Validité des mandats de gestion et fondement juridique des décisions en matière de contrôle de facturation.

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Validité des mandats de gestion et fondement juridique des décisions en matière de contrôle de facturation.

L’Essentiel : La caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois a notifié à M. [Y], infirmier libéral, un indu de 4 624,45 euros suite à un contrôle de facturation. En réponse, M. [Y] a contesté cette décision devant une juridiction compétente. La Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines a ensuite contesté le jugement annulant la procédure de contrôle, arguant que le juge n’avait pas précisé le fondement juridique de sa décision. M. [Y] a soutenu que ce moyen était nouveau, mais la Cour a établi qu’il était recevable, soulignant l’importance de la précision juridique dans les décisions judiciaires.

Contexte de l’affaire

La caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois, agissant pour le compte de la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, a notifié à M. [Y], un infirmier libéral, un indu d’un montant de 4 624,45 euros suite à un contrôle de facturation effectué entre le 1er janvier 2017 et le 7 novembre 2018. Ce montant correspondait aux anomalies constatées durant cette période.

Recours du professionnel de santé

En réponse à cette notification, M. [Y] a saisi une juridiction compétente pour contester la décision de la caisse primaire. Il a ainsi engagé un recours dans le cadre du contentieux de la sécurité sociale.

Arguments de la CANSSM

La Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines a contesté le jugement qui annulait la procédure de contrôle et l’indu. Elle a fait valoir que le juge devait préciser le fondement juridique de sa décision, en soulignant que l’annulation était fondée sur l’absence de délibérations habilitant les directeurs généraux à signer le mandat de gestion, ce qui, selon elle, constituait une violation de l’article 12 du code de procédure civile.

Réponse du professionnel de santé

M. [Y] a contesté la recevabilité du moyen soulevé par la CANSSM, arguant qu’il était nouveau. Toutefois, il a été établi que ce moyen était né de la décision attaquée, ce qui a conduit à sa recevabilité.

Analyse de la Cour

La Cour a rappelé que le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit applicables et doit préciser le fondement juridique de sa décision. Dans ce cas, le jugement a annulé la procédure de contrôle en se basant sur l’absence de délibérations nécessaires pour établir la validité du mandat de gestion. Cependant, le tribunal n’a pas précisé le fondement juridique de sa décision, ce qui a conduit à une violation de l’article 12 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 12 du code de procédure civile dans le cadre de la décision du tribunal judiciaire d’Arras ?

L’article 12 du code de procédure civile stipule que :

« Le juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, doit préciser le fondement juridique de sa décision. »

Cet article impose au juge une obligation de motivation de ses décisions, ce qui signifie qu’il doit expliciter les bases juridiques sur lesquelles il fonde son jugement.

Dans le cas présent, le tribunal judiciaire d’Arras a annulé la procédure de contrôle et l’indu subséquent en se basant sur l’absence de délibérations habilitant les directeurs de la CNAM et de la CANSSM à signer le mandat de gestion.

Cependant, il n’a pas précisé le fondement juridique de cette décision, ce qui constitue une violation de l’article 12.

Cette absence de motivation peut entraîner une insécurité juridique, car les parties ne peuvent pas comprendre les raisons précises qui ont conduit à la décision du tribunal.

Ainsi, le non-respect de cette obligation de motivation peut être un motif d’annulation de la décision rendue.

Quelles sont les conséquences de l’absence de délibérations habilitant les directeurs à signer le mandat de gestion ?

L’absence de délibérations habilitant les directeurs de la CNAM et de la CANSSM à signer le mandat de gestion a des conséquences directes sur la validité de ce mandat.

En effet, pour qu’un mandat de gestion soit valide, il doit être signé par des personnes dûment habilitées à cet effet.

Cela est généralement encadré par des dispositions internes aux caisses, qui précisent les modalités de délégation de pouvoir.

Dans le cas présent, le tribunal a constaté que ces délibérations n’étaient pas produites, ce qui l’a conduit à douter de la validité du mandat de gestion.

Cette situation soulève des questions sur la légitimité des actes effectués par la caisse primaire au nom de la CANSSM.

Si le mandat est jugé invalide, cela pourrait entraîner la nullité des actes réalisés dans le cadre de ce mandat, y compris la notification de l’indu à M. [Y].

Ainsi, l’absence de délibérations peut avoir des répercussions significatives sur les droits et obligations des parties impliquées dans le litige.

Comment le juge doit-il procéder en cas de contestation de la recevabilité d’un moyen ?

Lorsqu’un moyen est contesté pour sa recevabilité, le juge doit examiner si ce moyen est nouveau ou s’il est né de la décision attaquée.

Dans le cas présent, le professionnel de santé a soutenu que le moyen soulevé par la CANSSM était nouveau.

Cependant, le juge a considéré que le moyen était recevable, car il était directement lié à la décision attaquée.

Cette analyse est conforme aux principes de la procédure civile, qui permettent aux parties de soulever des moyens en réponse à des arguments présentés par l’autre partie.

Il est essentiel que le juge vérifie la nature du moyen et son lien avec la décision contestée pour garantir un procès équitable.

Ainsi, la recevabilité d’un moyen dépend de sa pertinence par rapport aux éléments de la décision en cause, et le juge doit s’assurer que les droits de chaque partie sont respectés dans le cadre de cette analyse.

CIV. 2

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 janvier 2025

Cassation

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 14 F-D

Pourvoi n° S 22-22.712

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JANVIER 2025

La caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les Mines, dont le siège est [Adresse 3], représentée par la caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 22-22.712 contre le jugement rendu le 5 septembre 2022 par le tribunal judiciaire d’Arras (pôle social, contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale), dans le litige l’opposant à M. [F] [Y], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les Mines, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [Y], et l’avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l’audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire d’Arras, 5 septembre 2022), rendu en dernier ressort, à la suite d’un contrôle de facturation portant sur la période du 1er janvier 2017 au 7 novembre 2018, la caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois (la caisse primaire), agissant pour le compte de la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines (la CANSSM), a notifié à M. [Y] (le professionnel de santé), exerçant la profession d’infirmier à titre libéral, un indu d’un montant de 4 624,45 euros, correspondant aux anomalies constatées.

2. Le professionnel de santé a saisi d’un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La CANSSM fait grief au jugement d’annuler la procédure de contrôle et l’indu subséquent, alors « que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu’à ce titre, il appartient au juge de préciser le fondement juridique de sa décision ; qu’en annulant l’indu, motif pris de ce que la validité du mandat de gestion du 13 mai 2015 ne pourrait être établie, en l’absence des délibérations habilitant les directeurs généraux des Caisses nationales à le signer, sans préciser le fondement juridique de sa solution, les juges du fond ont violé l’article 12 du code de procédure civile ».

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

4. Le professionnel de santé conteste la recevabilité du moyen, en soutenant qu’il est nouveau.

5. Cependant, le moyen est né de la décision attaquée.

6. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l’article 12 du code de procédure civile :

7. Le juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, doit préciser le fondement juridique de sa décision.

8. Pour annuler la procédure de contrôle et l’indu subséquent, le jugement retient que les délibérations habilitant les directeurs de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) et de la CANSSM à signer le mandat de gestion du 13 mai 2015 relatif à la délégation des activités au titre de l’assurance maladie, accident du travail et maladie professionnelle de la CANSSM à la CNAM ne sont pas produites. Il en déduit ne pas pouvoir se prononcer sur la validité du mandat de gestion dont bénéficiait la caisse primaire au nom et pour le compte de la CANSSM.

9. En statuant ainsi, sans préciser le fondement juridique de sa décision, le tribunal a violé le texte susvisé.


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