Validité des mises en demeure et de la contrainte en matière de cotisations sociales

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Validité des mises en demeure et de la contrainte en matière de cotisations sociales

L’Essentiel : Le 10 octobre 2017, un dirigeant d’entreprise a formé opposition à une contrainte établie par les directeurs de la caisse du régime social des indépendants et de l’URSSAF de l’Île-de-France. Cette contrainte concernait des cotisations et majorations de retard pour les troisième et quatrième trimestres de 2016, s’élevant à 14 454 euros. Le tribunal a validé la contrainte à hauteur de 14 260,59 euros, condamnant le dirigeant à payer cette somme à l’URSSAF. En appel, il a contesté la validité des mises en demeure, mais la cour a confirmé le jugement de première instance, déclarant irrecevable sa demande de remise des majorations.

Contexte de l’affaire

Le 10 octobre 2017, M. [F] [P] a formé opposition à une contrainte établie le 19 septembre 2017 par les directeurs de la caisse du régime social des indépendants et de l’URSSAF de l’Île-de-France. Cette contrainte concernait des cotisations et majorations de retard pour les troisième et quatrième trimestres de 2016, s’élevant à un montant total de 14 454 euros.

Jugement du tribunal

Le tribunal a rendu son jugement le 22 février 2021, validant la contrainte à hauteur de 14 260,59 euros. M. [F] [P] a été condamné à payer cette somme à l’URSSAF, ainsi qu’à supporter les frais de notification de la contrainte et les dépens. Sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée, et la décision a été déclarée exécutoire de droit à titre provisoire.

Arguments du tribunal

Le tribunal a jugé que les mises en demeure préalables étaient valides, permettant à M. [F] [P] de connaître ses obligations. Il a également confirmé la régularité de l’acte de signification de la contrainte, soulignant que la délégation de pouvoir des directeurs n’affectait pas la validité de la contrainte. De plus, il a noté que l’accord entre M. [F] [P] et la société dont il était gérant n’était pas opposable à l’organisme de sécurité sociale.

Appel de M. [F] [P]

M. [F] [P] a interjeté appel le 25 mars 2021, demandant l’infirmation du jugement. Il a contesté la validité des mises en demeure et de la contrainte, arguant qu’elles manquaient de motivation et de précisions. Il a également soutenu qu’il n’avait pas perçu de rémunération en tant que co-gérant de la société depuis décembre 2015, ce qui aurait dû le dispenser de cotisations.

Réponse de l’URSSAF

L’URSSAF a demandé à la cour de confirmer le jugement de première instance, déclarant irrecevable la demande de remise des majorations de retard et condamnant M. [F] [P] à payer 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Analyse des mises en demeure

M. [F] [P] a soutenu que les mises en demeure ne précisaient pas les périodes de cotisations concernées, ce qui aurait entravé sa compréhension de ses obligations. L’URSSAF a répliqué que les mises en demeure fournissaient suffisamment d’informations pour permettre au cotisant de connaître la nature et le montant des sommes réclamées.

Nullité de la contrainte

M. [F] [P] a également contesté la contrainte, affirmant qu’elle manquait de détails sur les cotisations demandées. L’URSSAF a fait valoir que la contrainte était conforme aux exigences légales, mentionnant les mises en demeure et les montants dus.

Signification de la contrainte

Concernant la signification de la contrainte, M. [F] [P] a argué que l’acte avait été signifié au nom de plusieurs organismes, ce qui ne respectait pas les exigences légales. La cour a répondu que la mention conjointe des organismes était conforme aux dispositions légales en vigueur.

Sommes dues et majorations

M. [F] [P] a contesté les sommes dues, affirmant que le RSI devait savoir que sa société prenait en charge ses cotisations. L’URSSAF a rétorqué que les cotisations étaient personnelles et que tout accord entre M. [F] [P] et sa société n’était pas opposable. La cour a confirmé que M. [F] [P] devait prouver le caractère infondé de la créance.

Décision finale de la cour

La cour a déclaré recevable l’appel de M. [F] [P], mais a confirmé le jugement du tribunal de première instance. Elle a également déclaré irrecevable la demande de remise des majorations de retard et a condamné M. [F] [P] à payer 3 000 euros à l’URSSAF au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de validité des mises en demeure en matière de recouvrement des cotisations sociales ?

Les mises en demeure doivent respecter certaines conditions de validité, conformément aux articles L. 244-2 et L. 244-9 du code de la sécurité sociale. Ces articles stipulent que la mise en demeure constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans un délai imparti.

Pour être valide, la mise en demeure doit permettre au cotisant de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation. Cela implique qu’elle précise, à peine de nullité, la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

Il est important de noter que la jurisprudence a établi que le défaut de réception par le destinataire d’une mise en demeure adressée par lettre recommandée n’affecte pas la validité de celle-ci ni celle des actes de poursuite subséquents.

Ainsi, dans le cas présent, les mises en demeure mentionnaient les périodes de référence, le montant des sommes dues, et distinguaient les cotisations des majorations de retard, permettant ainsi au cotisant de connaître la nature des cotisations mises à sa charge.

La contrainte est-elle valide si elle ne précise pas les détails des cotisations demandées ?

La contrainte doit permettre au redevable d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation. Selon l’article L. 133-1-1 du code de la sécurité sociale, la contrainte doit préciser, à peine de nullité, la nature et le montant des cotisations et contributions réclamées, ainsi que la période à laquelle celles-ci se rapportent.

Dans le cas présent, la contrainte du 19 septembre 2017 faisait référence aux mises en demeure antérieures, en rappelant leurs numéros respectifs, les dates de leur établissement, et les périodes auxquelles elles se référaient. Cette mention permettait au cotisant d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation.

Ainsi, la référence à des mises en demeure antérieures, qui contenaient les détails requis, est suffisante pour valider la contrainte. Par conséquent, le moyen de nullité de la contrainte pour absence de motivation a été écarté.

Quelles sont les conséquences de la nullité de la signification de la contrainte ?

La nullité éventuelle de l’acte de signification de la contrainte n’a pas pour effet d’annuler cette dernière, mais seulement de ne pas faire courir les délais d’opposition. L’article 648 du code de procédure civile précise que la signification doit être faite au nom de l’autorité poursuivante.

Dans le cas présent, la signification de la contrainte a été faite au nom de plusieurs organismes, ce qui a soulevé des questions sur l’identification de l’autorité poursuivante. Cependant, la mention conjointe de la caisse RSI et de l’URSSAF était conforme aux dispositions de l’article L. 133-1-1 du code de la sécurité sociale.

Il appartient à l’opposant de démontrer l’existence d’un grief en cas de nullité formelle. En l’espèce, le cotisant n’a pas rapporté la preuve d’un préjudice résultant de cette identification multiple. Par conséquent, le moyen de nullité de la signification de la contrainte a été écarté.

Les cotisations d’un travailleur indépendant peuvent-elles être prises en charge par sa société ?

Les cotisations d’un travailleur indépendant sont personnelles et ne peuvent pas être opposées à l’organisme de recouvrement par un accord entre le travailleur et sa société. L’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale stipule que les cotisations sont établies sur une base annuelle et sont calculées à titre provisionnel.

Dans le cas présent, le cotisant a soutenu que sa société avait pris en charge ses cotisations personnelles. Cependant, l’URSSAF a rappelé que tout accord intervenu entre un assuré et un tiers, quant à la prise en charge de ses cotisations, est inopposable au RSI.

Ainsi, même si la société avait déclaré prendre en charge les cotisations, cela ne saurait exonérer le cotisant de son obligation de paiement. Par conséquent, le cotisant ne peut pas opposer cet accord pour solliciter le rejet des prétentions de l’URSSAF.

Quelles sont les conditions pour obtenir une remise des majorations de retard ?

Conformément à l’article R. 243-20 du code de la sécurité sociale, la demande de remise totale ou partielle des majorations et pénalités n’est recevable qu’après règlement de la totalité des cotisations et contributions ayant donné lieu à application des majorations.

Il est également stipulé que la demande doit être portée préalablement devant le directeur de l’organisme. En l’espèce, le cotisant n’a pas démontré avoir formé une telle demande devant le directeur de l’URSSAF.

Ainsi, faute de démontrer avoir formé une demande préalable et alors même que les cotisations sont encore dues, la demande de remise des majorations de retard a été déclarée irrecevable. Le jugement a donc été confirmé en ce sens.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 13

ARRÊT DU 31 Janvier 2025

(n° , 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 21/03256 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPIR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Février 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MEAUX RG n° 17/00616

APPELANT

Monsieur [F] [P]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Abdelnour BOUADDI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1171

INTIMEE

URSSAF

[Adresse 7]

[Localité 4]

représentée par M. [L] [Z] en vertu d’un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Décembre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M Raoul CARBONARO, président de chambre

M Gilles REVELLES, conseiller

Mme Sophie COUPET, conseillère

Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Raoul CARBONARO, président de chambre et par Mme Fatma DEVECI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel interjeté par M. [F] [P] (le cotisant) d’un jugement rendu le 22 février 2021 par le tribunal judiciaire de Meaux dans un litige l’opposant à l’URSSAF de l’Île-de-France (l’URSSAF).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de préciser que le 10 octobre 2017, M. [F] [P] a formé opposition devant une juridiction en charge du contentieux de la sécurité sociale à une contrainte établie le 19 septembre 2017 et signifiée le 27 septembre 2017 par les directeurs de la caisse du régime social des indépendants et de l’URSSAF de l’Île-de-France au titre des cotisations et majorations de retard pour les troisième et quatrième trimestres 2016 pour un montant total de 14 454 euros.

Par jugement en date du 22 février 2021, le tribunal :

valide la contrainte n° 11700000155113640900838620481678 établie par le régime social des indépendants et l’URSSAF le 19 septembre 2017, à hauteur de la somme de 14 260,59 euros au titre des cotisations et majorations de retard pour la période des troisième et quatrième trimestres 2016 ;

condamne M. [F] [P] à payer à l’URSSAF de l’Île-de-France la somme totale de 14 260,50 euros au titre de la contrainte du 19 septembre 2017 ;

dit que les frais de notification de la contrainte, ainsi que tous les actes de procédure nécessaires à son exécution, restent à la charge de M. [F] [P] ;

condamne M. [F] [P] aux dépens ;

déboute M. [F] [P] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

rappelle que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.

Le tribunal a retenu que les mises en demeure préalables à la délivrance de la contrainte étaient valides pour permettre au cotisant de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation, dès lors que ce dernier ne pouvait légitimement ignorer que le montant des régularisations correspondait à l’année N – 1 en application des dispositions de l’article L. 133-6 du code de la sécurité sociale. Il a retenu que l’acte de signification était régulier dès lors que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, complétée par le décret n° 2017-864 du 9 mai 2017, confiait à l’URSSAF le recouvrement des cotisations et contributions sociales dues à titre personnel par les travailleurs indépendants. L’article L. 133-1-1 du code de la sécurité sociale désigne en outre les directeurs des deux organismes pour désigner conjointement un directeur pour la réalisation de la mission de recouvrement. Cette délégation ne saurait, selon le tribunal priver les directeurs de leur propre pouvoir. Dès lors, la contrainte ayant été signée par les deux directeurs et notifiée à la demande de la caisse du régime social des indépendants et de l’URSSAF, tant la contrainte que l’acte de signification étaient valables. Le tribunal a rappelé que l’accord ayant lié le cotisant à la société dont il était le gérant pour la prise en charge des cotisations n’était pas opposable à son organisme de sécurité sociale. Il a retenu en outre qu’il n’avait pas quitté la gérance de la société à partir de l’année 2016, sa rémunération ayant été simplement suspendue de telle sorte qu’il ne peut invoquer le fait qu’il ait été empêché d’exercer ses fonctions. Le tribunal a donc validé la contrainte pour son montant ramené à une somme légèrement inférieure au regard des versements produits.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception non remise à son destinataire qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 25 mars 2021.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, M. [F] [P] demande à la cour de :

infirmer le jugement rendu le 22 février 2021 notifiée le 5 mars 2021 du tribunal judiciaire pôle social de Meaux en ce qu’il a écarté les moyens de nullités pris de mises en demeure et de la contrainte irrégulières pour manque de motivations et de précisions ;

infirmer le jugement en ce qu’il a écarté le moyen pris de la nullité de la signification de la contrainte pour violation de l’article 648 du code de procédure civile ;

infirmer le jugement en ce qu’il a écarté le moyen de nullité pris du défaut de qualité ;

infirmer le jugement en ce qu’il a validé la contrainte de l’URSSAF en date du 19 septembre 2017 ;

infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté l’opposition de M. [F] [P] et l’a condamné au paiement de la somme de 14 260,59 euros au titre de la contrainte ;

infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [F] [P] de sa demande d’article 700 ;

en conséquence,

à titre principal,

juger que les mises en demeure sont intervenues en violation des dispositions impératives de l’article R. 244-1 du code de sécurité sociale, faute de préciser les périodes de cotisations concernées ;

juger que les mises en demeure sont intervenues en violation des dispositions impératives de l’article R. 244-1 du code de sécurité sociale, faute de préciser la nature et le quantum des sommes réclamées ;

juger nulle la contrainte faute de motivation ;

juger que l’acte de signification de la contrainte par huissier de justice est intervenu en violation de l’article 648 du code de procédure civile ;

juger que l’URSSAF ne justifie pas de la qualité de Mme [D] à établir une contrainte au nom de la caisse RSI et de l’URSSAF ;

en conséquence,

juger nulles et non avenues les mises en demeure des 10 octobre et 16 décembre 2016 et tous les actes subséquents ;

juger nulle et non avenue la contrainte 110 11700000155113640900838620481678 du 19 septembre 2017 de la caisse RSI et de l’URSSAF signifiée par huissier de justice le 28 septembre 2017 ;

les inviter à mieux se pourvoir ;

à titre subsidiaire,

juger que M. [F] [P] n’a perçu aucune rémunération en sa qualité de co-gérant de la société [6] depuis le 18 décembre 2015 jusqu’au 17 mai 216, date de sa démission ;

juger que M. [F] [P] a été dans l’impossibilité d’exercer son mandat en sa qualité de cogérant de la société [6] depuis le 18 décembre 2015 jusqu’au 17 mai 216, date de sa démission ;

juger que le RSI devait savoir ou ne pouvait ignorer que la société [6] s’était engagée à prendre en charge les cotisations RSI de M. [F] [P] ;

juger que M. [F] [P] a démissionné de ses fonctions de cogérant le 17 mai 2016 de la société [6] ;

juger que les formalités de modifications y afférents au RCS sont bien intervenues ;

juger que le contrat de travail de M. [F] [P] au sein de la filiale [5] a fait l’objet d’une rupture conventionnelle en date du 27 mai 2016 ;

en conséquence,

débouter l’URSSAF de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

ordonner la remise des majorations et pénalités ;

les inviter à mieux se pourvoir ;

en toute état de cause,

dire n’y avoir lieu à l’application d’une majoration de 1 625 euros ;

condamner l’URSSAF à payer à M. [F] [P] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

les condamner aux entiers dépens.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son représentant, l’URSSAF de l’Île-de-France demande à la cour de :

confirmer la décision de première instance du 22 février 2021 ;

déclarer irrecevable la demande de remise des majorations de retard ;

condamner M. [F] [P] à payer 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l’audience du 2 décembre 2024 qu’elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE

sur les nullités des mises en demeure :

Moyens des parties :

M. [F] [P] expose que si les mises en demeure mentionnent une régularisation et une provision, ces mêmes mises en demeure ne précisent pas la période à laquelle elles se rapportent ; que la référence faite dans les mises en demeure aux 3e et 4e trimestre 2016 ne saurait suffire à respecter l’obligation de motivation dans la mesure où la mise en demeure du 10 octobre 2016 relative au 3e trimestre 2016 porte sur des provisions et des régularisations de cotisations sans préciser sur quelle année porte et la régularisation et la provision et que la mise en demeure du 8 décembre 2016 relative au 4e trimestre 2016 porte exclusivement sur des régularisations de cotisations sans préciser sur quelle année porte la régularisation ; que pour preuve du caractère insuffisamment motivé, il n’a eu de cesse d’invoquer, pour s’opposer au paiement de ces sommes, la circonstance qu’il ne devait aucune cotisation dans la mesure où il avait cessé d’être co-gérant à compter de mai 2016 soit au cours du 2nd trimestre 2016 alors que lui était réclamé, du moins le croyait-il, des cotisations des 3e trimestre 2016 et 4e trimestre 2016 ; que ce n’est que dans le cadre des conclusions de l’URSSAF de première instance qu’il a su enfin que les sommes qui lui sont réclamées étaient relatives à la régularisation des cotisations pour l’année 2015 et aux provisions de l’année 2016 ; que ce défaut de motivation a causé un préjudice d’autant plus grand à M. [P] que le conflit ouvert entre lui et la société [6] s’est réglé dans le cadre d’un protocole d’accord au demeurant confidentiel, faisant obstacle désormais à la prise en charge des cotisations RSI par la société alors même que lors de sa nomination, ladite société s’engageait à prendre en charges ses cotisations personnelles ; que le tribunal a renversé la charge de la preuve en instituant une double présomption à sa charge : d’une part, la présomptions selon laquelle les régularisations sont nécessairement relatives à l’année n-1 sans qu’il ne soit besoin pour l’organisme de le préciser ; d’autre part, la présomption selon laquelle un redevable doit savoir que les régularisations correspondent nécessairement à l’année n-1, sans qu’il ne soit besoin pour l’organisme de le préciser ;

Qu’il a fallu pas moins de 5 tableaux dans ses conclusions de première instance pour voir l’URSSAF justifier du prétendu bien-fondé de l’appel de cotisations pour l’année 2016 ce que l’organisme réitère dans ses écritures d’appel ; que cette motivation a posteriori démontre si besoin est que la motivation contenue dans la mise en demeure du 10 octobre 2016 relative au quantum des cotisations provisionnelles pour l’année 2016 était insuffisante ; que ce n’est que dans le cadre de la présente instance, après avoir procédé à une déduction de 157,41 euros et un nouvel ajustement sur 2016 de la somme de 914 euros que l’organisme fixe désormais sa créance à la somme de 12 917,59 euros hors majoration ;

L’URSSAF de l’Île-de-France réplique qu’il n’est pas nécessaire de faire figurer dans la contrainte ou la mise en demeure le catalogue des cotisations et contributions réclamées ; que par ailleurs, pour éviter que ce formalisme ne soit trop contraignant pour la gestion de la branche du recouvrement et que la mise en demeure ne devienne une feuille de calcul illisible, la jurisprudence en a fixé des limites tout en garantissant au cotisant une information suffisante ; qu’ainsi, ne figurent pas parmi les mentions exigées par la jurisprudence, les éléments de calcul des cotisations réclamées qu’il s’agisse de cotisations dues au titre du régime général (employeur) ou de cotisations dues à titre personnel pour l’exercice d’une activité non salariée comme dans le cas présent ; qu’une mise en demeure qui précise, au titre d’une période déterminée, la cause des sommes réclamées et le montant de sa créance, avec indication des majorations et des pénalités de retard, permet à l’assujetti de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation ; que la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent, ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ;

Que la mise en demeure mentionne les périodes de référence, à savoir les 3e et 4e trimestres 2016, le montant des sommes dues pour chaque période, en distinguant les cotisations des majorations de retard, soit 13 111 euros de cotisations et 1 343 euros de majorations de retard, le numéro du compte cotisant et la nature des cotisations réclamées, les cotisations et contributions personnelles obligatoires ; que le créancier est désigné, à savoir le RSI.

Réponse de la cour :

Selon les articles L. 244-2 et L. 244-9 du code de la sécurité sociale, rendus applicables au recouvrement des cotisations et contributions par les organismes du régime social des indépendants par les articles L. 133-6-4, I, et L. 612-12 du même code, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l’intéressé d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation ; qu’à cette fin, il importe qu’elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice.

Le fait de mentionner dans la mise en demeure que les cotisations étaient appelées au titre du régime général et incluaient la contribution à l’assurance-chômage et les cotisations AGS, en précisant la période en cause est suffisant pour permettre à la société de connaître la nature des cotisations mises à sa charge (2e Civ., 12 mai 2021, pourvoi n° 20-12.264).

Il résulte des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale que le défaut de réception par son destinataire d’une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception n’affecte ni la validité de celle-ci ni la validité des actes de poursuite subséquents (2e Civ., 27 janvier 2022, pourvoi n° 20-21.538).

L’article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dispose.

« (Les cotisations) sont calculées, à titre provisionnel, sur la base du revenu d’activité de l’avant-dernière année. Pour les deux premières années d’activité, les cotisations provisionnelles sont calculées sur la base d’un revenu forfaitaire fixé par décret après consultation des conseils d’administration des organismes de sécurité sociale concernés.

« Lorsque le revenu d’activité de la dernière année écoulée est définitivement connu, les cotisations provisionnelles, à l’exception de celles dues au titre de la première année d’activité, sont recalculées sur la base de ce revenu.

« Lorsque le revenu d’activité de l’année au titre de laquelle elles sont dues est définitivement connu, les cotisations font l’objet d’une régularisation sur la base de ce revenu. »

Aux termes de cet article, les cotisations sont calculées à titre provisionnel sur la base des revenus de l’année N-2 puis recalculées sur les revenus de l’année N-1, donnant lieu à une première régularisation à titre provisionnel. Elles sont ensuite définitivement régularisées durant l’année N+1 lors de la connaissance des revenus perçus au titre de l’année correspondante.

En la présente espèce, la mise en demeure portant sur le troisième trimestre 2016 en date du 10 octobre 2016 a été notifiée par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception distribuée le 12 octobre 2016. Elle mentionne qu’elle a été délivrée par le RSI et qu’elle porte sur des régularisations et des cotisations provisionnelles concernant l’assurance maladie-maternité, les indemnités journalières, l’invalidité-décès, la retraite de base, la retraite complémentaire mais uniquement pour des régularisations, la CSG-CRDS pour les régularisations et comporte des majorations de retard.

La seconde mise en demeure en date du 8 décembre 2016 a été notifiée par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception distribuée le 16 décembre 2016 et porte sur la régularisation appelée au quatrième trimestre 2016 des mêmes cotisations et contributions.

Le cotisant, qui ne pouvait ignorer avoir déclaré ses revenus dans le courant du deuxième trimestre 2016 pour l’année 2015, était en mesure de savoir, au regard du texte précité de l’article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale qu’il n’est pas censé ignoré, que le RSI était susceptible de modifier les appels provisionnels de cotisations pour l’année 2016 au vu des revenus définitifs de l’année 2015 et que l’appel de cotisations du quatrième trimestre 2016 portait sur la régularisation définitive de l’année 2015.

Dès lors que ces mises en demeure identifiaient le créancier, le montant des sommes dues par type de cotisations exigibles ou de contributions appelées en les distinguant des majorations de retard pour une période déterminée, le cotisant était à même de connaître la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que les majorations qui s’y appliquent.

La discussion portant sur le montant des mises en demeure et une discussion de fond qui ne se rapporte pas à leur nullité.

En conséquence, les moyens tirés de la nullité des mises en demeure seront écartés.

sur la nullité de la contrainte :

Moyens des parties :

M. [F] [P] expose que la contrainte en date du 19 septembre 2017 ne comporte aucun détail des cotisations demandées ; que la référence faite dans la contrainte aux mises en demeure du 10 octobre 2016 et du 8 décembre 2016 est insuffisante pour pallier cette absence de motivation au vu des moyens de critique exposés à leur encontre.

L’URSSAF de l’Île-de-France réplique que l’article 16 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 complété par le décret 2017-864 du 11 mai 2017, met en place une nouvelle organisation du recouvrement des cotisations et contributions sociales obligatoires des travailleurs indépendants ; que cette réforme prévoit que toutes les étapes du recouvrement des cotisations et contributions sociales sont gérées conjointement par les caisses régionales RSI et les URSSAF (CGSS dans les DOM) ; qu’en conséquence, la notion d’interlocuteur social unique (ISU) est supprimée ; que les caisses RSI et les URSSAF (ou CGSS) deviennent ainsi pleinement et conjointement compétentes sur l’ensemble du processus de recouvrement des cotisations et contributions sociales, c’est-à-dire de la collecte des revenus jusqu’à la gestion du contentieux, que les cotisations concernées soient antérieures ou postérieures au 1er janvier 2017 ; que concernant le défaut de pouvoir du signataire de la contrainte, l’article R. 122-3 code de la sécurité sociale prévoit que le directeur d’un organisme de sécurité sociale peut déléguer une partie de ses pouvoirs à des agents de l’organisme ; que ce même article prévoit également qu’en cas de vacance d’emploi, d’absence momentanée ou d’empêchement du directeur, ses fonctions sont exercées par le directeur adjoint ;

Que, concernant la contrainte, cette dernière porte la mention « Caisse RSI et URSSAF ou CGSS », en respect du texte précité désignant le RSI ou l’URSSAF comme organisme de recouvrement des cotisations dues par les travailleurs indépendants à compter du 1er janvier 2017 ; que par ailleurs, la contrainte est signée par Mme [R] [D], directeur responsable du recouvrement des travailleurs indépendants, de sorte qu’il ne peut y avoir de doute sur le fait que c’est bien le RSI qui assure en l’espèce le recouvrement des cotisations réclamées ; qu’elle a reçu délégation de pouvoir à effet du 1er janvier 2017.

Réponse de la cour :

La contrainte décernée par un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement de cotisations et contributions doit permettre au redevable d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation et préciser à cette fin, à peine de nullité, la nature et le montant des cotisations et contributions réclamées et la période à laquelle celles-ci se rapportent, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice. La référence dans la contrainte à une mise en demeure préalable permet au cotisant d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation (2e Civ., 24 septembre 2020, pourvoi n° 19-17.805).

L’indication de références de dossiers distinctes est sans incidence (2e Civ., 23 janvier 2020, pourvoi n° 18-24.797).

En l’espèce, la contrainte du 19 septembre 2017 fait référence aux deux mises en demeure notifiées en rappelant leurs numéros respectifs, la date de leur établissement, les périodes auxquelles elles se réfèrent pour des montants strictement identiques, en distinguant les cotisations appelées et majorations de retard.

Ce moyen de nullité sera donc écarté.

Relativement à l’identité du créancier, l’article L. 133-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 applicable au litige, dispose que :

« I.- Le recouvrement des cotisations et contributions sociales dues à titre personnel, à l’exception de celles mentionnées aux articles L. 642-1 et L. 723-3, par les personnes mentionnées à l’article L. 611-1 relève de la compétence des organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1, L. 611-4, L. 611-8 et L. 752-4, en application des chapitres III et IV du titre IV du livre II, sous réserve d’adaptations par décret en Conseil d’Etat.

« II.- Le directeur de l’organisme mentionné à l’article L. 225-1 et le directeur général de l’organisme mentionné à l’article L. 611-4 désignent conjointement un directeur national chargé du recouvrement pour la réalisation de cette mission, auquel ils délèguent leur signature.

« Ce directeur est responsable, au niveau national, du pilotage et de l’organisation du recouvrement. Il fixe les orientations et l’organisation des missions mentionnées à l’article L. 133-1-2.

« Le directeur national participe à la préparation et au suivi de l’exécution des stipulations relatives aux objectifs et aux moyens du recouvrement des conventions mentionnées aux articles L. 227-1 et L. 611-7 conclues avec l’Etat.

« Il est responsable de la maîtrise d’ouvrage des systèmes d’information concourant au recouvrement des cotisations et contributions sociales mentionnées au I du présent article et s’assure de la mise en ‘uvre des actions nécessaires à leur fonctionnement.

« Il rend compte aux conseils d’administration des organismes mentionnés aux articles L. 225-1 et L. 611-4 de la situation générale du recouvrement.

« III.- Après avis du directeur national mentionné au II du présent article, le directeur et le directeur général mentionnés aux articles L. 225-1 et L. 611-4 désignent conjointement, sur proposition des directions des organismes et des caisses mentionnés aux articles L. 213-1, L. 611-8 et L. 752-4, des responsables locaux du recouvrement relevant de ces directions. Ces responsables sont chargés, dans le respect des directives fixées par le directeur national, de la mise en ‘uvre des missions prévues à l’article L. 133-1-2 et de l’organisation y afférent de l’activité des caisses et organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 611-8 et L. 752-4. Les directeurs de ces caisses et organismes leur délèguent leur signature à cette fin. »

L’article R. 133-2-11 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n° 2017-864 du 9 mai 2017 applicable au litige énonce que :

« I.-Le directeur national du recouvrement mentionné au II de l’article L. 133-1-1 est désigné pour une période de trois ans renouvelable une fois.

En cas de vacance d’emploi ou d’empêchement du directeur national du recouvrement un directeur par intérim peut être désigné dans les mêmes conditions que celui-ci pour une période maximale de six mois renouvelable une fois.

Le directeur national du recouvrement est rattaché, dans des conditions fixées par la convention mentionnée au 1° de l’article R. 133-2-10, à l’un des organismes mentionnés au premier alinéa pour sa gestion administrative.

II.-En cas de vacance d’emploi ou d’empêchement du responsable local du recouvrement, un responsable par intérim peut être désigné dans les mêmes conditions que celui-ci pour une période maximale de six mois renouvelable une fois.

Les responsables locaux du recouvrement sont rattachés, dans des conditions fixées par les conventions mentionnées à l’article R. 133-2-10, à l’un des organismes mentionnés au premier alinéa pour leur gestion administrative.

III.-Les organismes mentionnés aux articles L. 225-1 et L. 611-4 assurent la publicité des désignations mentionnées aux I et II.

IV.-Le directeur national du recouvrement et les responsables locaux du recouvrement peuvent, sous leur responsabilité, déléguer leur signature à un ou plusieurs agents de leur service pour prendre, en leur nom, certains actes relatifs à leurs attributions. »

Il résulte de ces articles que le créancier devant figurer sur la contrainte n’est plus un interlocuteur unique mais l’ensemble des caisses et organismes au titre desquelles les cotisations et contributions sont appelées, qui doivent déléguer un directeur responsable du recouvrement des travailleurs indépendants.

Dès lors, la mention d’une délivrance par la caisse RSI, l’URSSAF pour le CGSS de la contrainte est conforme aux textes précités.

L’URSSAF produit en outre la délégation n° 2017/009 par laquelle les directeurs des caisses régionales RSI Île-de-France Centre, Île-de-France Est et Île-de-France Ouest ainsi que l’URSSAF Île-de-France donnent délégation de signature à Mme [R] [D] à compter du 1er janvier 2017 pour notamment la délivrance et la notification des contraintes. Cette délégation de signature est valable trois ans.

Il appartient dès lors à M. [F] [P] de démontrer que cette délégation n’avait plus court à la date de la signature de la contrainte litigieuse le 19 septembre 2017. Faute de rapporter cette preuve, le moyen de nullité de la contrainte devra être écarté.

La contrainte sera donc pas annulée.

sur la nullité de la signification de la contrainte :

Moyens des parties :

M. [F] [P] expose qu’il ressort de la signification de l’acte d’huissier en date du 27 septembre 2017 que la contrainte a été signifiée à la demande de : « La Caisse RSI et l’Urssaf ou la CGSS prises en la personne de leurs Directeurs en exercice et élisant domicile au [Adresse 1]. » ; qu’en d’autres termes, l’acte de signification de la contrainte a été faite au nom de trois organismes de sécurité sociale y compris au nom de la Caisse générale de sécurité sociale dont la mission est de recouvrer les cotisations dans les DOM ; que cette identification multiple ne saurait satisfaire aux dispositions de l’article 648 2. b du code de procédure civile dans la mesure où l’acte ne précise pas qui de ces trois organismes est l’autorité poursuivante et ne mentionne pas davantage l’organe qui le représente ; que l’article 16 devenu à la date des faits l’article L. 133-1-1 du code de sécurité sociale dispose que le directeur de l’URSSAF et le directeur du RSI désignent conjointement un directeur national en charge du recouvrement à qui ils délèguent leur signature ; que la signification de la contrainte a été faite non pas au nom du directeur national en charge du recouvrement, ni même au nom du directeur du RSI ayant reçu délégation du directeur national, ni même au nom du directeur de l’URSSAF ayant reçu délégation du directeur national, mais au nom des directeurs en exercice du RSI et de l’URSSAF ; que par suite l’acte de signification de la contrainte est nul et non avenu entachant par là même la contrainte de nullité ;

Que par devant les premiers juges, il avait fait valoir que, faute pour l’URSSAF de justifier que Mme [D] a reçu délégation de signature du directeur national en charge du recouvrement à la date de septembre 2017, la contrainte est nulle et non avenue ; que l’URSSAF n’en a jamais justifié ; que si devant la cour, l’URSSAF produit une délégation de signature au bénéfice de Mme [D] à la date du 1er janvier 2017, elle ne justifie pas que celle-ci bénéficiait toujours de cette même délégation à la date de la signature de la contrainte soit le 19 septembre 2017.

Réponse de la cour :

La nullité éventuelle de l’acte de signification de la contrainte n’a pas pour effet d’annuler cette dernière, mais seulement de ne pas faire courir les délais d’opposition. Le moyen de nullité soulevé tendant à l’identification du créancier ayant été écarté du fait que la mention conjointe de la caisse RSI, l’URSSAF ou de la CGSS était conforme aux dispositions de l’article L. 133-1-1 du code de la sécurité sociale, l’acte de signification de la contrainte ne saurait être annulé de ce chef. S’agissant d’une nullité formelle, il appartenait en outre à l’opposant de démontrer l’existence d’un grief, ce qu’il ne rapporte pas en l’espèce.

Ce moyen de nullité sera donc écarté.

sur les sommes dues :

Moyens des parties :

M. [F] [P] expose que le RSI ne pouvait ignorer pour l’année 2015 que la société [6] prenait en charge ses cotisations personnelles ; que le RSI ne réclamera pas le paiement de ces cotisations à la société ; qu’il omettra d’informer le cotisant qu’il restait devoir des cotisations pour l’année 2015 pour s’être contenté de réclamer des cotisations au titre des 3e et 4e trimestre 2016 ; que pour mémoire, et de l’aveu même de l’URSSAF, la démission comme la radiation sont intervenues le 17 mai 2016 de sorte qu’à cette date les cotisations pour l’année 2015 auraient dû être immédiatement exigibles ; qu’il a été supprimé du KBIS en tant que cogérant le 15 septembre 2016 ; que le 20 septembre 2016, la société a informé l’huissier poursuivant et le RSI qu’elle entendait régler les cotisations dues ; que faute d’avoir recouvrer les sommes auprès de la société comme l’y invitait cette société, le RSI devra supporter ses propres manquements ; que l’URSSAF doit d’autant plus supporter ses manquements que la société a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire qui rend impossible tout recours de sa part à son encontre ;

Qu’il ne peut pour l’année 2016 n’y avoir ni cotisations provisionnelles ni cotisations forfaitaires dans la mesure où il n’a perçu aucun revenu ni même n’a exercé aucune activité en 2016 dans la mesure où il a été mis dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions ; que, pour rappel, les associés de la société avaient été convoqués à l’AGE du 18 décembre 2015 en vue de voir prononcer sa révocation de sa fonction de cogérant ; que ce n’est qu’en raison de la contestation formée par lui que les associés décidaient de reporter cette question de révocation à une date ultérieure et de prononcer la suspension de sa rémunération ; que la suspension de sa rémunération emportait nécessairement suspension de son mandat de co-gérant et donc de son activité de co-gérant, nonobstant la circonstance qu’il restait inscrit en cette qualité sur le KBIS de la société ; qu’il était alors sans activité professionnelle ; qu’en application de l’article D. 633-9 du code de la sécurité sociale, il ne doit aucune cotisation provisionnelle, puisqu’il était dans l’impossibilité de poursuivre son activité pour des motifs indépendants de sa volonté.

L’URSSAF de l’Île-de-France réplique qu’aux termes de l’article L. 131-6, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, les cotisations sont établies sur une base annuelle et sont calculées à titre provisionnel, en pourcentage du revenu professionnel de l’avant-dernière année ou des revenus forfaitaires ; que les cotisations sont ensuite régularisées en N+l lors de la connaissance des revenus perçus au titre de l’année correspondante ; que, selon les articles R. 115-5 et R. 242-13-1 du code de la sécurité sociale, au premier mai de chaque année, la déclaration de revenu doit être retournée remplie et signée par l’assuré à l’organisme ; qu’en l’absence de revenus ou dans le cas de revenus déficitaires, les travailleurs indépendants restent tenus au paiement de cotisations minimales ; que l’affiliation n’est pas subordonnée à la perception de revenus ; que les cotisations des travailleurs indépendants sont personnelles, celles-ci ouvrant des droits personnels à l’assuré ; qu’aussi, tout accord intervenu entre un assuré et un tiers, quant à la prise en charge de ses cotisations, est inopposable au RSI ; que les cotisations définitives ont été calculées en fonction des revenus déclarés de l’intéressé.

Réponse de la cour :

Les cotisations d’un travailleur indépendant sont personnelles à ce dernier, de telle sorte que tout accord par lequel la société dont il est gérant déclare prendre en charge ces dernières n’est pas opposable à l’organisme chargé du recouvrement qui, en l’absence de tout paiement spontané, est libre de poursuivre le débiteur. Dès lors, M. [F] [P] ne saurait opposer l’accord de la société dont il était le gérant de prise en charge des cotisations pour solliciter le rejet des prétentions de l’URSSAF.

En matière d’opposition à contrainte, il incombe à l’opposant de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l’organisme social (Civ. 2e, 19 décembre 2013, n° 12-28.075). En l’absence de comparution de l’opposant devant la cour d’appel, cette juridiction doit examiner la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s’est déterminé pour juger son opposition recevable et bien fondée (2e Civ., 25 novembre 2021, pourvoi n° 20-13.780).

L’article D. 633-9 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n° 2006-1580 du 11 décembre 2006 énonce :

« Les assurés qui apportent la preuve qu’ils se sont trouvés dans l’impossibilité de poursuivre leur activité pour un motif indépendant de leur volonté et étranger à la nature même de la profession exercée, notamment pour raison de santé ou en cas d’appel ou de rappel sous les drapeaux ou de sinistre, sont dispensés du paiement d’un trimestre de la cotisation provisionnelle pour toute période de cessation d’exercice d’au moins quatre-vingt-dix jours consécutifs. »

Le fait que le cotisant ait été en litige avec ses associés et qu’en date du 18 décembre 2015, la société ait suspendu sa rémunération ne constitue pas un élément étranger à la nature même de la profession exercée, au sens de l’article précité. N’ayant pas été démis de ses fonctions de gérant, il n’était donc légalement pas dans l’impossibilité de poursuivre son activité.

Dès lors, les dispositions de cet article peuvent être utilement invoquées pour faire obstacle à l’application des dispositions de l’article L. 633-10 et de l’article D. 633-1, dans leurs versions applicables au litige qui prévoit que la cotisation ne prend fin qu’à la date à laquelle l’assujettissement cesse, à savoir la radiation du registre du commerce et des sociétés qui a été inscrite après l’assemblée générale et ayant révoqué le cotisant de ses fonctions au 17 mai 2016.

En application de l’article D. 633-4, l’assuré doit déclarer ses revenus et, faute de l’affaire, une cotisation provisionnelle peut être prélevée, majorée d’une pénalité.

Le cotisant ayant commencé son activité depuis sa nomination en qualité de cogérant le 19 juin 2015, la cotisation 2015 a été calculée par l’organisme sur un forfait, conformément à l’article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale. Il en est de même pour l’année 2016, conformément au même article.

L’URSSAF justifie des calculs opérés en fonction des cotisations provisionnelles minimales liées à l’assiette définie par l’article D. 131-2 créé par le décret n° 2013-433 du 3 avril 2012 pour les années 2015 et 2016 et a opéré les régularisations en fonction de l’assiette des revenus déclarés pour 2015 sur l’année 2016.

M. [F] [P] ne démontre pas en quoi les appels de cotisations sont erronés et les calculs établis par l’URSSAF ne correspondent pas à ce qu’il devait à la date d’émission des mises en demeure.

Dès lors, il y a lieu par voie de confirmation de valider la contrainte pour la somme totale de 14 260,59 euros au titre des cotisations et majorations de retard pour la période des troisième et quatrième trimestres 2016.

sur les majorations de retard et pénalités :

Moyens des parties :

M. [F] [P] expose que cette demande n’est pas nouvelle ; qu’il entre dans l’office du juge judiciaire de se prononcer sur le bien-fondé de la décision administrative d’un organisme de sécurité sociale déterminant l’étendue de la créance qu’il détient sur l’un de ses assurés ; qu’il est de bonne foi.

L’URSSAF de l’Île-de-France réplique qu’il s’agit d’une demande nouvelle ; que cette demande de remise n’a jamais été préalablement soumise à l’examen du directeur de l’URSSAF ou de la commission de recours amiable ; que dès lors, la cour ne pourra que déclarer irrecevable cette demande de remise des majorations de retard.

Réponse de la cour :

Conformément aux dispositions de l’article R. 243-20 du code de la sécurité sociale, la demande gracieuse de remise totale ou partielle des majorations et pénalités n’est recevable qu’après règlement de la totalité des cotisations et contributions ayant donné lieu à application des majorations ou lorsque le cotisant a souscrit un plan d’apurement l’organisme de recouvrement dont il relève. Le directeur de l’organisme est seul compétent pour statuer sur les demandes portant sur des montants inférieurs à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. La demande devant le juge n’est recevable que si elle a été portée préalablement devant le directeur de l’organisme.

Faute de démontrer avoir formé une telle demande devant le directeur et alors même que les cotisations sont encore dues, la demande de remise des majorations de retard est irrecevable.

Le jugement déféré sera donc confirmé et complété en ce qu’il sera mentionné le caractère irrecevable de la demande de remise des majorations de retard.

M. [F] [P], qui succombe, sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

LA COUR,

DÉCLARE recevable l’appel de M. [F] [P] ;

CONFIRME le jugement rendu le 22 février 2021 par le tribunal judiciaire de Meaux ;

Y AJOUTANT,

DÉCLARE irrecevable la demande de remise des majorations de retard ;

CONDAMNE M. [F] [P] à payer à l’URSSAF de l’Île-de-France la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [F] [P] aux dépens.

La greffière Le président


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