L’Essentiel : Le 15 novembre 2024, l’autorité administrative a placé Monsieur [L] [S], de nationalité algérienne, en rétention. Le 18 novembre, une demande de prolongation de cette rétention a été soumise au tribunal judiciaire de Lille. Le conseil de Monsieur [L] [S] a contesté cette prolongation, soulignant l’absence de signature de l’OPJ et le manque de coordonnées de l’interprète. L’administration a défendu la conformité de la procédure. Cependant, le tribunal a constaté une violation des droits de Monsieur [L] [S], entraînant le rejet de la demande de prolongation et rappelant son obligation de quitter le territoire.
|
Décision de rétentionLe 15 novembre 2024, l’autorité administrative a décidé de placer Monsieur [L] [S], de nationalité algérienne, en rétention dans des locaux non pénitentiaires. Cette décision a été notifiée le même jour à 18 heures 15. Demande de prolongation de la rétentionLe 18 novembre 2024, l’autorité administrative a saisi le tribunal judiciaire de Lille pour demander une prolongation de la rétention de Monsieur [L] [S] pour une durée de vingt-six jours. Arguments du conseil de Monsieur [L] [S]Le conseil de Monsieur [L] [S] a contesté la prolongation en invoquant l’absence de signature de l’OPJ sur le procès-verbal et le manque de coordonnées de l’interprète dans la notification des droits. Réponse de l’administrationLe représentant de l’administration a affirmé que la procédure était conforme, avec une signature numérique et une attestation de conformité. Il a également rappelé que Monsieur [L] [S] avait précédemment enfreint une assignation à résidence. Déclarations de Monsieur [L] [S]Monsieur [L] [S] a déclaré être né le 5 juillet et vivre en Allemagne, où il a demandé l’asile. Il a affirmé ne pas avoir compris la notification de ses droits et a précisé qu’il n’avait pas l’intention de rester en France, étant venu uniquement pour des soins médicaux. Violation des droits de l’intéresséIl a été constaté que les droits de Monsieur [L] [S] n’avaient pas été correctement notifiés, car l’interprète utilisé n’avait pas été identifié et ses coordonnées n’étaient pas fournies. Cela constitue une violation des dispositions de l’article L141-3 du CESEDA, qui exige que l’interprète soit inscrit sur une liste officielle. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré la procédure irrégulière et a rejeté la demande de prolongation de la rétention. Il a également rappelé à Monsieur [L] [S] son obligation de quitter le territoire national. Notification de l’ordonnanceL’ordonnance a été notifiée aux parties concernées, leur permettant de faire appel dans les vingt-quatre heures suivant le prononcé. Monsieur [L] [S] a été informé qu’il resterait à disposition de la justice pendant un délai de vingt-quatre heures après la notification. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article L141-3 du CESEDA concernant l’assistance d’un interprète lors de la notification des droits d’un étranger en rétention ?L’article L141-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) stipule que lorsque des informations ou décisions doivent être communiquées à un étranger dans une langue qu’il comprend, cela peut se faire soit par écrit, soit par l’intermédiaire d’un interprète. Cet article précise que l’assistance de l’interprète est obligatoire si l’étranger ne parle pas le français et ne sait pas lire. En cas de nécessité, l’assistance de l’interprète peut se faire par des moyens de télécommunication. Il est également stipulé que seul un interprète inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ou un organisme d’interprétariat agréé peut être utilisé. Le nom et les coordonnées de l’interprète, ainsi que le jour et la langue utilisée, doivent être indiqués par écrit à l’étranger. Dans le cas présent, la procédure a été entachée d’irrégularités, car les droits de Monsieur [L] [S] ont été notifiés sans mentionner l’identité et les coordonnées de l’interprète. Cela constitue une violation de l’article L141-3, car il empêche de vérifier que l’interprète est bien inscrit sur la liste requise et d’assurer une information adéquate à l’étranger. Ainsi, l’absence de ces éléments sur le procès-verbal de notification des droits en rétention a conduit à une atteinte caractérisée aux droits de Monsieur [L] [S]. Quels sont les effets juridiques de l’irrégularité constatée dans la procédure de rétention de Monsieur [L] [S] ?L’irrégularité constatée dans la procédure de rétention de Monsieur [L] [S] a des conséquences juridiques significatives. En effet, lorsque la procédure de rétention est déclarée irrégulière, cela entraîne l’impossibilité de prolonger la rétention de l’individu concerné. Dans ce cas précis, le tribunal a déclaré n’y avoir lieu à la prolongation du maintien en rétention de Monsieur [L] [S]. Cette décision repose sur le constat que les droits de l’intéressé n’ont pas été correctement notifiés, ce qui constitue une violation des dispositions légales en vigueur. L’article L551-1 du CESEDA précise que la rétention administrative ne peut être ordonnée que dans le respect des droits fondamentaux de l’individu. Ainsi, toute irrégularité dans la notification des droits ou dans la procédure de rétention peut entraîner l’annulation de la mesure de rétention. Dans le cas présent, le tribunal a donc statué en faveur de Monsieur [L] [S], en déclarant la procédure irrégulière et en mettant fin à sa rétention. Cette décision souligne l’importance du respect des droits des étrangers en matière de rétention administrative et la nécessité d’une procédure conforme aux exigences légales. Quelles sont les obligations de l’administration en matière de notification des droits d’un étranger en rétention ?L’administration a des obligations précises en matière de notification des droits d’un étranger en rétention, conformément aux dispositions du CESEDA. L’article L141-3 impose que l’information soit communiquée dans une langue que l’étranger comprend, ce qui implique l’utilisation d’un interprète si nécessaire. De plus, l’administration doit s’assurer que l’interprète est dûment inscrit sur la liste établie par le procureur de la République ou qu’il appartient à un organisme agréé. Il est également requis que le nom et les coordonnées de l’interprète soient fournis à l’étranger, ainsi que la langue utilisée et le jour de l’intervention. Ces obligations visent à garantir que l’étranger soit pleinement informé de ses droits et des raisons de sa rétention. Dans le cas de Monsieur [L] [S], l’absence de mention de l’identité et des coordonnées de l’interprète sur le procès-verbal constitue une violation de ces obligations. Cela a conduit à une atteinte à ses droits, rendant la procédure irrégulière et entraînant la décision du tribunal de ne pas prolonger la rétention. Ainsi, l’administration doit veiller à respecter scrupuleusement ces obligations pour assurer la légalité des mesures de rétention administrative. |
___________________
Le magistrat délégué par la présidente du Tribunal judicaire
NOTE D’AUDIENCE
Articles L.614-1, L.614-13, L.741-10, L.743-5, L.743-20 du CESEDA
Audience publique
DATE D’AUDIENCE : 19 Novembre 2024
DOSSIER : N° RG 24/02455 – N° Portalis DBZS-W-B7I-Y6SK – M. LE PREFET DU NORD / M. [L] [S]
MAGISTRAT : Coralie COUSTY
GREFFIER : Salomé WAINSTEIN
DEMANDEUR :
M. LE PREFET DU NORD
Représenté par M. [R] [C]
DEFENDEUR :
M. [L] [S]
Assisté de Maître Lendita MEMETI KAMBERI avocat commis d’office
En présence de Mme [M] [W], interprète en langue arabe ,
__________________________________________________________________________
DEROULEMENT DES DEBATS
L’intéressé déclare : “ Je suis né le 5 juillet”
Le représentant de l’administration, entendu en ses observations ;
L’avocat soulève les moyens suivants : – Absence de signature du policier sur le procès-verbal qui concerne le report des droits et sur celui concernant l’avis au procureur de la république
– La notification du placement en rétention et des droits en rétention ne mentionnent pas les coordonnées de l’interprète.
Le représentant de l’administration répond à l’avocat ;
L’intéressé entendu en dernier déclare : “ Croyez-moi, j’ai dit que j’avais formulé une demande d’asile en Allemagne et pour l’interprériat, je n’ai rien compris, c’était par téléphone. Je n’ai pas l’intention de rester en France, la seule raison pour laquelle je suis venu c’est pour les soins médicaux, j’ai un problème au niveau des genoux, je voulais avoir des soins, je vais regagner l’Allemagne, je vais partir par mes propres moyens si je suis libéré, je quitterai le territoire français”.
DÉCISION
Sur la demande de maintien en rétention :
o RECEVABLE o IRRECEVABLE
o MAINTIEN o REJET o ASSIGNATION A RÉSIDENCE
Le greffier Le magistrat délégué
Salomé WAINSTEIN Coralie COUSTY
COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
──────────
LE MAGISTRAT DELEGUE
────
Dossier n° N° RG 24/02455 – N° Portalis DBZS-W-B7I-Y6SK
ORDONNANCE STATUANT SUR LA PROLONGATION D’UNE MESURE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE
Articles L.614-1, L.614-13, L.741-10, L.743-5, L.743-20 du CESEDA
Nous, Coralie COUSTY,, magistrat délégué par la présidente du Tribunal judiciaire de LILLE, assisté de Salomé WAINSTEIN, greffier ;
Vu les articles suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) :
– L.614-1, L.614-13, L.741-10, L.743-5, L.743-20
– L. 741-1, L.741-4, L.741-5, L.741-7, L.744-1, L.751-9, L.751-10
– L. 743-14, L.743-15, L.743-17
– L. 743-19, L. 743-25
– R. 741-3
– R.742-1, R. 743-1 à R. 743-8, R. 743-21
Vu la décision de placement en rétention administrative prise le 15/11/2024 par M. LE PREFET DU NORD;
Vu la requête en prolongation de l’autorité administrative en date du 18/11/2024 reçue et enregistrée le 18/11/2024 à 10h39 (cf. Timbre du greffe) tendant à la prolongation de la rétention de M. [L] [S] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de vingt-six jours ;
Vu l’extrait individualisé du registre prévu à l’article
L. 744-2 du CESEDA émargé par l’intéressé ;
PARTIES
AUTORITE ADMINISTRATIVE QUI A ORDONNE LE PLACEMENT EN RETENTION
M. LE PREFET DU NORD
préalablement avisé, représenté par Monsieur [G] [E] , représentant de l’administration
PERSONNE RETENUE
M. [L] [S]
né le 07 Juillet 1996 à [Localité 1] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
actuellement maintenu en rétention administrative
préalablement avisé et présent à l’audience,
Assisté de Maître Lendita MEMETI KAMBERI avocat commis d’office
En présence de Mme [M] [W], interprète en langue arabe
LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE, préalablement avisé, n’est pas présent à l’audience.
DÉROULEMENT DES DÉBATS
A l’audience publique, le magistrat délégué a procédé au rappel de l’identité des parties ;
Après avoir rappelé à la personne retenue les droits qui lui sont reconnus par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pendant sa rétention et l’avoir informée des possibilités et des délais de recours contre toutes décisions le concernant ;
L’intéressé a été entendu en ses explications ;
Le représentant du préfet a été entendu en ses observations ;
L’avocat a été entendu en sa plaidoirie ;
Le représentant du préfet ayant répondu à l’avocat ;
L’étranger ayant eu la parole en dernier ;
Par décision en date du 15 novembre 2024 notifiée le même jour à 18 heures 15, l’autorité administrative a ordonné le placement de Monsieur [L] [S], né le 07 juillet 1996 à [Localité 1] (ALGERIE) de nationalité algérienne, en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.
Par requête en date du 18 novembre 2024, reçue le même jour à 10 heures 39, l’autorité administrative a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de LILLE aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-six jours.
Le conseil de Monsieur [L] [S] sollicite le rejet de la prolongation de la rétention sur les moyens suivants :
-l’absence de signature de l’OPJ sur le procès-verbal concernant le report de droits et l’avis au procureur de la République
-la notification de la décision administrative et la notification des droits ne comporte pas de coordonnées de l’interprète
Le représentant de l’administration indique que l’ensemble de la procédure est signée numériquement et il y une attestation de conformité qui permet d’établir la régularité de la procédure. Il n’y a pas de grief. Il y a des réquisitions interprète en procédure mais il s’en rapporte. Il rappelle la situation administrative de l’intéressé, qui n’a pas respecté une précédente assignation à résidence.
Monsieur [L] [S] indique être né le 05 juillet. Il explique vivre en ALLEMAGNE, y avoir fait une demande d’asile. Il affirme n’avoir rien compris à la notification de ses droits. Il n’a aucun intention de rester en FRANCE, il est seulement venu pour se soigner.
Sur le moyen tiré de l’absence de mention du nom et des coordonnées de l’interprète sur le procès-verbal de notification des droits en rétention
Au terme de l’article L141-3 du CESEDA, lorsque les dispositions du présent code prévoient qu’une information ou qu’une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu’il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par l’intermédiaire d’un interprète. L’assistance de l’interprète est obligatoire si l’étranger ne parle pas le français et qu’il ne sait pas lire. En cas de nécessité, l’assistance de l’interprète peut se faire par l’intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu’à un interprète inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ou à un organisme d’interprétariat et de traduction agréé par l’administration. Le nom et les coordonnées de l’interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l’étranger.
En l’espèce, il résulte de la procédure que les droits afférents à la rétention ont été notifiés à Monsieur [L] [S] par le truchement téléphonique d’un interprète dont la langue parlée n’est pas précisée et dont l’identité et les coordonnées ne sont pas non plus mentionnées. Il s‘agit d’une violation del’article précité dont la règle permet de contrôler que l’interprète intervenu est bien inscrit sur la liste établie par le procureur de la République ou appartient à un organisme d‘interprétariat et de traduction agréé par l’administration, ainsi que d’assurer l’information de l’étranger. Il ne peut pas être déduit de la présence des réquisitions à interprète ou de la traduction précédente par potentiellement le même interprète du procès-verbal de notification de fin de garde à vue le respect des dispositions précitées alors qu’elles ont notamment pour objectif d’informer l’étranger du nom et des coordonnées de l’interprète. En l’absence de mention de ces éléments sur le procès-verbal de notification des droits en rétention, dont l’étranger reçoit copie, contrairement au procès-verbal de notification de fin de garde à vue, l’atteinte à ses droits est caractérisée.
Par conséquent, la procédure sera déclarée irrégulière et il ne sera pas fait droit à la requête de l’administration.
Statuant publiquement en premier ressort, par décision assortie de l’exécution provisoire,
DÉCLARONS recevable la requête en prolongation de la rétention administrative ;
DISONS N’Y AVOIR LIEU A LA PROLONGATION du maintien en rétention de M. [L] [S] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;
RAPPELONS qu’il a l’obligation de quitter le territoire national.
Fait à LILLE, le 19 Novembre 2024
Notifié ce jour à h mn
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
La présente ordonnance mettant fin à la rétention ou assignant l’étranger à résidence, a été notifiée par mail au procureur de la République, ce jour à h mn
LE GREFFIER
NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE AUX PARTIES
DOSSIER : N° RG 24/02455 – N° Portalis DBZS-W-B7I-Y6SK –
M. LE PREFET DU NORD / M. [L] [S]
DATE DE L’ORDONNANCE : 19 Novembre 2024
NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance aux parties, qui en émargeant ci-après, attestent en avoir reçu copie et les avisons de la possibilité de faire appel, devant le Premier président de la cour d’appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt-quatre heures de son prononcé ; les informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 2]); leur indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier président de la cour d’appel ou son délégué.
Information est donnée à M. [L] [S] qu’il est maintenu à disposition de la justice pendant un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République, lorsqu’il est mis fin à sa rétention ou lors d’une assignation à résidence. Durant cette période, l’intéressé peut, s’il le souhaite, contacter son avocat et un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.
Traduction orale faite par l’interprète.
LE REPRESENTANT DU PRÉFET L’INTERESSE
Par mail
L’INTERPRETE LE GREFFIER
L’AVOCAT
Par mail
Laisser un commentaire