Tribunal judiciaire d’Évreux, 8 janvier 2025, RG n° 24/00463
Tribunal judiciaire d’Évreux, 8 janvier 2025, RG n° 24/00463

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire d’Évreux

Thématique : Responsabilité et indemnisation : enjeux de la preuve et des provisions dans un contexte d’accident de la circulation

Résumé

Accident de la circulation

Le 17 septembre 2023, [W] [S] épouse [L], circulant en vélo électrique, a été impliquée dans un accident de la circulation à [Localité 16]. Cet accident a concerné un véhicule de marque Mercedes, conduit par [V] [Z], qui est décédé le [Date décès 7] 2023. Le véhicule était assuré par la SA MMA IARD.

Assignation en référé

Le 31 octobre 2024, [W] [S] épouse [L] a assigné la SA MMA IARD devant le tribunal, demandant plusieurs mesures, dont une expertise médicale, la fixation d’une consignation pour les honoraires de l’expert, et des provisions pour son préjudice et le remboursement de son vélo électrique. Lors de l’audience du 27 novembre 2024, la SA MMA IARD n’a pas comparu.

Demande d’expertise

La demande d’expertise a été jugée légitime selon l’article 145 du code de procédure civile, permettant à [W] [S] épouse [L] de faire constater et évaluer son préjudice. L’expertise a pour but de préserver les droits des parties et a été ordonnée par le tribunal.

Demande de provision

Concernant la demande de provision, le tribunal a noté que le montant de 10 000 euros demandé par [W] [S] épouse [L] était sérieusement contestable, le réduisant à 3 000 euros. Pour le remboursement du vélo électrique, le tribunal a accepté la demande, confirmant qu’il avait été endommagé lors de l’accident.

Frais de procès

La SA MMA IARD, ayant perdu le procès, a été condamnée à payer les dépens, ainsi qu’une somme de 1 200 euros à [W] [S] épouse [L] en vertu de l’article 700 du code de procédure civile.

Mission d’expertise

Le tribunal a ordonné une mission d’expertise confiée au Docteur [J] [N], avec des instructions détaillées sur les éléments à examiner, y compris le dossier médical de la victime et les circonstances de l’accident. L’expert devra évaluer les déficits fonctionnels et les impacts sur la vie quotidienne de [W] [S] épouse [L].

Conditions de l’expertise

L’expert doit recueillir des informations précises sur l’état antérieur de la victime, les circonstances de l’accident, et les conséquences sur sa vie quotidienne. Il devra également évaluer les besoins futurs en matière de soins et d’assistance, ainsi que les impacts sur la scolarité et l’insertion sociale si la victime est un enfant ou un adolescent.

Récapitulatif et suivi

Le tribunal a établi un calendrier pour le déroulement de l’expertise, stipulant que l’expert doit remettre son rapport dans un délai de six mois. Les parties doivent également fournir les documents nécessaires à l’expert pour mener à bien sa mission. La SA MMA IARD a été condamnée à verser des provisions à [W] [S] épouse [L] pour couvrir son préjudice.

N° RG 24/00463 – N° Portalis DBXU-W-B7I-H4NR

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ EVREUX

JURIDICTION DES RÉFÉRÉS

ORDONNANCE DU 08 JANVIER 2025

DEMANDEUR

Madame [W] [S] épouse [L]
née le [Date naissance 5] 1950 à [Localité 15] (99),
demeurant [Adresse 8]
[Adresse 1]

Représentée par Me Karine ALEXANDRE, avocat au barreau de l’EURE

DÉFENDEUR

Compagnie d’assurance MUTUELLES DU MANS ASSURANCE -MMA IARD
Immatriculée au RCS de le mans sous le numéro 440 048 882
dont le siège social est sis :
[Adresse 6]
– [Localité 9]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N’ayant pas constitué avocat

PRÉSIDENT : Sabine ORSEL

GREFFIER: Christelle HENRY

DÉBATS : en audience publique du 27 novembre 2024

ORDONNANCE :

– réputée contradictoire, rendue publiquement et en premier ressort,
– mise à disposition au greffe le 08 janvier 2025,
– signée par Sabine ORSEL, présidente et par Aurélie HUGONNIER, greffier lors de la mise à disposition de la décision au greffe.

Copie exécutoire délivrée le :

Copie délivrée le :

Service expertise le :

**************

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 17 septembre 2023, [W] [S] épouse [L], circulant en vélo-électrique, a été victime d’un accident de la circulation survenu à [Localité 16], impliquant un véhicule de la marque Mercedes, immatriculé [Immatriculation 12], conduit par [V] [Z] et assuré par la SA MMA IARD.

[V] [Z] est décédé le [Date décès 7] 2023.

Par acte du 31 octobre 2024, [W] [S] épouse [L] a fait assigner la SA MMA IARD devant le président de ce tribunal, statuant en référé, aux fins de voir :
-ordonner une expertise médicale au visa de l’article 145 du code de procédure civile ;
-fixer le montant de la consignation à valoir sur les honoraires de ce médecin expert et de son sapiteur ;
-condamner la SA MMA IARD à lui payer la somme de 10 000 euros de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice et la somme de 3 800 euros de provision à valoir sur le remboursement de son vélo électrique ;
-condamner la SA MMA IARD à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-condamner la SA MMA IARD aux dépens, y compris les frais d’expertise.

A l’audience du 27 novembre 2024, la SA MMA IARD n’a pas comparu.

PAR CES MOTIFS

La présidente du tribunal judiciaire,

ORDONNE une mission d’expertise confiée à :
Docteur [J] [N]
Clinique [13] service des urgences [Adresse 10]
Tél : [XXXXXXXX02] Port. : [XXXXXXXX04] Fax : [XXXXXXXX03] Mèl : [Courriel 11]
expert inscrit sur la liste de la cour d’appel ;

DIT que l’expert aura pour mission, en se faisant assister le cas échéant d’un sapiteur spécialisé pour établir un bilan neuropsychologique, après s’être fait communiquer, par la demanderesse ou par tout tiers détenteur, le dossier médical complet de [W] [S] épouse [L], avec son accord ou celui de ses représentants légaux ou de ses ayants-droit, et notamment le dossier défini par l’article R. 1112-2 du code de la santé publique, et les pièces médicales nécessaires à l’expertise, de 

1° ) Prendre connaissance des commentaires annexés à la présente mission ;

2° ) Se faire communiquer par les parties ou leurs conseils :
– les renseignements d’identité de la victime,
– tous les éléments relatifs aux circonstances tant factuelles que psychologiques et affectives de l’accident,
– tous les documents médicaux relatifs à l’accident, depuis les constatations des secours d’urgence jusqu’aux derniers bilans pratiqués (y compris bilans neuro-psychologiques), et notamment le dossier médical tel que défini par l’article R. 1112-2 du code de la santé publique,
– tous les éléments relatifs au mode de vie du blessé, antérieur à l’accident :
* degré d’autonomie fonctionnelle et intellectuelle par rapports aux actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne,
* conditions d’exercice des activités professionnelles,
* niveau d’études pour un étudiant,
* statut exact et / ou formation s’il s’agit d’un demandeur d’emploi et carrière professionnelle antérieure à l’acquisition de ce statut,
* activités familiales et sociales s’il s’agit d’une personne restant au foyer sans activité professionnelle rémunérée,
– tous les éléments relatifs au mode de vie du blessé contemporain de l’expertise (degré d’autonomie, statut professionnel…, lieu habituel de vie…),
– tous les éléments relatifs au degré de développement de l’enfant ou de l’adolescent, antérieur à l’accident :
* degré d’autonomie fonctionnelle et intellectuelle par rapports aux actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne, en rapport avec l’âge,
* systématiquement les bulletins scolaires pré-traumatiques et toutes précisions sur les activités extra scolaires.
– ces mêmes éléments contemporains de l’expertise : dans l’aide au patient bien spécifier le soutien scolaire mis en place (soutien individualisé en dehors et à l’école, soutien en groupe) et le comportement face au travail scolaire. Bien préciser le cursus (classes redoublées, type de classe, type d’établissement),
– toutes précisions sur l’activité professionnelle et sociale des parents et de la fratrie (niveau de formation par exemple) ;

Commentaire du point n° 2. L’expertise doit se réaliser avec le dossier médical, dossier déjà constitué en grande partie par les examens pratiqués avant consolidation. Si l’expert n’a pas procédé lui-même à ces examens, il doit reconstituer toute l’histoire clinique depuis l’arrivée des secours d’urgence jusqu’à la consolidation. Elle doit aussi se réaliser avec le maximum d’éléments permettant à l’expert de discuter contradictoirement puis d’indiquer quel était l’état du blessé, antérieur à l’accident. Les actes élémentaires correspondent aux activités essentielles de la vie quotidienne (se lever, s’habiller, se laver, aller aux toilettes, manger). Les actes élaborés correspondent notamment à la faculté qu’a la victime de gérer son budget, faire ses courses, se déplacer seul à l’extérieur… Cette distinction est d’autant plus importante que le traumatisme crânio-encéphalique obère beaucoup plus souvent les actes élaborés que les actes élémentaires. L’analyse du handicap comporte aussi d’autres dimensions, notamment l’examen du maintien ou de la perte du rôle familial du blessé, de ses capacités d’intégration sociale et d’insertion professionnelle.

3°) Après recueil de l’avis des parties, déduire de ces éléments d’information, le lieu ou les lieux, de l’expertise et prendre toutes les dispositions pour sa réalisation en présence d’un membre de l’entourage ou à défaut du représentant légal ;

Commentaire du point n° 3. Où doit avoir lieu l’expertise ?
Il est habituel que l’expertise se pratique au cabinet de l’expert lorsque les séquelles sont surtout d’ordre neuro-psychologique ; cependant il est recommandé que celle-ci se pratique sur le lieu de vie pour tous les cérébro-lésés présentant des handicaps les rendant dépendants pour des raisons physiques, intellectuelles ou comportementales. Lorsque le patient séjourne dans un centre d’accueil, il peut être intéressant qu’elle se fasse dans ce centre, afin de recueillir l’avis de l’équipe soignante.
En présence de qui ? Même si le patient est majeur, il est éminemment souhaitable qu’il soit accompagné par, au moins, un membre de la famille ou de l’entourage, ceux-ci étant en effet à même de relater les troubles intellectuels et du comportement dont le traumatisé crânien n’a pas toujours une juste appréciation. Tout particulièrement dans ce type de dossier, il n’y a que des avantages à ce que le patient soit assisté par un médecin de son choix.

4° ) Recueillir de façon précise, au besoin séparément, les déclarations de la victime et du membre de son entourage :
– sur le mode de vie antérieur à l’accident,
– sur la description des circonstances de l’accident,
– sur les doléances actuelles en interrogeant sur les conditions d’apparition des douleurs et de la gêne fonctionnelle, sur leur importance et sur leurs conséquences sur les actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne ;

5° ) Après discussion contradictoire en cas de divergence entre les déclarations ainsi recueillies et les documents produits :
– indiquer précisément le mode de vie du blessé antérieur à l’accident retenu pour déterminer l’incidence séquellaire :
* degré d’autonomie, d’insertion sociale et / ou professionnelle pour un adulte,
* degré d’autonomie en rapport avec l’âge, niveau d’apprentissage scolaire, soutien pédagogique…

pour un enfant ou un adolescent
– restituer le cas échéant, l’accident dans son contexte psycho-affectif, puis,
– avec retranscription intégrale du certificat médical initial, et totale ou partielle du ou des autres éléments médicaux permettant de connaître les principales étapes de l’évolution, décrire de façon la plus précise que possible les lésions initiales, les modalités du ou des traitements, les durées d’hospitalisation (périodes, nature, nom de l’établissement, service concerné), les divers retours à domicile (dates et modalités), la nature et la durée des autres soins et traitements prescrits imputables à l’accident,
– décrire précisément le déroulement et les modalités des 24 heures quotidiennes de la vie de la victime, au moment de l’expertise, et ce, sur une semaine, en cas d’alternance de vie entre structure spécialisée et domicile, en précisant, lorsqu’il s’agit d’un enfant ou d’un adolescent, la répercussion sur la vie des parents et des frères et sœurs, voir l’aide et la surveillance que doit apporter la famille et qu’elle ne devrait pas normalement apporter compte tenu de l’âge de l’enfant.

Commentaire du point numéro 5. La détermination de l’état du blessé antérieur à l’accident revêt une grande importance, celle-ci doit donc être faite après discussion contradictoire des preuves de cet état, lorsqu’il y a divergence d’appréciations. Pour la description de la vie quotidienne ou hebdomadaire du blessé, l’expert peut, si besoin est, recueillir tous avis techniques nécessaires, notamment celui d’un ergothérapeute.

6° ) Procéder à un examen clinique détaillé permettant :
– de décrire les déficits neuro-moteurs, sensoriels, orthopédiques et leur répercussion sur les actes et gestes de la vie quotidienne,
– d’analyser en détail les troubles des fonctions intellectuelles, affectives et du comportement, et leur incidence :
* sur les facultés de gestion de la vie et d’insertion ou de réinsertion socio-économique s’agissant d’un adulte,
* sur les facultés d’insertion sociale et d’apprentissages scolaires s’agissant d’un enfant ou d’un adolescent,
L’évaluation neuro-psychologique est indispensable :
* Un examen neuro-psychologique récent appréciant les fonctions intellectuelles et du
comportement doit être réalisé.
* Pour un enfant ou un adolescent, cette évaluation doit comporter plusieurs bilans (appréciation du retentissement immédiat et du retentissement sur la dynamique d’apprentissage).

Il convient de :
– Compléter ces évaluations par les données des bulletins scolaires actuels.
Dans l’appréciation des bulletins, différencier ce qui revient au comportement, des performances scolaires proprement dites ; ne pas se contenter du niveau de classe qui n’a parfois aucune valeur.,
– Rapporter le niveau de l’enfant à celui de sa classe, et le niveau de sa classe aux normes,
– Compléter si possible par un bilan éducatif ;

Commentaire du point 6. Il convient de ne jamais perdre de vue que les traumatisés crâniens graves présentent des séquelles portant essentiellement sur les fonctions supérieures. Le médecin expert devra donc en faire l’étude complète et précise, sans oublier de réaliser un bilan moteur par un examen neurologique somatique. Il appartient à l’expert de procéder à la synthèse de tous les éléments recueillis (en particulier : entourage, examens complémentaires, avis spécialisés).

7) Après avoir décrit un éventuel état antérieur physique ou psychique, pouvant avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles, rechercher si cet état antérieur était révélé et traité avant l’accident (préciser les périodes, la nature et l’importance des déficits et des traitements antérieurs) :

Pour déterminer cet état antérieur chez l’enfant, il convient de :
* différencier les difficultés d’apprentissage et de comportement ;
* décrire comment ces troubles antérieurs ont été pris en charge : type de rééducation, type de soutien scolaire, autre type de soutien, type de scolarité, en précisant bien la chronologie ;
Analyser, dans une discussion précise et synthétique, l’imputabilité aux lésions consécutives à l’accident des séquelles invoquées en se prononçant sur les lésions initiales, leur évolution, l’état séquellaire et la relation directe et certaine de ces séquelles aux lésions causées par l’accident en précisant :
– si l’éventuel état antérieur ci-dessus défini aurait évolué de façon identique en l’absence d’accident ;
– si l’accident a eu un effet déclenchant d’une décompensation ;
– ou s’il a entraîné une aggravation de l’évolution normalement prévisible en l’absence de ce traumatisme. Dans ce cas, donner tous éléments permettant de dégager une proportion d’aggravation et préciser si l’évaluation médico-légale des séquelles est faite avant ou après application de cette proportion ;

Commentaire du point numéro 7. S’agissant d’un enfant ou d’un adolescent, si l’existence d’un état antérieur est alléguée, l’imputabilité ne pourra être déterminée qu’à partir d’une description la plus précise possible de l’état antérieur, du type de troubles constatés, de la dynamique de l’évolution. Ceci rend absolument indispensable la répétition des évaluations neuro-psychologiques et si possible éducatives, ainsi qu’un recul suffisant avant la consolidation.

8°) Il est nécessaire de connaître, avant de consolider un enfant ou un adolescent, la dynamique des apprentissages scolaires ainsi que la qualité d’insertion sociale de l’enfant puis de l’adolescent.
Dans le cas où la consolidation ne serait pas acquise, indiquer :
– pour un adulte, quels sont les projets thérapeutiques et de vie envisagés ou mis en place et donner toutes indications de nature à déterminer les besoins nécessaires à la réalisation de ceux-ci (aménagement de matériels, aides humaines et / ou matérielle …) ;
– pour une enfant ou un adolescent, quels sont les projets thérapeutiques, de scolarité et de vie envisagés ou mis en place et donner toutes indications de nature à déterminer les besoins nécessaires à la réalisation de ceux-ci (aménagement de matériels, aides humaines et / ou matérielle, soutiens scolaires, rééducations telles que ergothérapie et psychomotricité…)
– et en tout état de cause, indiquer les fourchettes d’évaluation prévisible des différents postes de préjudice cités au paragraphe suivant ;

9°) Pour un enfant ou un adolescent, lorsque la consolidation semble acquise, l’évaluation des séquelles doit préalablement tenir compte des données suivantes :
La description des déficiences et du handicap doit être rapportée à ce qui est attendu pour l’âge.
Bien préciser l’incidence sur la vie familiale, sur la scolarité (type de scolarité, type d’aide nécessaire), décrire les activités extra scolaires et l’insertion sociale de l’enfant. La scolarité et les activités extra scolaires sont à comparer avec celles des frères et sœurs et éventuellement avec celles pré-traumatiques. Indiquer les conséquences financières pour les parents (soutien scolaire, école privée, transport scolaire, tierce personne, psychothérapie, ergothérapie, psychomotricité, activités de loisir, vacances).
Analyser les besoins exprimés par la famille compte tenu du défaut d’autonomie pour l’âge.
Analyser la qualité de vie du blessé et de sa famille (parents, frères et sœurs).
Donner une idée du retentissement ultérieur sur la vie professionnelle et sur les possibilités d’autonomie sociale sur les possibilités de fonder une famille.
Ces données doivent être intégrées et discutées lors de l’évaluation ci-dessous prévue au paragraphe suivant.

Commentaire des points numéro 8 et 9. Quand consolider un adulte ?
Fixer une date de consolidation est indispensable, mais n’est pas aisé ; en effet :
– les déficits neurologiques sont généralement fixés au cours de la deuxième année,
– les déficits neuro-psychologiques ne sont généralement pas fixés avant la troisième année,
– il est plus difficile de fixer un terme aux modifications du comportement ce qui ne doit pas empêcher l’expert de déterminer une date de consolidation.
En règle générale, elle n’interviendra pas avant la troisième année après l’accident, à l’exception des états végétatifs persistants et des états pauci-relationnels. Lorsque les séquelles sont d’ordre essentiellement neuro-psychologique, une consolidation trop précoce peut entraver différents projets thérapeutiques et même ruiner l’espoir de certaines familles en la poursuite d’une amélioration.

Quand consolider un enfant ou un adolescent ?
L’enfant à un moment donné, possède des acquis et un potentiel. C’est un être en devenir.
Longtemps il a été dit que le pronostic après atteinte cérébrale acquise était bon du fait de la plasticité neuronale. (“principe de Kennard” : plus on est jeune au moment de l’atteinte, moins c’est grave). En fait (données cliniques et expérimentales) plus l’enfant est jeune au moment de l’atteinte, moins bon est le pronostic d’autant plus que l’atteinte initiale est diffuse et importante. Car les acquis au moment de l’accident sont minimes et le traumatisme va altérer les capacités d’apprentissage. L’enfant ne sera pas celui qu’il aurait dû devenir (effet à retardement). Il ne s’agit pas d’un retard mais d’un décalage qui peut aller en s’accentuant au cours du temps.
Apprécier l’incidence du traumatisme sur le développement de l’enfant implique donc que la consolidation soit la plus tardive possible. Ne jamais consolider précocement lorsqu’il s’agit d’un traumatisme crânien grave, a fortiori quand l’enfant était jeune au moment de l’atteinte (ou alors très précocement lorsqu’il s’agit d’un traumatisme extrêmement sévère) ou lorsque existe une localisation frontale. On ne peut comme pour l’adulte, dans le but d’apprécier les conséquences du traumatisme crânien, comparer l’enfant à ce qu’il était. Il doit être comparé à ce qu’il aurait dû devenir (capacités antérieures, fratrie). La récupération motrice est souvent rapide et complète, les séquelles sont avant tout cognitives et comportementales (handicap invisible comme chez l’adulte).
Ces séquelles :
– peuvent être sous estimées ;
– sont les éléments pronostiques majeurs à considérer dans l’appréciation des possibilités d’apprentissage, d’insertion et de réinsertion. La motivation, les capacités d’attention, de compréhension, de jugement, de mémoire, les capacités de synthèse, de flexibilité mentale, de contrôle de soi sont autant d’outils nécessaires à un développement harmonieux de tout enfant.

10°) Évaluer les séquelles aux fins de :
–  fixer la durée de l’incapacité totale de travail et de l’incapacité de travail partielle, périodes pendant lesquelles pour des raisons médicales en relation directe, certaine et exclusive avec l’accident, la victime a dû interrompre totalement ou partiellement ses activités habituelles ;
– fixer la date de consolidation en établissant que les différents bilans et examens pratiqués prouvent la stagnation de la récupération des séquelles neurologiques et neuro-psychologiques ;
– fixer le taux du déficit fonctionnel imputable à l’accident résultant de l’atteinte permanente d’une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation ;
– préciser, en outre le taux de déficit fonctionnel actuel résultant à la fois de l’accident et d’un éventuel état antérieur ;
– en cas de vie à domicile, se prononcer sur la nécessité pour le blessé d’être assisté par une tierce personne (cette évaluation ne devant pas être réduite en cas d’assistance familiale), nécessaire pour pallier l’impossibilité ou la difficulté d’effectuer les actes élémentaires mais aussi les actes élaborés de la vie quotidienne, et les conséquences des séquelles neuro-psychologiques quand elles sont à l’origine d’un déficit majeur d’initiative et / ou de troubles du comportement. Dans l’affirmative, préciser si cette tierce personne doit, ou non, être spécialisée, ses attributions exactes ainsi que les durées respectives d’intervention de l’assistant spécialisé et de l’assistant non spécialisé. Donner à cet égard toutes précisions utiles. Se prononcer, le cas échéant, sur les modalités des aides techniques.
– se prononcer sur l’aménagement éventuel du logement ;
– après s’être entouré, au besoin, d’avis spécialisés, dire :
* si la victime est ou sera capable de poursuivre, dans les mêmes conditions, son activité professionnelle antérieure à l’accident ;
* dans la négative, ou à défaut d’activité professionnelle antérieure à l’accident, si elle est ou sera capable d’exercer une activité professionnelle. Dans ce cas, en préciser les conditions d’exercice et les éventuelles restrictions ou contre-indications ;
– dire si les frais médicaux, pharmaceutiques, para-médicaux, d’hospitalisation, d’appareillage et de transports postérieurs à la consolidation directement imputables à l’accident sont actuellement prévisibles et certains. Dans l’affirmative préciser lesquels et pour l’appareillage, le véhicule automobile et son aménagement, préciser la fréquence de leur renouvellement et leur surcoût ;
– décrire les souffrances physiques et psychiques endurées du fait des blessures subies et les évaluer sur l’échelle habituelle de 7 degrés ;
–  décrire la nature et l’importance du dommage esthétique et l’évaluer sur l’échelle habituelle de 7 degrés ;
– indiquer s’il existe ou existera un préjudice sexuel, de procréation, d’établissement ;
– décrire le préjudice d’agrément, défini comme la perte de la qualité de vie de la victime ;

Commentaire du point 10. S’agissant d’un enfant ou d’un adolescent, il convient d’apporter les précisions suivantes :
Tierce personne : il est nécessaire d’apprécier la tierce personne avant même la consolidation en fonction de l’autonomie que l’enfant n’a pas, compte tenu de son âge. Il est nécessaire de distinguer le rôle qu’auraient eu les parents sans l’accident, en fonction de l’âge de l’enfant, de celui qui relève de la tierce personne. L’enfant a, en dehors du cas d’un état végétatif ou d’un état pauci-relationnel, une espérance de vie normale ; il y a donc nécessité d’anticiper sur les besoins futurs en tierce personne.
Considérer la scolarité comme faisant partie de la prise en charge thérapeutique. Faciliter le soutien scolaire, la scolarité à petit effectif dans le but de favoriser l’insertion/réinsertion de l’enfant.
Considérer les prises en charge autres non prises en charge par la sécurité sociale : rééducation par ergothérapie, psychomotricité, psychothérapie, ordinateur portable, poussette adaptée, siège-auto … Il y a lieu d’évaluer l’ensemble des besoins objectifs en aide humaine, même si elle est assurée par les proches.
Pour l’analyse des capacités professionnelles, une évaluation dans une structure spécialisée peut être nécessaire telle qu’une unité d’évaluation de réentrainement et d’orientation sociale et professionnelle pour cérébro-lésés (UEROS), une association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) un centre de préorientation … L’analyse des besoins en matériels divers, de leur renouvellement et de leur surcoût, peut relever de l’avis d’un ergothérapeute. Il est rappelé que les souffrances endurées sont celles subies jusqu’à la consolidation.
Pour le préjudice d’agrément, perte de qualité de vie, il s’agit d’apprécier tant les impossibilités, les limitations que les perturbations. Le préjudice d’établissement s’entend de la difficulté ou de l’impossibilité de former un couple, de fonder une famille et/ou de les assumer.

11) Indiquer si l’état de la victime nécessite une mesure de protection judiciaire et notamment si elle est apte à gérer seule les fonds provenant de l’indemnisation ;

12) Établir un récapitulatif de l’évaluation de l’ensemble des postes énumérés dans la mission ;

ENJOINT aux parties de remettre à l’expert :
– le demandeur, immédiatement toutes pièces médicales ou para-médicales utiles l’accomplissement de la mission, en particulier les certificats médicaux, certificats de consolidation, documents d’imagerie médicale, compte-rendus opératoires et d’examen, expertises et le complet dossier médical prévu à l’article R. 1112-2 du code de la santé publique,
– les défendeurs aussitôt que possible et au plus tard 8 jours avant la première réunion, les documents, renseignements, réclamations indispensables au bon déroulement des opérations, l’exclusion de documents médicaux protégés par le secret professionnel et relatifs à [W] [S] épouse [L] sauf établir leur origine et l’accord du demandeur sur leur divulgation ;

DIT que l’expert ne communiquera directement aux parties les documents médicaux ainsi obtenus directement de tiers concernant [W] [S] épouse [L] qu’avec son accord ; qu’à défaut d’accord, ces éléments seront portés à la connaissance des parties par l’intermédiaire du médecin qu’elles auront désigné à cet effet ;

DIT qu’à défaut d’obtenir la remise des pièces qui lui sont nécessaires l’expert pourra être autorisé par le juge chargé du contrôle des expertises à déposer son rapport en l’état ; Que toutefois il pourra se faire communiquer directement, avec l’accord de [W] [S] épouse [L] ou de ses ayants-droit par tous tiers : médecins, personnels para-médicaux, établissements hospitaliers et de soins, caisses de sécurité sociale, toutes pièces médicales qui ne lui auraient pas été transmises par les parties et dont la production lui paraîtra nécessaire ;

DIT que l’expert s’assurera, à chaque réunion d’expertise, de la communication aux parties des pièces qui lui sont remises, dans un délai permettant leur étude, conformément au principe de la contradiction ; que les documents d’imagerie médicale pertinents seront analysées de façon contradictoire lors des réunions d’expertise ; Que les pièces seront numérotées en continu et accompagnées d’un bordereau récapitulatif ;

DIT que l’expert devra convoquer toutes les parties par lettre recommandée avec accusé de réception et leur avocat par lettre simple, les avisant de la faculté qu’elles ont de se faire assister par le médecin-conseil de leur choix ;

DIT que l’expert procédera à l’examen clinique, en assurant la protection de l’intimité de la vie privée de la personne examinée et le secret médical pour des constatations étrangères à l’expertise ; qu’à l’issue de cet examen, en application du principe du contradictoire il informera les parties et leurs conseils de façon circonstanciée de ses constatations et de leurs conséquences ;

DIT que l’expert pourra recueillir des informations orales, ou écrites, de toutes personnes susceptibles de l’éclairer ;

DIT que l’expert devra :
– en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai,
* en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées ;
* en les informant de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ou son projet de rapport ;
– adresser dans le même temps le montant prévisible de sa rémunération qu’il actualisera s’il y a lieu, procédant parallèlement aux demandes de provisions complémentaires ;
– adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception (par exemple : réunion de synthèse,
communication d’un projet de rapport) dont il s’expliquera dans son rapport, et arrêter le calendrier
de la phase conclusive de ses opérations :
* fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse, lesquelles disposeront d’un délai de 4 à 5 semaines à compter de la transmission du rapport ;
* rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà du terme qu’il fixe ;

DIT que l’expert répondra de manière précise et circonstanciée à ces dernières observations ou
réclamations qui devront être annexées au rapport définitif dans lequel devront figurer :
– la liste exhaustive des pièces consultées ;
– le nom des personnes convoquées aux opérations d’expertise en précisant pour chacune d’elle la date d’envoi de la convocation la concernant et la forme de cette convocation ;
– le nom des personnes présentes à chacune des réunions d’expertise ;
– la date de chacune des réunions tenues ;
– les déclarations des tiers entendus par lui, en mentionnant leur identité complète, leur qualité et leurs liens éventuels avec les parties ;
– le cas échéant, l’identité du technicien dont il s’est adjoint le concours, ainsi que le document qu’il aura établi de ses constatations et avis (lequel devra également être joint à la note de synthèse ou au projet de rapport) ;

DIT que l’expert exécutera sa mission conformément aux dispositions de l’article 263 du code de procédure civile ;

DIT que [W] [S] épouse [L] devra consigner la somme de 1 200 euros, à titre de provision à valoir sur la rémunération de l’expert, au greffe de ce tribunal dans le délai impératif de deux mois à compter de la notification de la présente décision, à peine de caducité de la désignation de l’expert ;

DIT que l’expert, en concertation avec les parties, définira un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise et qu’il actualisera le calendrier en tant que de besoin, notamment en fixant un délai aux parties pour procéder aux extensions de mission nécessaire ;

DIT que dans les trois mois de sa saisine, l’expert indiquera aux parties et au juge chargé du contrôle des expertises le montant de sa rémunération définitive prévisible, notamment au regard de l’intérêt du litige, afin que soit éventuellement fixée une provision complémentaire dans les conditions de l’article 280 du code de procédure civile ;

DIT que préalablement au dépôt de son rapport, l’expert adressera aux parties, le cas échéant par voie électronique uniquement, un pré-rapport, répondant à tous les chefs de la mission et destiné à provoquer leurs observations ; qu’il devra fixer aux parties un délai d’au moins quatre semaines pour le dépôt de leurs dires éventuels, leur rappellera qu’il n’est pas tenu de répondre aux observations transmises après cette date limite et précisera la date de dépôt de son rapport ;

N° RG 24/00463 – N° Portalis DBXU-W-B7I-H4NR – ordonnance du 08 janvier 2025

DIT que l’expert devra déposer son rapport au greffe de la juridiction dans le délai de 6 mois à compter du jour où il aura été saisi de sa mission ; qu’il en adressera une copie à chaque partie, accompagnée de sa demande de rémunération ;

RAPPELLE que l’expert joindra au dépôt du rapport d’expertise sa demande de rémunération et que les parties disposeront alors de 15 jours pour formuler auprès du juge du contrôle des expertises leurs observations sur cette demande ;

DÉSIGNE le juge chargé du contrôle des expertises de ce tribunal à effet de suivre l’exécution de la présente mesure d’instruction ;

DIT qu’en cas de difficultés, l’expert ou les représentants des parties en référeront immédiatement au juge chargé du service du contrôle des expertises au besoin à l’adresse mail suivante : [Courriel 14] ;

CONDAMNE la SA MMA IARD à payer à [W] [S] épouse [L] la somme de 6800 euros, à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice ;

CONDAMNE la SA MMA IARD à payer à [W] [S] épouse [L] la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA MMA IARD aux entiers dépens.

Le greffier, La présidente,

 


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