Tribunal judiciaire de Strasbourg, 25 novembre 2024, RG n° 22/00615
Tribunal judiciaire de Strasbourg, 25 novembre 2024, RG n° 22/00615

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Strasbourg

Thématique : Réticence intentionnelle et validité des déclarations dans les contrats d’assurance

Résumé

Contexte de l’affaire

Madame [Y] [E] et son époux, Monsieur [M] [H], ont souscrit un contrat d’assurance emprunteur auprès de la SARL CSF Assurances le 15 mars 2010, en garantie de leur prêt immobilier. Lors de cette adhésion, Monsieur [H] a rempli une déclaration de bonne santé.

Décès de Monsieur [H] et refus de garantie

Monsieur [H] est décédé le [Date décès 1] 2020. Suite à son décès, la société CSF Assurances a refusé de garantir le capital restant dû, arguant que Monsieur [H] n’avait pas divulgué ses antécédents médicaux. Madame [H] a contesté ce refus, affirmant que son époux n’avait pas de pathologie particulière.

Échanges entre Madame [H] et CSF Assurances

Après le refus de garantie, CSF Assurances a demandé à Madame [H] de fournir des documents médicaux concernant les antécédents de son époux. Madame [H] a répondu qu’elle ne savait pas quels documents fournir, insistant sur l’absence de pathologies. Malgré plusieurs relances de l’assureur, elle a maintenu qu’il n’y avait rien à déclarer.

Assignation en justice

Le 18 janvier 2022, Madame [Y] [E] a assigné la SARL CSF Assurances devant le Tribunal Judiciaire de Strasbourg, demandant la prise en charge du capital restant dû. Elle a formulé plusieurs demandes, y compris le versement d’une somme au titre des frais de justice.

Arguments de la défenderesse

Dans ses dernières conclusions, la SARL CSF Assurances a demandé l’annulation du contrat pour réticence intentionnelle, soutenant que Monsieur [H] avait dissimulé des antécédents médicaux. L’assureur a également demandé le déboutement de Madame [H] de toutes ses demandes.

Motifs de la décision du tribunal

Le tribunal a statué que le contrat d’assurance était nul en raison de fausse déclaration intentionnelle. Il a souligné que les antécédents médicaux de Monsieur [H] avaient été omis lors de la souscription, ce qui avait diminué l’opinion du risque pour l’assureur. La déclaration de bonne santé signée par Monsieur [H] ne correspondait pas à la réalité de son état de santé.

Conséquences de la décision

En conséquence, le tribunal a débouté Madame [H] de toutes ses prétentions et l’a condamnée aux dépens, ainsi qu’au paiement d’une indemnité à la société CSF Assurances. Le jugement a été prononcé en premier ressort, avec des dispositions pour l’exécution provisoire.

N° RG 22/00615 – N° Portalis DB2E-W-B7G-K3KS

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

minute n°24/

N° RG 22/00615 –
N° Portalis DB2E-W-B7G-K3KS

Copie exec. aux Avocats :

CE JOUR

Me Vincent REUTHER
Me Jessy SAMUEL

Le Greffier

Me Vincent REUTHER
Me Jessy SAMUEL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE STRASBOURG

JUGEMENT du 25 Novembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

– Juge Unique : Isabelle ROCCHI, Vice-Président
– Greffier : Audrey TESSIER, Greffier

DÉBATS :

à l’audience publique du 23 Septembre 2024 à l’issue de laquelle le Président a avisé les parties que le jugement serait prononcé par mise à disposition au greffe à la date du 25 Novembre 2024.

JUGEMENT :

– déposé au greffe le 25 Novembre 2024
– Contradictoire et en premier ressort,
– signé par Isabelle ROCCHI, Président et par Audrey TESSIER, Greffier.

DEMANDERESSE :

Madame [Y] [E] veuve [H]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Jessy SAMUEL, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant, vestiaire : 69

DÉFENDERESSE :

S.A.R.L. de courtage d’assurances CSF, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° B 322.950.148. prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentée par Me Vincent REUTHER, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat postulant, vestiaire : 60, Me Lise RISSER, avocat au barreau de MULHOUSE, avocat plaidant

Le 15 mars 2010, Madame [Y] [E] et son époux, Monsieur [M] [H] ont adhéré au contrat d’assurance emprunteur de la SARL CSF Assurances, en garantie de leur prêt immobilier.

Parallèlement à la signature de ce contrat, Monsieur [H] a signé une déclaration de bonne santé.

Il est décédé le [Date décès 1] 2020.

Par courrier du 26 novembre 2020, CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR a opposé un refus de garantie à Madame [H] au motif que son époux n’aurait pas porté à la connaissance de l’assureur ses antécédents médicaux.

En réponse, Madame [H] a demandé à la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR d’indiquer pour quelle raison ce questionnaire aurait modifié la situation dans la mesure où son mari était décédé d’une mort naturelle et où il était régulièrement suivi par un médecin traitant sans qu’il ait été question d’une pathologie particulière et ainsi, que s’il n’a pas été porté à la connaissance de l’assurance CSF des antécédents médicaux, c’est qu’il n’y en avait pas lors de la signature du contrat.

Par courrier du 19 janvier 2021, la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR a sollicité auprès de Madame [H] la transmission de toutes les pièces médicales relatives aux pathologies relatées dans le rapport médical et le questionnaire confidentiel.

Par courrier du 30 janvier 2021, Madame [H] a indiqué que concrètement, elle ne savait pas quel document il fallait envoyer dans la mesure où elle rappelait que son mari ne présentait aucune pathologie particulière…

La société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR a réitéré sa demande par courrier du 03 février 2021.

Madame [H] a répondu le 30 août 2021, en rappelant que concrètement, Monsieur [H] n’avait aucun antécédent médical de sorte qu’il n’y avait rien à déclarer et que la situation ne pouvait durer indéfiniment.

Le 21 octobre 2021, la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR a adressé un nouveau courrier à Madame [H], faisant état de traitements d’hyper-tension ou de psychose.

Estimant que l’opposition de la société CSF Assurances était mal fondée en ce que son mari serait décédé de causes naturelles, et qu’en conséquence ce n’est en aucun cas son hyper-tension ou d’autres troubles qui auraient occasionné son décès, suivant acte introductif d’instance signifié le 18 janvier 2022, Madame [Y] [E] épouse [H] a fait assigner la SARL de courtage d’assurances CSF devant la chambre civile du Tribunal Judiciaire de Strasbourg afin de demander au tribunal de condamner la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR à prendre en charge le capital restant dû après paiement de l’échéance qui précède la date du décès selon l’amortissement du contrat de prêt conformément aux dispositions contractuelles.

Aux termes de ses conclusions d’assignation elle demandait ainsi au tribunal de :
* déclarer sa demande recevable et bien fondée ;
* condamner la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR à prendre en charge pour la quotité assurée le montant du capital restant dû après paiement de l’échéance qui précède la date du décès ;
* lui réserver le droit de chiffrer ces montants ;
* condamner la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR au versement de la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
* condamner la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR aux entiers frais et dépens de la procédure ;
* dire que l’exécution provisoire est de droit.

Dans ses dernières conclusions, notifiées le 23 mai 2024, Madame [Y] [E] épouse [H] demande au tribunal de :
* déclarer la demande recevable et bien fondée ;
* condamner la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR à prendre en charge pour la quotité assurée le montant du capital restant dû après paiement de l’échéance qui précède la date du décès soit la somme de 65.161,47 € assortis des intérêts légaux à compter de la présente saisine ;
* débouter la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR de l’intégralité de ses demandes ;
* condamner la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR au versement de la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
* condamner la société CSF ASSURANCES EMPRUNTEUR aux entiers frais et dépens de la procédure ;
* dire que l’exécution provisoire est de droit.

Suivant dernières conclusions notifiées le 23 novembre 2023, la SARL CSF Assurances demande au tribunal, sur le fondement notamment de l’article L.113-8 du code des assurances, de :
* dire que le contrat d’assurance souscrit par Monsieur [H] est annulé pour réticence intentionnelle ayant diminué l’opinion du risque pour l’assureur ;
* en conséquence, débouter Madame [H] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
* la condamner aux entiers frais et dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître Vincent REUTHER, avocat au barreau de Strasbourg, ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 duc Code de Procédure Civile.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est fait expressément référence aux écritures des parties visées ci-dessus quant à l’exposé du surplus des prétentions et moyens.

La procédure a été clôturée par ordonnance du juge de la mise en état en date du 27 mai 2024.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, statuant suivant jugement prononcé par mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort ;

DECLARE nul pour fausse déclaration intentionnelle le contrat d’assurance souscrit par Monsieur [H] ;

DEBOUTE en conséquence Madame [H] de l’intégralité de ses prétentions ;

CONDAMNE Madame [H] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Vincent REUTHER, avocat au barreau de Strasbourg ;

CONDAMNE Madame [H] à payer à la société CSF Assurances une indemnité de deux mille euros (2.000 €) sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

Le Greffier Le Président

Audrey TESSIER Isabelle ROCCHI

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon