Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Versailles
Thématique : Conflit de voisinage et construction illégale : enjeux d’urbanisme et troubles anormaux.
→ RésuméExposé du litigeLes consorts [M], propriétaires d’une maison et d’un terrain à [Localité 6], ont assigné leurs voisins, Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y], en raison de la construction d’une extension illégale de leur propriété. Les consorts [M] demandent la démolition de cette extension, ainsi que des dommages et intérêts pour divers préjudices subis. Demandes des consorts [M]Les consorts [M] réclament la démolition de la partie neuve de la propriété des consorts [Y] et [I], en précisant les dimensions de l’extension. Ils demandent également des dommages et intérêts pour un préjudice moral et des troubles de voisinage, ainsi qu’une indemnisation pour la dévaluation de leur propriété. Ils soulignent que la construction a été réalisée sans autorisation et qu’elle a causé des nuisances significatives. Réponses des consorts [Y] et [I]Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y] contestent les demandes des consorts [M], affirmant avoir obtenu une autorisation d’urbanisme pour leur extension. Ils soutiennent que les allégations de nuisances sont infondées et que les consorts [M] cherchent à nuire à leur réputation. Ils demandent également des dommages et intérêts pour préjudice moral. Motifs de la décisionLe tribunal examine la légalité de la construction et conclut qu’il n’est pas prouvé que l’extension nécessitait un permis de construire, car la surface de plancher ne dépasse pas les seuils requis. Concernant les troubles de voisinage, le tribunal constate que les consorts [M] n’ont pas fourni de preuves suffisantes pour justifier leurs allégations de nuisances. Conclusion du tribunalLe tribunal déboute les consorts [M] de toutes leurs demandes et rejette également la demande de dommages et intérêts des consorts [Y] et [I]. Les consorts [M] sont condamnés à supporter les dépens et à verser une somme aux consorts [Y] et [I] en application de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution de la décision est déclarée de droit. |
Minute n°
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Troisième Chambre
JUGEMENT
22 JANVIER 2025
N° RG 23/05760 – N° Portalis DB22-W-B7H-RQGB
Code NAC : 74B
DEMANDEURS :
1/ Madame [U] [M] épouse [R]
née le 08 Juillet 1961 à [Localité 7] (PORTUGAL),
demeurant [Adresse 3],
2/ Madame [C] [M] épouse [F]
née le 02 Février 7968 à [Localité 11] (PORTUGAL),
demeurant [Adresse 4],
3/ Monsieur [K] [M]
né le 01 Avril 1966 à [Localité 11] (PORTUGAL),
demeurant [Adresse 1],
4/ Madame [M] [G]
née le 22 Novembre 1943, de nationalité portugaise,
demeurant [Adresse 2],
représentés par Maître François GERBER de la SELARL CABINET GERBER, avocat plaidant au barreau de PARIS et par Maître Anne-Lise ROY, avocat postulant au barreau de VERSAILLES.
DÉFENDEURS :
1/ Monsieur [P] [I]
né le 14 Novembre 1971 à [Localité 8] (78),
demeurant [Adresse 2],
2/ Madame [D] [Y]
née le 19 Septembre 1977 à [Localité 5] (SENEGAL),
demeurant [Adresse 2],
représentés par Maître Christophe SCOTTI, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.
* * * * * *
ACTE INITIAL du 03 Octobre 2023 reçu au greffe le 05 Octobre 2023.
DÉBATS : A l’audience publique tenue le 05 Décembre 2024, Monsieur LE FRIANT, Vice-Président, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assisté de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, a indiqué que l’affaire sera mise en délibéré au 22 Janvier 2025.
* * * * * *
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [K] [M], Madame [U] [R] née [M], Madame [C] [F] née [M] et Madame [G] [M], ci-après dénommés les consorts [M], sont propriétaires indivis d’une maison et d’un terrain situés [Adresse 2] à [Localité 6].
Ils ont pour voisins immédiats Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y] qui sont propriétaires d’une maison située au [Adresse 2] à [Localité 6].
Par actes en date du 3 octobre 2023, les consorts [M] ont assigné Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y] devant la présente juridiction.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 juin 2024.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 18 juin 2024, les consorts [M] demandent au tribunal de :
– Ordonner la démolition de la partie neuve de la propriété [Y] et [I] située au [Adresse 2] dans les conditions suivantes :
* sur une largeur côté sud (côté [M]) de 6.60 mètres – d’après la déclaration de travaux –
* sur une longueur côté Ouest (côté [Adresse 9]) de
7.60 mètres – d’après la déclaration de travaux –
* et une hauteur de 9 mètres
– le tout sous astreinte définitive de 3.000 euros par jour de retard, à compter de l’expiration du délai de deux mois suivant la signification par huissier de la décision à intervenir,
Sur l’indemnisation du préjudice d’[G] [M] :
– Condamner les consorts [Y] et [I] solidairement à lui verser la somme de 5.000 € par an depuis octobre 2017, soit 30.000 € ( à parfaire au jour de la décision) à titre de dommages et intérêts.
Sur l’indemnisation du préjudice des consorts [M]
– Condamner les consorts [Y] et [I] solidairement à leur verser la somme de 80.000 € à titre de dommages et intérêts pour chacun d’eux ;
Sur l’article 700 du CPC :
– Condamner les consorts [Y] et [I] à verser la somme de
8.000 € aux consorts [M] sur le fondement de l’article 700 du CPC et les condamner aux entiers dépens .
Ils font valoir que :
– les consorts [Y] et [I] ont construit dans des conditions totalement illégales, c’est-à-dire sans autorisation administrative, une extension de leur maison, augmentant sa surface de 66m² supplémentaires au moins, sur deux niveaux,
– ils ont fraudé le droit de l’urbanisme dans des conditions condamnées par la Cour de cassation chambre criminelle et par la Cour de cassation, chambre civile sur le fondement de l’article 1240 du code civil,
– il est également demandé au tribunal de condamner les consorts [Y] et [I] à verser aux consorts [M] des dommages et intérêts sur le fondement des troubles de voisinage,
– les consorts [Y] et [I] n’ont jamais sollicité et en conséquence jamais obtenu de permis de construire,
– la déclaration de travaux est mensongère et irrégulière car elle mentionne la création d’une surface de plancher complémentaire de 33,6 mètres carrés alors qu’elle fait 67,2 mètres carrés et qu’il fallait un permis de construire,
– les fondations d’une profondeur de 40 centimètres ne sont pas suffisantes pour supporter le poids de la construction,
– la hauteur totale est de 9 mètres,
– ils ont subi des troubles causés par :
° le fracas, les poussières et les dommages de toute nature générés par l’opération de construction irrégulière ;
° la privation de la lumière, du soleil et du jour en raison du caractère massif de la construction critiquée et de la masse grise qui apparaît désormais devant la propriété des consorts [M], à savoir une masse de parpaings de près de 10 mètres de haut ;
° les vues et les conséquences des vues sur le site des consorts [M] par les consorts [Y] et [I] qui prennent un malin plaisir à observer Madame [M] dans ses déplacements et à la harceler par différentes manifestations d’antipathie (cris, remarques, ricanements…) ;
° la réverbération de la chaleur (vu l’exposition plein sud du mur aveugle de la propriété [Y]), qui tue désormais l’ensemble des plantes du jardin de Mme [M] ;
– le préjudice est constitué :
° d’un trouble de jouissance du fait de la privation de l’ensoleillement, côté Est (soleil du matin), de 6h00 à 10h30, par le bloc de béton culminant à 9m de haut,
° de l’imposition de la vue désagréable du béton nu hors ravalement sur une surface de l’ordre de 40m² du sol au faitage du toit,
° de nuisances liées à l’écoulement des eaux de pluie depuis la gouttière [Y] [I] directement sur le mur et dans le jardin [M], du fait de l’absence de fermeture de la gouttière et d’installation d’évacuation des eaux de pluie vers la propriété [Y] [I]. De ce fait, les eaux de pluie se déversent directement sur le mur de séparation et dans le jardin des voisins. Le mur est moisi,
° la vue, certes indirecte sur sa maison qui permet cependant à ses voisins de l’observer dans ses allées et venues depuis la fenêtre du rez-de-chaussée côté [Adresse 9] et par le Vélux côté [Adresse 10],
° les nuisances liées aux travaux.
– les nus-propriétaires subissent également un préjudice puisque la valeur de la propriété est diminuée par la construction voisine qui vient assombrir le fond et constitue une vue sur leur terrain,
– le mur de l’extension est situé pour partie sur la propriété des consorts [M] ;
– l’extension critiquée par les consorts [M] ne peut se prévaloir de la protection prévue par l’article L. 480-13 du Code de l’urbanisme, puisque la construction n’a pas été édifiée conformément à un permis de construire ;
– le fait que la commune de [Localité 6] ne dispose pas de service suffisamment compétent :
– soit pour instruire les demandes d’autorisation de travaux et/ou les permis de construire qui lui sont déposés,
– soit pour vérifier la conformité des travaux réalisés au regard des règles de l’urbanisme, ne saurait avantager les consorts [Y] et [I] dans le cadre de ce contentieux.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 18 juin 2024, Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y] sollicitent que le tribunal :
Vu l’article R421-17 du Code de l’Urbanisme,
Vu l’article 1240 du code civil;
– débouter Monsieur [K] [M], Madame [U] [R] née [M], Madame [C] [F] née [M] et Madame [G] [M] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;
– condamner solidairement et conjointement Monsieur [K] [M], Madame [U] [R] née [M], Madame [C] [F] née [M] et Madame [G] [M] à payer à Madame [Y] et Monsieur [I] la somme 10.000 euros à chacun à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
– condamner solidairement et conjointement Monsieur [K] [M], Madame [U] [R] née [M], Madame [C] [F] née [M] et Madame [G] [M] à payer à Madame [Y] et Monsieur [I] la somme de
4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
– dire ne pas avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir;
Ils font valoir que :
– la correspondance datée du 26 octobre 2017 des Consorts [M] adressée au Maire de [Localité 6] constitue un recours administratif contre l’autorisation d’urbanisme à savoir une déclaration préalable n° 7825517 F 0041 qui avait été régulièrement délivrée à Monsieur [I] et Madame [Y] pour l’extension de leur habitation,
– une décision de rejet de ce recours a été prise par le maire de [Localité 6] en date du 2 novembre 2017,
– le maire de la commune de [Localité 6] précise que le projet de travaux est conforme au plan local d’urbanisme,
– les requérants dans le recours du 26 octobre 2017 précise que leurs voisins ont commencé des travaux le 25 octobre 2017 sans avoir implanté les panneaux d’affichage d’informations puis dans le même paragraphe précise que les travaux ont commencé à 8h45 et le panneau (d’affichage a été mis à neuf heures),
– l’autorisation d’urbanisme qui a permis la construction de l’extension, existe et elle demeure définitive puisqu’elle n’a pas été annulée par la juridiction administrative compétente,
– il n’existe strictement aucun dommage résultant de la construction de l’extension concernée : les requérants se bornent à alléguer que l’extension a engendré le fracas et les poussières ; une privation de la lumière, du soleil et du jour en raison du caractère massif de la construction critiquée,
– le constat du commissaire de justice n’a strictement aucune valeur probante puisqu’il n’existe pas de nouvelles vues illégales,
– l’on peine à comprendre comment le commissaire de justice a pu déterminer la hauteur du toit de l’extension en indiquant qu’elle est approximativement à
9 mètres,
– ils justifient avoir réalisé la construction suivant les dimensions exactes des plans ;
– ce dernier dossier dégénère de manière évidente en harcèlement procédural c’est-à-dire en abus d’ester en justice,
– les allégations de violences psychologiques exercées par la famille [Y]/[I] sont fantaisistes, non établies mais particulièrement diffamatoires eu égard à la situation personnelle et sociale de chaque membre de la famille,
L’affaire a été plaidée à l’audience du 5 décembre 2024 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 22 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort,
Déboute Monsieur [K] [M], Madame [U] [R] née [M], Madame [C] [F] née [M] et Madame [G] [M] de l’ensemble de leurs prétentions ;
Déboute Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y] de leur demande à titre de dommages et intérêts ;
Condamne in solidum Monsieur [K] [M], Madame [U] [R] née [M], Madame [C] [F] née [M] et Madame [G] [M] à supporter la charge des dépens ;
Condamne in solidum Monsieur [K] [M], Madame [U] [R] née [M], Madame [C] [F] née [M] et Madame [G] [M] à
payer à Monsieur [P] [I] et Madame [D] [Y] la somme
de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 JANVIER 2025 par Monsieur LE FRIANT, Vice-Président, assisté de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, lesquels ont signé la minute du présent jugement.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Carla LOPES DOS SANTOS Thibaut LE FRIANT
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