Validité matrimoniale et enjeux de bigamie dans le cadre des unions internationales

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Validité matrimoniale et enjeux de bigamie dans le cadre des unions internationales

L’Essentiel : Le mariage entre M. [E] et Mme [B], célébré le 2 juin 2014, a été annulé par le tribunal le 14 février 2023. Le procureur a ensuite assigné M. [E] pour bigamie, en raison d’un mariage antérieur non dissous en Arabie Saoudite. Malgré l’absence d’avocat, l’affaire a été mise en délibéré après les débats du 15 octobre 2024. Le 26 novembre 2024, le tribunal a confirmé l’annulation du mariage, ordonné la mention de cette décision sur les registres d’état civil et condamné les deux parties aux dépens.

Contexte du mariage

Le mariage entre M. [E], né le 1er février 1977 au Yémen, et Mme [B], née le 19 juin 1958 au Maroc, a été célébré le 2 juin 2014 à [Localité 8] par l’officier de l’état civil.

Procédure judiciaire

Le 21 et 26 juillet 2022, le procureur de la République a assigné M. [E] et Mme [B] en vue d’obtenir l’annulation de leur mariage. Le tribunal a rendu un jugement le 14 février 2023, déclarant le mariage nul et ordonnant la mention de cette décision sur les registres d’état civil.

Nouvelle assignation pour bigamie

Le 26 mars 2024, le procureur a réitéré l’assignation, cette fois pour cause de bigamie, en raison d’un mariage antérieur de M. [E] contracté le 1er août 2009 en Arabie Saoudite, qui n’avait pas été dissous.

Constitution des parties

M. [E] et Mme [B] n’ont pas constitué d’avocat malgré leur assignation régulière. L’affaire a été mise en délibéré après la clôture des débats le 15 octobre 2024.

Décision finale du tribunal

Le tribunal a déclaré le mariage nul et de nul effet, ordonné la mention de cette décision sur les actes de mariage et de naissance concernés, et condamné M. [E] et Mme [B] aux dépens. La décision a été rendue le 26 novembre 2024.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 147 du Code civil concernant la bigamie ?

L’article 147 du Code civil stipule que « Nul ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier ».

Cette disposition est fondamentale en matière de mariage, car elle interdit formellement la bigamie, c’est-à-dire le fait pour une personne d’être mariée à plusieurs personnes simultanément.

Dans le cas présent, M. [E] avait contracté un mariage antérieur le 1er août 2009, qui n’avait pas été dissous au moment de son union avec Mme [B] le 2 juin 2014.

Ainsi, le tribunal a déclaré le mariage nul et de nul effet en application de cet article, car il était établi que M. [E] était déjà engagé dans les liens du mariage lors de son union avec Mme [B].

Cette décision s’inscrit dans le cadre de la protection de l’institution du mariage et vise à garantir la monogamie, principe fondamental du droit français.

Quelles sont les conséquences de l’annulation d’un mariage en vertu de l’article 147 ?

L’annulation d’un mariage, comme le prévoit l’article 147 du Code civil, entraîne plusieurs conséquences juridiques.

Tout d’abord, le mariage est déclaré nul et de nul effet, ce qui signifie qu’il n’a jamais eu d’existence légale.

Cela implique que les droits et obligations qui en découlent, tels que les droits successoraux ou les obligations alimentaires, sont également annulés.

De plus, l’article 1318 du Code civil précise que « l’acte de mariage est un acte public ».

Ainsi, l’annulation doit être mentionnée en marge de l’acte de mariage et des actes d’état civil concernés, afin d’informer les tiers de la situation juridique des personnes concernées.

Dans ce cas, le tribunal a ordonné la mention de l’annulation en marge de l’acte de mariage et de l’acte de naissance de Mme [B], garantissant ainsi la transparence et la clarté des informations d’état civil.

Comment se déroule la procédure d’annulation d’un mariage selon le Code de procédure civile ?

La procédure d’annulation d’un mariage est régie par les articles du Code de procédure civile, notamment les articles 684 et suivants.

Ces articles prévoient que le procureur de la République peut agir en justice pour demander l’annulation d’un mariage, notamment en cas de bigamie.

L’assignation doit être faite selon les modalités prévues, et les parties doivent être régulièrement convoquées.

Dans le cas présent, M. [E] et Mme [B] ont été assignés conformément aux articles 684 et 659, ce qui a permis au tribunal de se prononcer sur la demande d’annulation.

L’article 688 précise également que l’affaire doit être mise en délibéré après les plaidoiries, garantissant ainsi le respect des droits de la défense et le bon déroulement de la procédure.

Cette rigueur procédurale est essentielle pour assurer la légitimité des décisions judiciaires en matière d’état civil.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

Pôle famille
Etat des personnes

N° RG 24/33560 –
N° Portalis 352J-W-B7I-C4LCI

SC

N° MINUTE :
[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 26 Novembre 2024
DEMANDERESSE

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE
Parquet 02 Etat des personnes
[Adresse 9]
[Localité 3]
en personne

DÉFENDEURS

Monsieur [M] [E]
[Adresse 2]
[Localité 4]
ESPAGNE
non représenté

Madame [Z] [B]
[Adresse 1]
[Localité 8]
non représentée

MINISTÈRE PUBLIC

Isabelle MULLER-HEYM

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Nastasia DRAGIC, Vice-Présidente
Sabine CARRE, Vice-Présidente
Anne FREREJOUAN DU SAINT, Juge

assistées de Founé GASSAMA, lors des débats et de Karen VIEILLARD, Greffière lors du prononcé.
Décision du 26 Novembre 2024
Pôle famille Etat des personnes
N° RG 24/33560 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4LCI

DÉBATS

A l’audience du 12 novembre 2024 tenue en chambre du conseil.
Avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2024.

JUGEMENT

Réputé contradictoire
en premier ressort
Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Nastasia DRAGIC, Présidente et par Karen VIEILLARD, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 2 juin 2014, le mariage de [M] [E], né le 1er février 1977 à [Localité 5] (Yémen), et de [Z] [B], née le 19 juin 1958 à [Localité 6] (Maroc), a été célébré par l’officier de l’état civil de la mairie de [Localité 8].

Par actes de commissaire de justice délivrés les 21 et 26 juillet 2022 le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris a fait assigner M. [E], de nationalité yéménite, et Mme [B], de nationalité française, aux fins d’annulation du mariage célébré entre eux à [Localité 8] le 2 juin 2014.

Par jugement réputé contradictoire en date du 14 février 2023, le tribunal a :
– déclaré nul et de nul effet le mariage célébré à [Localité 8] le 2 juin 2014 entre M. [E], né le 1er février 1977 à [Localité 5] (Yémen), et Mme [B], née le 19 juin 1958 à [Localité 6] (Maroc) ;
– ordonné la mention de cette décision en marge de l’acte de mariage n°313 dressé le 2 juin 2014 sur les registres de l’état civil de la mairie de [Localité 8] et de l’acte de naissance de Mme [B], née le 19 juin 1958 à [Localité 6] (Maroc), transcrit le 5 juillet 2007 sur le registre du service central de l’état civil de [Localité 7] sous le N° (ACQ) DX.2007.0001.21962. ;
– condamné M. [E] et Mme [B], in solidum, aux dépens.

Par actes de commissaire de justice délivrés en réitération de la citation primitive le 26 mars 2024, le procureur de la République a fait assigner devant le tribunal M. [E] et Mme [B] aux fins de voir :
– déclarer nul et de nul effet pour cause de bigamie le mariage célébré à [Localité 8] le 2 juin 2014 entre M. [E] et Mme [B] ;
– ordonner la mention de l’annulation en marge de l’acte de mariage dans les registres de l’état civil de la mairie de [Localité 8] ;
– ordonner la mention de l’annulation en marge de l’acte de naissance de Mme [B], née le 19 juin 1958 à [Localité 6] (Maroc) ;
– statuer ce que de droit sur les dépens.

A l’appui de sa demande, le procureur de la République fait valoir qu’il a été avisé le 18 août 2016 par la mairie de [Localité 8] de la situation de bigamie de M. [E] en raison du mariage qu’il avait contracté le 1er août 2009 à [Localité 10] (Arabie Saoudite) avec Mme [U] [S] [K] et qui n’avait pas été dissous ; que la lecture des actes produits a permis d’établir que le 2 juin 2014, M. [E] était bien engagé dans les liens du mariage lors de son union avec Mme [B] ; que le mariage contracté le 2 juin 2014 à la mairie de [Localité 8] doit donc être déclaré nul en application des dispositions de l’article 147 du code civil.

M. [E], assigné selon les modalités prévues par les articles 684 et suivants du code de procédure civile et par le règlement (CE) n°2020/1784 du Parlement européen et Conseil du 25 novembre 2020, et Mme [B], régulièrement assignée selon les modalités prévues à l’article 659 du code de procédure civile, n’ont pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 15 octobre 2024, et l’affaire a été fixée pour plaidoirie le 12 novembre 2024, puis mise en délibéré au 26 novembre 2024 par application des dispositions de l’article 688 du code de procédure civile.

[DÉBATS NON PUBLICS – Motivation de la décision occultée]
PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

DECLARE nul et de nul effet le mariage célébré à [Localité 8] le 2 juin 2014 entre [M] [E], né le 1er février 1977 à [Localité 5] (Yémen), et [Z] [B], née le 19 juin 1958 à [Localité 6] (Maroc) ;

ORDONNE la mention de cette décision en marge :
– de l’acte de mariage n°313 dressé le 2 juin 2014 sur les registres de l’état civil de la mairie de [Localité 8] ;
– de l’acte de naissance de Mme [Z] [B], née le 19 juin 1958 à [Localité 6] (Maroc), transcrit le 5 juillet 2007 sur le registre du service central de l’état civil de [Localité 7] sous le n° (ACQ) DX.2007.0001.21962. ;

CONDAMNE M. [M] [E] et Mme [Z] [B], in solidum, aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 26 novembre 2024.

La Greffière La Présidente

Karen VIEILLARD Nastasia DRAGIC


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