Succession Picasso contre Artprice.com
La société anonyme Artprice.com est spécialisée dans l’exploitation de bases de données relatives au marché de l’art et possède un fonds documentaire de plusieurs millions d’oeuvres d’art qu’elle exploite. En 2007, elle a signé avec une société de perception et de répartition des droits d’auteur, l’ADAGP, une convention portant sur l’exploitation d’oeuvres des arts visuels. Reprochant à la société Artprice.com d’avoir, sans son autorisation, constitué une base de données par numérisation des oeuvres de l’artiste Pablo Picasso et d’avoir, de plus, exploité cette base de données par la reproduction de ces oeuvres dans la mémoire du serveur et la communication au public desdites oeuvres, la succession de ce peintre (qui n’est pas adhérente de l’ADAGP) a poursuivi en contrefaçon la société Artprice.com.
En défense, la société Artprice.com faisait valoir que les reproductions en cause s’inscrivaient dans le cadre légitime d’information du public et qu’elles permettaient aux internautes d’être informés en temps réel de l’actualité relative aux oeuvres d’art et d’acquérir ainsi des informations sur le marché de l’art de manière très précise.
Contrefaçon établie
Les juges ont retenu le délit de contrefaçon à l’égard de la société Artprice.com. S’il est vrai que l’article L 122-5 (9°) soustrait au monopole de l’auteur l’utilisation d’oeuvres graphiques et plastiques, encore faut-il qu’en soient satisfaites les conditions, à savoir ‘par voie de presse’ et ‘dans un but exclusif d’information immédiate et en relation directe avec cette dernière’. A cet égard, le site Artprice.com n’entre pas dans le cadre de l’exception légale.
En effet, la société Artprice.com exploitant l’ensemble des informations relatives au marché de l’art mondial afin de les livrer à ses clients sur son site internet, ne peut être assimilée à un organe de presse ayant pour seule vocation d’informer le public en lui rendant compte de l’actualité immédiate. L’utilisation des oeuvres n’est ni exceptionnelle, ni incidente et encore moins liée à la seule actualité. Le fait que les visuels en cause soient diffusés par email aux clients de la société ne change pas la donne juridique.
En procédant aux actes de reproduction distincts que constituent la numérisation des oeuvres afin de les placer sur son site puis à sa fixation dans la mémoire pour constituer une base de données, la société Artprice.com s’est placée en situation d’offre permanente au public. Elle ne peut donc échapper aux conséquences d’une atteinte aux droits exclusifs de l’auteur qui incrimine des faits de reproduction illicites, ceci en se prévalant de l’existence de correspondances privées, dès lors qu’elle agit en qualité de prestataire d’un service contractuellement lié au public particulier que constitue la masse de ses abonnés, fût-ce au moyen de courriels adressés à des personnes physiques ou morales sollicitant personnellement ses services dans le cadre de cette convention (300.000 euros de dommages et intérêts).
Mots clés : Image des oeuvres
Thème : Image des oeuvres
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour d’appel de Paris | Date : 18 janvier 2013 | Pays : France