Les informations publiées sur les comptes Instagram des personnalités publiques

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Les informations publiées sur les comptes Instagram des personnalités publiques

Un magazine de Presse People est en droit de reprendre les informations publiées sur les comptes Instagram des personnalités publiques.

En la cause, le magazine Voici a seulement repris, au soutien de ses moyens et prétentions dans le cadre d’une procédure judiciaire, des éléments de faits qu’elle tire du contenu de trois articles de presse et des publications des intéressés sur les comptes Instagram de personnalités, elle n’a donc pas commis une immixtion illicite dans la vie privée.

L’Essentiel : Lors de l’audience du 09 octobre 2024, présidée par Gauthier DELATRON, le tribunal a examiné l’affaire opposant [K] [C] à PRISMA MEDIA. [K] [C] a assigné la société pour atteinte à sa vie privée suite à la publication d’un article dans le magazine Voici, demandant 30 000 euros de dommages-intérêts. Bien que PRISMA MEDIA ait reconnu l’atteinte, elle a contesté la gravité du préjudice. Le tribunal a finalement condamné PRISMA MEDIA à verser 3 000 euros à [K] [C] pour atteinte à sa vie privée, tout en déboutant ses autres demandes.
Résumé de l’affaire :

Débats et Audience

A l’audience du 09 octobre 2024, présidée par Gauthier DELATRON, le tribunal a entendu les parties sans opposition des avocats. Le rapport a été rendu conformément aux dispositions légales.

Assignation et Demandes

Le 18 octobre 2023, [K] [C], dit [I] [Y], a assigné la société PRISMA MEDIA, éditrice du magazine Voici, pour atteinte à sa vie privée et à son droit à l’image, suite à la publication d’un article dans le numéro 1868 du magazine. Il a demandé des dommages-intérêts de 30 000 euros pour chaque préjudice, une interdiction de diffusion des photographies litigieuses, ainsi qu’une publication d’un communiqué judiciaire.

Conclusions des Parties

Les dernières conclusions de [K] [C] ont été signifiées le 17 mai 2024, maintenant ses demandes et ajoutant une nouvelle demande de 10 000 euros pour des atteintes supplémentaires. En réponse, PRISMA MEDIA a contesté les demandes, demandant le déboutement de [K] [C] et la condamnation de ce dernier aux dépens.

Publication Litigieuse

L’article en question, publié dans le magazine Voici, traite d’une relation amoureuse supposée entre [K] [C] et [R] [G]. Il contient des photographies prises à l’insu de [K] [C], illustrant des moments intimes entre les deux. L’article a été jugé comme une immixtion dans la vie privée de [K] [C].

Atteintes à la Vie Privée et Droit à l’Image

Conformément aux articles du code civil et de la Convention des droits de l’Homme, [K] [C] a affirmé que la publication a violé son droit à la vie privée et à l’image. La société PRISMA MEDIA a reconnu l’atteinte à ces droits, mais a contesté la gravité du préjudice.

Écritures du 14 Mai 2024

Dans ses écritures du 14 mai 2024, [K] [C] a allégué de nouvelles atteintes à sa vie privée par la société PRISMA MEDIA, qui a reproduit des éléments de son compte Instagram. PRISMA MEDIA a défendu sa position en affirmant qu’elle avait simplement relayé des informations accessibles au public.

Demande Indemnitaire

Le tribunal a examiné la demande d’indemnisation de [K] [C], qui a soutenu que la publication lui avait causé un préjudice moral significatif. PRISMA MEDIA a demandé une réparation de principe, contestant la gravité du préjudice.

Évaluation du Préjudice

Le tribunal a pris en compte la nature des atteintes et la visibilité du magazine pour évaluer le préjudice. Bien que [K] [C] ait subi une atteinte à sa vie privée, le tribunal a noté qu’il n’avait pas fourni de preuves suffisantes pour justifier l’ampleur de son préjudice.

Décision du Tribunal

Le tribunal a condamné la société PRISMA MEDIA à verser 3 000 euros à [K] [C] pour les atteintes à sa vie privée et à son droit à l’image. Les autres demandes de [K] [C] ont été déboutées, et PRISMA MEDIA a été condamnée aux dépens et à verser 2 000 euros à [K] [C] pour les frais de justice. L’exécution provisoire a été ordonnée.

Q/R juridiques soulevées : Un magazine de Presse People est en droit de reprendre les informations publiées sur les comptes Instagram des personnalités publiques.

En la cause, le magazine Voici a seulement repris, au soutien de ses moyens et prétentions dans le cadre d’une procédure judiciaire, des éléments de faits qu’elle tire du contenu de trois articles de presse et des publications des intéressés sur les comptes Instagram de personnalités, elle n’a donc pas commis une immixtion illicite dans la vie privée.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


MINUTE N°:
17ème Ch. Presse-civile

N° RG 23/13617 – N° Portalis 352J-W-B7H-C3AV2

G.D

Assignation du :
18 Octobre 2023
[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

République française
Au nom du Peuple français

JUGEMENT
rendu le 27 Novembre 2024

DEMANDEUR

[K] [M] dit “[I] [Y]” [C]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Maître Alain TOUCAS-MASSILLON de la SELASU Alain Toucas-Massillon, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #D1155

DEFENDERESSE

S.A.S. PRISMA MEDIA
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Olivier D’ANTIN de la SCP S.C.P d’ANTIN – BROSSOLLET – BAILLY, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0336

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Magistrats ayant participé au délibéré :

Gauthier DELATRON Juge
Président de la formation

Sophie COMBES, Vice-Présidente
Jean-François ASTRUC Vice-Président
Assesseurs

Greffiers :
Virginie REYNAUD, Greffier lors des débats
Viviane RABEYRIN, Greffier lors de la mise à disposition

DEBATS

A l’audience du 09 Octobre 2024 tenue publiquement devant Gauthier DELATRON, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les parties, en a rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du code de procédure civile.

JUGEMENT

Mis à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

Vu l’assignation délivrée le 18 octobre 2023 à la société PRISMA MEDIA, éditrice du magazine Voici, à la requête de [K] [C], dit [I] [Y], lequel, estimant qu’il avait été porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et à son droit à l’image dans le numéro 1868 du magazine en date du 22 au 28 septembre 2023, demande au tribunal, au visa des articles 9 du code civil et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, de :

condamner la société PRISMA MEDIA à lui verser les sommes suivantes :30 000 euros au titre de son préjudice résultant des atteintes à sa vie privée ;30 000 euros au titre de son préjudice résultant de l’atteinte à son droit à l’image ;

faire interdiction à la société PRISMA MEDIA de reproduire ou diffuser par tout moyen, sur tout support, auprès de quiconque et de quelque manière que ce soit, les photographies litigieuses, sous astreinte provisoire de 25 000 euros par infraction constatée ; réserver la liquidation de l’astreinte provisoire et ses suites ;ordonner, aux frais de la société PRISMA MEDIA, la publication d’un communiqué judiciaire dont les caractéristiques et modalités sont précisées au dispositif de l’assignation, en page de couverture du prochain numéro du magazine Voici suivant la signification de l’ordonnance à intervenir et ce sous astreinte de 15 000 euros par numéro de retard ;condamner la société PRISMA MEDIA à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner la société PRISMA MEDIA aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Alain TOUCAS-MASSILLON.
Vu les dernières conclusions de [K] [C] signifiées par voie électronique le 17 mai 2024, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, par lesquelles il maintient les demandes contenues dans son assignation et y ajoutant, sollicite la condamnation de la société PRISMA MEDIA à lui verser la somme de 10 000 euros au titre des nouvelles atteintes à sa vie privée et à l’image commises par le magazine Voici dans ses écritures judiciaires signifiées le 14 mai 2024 ;

Vu les dernières conclusions de la société PRISMA MEDIA, signifiées par voie électronique le 18 juin 2024, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, par lesquelles elle demande au tribunal de :
n’allouer au demandeur d’autre réparation que de principe au titre des atteintes portées à sa vie privée et à son droit à l’image ;débouter le demandeur de sa demande de condamnation au titre de nouvelles atteintes commises par Voici dans ses écritures judiciaires signifiées le 14 mai 2024 ;débouter le demandeur de ses autres demandes ;condamner le demandeur aux entiers dépens.
Vu l’ordonnance de clôture en date du 19 juin 2024 ;

A l’audience du 9 octobre 2024, les parties ont oralement soutenu leurs écritures et il leur a été indiqué que la décision, mise en délibéré, serait rendue le 27 novembre 2024.

Sur la publication litigieuse

[K] [C], dit [I] [Y], est un musicien et comédien français.

Dans son édition n°1868, datée du 22 au 28 septembre 2023, le magazine Voici, édité par la société PRISMA MEDIA, consacre un article à [R] [G] et [K] [C] dit [I] [Y].

Celui-ci est annoncé en page de couverture par le titre « [R] [G] son histoire secrète avec [I] [Y] », sous une pastille « Photos Exclu », apposé à deux photographies, manifestement prises par téléobjectif, montrant le demandeur et [R] [G], complices sur l’une, enlacés sur l’autre. Une légende indique : « Alors qu’elle se dit célibataire, la mannequin vit en réalité depuis six mois une romance avec le rappeur. Une relation qu’elle cache pour des raisons très personnelles… »

La publication querellée est ensuite développée en pages 12 à 14 du magazine, sous les titres « [R] [G] célibataire ? Non, pas vraiment », « Depuis six mois elle vit le grand frisson avec [I] [Y] » et « [R] n’est heureuse qu’en étant amoureuse ». Un sous-titre précise : « Pour ne pas froisser son ex, elle ne cesse de répéter qu’elle n’a pas d’homme dans sa vie. Pourtant, avec l’ancien rappeur tout indique que la belle histoire pourrait durer. »

L’article débute en pointant le fait que si [R] [G] se déclare célibataire « depuis son divorce avec [J] [B] en décembre 2022 », « elle occulte une partie de la vérité ». Après un intertitre « Fini l’hôtel. Quand elle vient à [Localité 8], elle loge chez [I] », l’article révèle ainsi qu’[R] [G] vit, « depuis le mois d’avril », une relation amoureuse avec [I] [Y], « membre fondateur du groupe de rap Ministère A.M.E.R. » S’interrogeant sur la peur d’[R] [G] à l’idée de froisser son ex-mari en l’officialisant, l’article indique qu’[R] [G] et [I] [Y] ont été « aperçus main dans la main à [Localité 9] » et digresse sur les circonstances de leur relation, indiquant notamment que ce dernier est revenu vivre en France après s’être expatrié à [Localité 5], qu’il vit à [Localité 8] et elle entre [Localité 6] et [Localité 7], et qu’elle logerait chez lui lorsqu’elle se rend à [Localité 8]. Sont rapportés entre guillemets les propos attribués à un proche anonyme, qui évoque les qualités de [I] [Y] et ce qui a séduit [R] [G] chez lui. L’article relate une publication de ce dernier en story Instagram du 17 septembre pour l’anniversaire d’[R] [G], présentant une photographie de leurs deux mains enlacées, accompagnée de ces mots « Le jour sacré où Dieu a décidé qu’il ne pouvait plus faire tourner le monde sans toi ». L’article digresse sur les sentiments et l’état d’esprit d’[R] [G] à l’égard de cette relation.

L’article est illustré de cinq photographies, manifestement prises à l’aide d’un téléobjectif, qui représentent les intéressés côte à côte dans la rue, tirant des valises, partageant un baiser ou s’enlaçant. Elles sont accompagnées des légendes suivantes : « Ok, elle est heureuse, mais si elle pouvait éviter de sourire pendant qu’il l’embrasse, ce serait plus pratique… » ; « Depuis qu’elle est avec [I], son brushing est toujours parfait. C’est normal, il ne lui pique jamais son sèche-cheveux », « Pour admirer les jambes d’[R], c’est simple, il suffit d’avoir les yeux en face des trous » et « Ils ont 52 et 51 ans, mais avec leurs fringues, ils ressemblent au couple le plus hot du lycée ».

Une dernière photographie présentant [I] [Y], posant de face, illustre un encart titré « [I] [Y] : bientôt de retour au ciné », développant les activités artistiques actuelles et à venir de l’intéressé.

C’est dans ces circonstances qu’est intervenue la présente assignation.

Sur les atteintes à la vie privée et au droit à l’image

Conformément à l’article 9 du code civil et à l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, toute personne, quelle que soit sa notoriété, a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection en fixant elle-même ce qui peut être divulgué par voie de presse. De même, elle dispose sur son image, attribut de sa personnalité, et sur l’utilisation qui en est faite d’un droit exclusif, qui lui permet de s’opposer à sa diffusion sans son autorisation.

Ces droits doivent se concilier avec le droit à la liberté d’expression, consacré par l’article 10 de la même convention. Ils peuvent céder devant la liberté d’informer, par le texte et par la représentation iconographique, sur tout ce qui entre dans le champ de l’intérêt légitime du public, certains événements d’actualité ou sujets d’intérêt général pouvant justifier une publication en raison du droit du public à l’information et du principe de la liberté d’expression, ladite publication étant appréciée dans son ensemble et au regard du contexte dans lequel elle s’inscrit.

Le droit à l’information du public s’agissant des personnes publiques, s’étend ainsi d’une part aux éléments relevant de la vie officielle, d’autre part aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifie une actualité ou un débat d’intérêt général. A l’inverse, les personnes peuvent s’opposer à la divulgation d’informations ou d’images ne relevant pas de leur vie professionnelle ou de leurs activités officielles et fixer les limites de ce qui peut être publié ou non sur leur vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir.

Enfin, la diffusion d’informations déjà notoirement connues du public n’est pas constitutive d’atteinte au respect de la vie privée.

Sur la publication du 22 septembre 2023

Au soutien de son action, [K] [C] fait valoir que la société PRISMA MEDIA a publié, sans son autorisation, un article annonçant une liaison sentimentale entre lui et [R] [G], ce qu’il estime être une immixtion intolérable dans sa vie privée.

Il fait aussi valoir que la société PRISMA MEDIA a publié huit clichés photographiques sans son autorisation, sur lesquels il est parfaitement identifiable, dont deux sont reproduits en page de couverture. Il précise que la majorité d’entre eux ont été obtenus à son insu, manifestement au moyen d’un téléobjectif.

La société PRISMA MEDIA ne conteste pas l’atteinte aux droits de la personnalité du demandeur.

En l’espèce, la publication du 22 septembre 2023 procède à la révélation d’une liaison sentimentale supposée entre [K] [C] et [R] [G] ainsi qu’à des spéculations sur leurs sentiments, éléments qui relèvent assurément de la vie privée de l’intéressé et singulièrement de sa vie intime.

Par ailleurs, cette atteinte est prolongée par la diffusion de huit photographies du demandeur, dont sept ont été manifestement prises au téléobjectif, en compagnie d’[R] [G], captant des gestes de tendresse entre les intéressés. La publication de ces clichés, divulgués sans autorisation et sans que cela ne soit rendu nécessaire par un débat d’intérêt général ou un sujet d’actualité, porte une atteinte au droit à l’image de [K] [C], en ce qu’il n’a pas autorisé cette captation, et au respect dû à l’intimité de sa vie privée puisqu’ils ont trait à un moment intime dans lequel s’immisce le photographe.

Il convient donc de considérer que sont établies l’atteinte à la vie privée et au droit à l’image du demandeur dans le cadre de la publication du 22 septembre 2023.

Sur les écritures du 14 mai 2024

Au soutien de sa demande additionnelle, [K] [C] fait valoir que dans ses écritures signifiées le 14 mai 2024, la défenderesse s’est livrée à des suppositions et des recoupements de supposées story INSTRAGRAM, qu’elle aurait en réalité reprises d’autres articles de presse, ce qu’il considère comme une nouvelle atteinte à sa vie privée.

Il fait aussi valoir que dans ces mêmes écritures, la société PRISMA MEDIA a reproduit sans autorisation trois nouvelles photographies, qui proviendraient du supposé compte INSTAGRAM de [K] [C], portant ainsi atteinte à son droit à l’image.

La société PRISMA MEDIA conteste l’atteinte aux droits de la personnalité du demandeur en ce qui concerne ses écritures signifiées le 14 mai 2024, indiquant avoir simplement reproduit des extraits du compte INSTAGRAM de [K] [C], librement accessible au public.

En l’espèce, dans l’exposé de ses moyens tenant à l’appréciation du préjudice du demandeur (pages 3 et 4 de ses écritures signifiées le 14 mai 2024), la défenderesse constate que celui-ci aurait publié le 26 septembre 2023, soit postérieurement à la publication de l’article litigieux, des story sur son compte INSTAGRAM, rendant compte de vacances au Portugal, en compagnie d’une femme blonde identifiée par la mention « 3A », des médias ayant selon elle relevé que cette mention renvoyait au prénom [R], qui comporte trois fois la lettre A. La défenderesse renvoie à cet égard à sa pièce n°13, correspondant à un article du site Pure People du 27 septembre 2023, intitulé « [I] [Y] en couple, il dévoile de gros indices sur l’identité de sa mystérieuse et divine blonde ! ».

La défenderesse ajoute qu’en janvier 2024, [I] [Y] et [R] [G] se sont mis en scène dans le même restaurant italien NOTTO de [Localité 6], « un recoupement de leurs story INSTAGRAM ne laissant guère de doute sur la nature de leur relation ». Elle renvoie à cet égard à ses pièces n°14 et 15 du site Pure People du 29 janvier 2024, intitulés « [R] [G] très proche d’un charmant rappeur : un repas plein de complicité et de gestes tendres… » et « [I] [Y] avec une mystérieuse blonde dans le même restaurant qu’[R] [G] ».

Enfin, la défenderesse reproduit quatre extraits story INSTAGRAM, repris du site Pure People, l’un présenté comme publié par [R] [G], les trois autres comme publiés par [K] [C].

Au regard de ces éléments, la défenderesse ayant seulement repris, au soutien de ses moyens et prétentions dans le cadre d’une procédure judiciaire, des éléments de faits qu’elle tire du contenu de trois articles de presse et des publications des intéressés sur leurs propres comptes Instagram, elle n’a pas commis une immixtion illicite dans la vie privée du demandeur.

Dans ces conditions, les atteintes alléguées quant aux écritures du 14 mai 2024 ne sont pas constituées.

Sur les mesures sollicitées

Sur la demande indemnitaire

Si la seule constatation de l’atteinte au respect à la vie privée et au droit à l’image par voie de presse ouvre droit à réparation, le préjudice étant inhérent à ces atteintes, il appartient toutefois au demandeur de justifier de l’étendue du dommage allégué ; l’évaluation du préjudice est appréciée de manière concrète, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes, ainsi que des éléments invoqués et établis.

Par ailleurs, l’atteinte au respect dû à la vie privée et l’atteinte au droit à l’image constituent des sources de préjudice distinctes, pouvant ouvrir droit à des réparations différenciées, à condition qu’elles soient dissociables.

S’agissant de l’atteinte à la vie privée, l’allocation de dommages et intérêts ne se mesure pas à la gravité de la faute commise, ni au chiffre d’affaires réalisé par l’éditeur de l’organe de presse en cause ; cependant, la répétition des atteintes, comme l’étendue de la divulgation et l’importance du lectorat de ce magazine à fort tirage, sont de nature à accroître le préjudice.

En outre, l’utilisation de l’image d’une personne sans autorisation est de nature à provoquer chez son titulaire un dommage moral, la seule constatation de l’atteinte à ce droit par voie de presse ouvrant droit à réparation. Le demandeur doit toutefois justifier de l’étendue du dommage allégué, le préjudice étant apprécié concrètement, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes et des éléments versés aux débats.

Au soutien de sa demande indemnitaire, [K] [C] expose que la publication de cet article lui cause un grave préjudice moral, celui-ci étant aggravé notamment par l’exploitation mercantile en page de couverture de son nom, de sa notoriété et de son image, par la mise en scène de l’annonce de sa liaison, par les détails réels ou supposés contenus dans l’article quant à sa situation familiale et ses sentiments, par la traque dont il a fait l’objet au regard des précisions apportées sur son emploi du temps et les photographies volées au téléobjectif, par la très grande visibilité du magazine en kiosque, par le nombre important des lecteurs et par le ton dénigrant et infantilisant de l’article à l’égard des deux intéressés.

La société défenderesse sollicite l’allocation d’une réparation de principe au demandeur, dont elle conteste la gravité du préjudice, soutenant qu’il ne produit aucune pièce pouvant le justifier. Produisant en ce sens trois articles de presse du site Pure People (pièces n°13 à 15) et un article du magazine Gala (pièce n° 16), elle soutient en outre que [K] [C] aurait évoqué lui-même sa vie privée et suscité ainsi la curiosité du public, notamment par des publications sur son compte INSTAGRAM, le 26 septembre 2023 et en janvier 2024, soit postérieurement à l’article litigieux, faisant allusion à sa relation avec [R] [G].

A titre préalable, il sera relevé que si le préjudice moral causé par la publication en cause est lié à une double atteinte, l’une à la vie privée, l’autre au droit à l’image, il doit être apprécié de manière globale dès lors que ces deux atteintes sont intrinsèquement liées.

En l’espèce, pour évaluer l’étendue du préjudice moral du demandeur consécutif à la publication litigieuse, il convient de prendre en compte le fait que celui-ci subit l’exposition au public d’éléments de sa vie privée dans un article qui paraît dans un magazine de diffusion nationale et à grand tirage (pièces 2.1 à 2.4 en demande) et qui est annoncé en page de couverture, par un texte de couleur criarde annonçant la révélation d’une histoire présentée comme « secrète » et par la mention « PHOTOS EXCLU », soit sous la promesse de l’exclusivité propre à attirer l’attention d’un public plus large que celui des seuls acheteurs du magazine.

Il convient également de prendre en considération que l’article, en traitant du sujet intime de sa relation amoureuse supposée avec [R] [G], à propos de laquelle le demandeur ne s’était pas publiquement exprimé au préalable, est de nature à donner de la consistance au préjudice allégué.

Il y a lieu également de retenir que les intéressés ont été photographiés avec un téléobjectif, ce qui démontre une surveillance préjudiciable de leurs activités, y compris dans des moments de nature privée.

Certains éléments commandent toutefois une appréciation plus modérée du préjudice subi par le demandeur.

Il sera, en premier lieu, souligné que [K] [C] ne produit aucune pièce de nature à préciser le préjudice résultant spécifiquement pour lui de la publication de l’article.

Il convient également de relever que l’article est avant tout focalisé sur [R] [G] et le ton de l’article reste bienveillant à l’égard de [K] [C], dont les qualités supposées sont mises en avant.

Enfin, s’il a pas révélé officiellement cette liaison supposée à l’occasion des articles de presse postérieurs produits par la défenderesse (pièces n°13 à 16 en défense), il convient de relever que ses publications sur son compte INSTAGRAM, relayées par ces articles, qui font des allusions à sa liaison, sont de nature à attiser la curiosité du public et à nuancer la sensibilité de [K] [C] à l’évocation d’éléments relevant de sa vie privée par un magazine ainsi que l’importance qu’il accorde à la protection de celle-ci.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu d’allouer à [K] [C], à titre de réparation de son préjudice moral, la somme de 3 000 euros pour les atteintes portées à sa vie privée et à son droit à l’image au sein du magazine Voici n°1868 en date du 22 au 28 septembre 2023.

Sur la demande d’interdiction de publication ultérieure et de cession des images

Si l’article 9 du code civil et l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales confèrent à toute personne un droit au respect de sa vie privée, celui-ci doit être concilié avec le droit à la liberté d’expression, consacré par l’article 10 de la même convention. Dès lors, chaque publication fait l’objet d’une appréciation in concreto de l’équilibre entre ces deux droits, et il ne saurait être posé une interdiction de principe pour l’avenir, qui contreviendrait au second. La demande sera en conséquence rejetée.

Sur la demande de publication du communiqué de la décision 

Il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de publication judiciaire, qui constitue une restriction disproportionnée de la liberté d’expression, alors que l’allocation de dommages et intérêts au demandeur est suffisante à réparer le préjudice subi.

Sur les autres demandes

La société PRISMA MEDIA, qui succombe, sera condamnée aux dépens, avec distraction au profit de Maître Alain TOUCAS-MASSILLON conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du demandeur les frais exposés par lui au titre de la présente procédure, il y a lieu en conséquence de condamner la société PRISMA MEDIA à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sera rappelé que l’exécution provisoire, en application de l’article 514 du code de procédure civile, est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Condamne la société PRISMA MEDIA à payer à [K] [C] la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral résultant des atteintes portées à son droit à la vie privée et à son droit à l’image au sein du magazine Voici n°1868 en date du 22 au 28 septembre 2023 ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société PRISMA MEDIA aux dépens, avec distraction au profit de Maître Alain TOUCAS-MASSILLON conformément à l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société PRISMA MEDIA à payer à [K] [C] la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que l’exécution provisoire est de droit nonobstant appel.

Fait à Paris le 27 Novembre 2024

Le Greffier Le Président


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