Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 28 janvier 2025, RG n° 23/03187
Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 28 janvier 2025, RG n° 23/03187

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion

Thématique : Accès contesté à la voie publique : enjeux d’une servitude de passage

Résumé

Contexte de l’Affaire

Monsieur [R] [Y] a assigné Madame [L] [B], Madame [V] [F] et Madame [I] [F] devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis le 15 septembre 2023. Il cherche à établir que le fonds de l’indivision [Y], situé à [Localité 13] et cadastré BW [Cadastre 1], a un droit de passage sur les parcelles BW [Cadastre 7] et BW [Cadastre 8]. Il demande également une expertise judiciaire pour évaluer la situation des accès à la voie publique.

Arguments de Monsieur [R] [Y]

Monsieur [R] [Y] soutient que l’accès à la voie publique depuis sa parcelle est insuffisant pour desservir de nouveaux lots, en raison de la configuration étroite et sinueuse du chemin. Il affirme que l’accès par la parcelle voisine BW [Cadastre 9] est impossible à cause des bâtiments, et que le passage vers le nord mène à un cul-de-sac. Il demande donc une expertise pour déterminer un passage adéquat.

Décision du Juge de la Mise en État

Le 25 juin 2024, le juge de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Mesdames [F] concernant la qualité et le droit à agir de Monsieur [R] [Y]. Il a également condamné Mesdames [F] à verser 750 euros à Monsieur [R] [Y] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Demandes des Défenderesses

Dans leurs conclusions du 7 octobre 2024, Mesdames [V] et [I] [F] demandent la mise hors de cause de Madame [V] [F], ainsi que le rejet de la demande de Monsieur [R] [Y] pour l’établissement d’une servitude de passage. Elles demandent également une expertise complémentaire pour évaluer l’enclave et l’accessibilité de la parcelle BW [Cadastre 1].

Arguments des Défenderesses

Les défenderesses affirment que seule Madame [I] [F] est propriétaire de la parcelle BW [Cadastre 7]. Elles soutiennent que la parcelle BW [Cadastre 1] a un accès praticable à la voie publique, comme le prouve un constat d’huissier. Elles contestent l’argument de l’enclave et estiment que la demande de Monsieur [R] [Y] est infondée.

Régularité de la Saisine

Le tribunal a confirmé la régularité de la saisine à l’égard de la partie non comparante, en vérifiant que l’assignation avait été correctement signifiée, conformément aux exigences légales.

Demande de Mise Hors de Cause

La demande de mise hors de cause de Madame [V] [F] a été considérée comme une fin de non-recevoir, mais le tribunal a jugé qu’elle n’était pas recevable car elle n’avait pas été soumise au juge de la mise en état avant son dessaisissement.

Évaluation de l’Enclave

Le tribunal a examiné la demande d’établissement d’une servitude de passage pour cause d’enclave. Il a constaté que la parcelle BW [Cadastre 1] dispose d’un accès à un chemin carrossable, contredisant les allégations de Monsieur [R] [Y] sur l’insuffisance de cet accès.

Conclusion du Tribunal

Le tribunal a rejeté toutes les demandes de Monsieur [R] [Y], y compris celle d’expertise, et a condamné ce dernier aux dépens ainsi qu’à verser 2 712,50 euros à Mesdames [V] et [I] [F] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision a été déclarée exécutoire provisoirement.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/03187 – N° Portalis DB3Z-W-B7H-GO7J

NAC : 74D

JUGEMENT CIVIL
DU 28 JANVIER 2025

DEMANDEUR

M. [R] [Y], agissant en qualité de membre de l’indivision [Y]
[Adresse 6]
[Localité 10]
Rep/assistant : Maître Iqbal AKHOUN de la SELARL IAVOCATS & PARTNERS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉFENDERESSES

Mme [V] [F]
[Adresse 5]
[Localité 13]
Rep/assistant : Maître Laurent PAYEN de la SELARL PAYEN, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mme [I] [F]
[Adresse 3]
[Localité 13]
Rep/assistant : Maître Laurent PAYEN de la SELARL PAYEN, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mme [L] [B]
[Adresse 2]
[Localité 11]

Copie exécutoire délivrée le : 28.01.2025
CCC délivrée le :
à Maître Iqbal AKHOUN de la SELARL IAVOCATS & PARTNERS, Maître Laurent PAYEN de la SELARL PAYEN

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Le Tribunal était composé de :

Madame Sophie PARAT, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

LORS DES DÉBATS

L’affaire a été évoquée à l’audience du 17 Décembre 2024.

LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 28 Janvier 2025.

JUGEMENT : Réputé contradictoire, du 28 Janvier 2025 , en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Sophie PARAT, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES:

Par actes de commissaire de justice en date du 15 septembre 2023, Monsieur [R] [Y] a fait assigner Madame [L] [B], Madame [V] [F] et Madame [I] [F] devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis afin de:
JUGER que le fonds appartenant à l’indivision [Y], sis sur la commune de [Localité 13] et cadastré BW [Cadastre 1], bénéficie d’un droit de passage sur les parcelles cadastrées BW [Cadastre 7] et BW [Cadastre 8],
Et Avant Dire Droit
ORDONNER une expertise judiciaire et commettre tel expert qu’il plaira au Tribunal avec mission de :
– Tenter d’identifier les propriétaires des parcelles BW [Cadastre 7] et BW [Cadastre 8],
– Se rendre sur les lieux après avoir convoqué les parties prétendantes conformément à la loi,
– Se faire communiquer tous documents qu’il estimera utiles dans l’accomplissement de sa mission,
– Consigner les dires des parties à son rapport et mentionner la suite qu’il leur aura donnée,
– Constater que le droit d’accès de la BW[Cadastre 1] à la voie publique provient de la division de la parcelle N°[Cadastre 4] initialement bordée par le CD4 en plusieurs parcelles dont la BW [Cadastre 1] et déterminer si la propriété du requérant dispose d’une issue suffisante sur la voie publique par cet accès pour assurer la desserte normale et complète du fonds,
– Dans la négative, proposer une nouvelle assiette du droit de passage la moins dommageable pour les fonds servants, en tenant compte des intérêts du fonds enclavé;
– Donner un avis motivé sur l’éventuelle indemnité proportionnelle au dommage qui pourrait être due aux fonds servants,
– Fournir au Tribunal tout élément de fait utile à son appréciation.
JUGER que l’expert judiciaire devra communiquer aux parties une note de synthèse préliminaire et laisser aux parties un délai suffisant pour faire valoir leurs observations.
FIXER le montant de la consignation due par le requérant et à valoir sur la rémunération de l’expert judiciaire.
RESERVER les dépens.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que la parcelle dont il est propriétaire indivis, qui résulte de la division de la parcelle anciennement cadastrée BW[Cadastre 4], bordée au sud par le CD4, bénéficie d’un accès à ce CD, qui serait néanmoins insuffisant pour la desserte de nouveaux lots alors que la parcelle fait l’objet d’un projet de vente pour logement. Il soutient notamment que l’accès à la voie publique est insuffisant au regard du caractère étroit, pentu et sinueux du chemin de desserte. Il ajoute que l’accès à la voie publique par la parcelle voisine BW[Cadastre 9] est matériellement impossible compte tenu de l’implantation des bâtiments et que le passage vers le nord n’aboutit qu’à un cul de sac.

Par ordonnance du 25 juin 2024, le juge de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir tirée d’un défaut de qualité et de droit à agir du demandeur et condamné Mesdames [F] à payer à Monsieur [R] [Y] la somme de 750 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’incident.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées électroniquement le 7 octobre 2024, Mesdames [V] et [I] [F] demandent au tribunal de :
A titre principal :
PRONONCER la mise hors de cause de Madame [V] [F] non concernée par le présent litige faute d’être propriétaire de la parcelle en cause ;
DEBOUTER Monsieur [R] [Y] de sa demande au titre de l’établissement d’une servitude du fait du défaut d’enclave de la parcelle BW[Cadastre 1], ainsi que de toutes ses autres demandes, fins et conclusions ;
A titre subsidiaire :
COMPLETER la mission d’expertise sollicitée avant dire-droit en ajoutant les points suivants :
– Déterminer si la parcelle BW[Cadastre 1] fait l’objet d’une enclave,
– A défaut, dire si la parcelle BW[Cadastre 1] est accessible par un chemin existant,
– A défaut, determiner le passage le plus court et le moins onéreux a mettre en place afin de permettre l’accessibilité ;
– Si le tracé doit passer sur la parcelle de Mme [I] [F], donner avis sur le montant de l’indemnite a verser par M. [Y] a Mme [F];
En tout etat de cause :
CONDAMNER Monsieur [R] [Y] a verser a Mesdames [V] et [I] [F], la somme de 2712,50 euros au titre de l’article 700 du Code de procedure civile,
CONDAMNER Monsieur [R] [Y] aux entiers depens de la presente instance.

En défense, elles font valoir en premier lieu que seule Madame [I] [F] est propriétaire de la parcelle BW[Cadastre 7]. Sur le fond, elles font valoir que la parcelle BW[Cadastre 1] est longée par une route qui est parfaitement praticable, comme le démontre la pièce 7 versée par le demandeur. Elles précisent avoir fait établir un constat d’huissier prouvant qu’un camion benne pouvait circuler sur le chemin desservant le CD4 auquel la parcelle du demandeur a accès et démontrant l’absence de toute signalisation interdisant l’accès au public à ce chemin. Elles soutiennent donc que la parcelle du demandeur n’est pas enclavée et que sa demande est infondée.

Madame [L] [B], assignée à étude, n’a pas constitué avocat.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des moyens et arguments développés au soutien de leurs prétentions.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 novembre 2024. Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier au greffe le 17 décembre 2024.

Les conseils des parties ont été informés que le jugement serait mis à disposition au greffe à la date du 28 janvier 2025, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

DECLARE irrecevable la fin de non-recevoir tirée de l’absence d’intérêt à défendre de Madame [V] [F],

REJETTE la demande tendant à reconnaître au bénéfice de la parcelle cadastrée BW numéro [Cadastre 1] située sur la commune de [Localité 13], l’existence d’une servitude de passage sur les parcelles cadastrées BW numéro [Cadastre 7] et numéro [Cadastre 8],

REJETTE la demande d’expertise,

CONDAMNE Monsieur [R] [Y] aux dépens de l’instance,

CONDAMNE Monsieur [R] [Y] à verser à Mesdames [V] et [I] [F], la somme de 2712,50 € (deux mille sept cent douze euros et cinquante centimes) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE toute demande plus ample ou contraire des parties,

RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire,

La greffière La présidente

 


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