Vente parfaite d’un Basquiat

·

·

Vente parfaite d’un Basquiat

L’Essentiel : Dans une vente aux enchères, un acheteur a acquis une œuvre de Jean-Michel Basquiat pour près d’un million d’euros, invoquant la nullité de la vente en raison d’une information erronée dans le catalogue. Il soutenait que l’affirmation selon laquelle le tableau avait fait la couverture du New York Times en février 1985 était déterminante pour son consentement. Cependant, le tribunal a jugé que l’acheteur n’avait pas prouvé que cette information constituait une qualité substantielle de l’œuvre. La mention, bien que potentiellement ambiguë, ne justifiait pas la nullité, l’erreur étant considérée comme inexcusable pour un professionnel de l’art.

Action en nullité d’une vente

En cas d’acquisition d’œuvre d’art, l’appréciation de l’erreur est subjective mais il appartient à celui qui l’invoque, d’établir en quoi il s’agissait dans son esprit au moment de la vente, d’une qualité substantielle et pour quelle raison elle a été déterminante de son consentement, encore qu’elle puisse être excusable.

Dans le cadre d’une vente aux enchères d’oeuvres d’art contemporain à l’Espace Tajan, un acheteur s’est porté adjudicataire d’une oeuvre de Jean-Michel Basquiat pour près d’un million d’euros. L’acheteur a par la suite demandé la nullité de la vente en faisant valoir que l’information publiée au catalogue Tajan, suivant laquelle le tableau avait fait la couverture du New York Times en février 1985, déterminante de son consentement, s’était révélée inexacte.

Consentement non vicié

Y compris en matière de vente d’œuvres d’art, par combinaison des articles 1109 et 1110 du code civil, le consentement n’est pas valable s’il n’a été donné que par erreur, à condition que l’erreur tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet. Il appartient en conséquence à l’acquéreur de démontrer que l’erreur a porté sur une qualité substantielle de la chose et que cette qualité, qu’il avait en vue au moment de la vente, a formé la cause impulsive de sa volonté et a déterminé son consentement.

En l’espèce, le catalogue de la vente consacré à l’oeuvre de Jean-Michel Basquiat: « Si l’on connaît de nombreux autoportraits de Jean-Michel Basquiat Self-portrait with tie est particulièrement singulier. Cet autoportrait a été réalisé en 1985 lors d’un séjour chez Bruno Bischofberger à Saint Moritz, au plus fort de son succès. Il fait d’ailleurs la couverture du journal The New York Times en février 1985, illustrant l’article intitulé « New Art, New Money the Marketing of an American Artist. »

Faute inexcusable

L’acheteur considérait que cette dernière phrase a fait naître la croyance erronée que le tableau avait fait la couverture du New York Times en février 1985, car le pronom « il » en début de phrase renvoyait nécessairement à l’autoportrait. Or, le pronom « il » pouvait tout aussi bien désigner l’artiste ayant réalisé l’oeuvre « au plus fort de son succès » ce dernier membre de phrase ne pouvant en aucun cas se rapporter au tableau.  Or Jean-Michel Basquiat a bien fait la couverture du New York Times en février 1985, habillé en costume noir-cravate posant pieds nus comme il s’est représenté dans l’autoportrait. Le titre de l’article paru dans le journal « New Art, New Money : the Marketing of an American Artist »» illustré par la photographie est sans ambiguïté en ce sens qu’il se rapportait à l’artiste et non à l’oeuvre.

Par conséquent, l’information figurant au catalogue n’était pas fausse, seul le contexte dans lequel elle était insérée étant susceptible d’entraîner une confusion, encore qu’il pouvait être aisément vérifié sur Internet ou clarifié sur demande de l’acheteur.

La publication éventuelle de l’oeuvre dans le célèbre quotidien newyorkais n’a pas été  présentée comme une qualité substantielle du tableau en cause. L’acheteur ne démontrait pas en quoi cette information pouvait constituer, à ses yeux, au moment de la vente, une qualité substantielle de la chose, ni être déterminante de son consentement. L’acheteur ne pouvait dans ce contexte, invoquer le caractère erroné de l’information, cette erreur, pour un professionnel de l’art moderne, étant en tout état de cause, inexcusable.

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce qu’une action en nullité d’une vente d’œuvre d’art ?

L’action en nullité d’une vente d’œuvre d’art est un recours juridique permettant à un acheteur de contester la validité d’une transaction. Cette action peut être fondée sur des erreurs concernant des éléments essentiels de l’œuvre, comme sa provenance ou ses caractéristiques.

Dans le cadre de l’acquisition d’œuvres d’art, l’acheteur doit prouver que l’erreur invoquée concerne une qualité substantielle de l’œuvre, qui a influencé son consentement au moment de la vente.

Il est important de noter que l’erreur doit être déterminante pour que l’acheteur puisse revendiquer la nullité de la vente.

Comment le consentement est-il considéré comme non vicié dans une vente d’œuvre d’art ?

Le consentement est considéré comme non vicié lorsque l’acheteur a donné son accord en toute connaissance de cause. Selon les articles 1109 et 1110 du code civil, le consentement n’est pas valable s’il repose sur une erreur.

Cette erreur doit porter sur la substance même de l’objet de la vente. L’acheteur doit démontrer que l’erreur a concerné une qualité substantielle de l’œuvre, qui était déterminante pour son consentement.

Dans le cas d’une vente d’œuvre d’art, cela implique que l’acheteur doit prouver que l’information erronée a influencé sa décision d’achat.

Quelle était la nature de l’erreur invoquée par l’acheteur dans l’affaire Basquiat ?

L’acheteur a invoqué une erreur concernant l’information selon laquelle le tableau de Jean-Michel Basquiat avait fait la couverture du New York Times en février 1985. Cette information, selon lui, était déterminante pour son consentement à l’achat.

Il a soutenu que cette mention dans le catalogue a créé une croyance erronée, le pronom « il » étant interprété comme se référant au tableau. Cependant, cette interprétation était contestée, car le pronom pouvait également désigner l’artiste.

Il a été établi que Jean-Michel Basquiat avait effectivement fait la couverture du journal, mais que cela ne se rapportait pas directement à l’œuvre en question.

Pourquoi la faute inexcusable a-t-elle été évoquée dans cette affaire ?

La notion de faute inexcusable a été évoquée car l’acheteur, en tant que professionnel de l’art moderne, aurait dû être en mesure de vérifier l’information concernant la couverture du New York Times.

L’acheteur n’a pas démontré que l’information sur la couverture était une qualité substantielle de l’œuvre, ni qu’elle était déterminante pour son consentement.

De plus, l’information, bien que potentiellement ambiguë dans son contexte, n’était pas fausse. L’acheteur aurait pu clarifier cette information avant la vente, ce qui a conduit à considérer son erreur comme inexcusable.

Quelles sont les implications de cette décision pour les acheteurs d’œuvres d’art ?

Cette décision souligne l’importance pour les acheteurs d’œuvres d’art de faire preuve de diligence raisonnable avant d’effectuer un achat. Ils doivent s’assurer que toutes les informations fournies sont exactes et pertinentes.

Les acheteurs doivent également être conscients que, dans le cadre d’une vente aux enchères, des informations peuvent être présentées de manière à prêter à confusion.

Il est essentiel de vérifier les faits et de poser des questions si des éléments semblent ambigus. En cas d’erreur, la responsabilité de prouver que cette erreur est substantielle et déterminante repose sur l’acheteur.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon