu compte au tribunal conformément à l’article 786 du code de procédure civile. Jugement et AssignationLe tribunal a été saisi par une assignation délivrée le 12 janvier 2024 à la société CMI FRANCE, éditrice du magazine Public, à la demande de [L] [D], dite [L] [T]. Cette dernière a allégué une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et à son droit à l’image dans le numéro 1063 du magazine, daté du 24 novembre 2023. Elle a demandé des dommages-intérêts et la publication d’un communiqué judiciaire. Conclusions des PartiesLes dernières conclusions de [L] [D] ont été signifiées le 5 septembre 2024, maintenant ses demandes initiales. En réponse, CMI FRANCE a demandé le déboutement de la demanderesse et a proposé une évaluation symbolique du préjudice à un euro. Le tribunal a mis l’affaire en délibéré pour une décision prévue le 27 novembre 2024. Publication ContestéeLe magazine Public a publié un article sur la relation entre [L] [T] et [Z] [W], avec des détails sur leur cohabitation et des spéculations sur leur vie privée. L’article a été illustré par des photographies de [L] [T] et de sa famille, ce qui a conduit à l’assignation pour atteinte à sa vie privée. Atteintes à la Vie Privée et Droit à l’ImageConformément aux articles 9 du code civil et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme, [L] [T] a soutenu que la publication a violé son droit à la vie privée et à l’image. CMI FRANCE a rétorqué que les informations étaient déjà publiques et que les photographies avaient été prises lors d’événements officiels. Évaluation du PréjudiceLe tribunal a noté que le préjudice moral résultant de la publication devait être évalué en tenant compte de la nature des atteintes. Bien que [L] [T] ait subi une atteinte à sa vie privée, le tribunal a également pris en compte sa propre exposition médiatique. Décision du TribunalLe tribunal a condamné CMI FRANCE à verser 2.000 euros à [L] [T] pour le préjudice moral. La demande de publication d’un communiqué judiciaire a été rejetée, considérée comme une restriction disproportionnée de la liberté d’expression. CMI FRANCE a également été condamnée aux dépens et à verser 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. ConclusionLe jugement a été rendu le 27 novembre 2024, confirmant les atteintes à la vie privée et au droit à l’image de [L] [T] tout en tenant compte de sa propre médiatisation. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS
■
MINUTE N°:
17ème Ch. Presse-civile
N° RG 24/01039 – N° Portalis 352J-W-B7I-C3XX4
G.D
Assignation du :
12 Janvier 2024
[1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
République française
Au nom du Peuple français
JUGEMENT
rendu le 27 Novembre 2024
DEMANDERESSE
[L] [D] dite [L] [T]
[Adresse 1]
[Adresse 5]
représentée par Me Alain TOUCAS-MASSILLON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1155
DEFENDERESSE
S.A.S. CMI FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Patrick SERGEANT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B1178
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Magistrats ayant participé au délibéré :
Gauthier DELATRON Juge
Président de la formation
Sophie COMBES, Vice-Présidente
Jean-François ASTRUC Vice-Président
Assesseurs
Greffiers :
Virginie REYNAUD, Greffier lors des débats
Viviane RABEYRIN, Greffier lors de la mise à disposition
A l’audience du 09 Octobre 2024 tenue publiquement devant Gauthier DELATRON, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les parties, en a rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du code de procédure civile.
JUGEMENT
Mis à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Vu l’assignation délivrée le 12 janvier 2024 à la société CMI FRANCE, éditrice du magazine Public, à la requête d’[L] [D], dite [L] [T], laquelle, estimant qu’il avait été porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et à son droit à l’image dans le numéro 1063 du magazine en date du 24 novembre 2023, demande au tribunal, au visa des articles 9 du code civil et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, de :
condamner la société CMI FRANCE à lui verser les sommes suivantes :20 000 euros au titre de son préjudice résultant des atteintes à sa vie privée ;10 000 euros au titre de son préjudice résultant de l’atteinte à son droit à l’image ;
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Condamne la société CMI FRANCE à payer à [L] [D] la somme de 2.000 euros en réparation de son préjudice moral résultant des atteintes portées à son droit à la vie privée et à son droit à l’image ;
Déclare sans objet la demande de la société CMI FRANCE tendant au débouté d’[L] [D] de toutes ses demandes, fins et conclusions relatives à l’affaire dont était précédemment saisi le tribunal judiciaire de Nanterre sous le numéro RG 24/00751 ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne la société CMI FRANCE aux dépens, avec distraction au profit de Maître Alain TOUCAS-MASSILLON conformément à l’article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la société CMI FRANCE à payer à [L] [D] la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit nonobstant appel.
Fait à Paris le 27 Novembre 2024
Le Greffier Le Président
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