Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] ont commandé un poêle à granulés de la société FLAM’ECO STYL pour 5000 euros, avec un acompte de 2500 euros réglé en janvier 2020. Après des problèmes de surconsommation et d’arrêts fréquents, ils ont contacté la société en octobre 2021. Deux expertises amiables ont été réalisées, la première en janvier 2022 et la seconde en mars 2022. Les époux [R] ont assigné FLAM’ECO STYL en octobre 2022 pour obtenir la résolution de la vente et une indemnisation. Le tribunal a ordonné la communication du rapport d’expertise et la réouverture des débats pour juin 2024. Lors de l’audience, les époux ont demandé la résolution de la vente et des dommages-intérêts, tandis que FLAM’ECO STYL a contesté la recevabilité des demandes et a demandé une expertise sur l’utilisation du poêle. L’affaire a été mise en délibéré pour le 17 septembre 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Tribunal judiciaire de Chartres
RG n°
22/02737
Minute : TJ
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, avocats au barreau de CHARTRES
Copie certifiée conforme
délivrée le :
à :
SCP POISSON & CORBILLE LALOUE, avocats au barreau de CHARTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE CHARTRES
JUGEMENT Contradictoire
DU 17 Septembre 2024
DEMANDEURS :
Monsieur [B] [R],
Madame [C] [R],
demeurant tous deux 78 bis Grande rue à HOUVILLE LA BRANCHE (28700)
représentés par Me GARNIER de la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, demeurant 30 Boulevard Chasles – 28000 CHARTRES, avocats au barreau de CHARTRES, vestiaire : T 21
D’une part,
DÉFENDEUR :
S.A.R.L. FLAM ECO STYL, Société à responsabilité limitée, au capital de 20.000 euros, immatriculé sous le numéro 533 515 987 du registre du commerce et des sociétés de CHARTRES,
ayant son siège social 42 rue Jean Bouin à LUISANT (28600),
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
représentée par la SCP POISSON & CORBILLE LALOUE, demeurant 6 Rue Saint Brice – 28000 CHARTRES, avocats au barreau de CHARTRES, vestiaire : T 19
D’autre part,
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Juge :
François RABY, juge du tribunal judiciaire par délégation selon ordonnance de Madame la présidente en date du 02 septembre 2024
Greffier: Séverine FONTAINE
DÉBATS :
L’affaire a été plaidée à l’audience publique du 11 Juin 2024 et mise en délibéré au 17 Septembre 2024 date à laquelle la présente décision est rendue par mise à disposition au greffe.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] ont commandé, selon bon de commande du 28 décembre 2019, auprès de la société FLAM’ECO STYL, la fourniture et la pose avec mise en service d’un poêle à granulés de marque BRISACH modèle ISOLA pour un montant total de 5000 euros TTC.
Cette prestation a donné lieu à facturation le 21 février 2020 pour un montant de 3500 euros, un acompte de 2500 euros ayant été réglé le 14 janvier 2020.
Suite à la constatation d’anomalies, notamment une surconsommation de granulés et des arrêts récurrents du poêle, Monsieur [D] [R] a adressé une lettre recommandée avec demande d’avis de réception le 31 octobre 2021 à la société défenderesse.
Une première expertise amiable déposée le 14 janvier 2022 par le cabinet POLYEXPERT, mandaté par l’assurance de protection juridique des époux [R]. Une seconde expertise amiable, dont le rapport a été établi le 5 mars 2022, a été effectuée par le cabinet ISTIA, sollicité par Monsieur [T] [R].
Par assignation signifiée à personne morale le 28 octobre 2022, les époux [R] ont assigné la société FLAM’ECO STYL devant le tribunal judiciaire de Chartres aux fins d’ordonner la résolution judiciaire de la vente et d’indemnisation de leurs préjudices.
Par jugement avant-dire droit en date du 20 février 2024, le tribunal judiciaire de Chartres a enjoint les époux [R] de communiquer à la société FLAM’ECO STYL, par acte du palais et par mail, et déposer au greffe du tribunal judiciaire, au plus tard le 5 avril 2024, l’intégralité du rapport d’expertise amiable par le cabinet Polyexpert le 14 janvier 2022 et ordonné la réouverture des débats à l’audience du tribunal judiciaire de Chartres du 11 juin 2024.
Le rapport d’expertise réalisé par le cabinet POLYEXPERT a été produit aux débats par Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] le 28 mars 2024.
L’affaire a été appelée à l’audience du 11 juin 2024, ou elle a été retenue.
Lors de l’audience, les époux [R], représentés par leur avocat, demandent au tribunal, reprenant leurs prétentions figurant au sein de leurs dernières écritures déposées à l’audience :
à titre principal :de déclarer les demandes de les époux [R] recevables ;d’ordonner la résolution de la vente du poêle à granulés ;de condamner la société FLAM’ECO STYL au paiement de la somme de 5000 euros au titre de la garantie des vices cachésde condamner la société FLAM’ECO STYL au paiement de la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance ;de rejeter les demandes formulées par la société FLAM’ECO STYL ;subsidiairement, de statuer avant-dire droit et d’ordonner une expertise visant à examiner les désordres allégués, préciser leur origine, leur date d’apparition et évaluer les préjudices subis par les demandeurs ;en tout état de causes, de condamner la société FLAM’ECO STYL au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
La société FLAM’ECO STYL, régulièrement représentée par son avocat et reprenant ses prétentions contenues dans ses dernières écritures déposées à l’audience, demande principalement au tribunal de déclarer irrecevables les demandes formulées par les époux [R] et, subsidiairement, de les rejeter. A titre infiniment subsidiaire, la société FLAM’ECO STYL sollicite la désignation d’un expert ayant pour mission de dire si les dysfonctionnements sont liés à une mauvaise utilisation du produit par son propriétaire ainsi qu’une mauvaise qualité des granulés utilisés. Enfin, la société FLAM’ECO STYL demande au tribunal de condamner les époux [R] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est fait référence aux termes de leurs dernières conclusions respectives en date du 11 juin 2024.
L’affaire a été mise en délibéré au 17 septembre 2024 par mise à disposition au greffe.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action des époux [R]
En vertu de l’article 1549 du code civil et de l’application qui en est faite, le délai de prescription de l’action résultant des vices rédhibitoires est de deux ans à compter de la découverte du vice, la détermination du point de départ étant laissée à l’appréciation souveraine des juges du fond et pouvant se situer au jour de la notification du rapport d’expertise.
En l’espèce, si les demandeurs ont, aux termes de leurs écritures, indiqué avoir « assez rapidement […] constaté plusieurs anomalies, notamment une surconsommation de granulés et des arrêts récurrents du poêle », il n’en demeure pas moins que ces derniers ont été constants quant au moment de l’apparition du vice, qu’ils situent à la fin de l’année 2021.
En effet, cette période a été communiquée à l’expert en charge de l’expertise du 14 janvier 2022, qui relate que les époux [R] ont arrêté l’utilisation du poêle « fin 2021 » en constatant les anomalies alléguées.
Il en va de même pour le rapport d’expertise du 5 mars 2022 ou encore la mise en demeure relative au remboursement réalisée par leur conseil et réceptionnée par la société défenderesse le 9 février 2022.
En outre, la demande en justice a été faite par une assignation signifiée à personne morale le 28 octobre 2022, soit environ un an après.
L’action rédhibitoire effectuée par les époux [R] n’est donc pas prescrite. Il convient par conséquent de la déclarer recevable.
Sur la demande principale de résolution de la vente
En vertu de l’article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. Cela implique de démontrer l’existence d’un vice qui rend soit la chose inutilisable, soit en diminue l’utilité, étant précisé qu’il convient de prendre en considération la fonction normale de la chose. En outre, le vice doit être antérieur au transfert des risques. Il convient à cet égard de souligner que le moment de la naissance du vice doit être prise en compte et non son apparition. Le vice doit enfin être inhérent à la chose vendue, ne pas avoir été réparé par le vendeur au moment de l’action et, en application de l’article 1642 du code civil, être caché, l’acheteur n’ayant pu s’en convaincre lui-même au moment de l’achat.
Aux termes de l’article 1353 du code civil, « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ».
L’article 1382 du même code dispose que « les présomptions qui ne sont pas établies par la loi, sont laissées à l’appréciation du juge, qui ne doit les admettre que si elles sont graves, précises et concordantes, et dans les cas seulement ou la loi admet la preuve par tout moyen ».
Enfin, en vertu de l’article 9 du code de procédure civile, « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ».
En l’espèce, l’expertise amiable effectuée par Monsieur [V] [I], du cabinet POLY EXPERT mandaté par l’assurance de protection juridique des époux [R], constate bien l’existence d’un vice affectant le poêle en faisant état d’un « dysfonctionnement de la bougie, donc une mauvaise combustion », ce qui empêche son allumage.
Cependant, l’expert relève que ce dysfonctionnement est lié à l’absence de retrait du brasero par les propriétaires, qui affirment, à l’inverse de ce qu’il constate, que celui-ci est ancré et ne peut pas être retiré. L’expertise mentionne en outre que la fréquence de nettoyage de la chambre de combustion du poêle de la part des époux [R] est insuffisante au regard de leur utilisation importante et que le granulé utilisé est de mauvaise qualité, ce qui entraîne « probablement une surconsommation ». Le rapport d’expertise conclut ainsi que, «au regard de ce qui précède, nous ne constatons aucun défaut de conformité sur l’installation ».
Si la seconde expertise amiable diligentée à l’initiative des époux [R] et réalisée par Monsieur [Y] [O] du cabinet ISTIA conclut que « face aux dysfonctionnements du poêle à granulés, il convient à la société FLEM’CO STYL de remplacer le poêle ou à défaut de remplacer les éléments défectueux », aucun élément quant à la cause du dysfonctionnement n’est clairement mis en évidence au sein du rapport. En effet, contrairement à ce qu’affirment les demandeurs, le constat quant à l’existence d’une vis sans fin dans le chargeur à granulat ne permettant pas de limiter le chargement en granulés n’est pas mis en lien avec la combustion trop rapide du poêle, provoquant son arrêt.
Enfin, le rapport d’intervention de la société IMR ENERGIE en date du 27 mai 2024, plus de quatre ans après l’achat du poêle, versé aux débats par les demandeurs ne relève que l’existence d’une chambre de combustion dans un état de détérioration important sans en préciser l’origine, de sorte qu’il ne saurait constituer un élément de preuve suffisant permettant d’établir l’existence d’un vice caché au sens des dispositions du code civil.
Ainsi, si le dysfonctionnement du poêle lié à la mauvaise combustion est établi par les deux expertises amiables, l’expertise réalisée par le cabinet POLYEXPERT relève, de manière claire et circonstanciée, que ce défaut trouve son origine dans un entretien du poêle inadapté de la part des époux [R] et non dans un vice de conception inhérent à la chose. En outre, comme cela a été exposé précédemment, la seconde expertise amiable réalisée par le cabinet ISTIA et qui, à la différence de la première, n’a pas recueilli les observations contradictoires de la société défenderesse, ne pose pas de lien de causalité entre un défaut inhérent à la chose et le dysfonctionnement constaté. Il ressort donc des conclusions et des pièces versées aux débats que les conditions d’antériorité au transfert des risques et d’inhérence du vice à la chose ne sont pas établies par les demandeurs, faute de démontrer que le poêle faisait l’objet d’un défaut de conception dès le moment de la vente ayant occasionné les dysfonctionnements allégués.
Ainsi, l’existence d’un vice caché affectant le poêle acquis par les époux [R] au sens des dispositions du code civil n’étant pas démontrée, il convient de rejeter leur demande de résolution de la vente ainsi que les demandes indemnitaires afférentes.
Sur la demande subsidiaire d’expertise
En vertu des articles 143 et 144 du code de procédure civile et de l’application qui en est faite, le juge apprécie souverainement et de manière discrétionnaire l’opportunité d’ordonner, à la demande des parties, une mesure d’instruction visant à éclairer les faits dont dépend la solution du litige.
En l’espèce, au vu des éléments d’ores et déjà versés au dossier, en particulier des deux expertises amiables ayant déjà été réalisées le 14 janvier 2022 et le 5 mars 2022, il n’est pas nécessaire d’ordonner une mesure d’expertise judiciaire.
Cette demande sera donc rejetée.
Sur les demandes accessoires
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, les époux [R], qui succombent, seront condamnés aux entiers dépens de l’instance.
Il y a lieu de condamner les époux [R] à payer à la société FLAM’ECO STYL la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. La demande formulée par Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] au titre des frais irrépétibles sera par conséquent rejetée.
Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret du 11 décembre 2019 applicable en l’espèce, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. En l’espèce, compte tenu de l’absence de motif dérogatoire, il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision.
Le tribunal judiciaire, statuant après débats publics, par décision contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
DECLARE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] recevables en leur action ;
DEBOUTE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] de leur demande de résolution judiciaire du contrat de vente d’un poêle à granulés de marque BRISACH modèle ISOLA conclue le 28 décembre 2019 entre eux-mêmes et la société FLAM’ECO STYL ;
DEBOUTE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] de leur demande en paiement de la somme de 5 000,00 euros au titre de la garantie des vices cachés ;
DEBOUTE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] de leur demande en paiement de la somme de 3 000,00 au titre de leur préjudice de jouissance;
DEBOUTE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] de leur demande subsidiaire d’expertise ;
DEBOUTE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] à payer à la société FLAM’ECO STYL la somme de deux mille euros (2 000,00 euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [D] [R] et Madame [C] [R] aux entiers dépens de l’instance ;
RAPPELLE l’exécution provisoire de la présente décision.
Ainsi jugé et prononcé.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Séverine FONTAINE François RABY
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