Tribunal judiciaire de Strasbourg, 26 novembre 2024, RG n° 23/05191
Tribunal judiciaire de Strasbourg, 26 novembre 2024, RG n° 23/05191

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Strasbourg

Thématique : Irrégularités dans la tenue des assemblées générales de copropriété : enjeux et conséquences juridiques.

Résumé

L’affaire concerne un ensemble immobilier à [Localité 4], avec des copropriétaires ayant contesté l’assemblée générale du 5 avril 2023. Le juge a déclaré irrecevables leurs demandes d’annulation, mais a constaté des irrégularités dans le procès-verbal de l’assemblée. En conséquence, le tribunal a annulé les résolutions n°4 et 59, tout en déboutant les copropriétaires de leurs autres demandes. Le syndicat des copropriétaires a été condamné à verser des frais aux copropriétaires, qui ont été dispensés de participer aux frais de procédure. L’exécution provisoire du jugement a également été rappelée.

N° RG 23/05191 – N° Portalis DB2E-W-B7H-L7KS

3ème Ch. Civile Cab. 1

N° RG 23/05191 – N° Portalis DB2E-W-B7H-L7KS

Minute n°

Copie exec. à :

Me David FRANCK
Me Audrey PALLUCCI

Le

Le greffier

Me David FRANCK
Me Audrey PALLUCCI

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE STRASBOURG

JUGEMENT DU 26 NOVEMBRE 2024

DEMANDEURS :

Monsieur [A] [W]
demeurant [Adresse 6] – [Localité 4]
représenté par Me David FRANCK, avocat au barreau de STRASBOURG, vestiaire 155
Madame [Y] [E] [V]
née le 05 juin 1971 à [Localité 10] (Turquie), de nationalité turque, demeurant [Adresse 6] à [Localité 4]
représentée par Me David FRANCK, avocat au barreau de STRASBOURG, vestiaire 155
Monsieur [S] [X]
né le 01 Février 1962 à [Localité 9] (ALGERIE), demeurant [Adresse 6] – [Localité 4]
représenté par Me David FRANCK, avocat au barreau de STRASBOURG, vestiaire 155

DEFENDERESSE :

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L’IMMEUBLE [Adresse 8] [Adresse 1] ET [Adresse 6] À [Localité 4], représenté par son Syndic, la société CITYA IMMO 4, Immatriculée au RCS de STRASBOURG sous le numéro B 400 665 162, dont le siège est sis [Adresse 2] à [Localité 5]
représentée par Me Audrey PALLUCCI, avocat au barreau de STRASBOURG, vestiaire 27

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Vincent BARRÉ, Vice-président, Président,
assisté de Aude MULLER, greffier

OBJET : Demande en nullité d’une assemblée générale ou d’une délibération de cette assemblée

DÉBATS :

A l’audience publique du 08 Octobre 2024 à l’issue de laquelle le Président, Vincent BARRÉ, Vice-président, statuant en formation de juge unique a avisé les parties que le jugement serait prononcé par mise à disposition au greffe à la date du 26 Novembre 2024.

JUGEMENT :

Contradictoire en Premier ressort,
Rendu par mise à disposition au greffe,
Signé par Vincent BARRÉ, Vice-président et par Aude MULLER, greffier

L’ensemble immobilier situé à [Localité 4] [Adresse 1], [Adresse 3] et [Adresse 6], comporte deux bâtiments dénommés [Adresse 7] (bâtiment A, lots 1 à 60) et [Adresse 8] (bâtiment L, lots 61 à 189) qui est régi par un acte portant état descriptif de division et règlement de copropriété du 21 février 1964, modifié en 1968.

M. [A] [W] est propriétaire du lot 115, Mme [Y] [E] [V] du lot 110 et M. [S] [X] du lot 126 de l’immeuble [Adresse 6] à [Localité 4], soit au sein du bâtiment [Adresse 8].

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 7 mars 2023, la société Citya immo 4 a convoqué les copropriétaires de la résidence [Adresse 8] à une assemblée générale extraordinaire fixée au 5 avril 2023.

Le procès-verbal de cette assemblée générale a été adressé à M. [W], Mme [E] [V] et M. [X].

Selon un acte d’huissier de justice délivré au syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [Adresse 8] », [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 4] (ci-après le syndicat des copropriétaires) le 16 juin 2023, M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] ont saisi le tribunal judiciaire de Strasbourg d’une demande d’annulation de l’assemblée générale du 5 avril 2023, subsidiairement de certaines résolutions.

Saisi par le syndicat des copropriétaires, le juge de la mise en état a, selon une ordonnance du 2 juillet 2024, déclaré recevable les fins de non-recevoir formées par le syndicat des copropriétaires, déclaré irrecevable l’action de M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] tendant à l’annulation de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023, déclaré irrecevable l’action de M. [W] tendant à l’annulation des résolutions 5 à 9, 11 à 25, 29 à 43 et 47 à 66 de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023, déclaré irrecevable l’action de Mme [E] [V] tendant à l’annulation des résolutions 5 à 9, 11 à 25, 29 à 43, 47 à 55 de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023, déclaré irrecevable l’action de M. [X] tendant à l’annulation des résolutions 5 à 9, 11 à 25, 29 à 43 et 47 à 66 de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023, dit que les dépens de l’incident suivront le sort de l’instance au fond et condamné M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] à payer chacun la somme de 300 € au syndicat des copropriétaires au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par des conclusions transmises par voie électronique le 31 mai 2024, M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] demandent au tribunal de :
– déclarer leur demande recevable et bien fondée,
– constater, dire et juger que la feuille de présence souffre d’irrégularités,
– constater, dire et juger que le procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023 ne fait pas état des départs des copropriétaires,
– constater, dire et juger qu’en raison des irrégularités affectant la feuille de présence et le procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023, les majorités nécessaires ne peuvent pas être établies avec certitude,
– annuler en conséquence l’ensemble les résolutions de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023,
– annuler, à titre subsidiaire, les résolutions 4 à 9, 11 à 25, 29 à 43 et 47 à 66 prises lors de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023,
– constater, dire et juger qu’aucun rapport du conseil syndical n’a été joint à la convocation de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023,
– constater, dire et juger que les informations relatives au reste à charge de chaque propriétaire n’ont pas été notifiée en même temps que l’ordre du jour de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023,
– constater, dire et juger que le conseil syndical n’a pas été consulté sur les marchés et contrats et liés à l’Opah,

– annuler en conséquence l’ensemble les résolutions de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023,
– annuler, à titre subsidiaire, les résolutions 4 à 9, 11 à 25, 29 à 43 et 47 à 66 prises lors de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023,
– débouter en tout état de cause le syndicat des copropriétaires de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
– constater, et au besoin dire et juger, qu’ils ont été contraints d’ester en justice et qu’ils ont exposés de ce fait des frais irrépétibles qu’il serait inéquitable de laisser à leur charge,
– condamner le syndicat des copropriétaires à leur payer à chacun la somme de 3 000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de la procédure,
– dire et juger qu’ils seront exonérés, en leur qualité de copropriétaires, de leur quote-part dans les condamnations, dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat des copropriétaires dans la présente procédure, au titre des charges générales d’administration, conformément aux dispositions de l’article 10-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965,
– rappeler que l’exécution provisoire de la décision à intervenir est de droit.

Le syndicat des copropriétaires demande au tribunal, selon des conclusions transmises par voie électronique le 24 juin 2024, de :
– juger la demande de M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] tendant à l’annulation de l’assemblée générale du 5 avril 2023 ainsi que l’ensemble des résolutions prises lors de cette assemblée générale de copropriété irrecevable,
– débouter les demandeurs de l’intégralité de leurs fins, moyens et conclusions,
– condamner in solidum M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum M. [W], Mme [E] et M. [X] aux entiers frais et dépens de l’instance,
– dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’instruction a été déclarée close selon une ordonnance du 10 septembre 2024, l’affaire a été évoquée à l’audience du 8 octobre 2024 et mise en délibéré au 26 novembre 2024.

MOTIFS

Il sera rappelé à titre liminaire qu’en application de l’article 768 du code de procédure civile, le tribunal ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Or, ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir « constater » ou « dire et juger » en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d’emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que le tribunal n’y répondra qu’à la condition qu’ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans son dispositif, mais dans les motifs de la décision.

Par ailleurs, il sera relevé que si, dans le dispositif de leurs dernières conclusions, M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] demandent que l’ensemble des résolutions de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023 soient annulées et subsidiairement que les résolutions 4 à 9, 11 à 25, 29 à 43 et 47 à 66 soient annulées, par ordonnance du 2 juillet 2024, le juge de la mise en état, seul compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir conformément aux dispositions de l’article 789 6° du code de procédure civile, a notamment déclaré irrecevable l’action de M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] tendant à l’annulation de l’assemblée générale du 5 avril 2023, irrecevable l’action de M. [W] tendant à l’annulation des résolutions 5 à 9, 11 à 25, 29 à 43 et 47 à 66 de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023, irrecevable l’action de Mme [E] [V] tendant à l’annulation des résolutions 5 à 9, 11 à 25, 29 à 43, 47 à 66 de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023 et irrecevable l’action de M. [X] tendant à l’annulation des résolutions 5 à 9, 11 à 25, 29 à 43 et 47 à 66 de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023.

Ainsi, ne seront examinés que les moyens développés par M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] aux fins d’annulation de la résolution 4 et par Mme [E] [V] s’agissant des résolutions 56 à 66.

– Sur les résolutions 4 et 56 à 66 de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2023 :

M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] exposent que la feuille de présence et le procès-verbal présentent des irrégularités et des manquements qui empêchent toute reconstitution du sens du vote.

Ils font valoir que la feuille de présence n’a pas été annexée au procès-verbal, que le procès-verbal ne mentionne pas d’autres arrivées que celles de M. [W] et de M. [Z] en cours d’assemblée et ne précise pas de départs prématurés alors qu’un certain nombre de copropriétaires sont partis avant la fin et que le syndic a refusé de consigner leur départ et leurs instructions de vote faute de remettre un pouvoir à un copropriétaire présent. Ils ajoutent que le procès-verbal indique des tantièmes variables d’une résolution à l’autre sans logique.

Ils indiquent par ailleurs qu’aucun rapport du syndic n’a été joint aux convocations à l’assemblée générale extraordinaire, qu’ils ont pris connaissance de la véritable dimension du projet et de son chiffrage par la convocation reçue de sorte que le temps qui leur a été laissé pour appréhender le projet était restreint et que le conseil syndical n’a pas été mis en mesure de suivre le projet Opah.

Ils ajoutent qu’aucune explication ne leur a été apportée quant à l’augmentation du chiffrage des travaux entre 2019 et 2023 et qu’Urbanis ne les a informés que le 9 mars 2023, puis le jour de l’assemblée, du montant du reste à charge dû par chaque copropriétaire compte tenu des subventions accordées.

M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] concluent à un défaut d’information des copropriétaires justifiant l’annulation de la résolution 4 et également des résolutions 56 à 66 à la demande de Mme [E] [V].

Le syndicat des copropriétaires conteste tout défaut d’information.

Il rappelle que les travaux sont des travaux d’ampleur, que le syndicat a été accompagné par Urbanis dans le cadre d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat copropriétés dégradées mis en place par l’Eurométropole.

Il expose que le défaut de production de l’avis syndical n’est pas sanctionné par la nullité des résolutions de l’assemblée générale, que les copropriétaires ont bénéficié d’une information, soit un dossier constitué d’un planning, du détail des travaux lot par lot, des gains attendus sur le plan énergétique, les subventions mobilisables, le projet de financement et les prochaines étapes en cas de vote favorable.

S’agissant des résolutions 56 à 66 sur le financement des travaux, il indique que les copropriétaires ont eu les informations nécessaires et que si Urbanis a été contrainte de recalculer le reste à charge de chaque copropriétaire, cette situation, qui concerne chaque copropriétaire, ne peut justifier une annulation.

Sur la résolution 4 :

Selon l’article 14 du décret du 17 mars 1967, il est tenu une feuille de présence, pouvant comporter plusieurs feuillets, qui indique les nom et domicile de chaque copropriétaire ou associé :
-présent physiquement ou représenté ;
-participant à l’assemblée générale par visioconférence, par audioconférence ou par un autre moyen de communication électronique ;
– ayant voté par correspondance avec mention de la date de réception du formulaire par le syndic.
Dans le cas où le copropriétaire ou l’associé est représenté, la feuille de présence mentionne les nom et domicile du mandataire désigné et précise le cas échéant si ce dernier participe par visioconférence, par audioconférence ou par un autre moyen de communication électronique.
Cette feuille indique pour chaque copropriétaire le nombre de voix dont il dispose, le cas échéant en faisant application des dispositions des deuxième et troisième alinéas du I de l’article 22 et du dernier alinéa de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965.
Elle est émargée par chaque copropriétaire ou associé présent physiquement, ou par son mandataire.
Elle est certifiée exacte par le président de séance désigné par l’assemblée générale.
Elle peut être tenue sous forme électronique dans les conditions définies par les articles 1366 et 1367 du code civil.

Par ailleurs, conformément à l’article 17 du décret, il est établi un procès-verbal des décisions de chaque assemblée qui est signé, à la fin de la séance, ou dans les huit jours suivant la tenue de l’assemblée, par le président, par le secrétaire et par le ou les scrutateurs.
Le procès-verbal précise, le cas échéant, si les mandats de vote ont été distribués par le président du conseil syndical, par un membre du conseil syndical ou par le président de séance dans les conditions prévues à l’article 15-1.
Le procès-verbal comporte, sous l’intitulé de chaque question inscrite à l’ordre du jour, le résultat du vote. Il précise les noms et nombre de voix des copropriétaires ou associés qui se sont opposés à la décision, qui se sont abstenus, ou qui sont assimilés à un copropriétaire défaillant en application du deuxième alinéa de l’article 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965.
Le procès-verbal mentionne les réserves éventuellement formulées par les copropriétaires ou associés opposants sur la régularité des décisions.
Les incidents techniques ayant empêché le copropriétaire ou l’associé qui a eu recours à la visioconférence, à l’audioconférence ou à tout autre moyen de communication électronique de faire connaître son vote sont mentionnés dans le procès-verbal.
La feuille de présence est annexée au procès-verbal.
Les procès-verbaux des assemblées générales sont inscrits, à la suite les uns des autres, sur un registre spécialement ouvert à cet effet.
Ce registre peut être tenu sous forme électronique dans les conditions définies par l’article 1366 du code civil. Dans ce cas, la feuille de présence et les procès-verbaux peuvent être établis sous forme électronique et sont signés dans les conditions prévues au second alinéa de l’article 1367 du code civil.

Enfin, l’article 17-1 indique que l’irrégularité formelle affectant le procès-verbal d’assemblée générale ou la feuille de présence, lorsqu’elle est relative aux conditions de vote ou à la computation des voix, n’entraine pas nécessairement la nullité de l’assemblée générale dès lors qu’il est possible de reconstituer le sens du vote et que le résultat de celui-ci n’en est pas affecté.

En l’espèce, la feuille de présence mentionne le nom, l’adresse, le numéro de lot et les tantièmes de chaque copropriétaire présent ou représenté, dans ce cas le nom du mandataire désigné est précisé ; elle est émargée et signée par le président, le secrétaire et le scrutateur.

Par ailleurs, la feuille de présence précise l’arrivée de M. [W] et de M. [Z] à 18 heures 30 ainsi que le départ de M. [J] à 21 heures et de Mme [N] à 22 heures 15 et les noms des copropriétaires à qui ils ont donné pouvoir.

Le procès-verbal indique qu’une feuille de présence est dressée, qu’elle fait ressortir que 61 copropriétaires sur 113 sont présents ou valablement représentés représentant 59490 tantièmes / 100 000 tantièmes à l’ouverture de l’assemblée générale, liste le nom et le tantième de chaque copropriétaire présent ou représenté, que les copropriétaires représentant 40 519 tantièmes / 100 000 sont absents ou non représentés et liste leurs noms et les tantièmes, fait état de l’arrivée de M. [W] et de M. [Z] à 18 heures 31, soit au cours de la résolution 2 et, pour chaque résolution, précise les noms et nombre de voix des copropriétaires qui se sont opposés à la décision, qui se sont abstenus et le résultat du vote.

Il sera en premier lieu observé que le procès-verbal fait état de 61 copropriétaires présents ou représentés représentant 59 490 tantièmes à l’ouverture de l’assemblée générale alors que la feuille de présence comptabilise 62 copropriétaires présents ou représentés représentant 60 740 tantièmes, M. [G] ayant émargé la feuille de présence mais n’ayant pas été comptabilisé comme présent sur le procès-verbal.

Ainsi pour la résolution 4, soit après l’arrivée de M. [W] et de M. [Z], 64 copropriétaires étaient présents ou représentés, représentant 62 380 tantièmes (et les absents et non représentés 37 620 tantièmes).

Or, le procès-verbal est libellé comme suit s’agissant de la résolution 4 :
« Abstentions : 0 copropriétaire(s) représentant 0 tantième / 96040 tantièmes.
Votes contre : 10 copropriétaire(s) représentant 11 720 tantièmes / 96 040 tantièmes.
[W] [A] (1170), [U] [O] (1180), [R]/[E] [F] et [Y] (1180), [H] [C] (970), [X] [S] (1360), [P] [M] (1190), M [K] [I] (960), [B] [L] (1170), [J] [D] (1170), [CW] [T] (1370)
Votes pour : 48 copropriétaire(s) représentant 47 850 tantièmes / 96 040 tantièmes.

La résolution (article 25) ayant obtenu 47 850 tantièmes / 96 040 tantièmes ; la majorité de l’article 25 n’est pas atteinte et le vote ayant recueilli au moins 1/3 des voix de tous les copropriétaires composant le syndicat, il est procédé immédiatement à un second vote à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés, conformément aux dispositions de l’article 25-1 de la loi du 10 juillet 1965,
Abstentions : 0 copropriétaire(s) représentant 0 tantième / 96040 tantièmes.
Votes contre : 10 copropriétaire(s) représentant 11 720 tantièmes / 96 040 tantièmes.
[W] [A] (1170), [U] [O] (1180), [R]/[E] [F] et [Y] (1180), [H] [C] (970), [X] [S] (1360), [P] [M] (1190), M [K] [I] (960), [B] [L] (1170), [J] [D] (1170), [CW] [T] (1370)
Votes pour : 48 copropriétaire(s) représentant 47 850 tantièmes / 96 040 tantièmes.
Résolution adoptée à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés
Soit 47 850 tantièmes / 59570 tantièmes ».

Le procès-verbal est ainsi erroné s’agissant du nombre de copropriétaires ayant pris part au vote, 58 au lieu de 64 copropriétaires présents et représentés et s’agissant des tantièmes représentés par les présents et représentés (62 380 tantièmes et non 96 040 tantièmes ou 59 570 tantièmes) de sorte que le vote de 6 copropriétaires n’apparaît pas dans le procès-verbal.

Le sens du vote ne peut pas être reconstitué faute de connaître le sens du vote des 6 copropriétaires manquants sur le procès-verbal au regard de la feuille de présence.

Compte tenu des erreurs affectant le procès-verbal au regard de la feuille de présence, la résolution 4 sera annulée.

Sur les résolutions 56 à 66 :

La résolution 59 porte sur la souscription auprès de la Caisse d’épargne et de prévoyance Ile de France d’un éco-prêt à taux zéro au nom du syndicat des copropriétaires destiné au financement de travaux de rénovation énergétique au seul bénéfice des seuls copropriétaires éligibles décidant d’y participer, résolution en lien direct avec la résolution 4 relative aux travaux de rénovation énergétique de la copropriété précédemment annulée sera en conséquence annulée.

Sur la régularité de la feuille de présence et du procès-verbal :

S’agissant des résolutions 56 à 58, 60 à 64 et 66 soumises à la majorité de l’article 25 et à défaut de l’article 25-1, le procès-verbal mentionne pour chacune d’elle le vote de 64 copropriétaires.

Les résolutions 56, 57, 58, 60, 61, 62 et 66 ont valablement été adoptées à la majorité de l’article 25.

Mme [E] [V] ne démontre pas que le vote de ces résolutions ne prendrait pas en compte le départ de copropriétaires en cours d’assemblée générale, aucune discordance entre la feuille de présence et le procès-verbal n’étant démontré sur ce point.

En ce qui concerne les résolutions 63 et 64, celles-ci ont fait l’objet d’un second vote conformément à l’article 25-1 n’ayant pas obtenu la majorité des voix de tous les copropriétaires mais ayant recueilli au moins le tiers de ces voix.

Si le procès-verbal mentionne le résultat de ce second vote pour chacune de ces résolutions sur une base incohérente de tantièmes, 59 130 pour la résolution 63 et 58 970 pour la résolution 64, au lieu de 62 380 tantièmes, le résultat n’en est pas affecté, la résolution 63 recueillant 49 010 tantièmes de votes pour et la résolution 64 : 48 850 tantièmes de votes pour.

S’agissant de la résolution 65 soumise à la majorité de l’article 24, si le procès-verbal mentionne un vote sur 58 970 tantièmes au lieu de 62 380 tantièmes, le résultat n’en est pas affecté puisque 51 copropriétaires représentant 48 850 tantièmes ont voté pour la résolution.

Sur l’avis du conseil syndical :

Selon l’article 11 du décret du 17 mars 1967, sont notifiés au plus tard en même temps que l’ordre du jour, II – pour l’information des copropriétaires 3° l’avis rendu par le conseil syndical lorsque sa consultation est obligatoire, en application du deuxième alinéa de l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965.

En l’espèce, si le conseil syndical n’a rendu aucun avis sur les travaux envisagés, l’avis n’est prescrit qu’à titre informatif et n’est pas une condition de validité des résolutions concernées.

Sur le défaut d’information :

Il sera relevé en premier lieu que Mme [E] [V] n’explicite pas en quoi consiste le manque d’information pour les résolutions 56 à 58 et 60 à 66

Or, il résulte du procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2024 que les documents généraux relatifs aux travaux votés, hors travaux de rénovation énergétique dont la résolution 4 a été annulée, ont été communiqués aux copropriétaires.

Il sera en conséquence jugé que Mme [E] [V] ne rapporte pas la preuve d’un défaut d’information de nature à justifier les résolutions 56 à 58 et 60 à 66.

Ainsi, la demande de Mme [E] [V] tendant à l’annulation des résolutions 56 à 58 et 60 à 66 sera rejetée.

– Sur les dépens et les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile :

Le syndicat des copropriétaires, qui succombe en partie, sera condamné aux frais et dépens de l’instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer à M. [A] [W], Mme [Y] [E] [V] et M. [S] [X] la somme de 1 000 € à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La demande formée à ce titre par le syndicat des copropriétaires sera rejetée.

Enfin, il sera fait application de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 au profit de M. [W], Mme [E] [V] et M. [X] selon lequel le copropriétaire qui, à l’issue d’une instance judiciaire l’opposant au syndicat, voit sa prétention déclarée fondée par le juge, est dispensé, même en l’absence de demande de sa part, de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires.

– Sur l’exécution provisoire :

L’article 514 du code de procédure civile dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

En l’espèce, aucune raison ne justifie d’écarter l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,

ANNULE les résolutions n°4 et 59 votées par l’assemblée générale extraordinaire des copropriétaires de l’immeuble « [Adresse 8] », [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 4] le 5 avril 2023 ;

DEBOUTE M. [A] [W], Mme [Y] [E] [V] et M. [S] [X] du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [Adresse 8] », [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 4] aux entiers dépens ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [Adresse 8] », [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 4] à payer à M. [A] [W], Mme [Y] [E] [V] et M. [S] [X] la somme de mille euros (1 000 €) à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [Adresse 8] », [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 4] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DISPENSE M. [A] [W], Mme [Y] [E] [V] et M. [S] [X] de participer aux frais de procédure du syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [Adresse 8] », [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 4], conformément à l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

RAPPELLE l’exécution provisoire du jugement.

Le Greffier Le Président
Aude MULLER Vincent BARRÉ

 


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