Le violeur masqué du net : Cour d’assise en vue

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Le violeur masqué du net : Cour d’assise en vue

L’Essentiel : Le « violeur masqué du net » pourrait bientôt comparaître en Cour d’assise. La Cour de cassation a récemment censuré des juges qui avaient exclu le viol, malgré l’utilisation de stratagèmes par l’auteur pour obtenir des relations sexuelles. Pendant des années, il a créé un faux profil sur des sites de rencontre, se présentant comme un homme séduisant et aisé, afin d’attirer des femmes vulnérables. Les victimes, choquées par la réalité de leur agresseur, ont exprimé un profond traumatisme. La Cour a affirmé que tromper une personne sur l’identité de l’agresseur constitue une surprise, annulant ainsi le consentement.

Monter des stratagèmes pour obtenir les faveurs sexuelles de partenaires trouvées sur des sites de rencontres et qui n’auraient pas consenti à une relation sexuelle sans ces stratagèmes (apparence physique, faux métier …), expose l’auteur desdits stratagèmes à des poursuites pour viol.

La surprise et le vice du consentement

Le « violeur masqué du net » pourrait comparaître en Cour d’assise. La Cour de cassation vient de censurer les juges du fond (chambre de l’instruction, CA d’Aix-En-Provence, 12 avril 2018) d’avoir exclu le viol alors que des stratagèmes avaient bien été utilisés par l’auteur pour coucher avec ses victimes.

Les dessous de l’affaire

L’auteur des faits avait mis en place durant de nombreuses années un stratagème destiné à faire venir, à son domicile, des femmes qu’il estimait être incapable d’attirer sous sa véritable personnalité ; ce stratagème était composé de plusieurs étapes : i) la création d’un profil internet sur des sites de rencontre décrivant un homme paraissant âgé d’une trentaine d’années, au physique athlétique et très avantageux, photos à l’appui, dont il s’avèrera que, récupérées sur internet, elles correspondaient à un mannequin faisant de la publicité ; ii) l’affirmation d’une certaine aisance financière dans le cadre d’une activité professionnelle valorisante (architecte décorateur) dans un cadre prestigieux (Monaco) ; iii) de nombreux échanges par messages et contacts téléphoniques, destinés à mettre en confiance les femmes contactées sur le caractère « exceptionnel » de leur rencontre, femmes souvent en situation fragile (rupture, mère célibataires, veuve) ; iv) l’organisation d’une première rencontre « exceptionnelle » à l’image de la relation créée au domicile du mis en examen à l’exclusion d’un endroit public, selon un scénario bien détaillé : porte entrouverte, pénombre dans l’appartement, mise en place d’un bandeau sur les yeux (pour éviter de voir), mains attachées (pour éviter de toucher), enfin une relation sexuelle suivie ou précédée de prise de clichés.

A la découverte d’un homme âgé de plus de soixante ans, perçu puis vu comme voûté, ridé, portant des lunettes, les cheveux teints et dégarnis les femmes « piégées » ont fait valoir leur  choc du fait de la répulsion ressentie mais aussi du fait du sentiment d’avoir été abusé, certaines des femmes entendues faisant valoir un traumatisme durable, voire un bouleversement dans leur vie affective.

Définition légale de la surprise

Restait dans cette affaire, la question de la définition de la surprise au sens de l’article 222-22 du code pénal. La notion juridique de surprise renvoie aux moyens employés par l’auteur pour annihiler le consentement de sa victime et non au sentiment d’étonnement ou de stupéfaction, au sens courant, que celle-ci a pu éprouver en présence de comportements inattendus. Il est ainsi admis que constitue un viol par surprise, le fait de profiter de l’obscurité totale pour se glisser dans le lit d’une femme qui pense avoir affaire à son compagnon. La surprise consiste à obtenir des faveurs sexuelles en trompant la victime sur la situation réelle.

Par une motivation limpide, la Cour de cassation a tranché : en application de l’article 222-23 du code pénal, l’emploi d’un stratagème destiné à dissimuler l’identité et les caractéristiques physiques de son auteur pour surprendre le consentement d’une personne et obtenir d’elle un acte de pénétration sexuelle constitue la surprise au sens du code pénal.

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Q/R juridiques soulevées :

Quels stratagèmes ont été utilisés par l’auteur pour obtenir des faveurs sexuelles ?

L’auteur a mis en place un stratagème complexe sur plusieurs années pour attirer des femmes à son domicile.

Ce stratagème comprenait la création d’un profil sur des sites de rencontre, où il se présentait comme un homme d’une trentaine d’années, avec un physique athlétique.

Les photos utilisées étaient celles d’un mannequin, récupérées sur Internet, ce qui montre une intention délibérée de tromper.

Il prétendait également avoir une situation financière aisée, se présentant comme architecte décorateur à Monaco, ce qui ajoutait à son attrait.

Des échanges fréquents par messages et appels visaient à instaurer un climat de confiance, ciblant des femmes souvent en situation fragile, comme des mères célibataires ou des veuves.

Enfin, il organisait des rencontres dans un cadre privé, avec des mises en scène destinées à désorienter et à manipuler ses victimes.

Comment la notion de surprise est-elle définie légalement dans cette affaire ?

La notion de surprise, selon l’article 222-22 du code pénal, se réfère aux moyens employés pour annihiler le consentement de la victime.

Il ne s’agit pas simplement d’un sentiment d’étonnement, mais d’une manipulation délibérée de la situation.

Par exemple, un viol par surprise peut se produire si un individu profite de l’obscurité pour se glisser dans le lit d’une femme qui croit être avec son partenaire.

Dans ce cas, la surprise est liée à la tromperie sur la situation réelle, ce qui constitue une violation du consentement.

La Cour de cassation a précisé que l’utilisation d’un stratagème pour dissimuler l’identité et les caractéristiques physiques de l’auteur, afin de surprendre le consentement, est constitutive de la surprise au sens du code pénal.

Cela souligne l’importance de la transparence et du consentement éclairé dans les relations sexuelles.

Quelles conséquences psychologiques ont été rapportées par les victimes ?

Les victimes de cet auteur ont exprimé un choc profond à la découverte de la véritable identité de l’homme, qui était bien plus âgé et physiquement différent de ce qu’elles avaient imaginé.

Ce choc a engendré un sentiment de répulsion et d’abus, certaines femmes rapportant un traumatisme durable.

Les conséquences psychologiques incluent des bouleversements dans leur vie affective, ce qui peut avoir des répercussions à long terme sur leur capacité à établir des relations de confiance.

Le fait d’avoir été manipulées et trompées a également contribué à un sentiment de vulnérabilité et de perte de contrôle.

Ces expériences peuvent mener à des troubles de l’anxiété, de la dépression, et à des difficultés relationnelles futures, soulignant l’impact profond que de tels stratagèmes peuvent avoir sur la santé mentale des victimes.

Il est déterminant de reconnaître ces effets pour mieux soutenir les victimes dans leur processus de guérison.


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