Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Rennes
Thématique : Confusion sur l’identité du débiteur et ses conséquences en matière d’exécution forcée
→ RésuméContexte de l’affaireLes époux [M] ont engagé le cabinet d’architecture MAISON CRÉATION pour la construction d’une maison à [Localité 7], avec la société GLET (EURL CONSTRUCTIONS GLET) responsable des travaux de maçonnerie. Les travaux ont été achevés le 16 juin 2006, et un procès-verbal de réception a été établi avec réserves concernant l’EURL CONSTRUCTIONS GLET. Saisie-attribution et actions judiciairesLe 3 juillet 2024, les époux [M] ont procédé à une saisie-attribution auprès de la BNP PARIBAS pour récupérer 7.625,28 € suite à un jugement du tribunal de grande instance de Rennes du 19 septembre 2016 et un arrêt de la cour d’appel de Rennes du 3 octobre 2019. En réponse, la SARL GLET CONSTRUCTION a assigné les époux devant le juge de l’exécution pour obtenir la mainlevée de cette saisie. Demandes de la SARL GLET CONSTRUCTIONDans ses conclusions, la SARL GLET CONSTRUCTION a demandé l’annulation de la saisie-attribution, la mainlevée de celle-ci, ainsi qu’une indemnisation de 7.000 € pour préjudice et 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Elle a soutenu qu’elle n’était pas le débiteur désigné par le titre exécutoire, qui concernait l’EURL GLET. Réponse des époux [M]Les époux [M] ont contesté la demande de la SARL GLET CONSTRUCTION, affirmant qu’ils détenaient un titre exécutoire valide à son encontre. Ils ont soutenu que l’arrêt de la cour d’appel du 3 octobre 2019 les désignait comme créanciers de la société GLET CONSTRUCTION, et ont demandé au juge de déclarer la saisie-attribution valable. Recevabilité de la contestationLe juge a déclaré la contestation de la SARL GLET CONSTRUCTION recevable, ayant été formée dans le délai imparti après la dénonciation de la saisie. La société a respecté les procédures nécessaires pour contester la saisie-attribution. Compétence du juge de l’exécutionLe juge a confirmé sa compétence pour traiter le litige, qui concernait une saisie-attribution et une contestation sur l’identité du débiteur. L’exception d’incompétence soulevée par les époux [M] a été rejetée. Validité de la saisie-attributionLe juge a conclu que la SARL GLET CONSTRUCTION n’était pas le débiteur désigné par le titre exécutoire, car l’EURL GLET et la SARL GLET CONSTRUCTION sont des entités juridiques distinctes. Par conséquent, la saisie-attribution a été jugée invalide et a été ordonnée sa mainlevée. Demande de dommages et intérêtsLa demande de la SARL GLET CONSTRUCTION pour des dommages-intérêts a été rejetée. Le juge a estimé que les époux [M] n’avaient pas agi de mauvaise foi en procédant à la saisie, malgré l’erreur d’identification du débiteur. Décision finaleLe juge a statué en faveur de la SARL GLET CONSTRUCTION en ordonnant la mainlevée de la saisie-attribution, tout en déboutant la société de ses demandes d’indemnisation et de frais. Les époux [M] ont été condamnés aux dépens de la procédure. |
Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
[Adresse 5] – tél : [XXXXXXXX01]
JUGE DE L’EXÉCUTION
Audience du 09 Janvier 2025
Affaire N° RG 24/05720 – N° Portalis DBYC-W-B7I-LEGC
RENDU LE : NEUF JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ
Par Mélanie FRENEL, Juge chargé de l’exécution, statuant à Juge Unique.
Assistée de Annie PRETESEILLE, Greffier, lors des débats et lors du prononcé, qui a signé la présente décision.
ENTRE :
-La société GLET CONSTRUCTION, SARL , ayant son siège [Adresse 10] agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège,
Ayant pour avocat la SELARL QUADRIGE AVOCATS, avocats au barreau de RENNES représentée par Maître Christophe DAVID,
Partie(s) demanderesse(s)
ET :
– Monsieur [C] [M], né le [Date naissance 2] 1971, à [Localité 8], demeurant [Adresse 3]
– Madame [K] [O], née le [Date naissance 6] 1972, à [Localité 8], demeurant [Adresse 4]
représentés par Maître OUAIRY JALLAIS Marceline de la SCP DEPASSE, DAUGAN, QUESNEL, DEMAY, avocats au barreau de RENNES
Partie(s) défenderesse(s)
DEBATS :
L’affaire a été plaidée le 07 novembre 2024, et mise en délibéré pour être rendue le 19 décembre 2024. A cette date le délibéré a été prorogé au 09 janvier 2025.
JUGEMENT :
En audience publique, par jugement Contradictoire
En PREMIER RESSORT, par mise à disposition au Greffe
EXPOSÉ DU LITIGE
Les époux [M] ont confié au cabinet d’architecture MAISON CRÉATION une mission complète aux fins de construire une maison d’habitation à [Localité 7]. La société GLET (EURL CONSTRUCTIONS GLET) était chargée des travaux de maçonnerie.
Les travaux se sont achevés le 16 juin 2006 et ont fait l’objet d’un procès-verbal de réception par corps d’état séparés avec réserves s’agissant de l’EURL CONSTRUCTIONS GLET.
Le 3 juillet 2024, monsieur [C] [M] et madame [K] [O]-[M] ont fait procéder à une saisie-attribution entre les mains de la BNP PARIBAS dans les livres de laquelle la SARL GLET CONSTRUCTION est titulaire d’un compte pour obtenir le paiement de la somme de 7.625,28 € en principal, frais et intérêts en exécution d’un jugement rendu par le tribunal de grande instance (devenu tribunal judiciaire) de Rennes le 19 septembre 2016 ainsi que d’un arrêt de la cour d’appel de Rennes en date du 3 octobre 2019.
Par acte de commissaire de justice du 2 août 2024, la SARL GLET CONSTRUCTION a fait assigner monsieur [C] [M] et madame [K] [O]-[M] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Rennes afin d’obtenir la mainlevée de cette saisie-attribution.
Après un renvoi pour échange de pièces et conclusions entre les parties, l’affaire a été retenue à l’audience du 7 novembre 2024, les parties s’en remettant à leurs écritures.
Aux termes de conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 22 octobre 2024, la SARL GLET CONSTRUCTION demande au juge de l’exécution de :
“Vu les articles L 111-1 et suivants du Code de Procédure Civile d’exécution,
Vu l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de RENNES le 3 octobre 2019,
– Annuler la saisie attribution pratiquée le 3 juillet 2024 à la requête de Monsieur [M] et Madame [O] au préjudice de la SARL GLET CONSTRUCTION entre les mains de la société BNP PARIBAS ;
En conséquence,
– Ordonner la mainlevée de la saisie attribution ;
– Condamner Monsieur [M] et Madame [O] à verser à la SARL GLET CONSTRUCTION la somme de 7.000 € en indemnisation du préjudice subi en raison de la saisie-attribution infondée ;
– Débouter Monsieur [M] et Madame [O] de l’intégralité de leurs demandes ;
– Condamner Monsieur [M] et Madame [O] à verser à la SARL GLETCONSTRUCTION la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure Civile ;
– Les condamner aux entiers dépens.”
A l’appui de ses demandes, la SARL GLET CONSTRUCTION soutient que les défendeurs ne disposent pas de titre exécutoire à son encontre, la débitrice des condamnations au paiement prononcées par le tribunal judiciaire et la cour d’appel étant l’EURL GLET aux droits desquels elle ne vient pas.
Elle sollicite l’octroi d’une indemnité en faisant valoir qu’il n’a pas été donné suite à sa demande de mainlevée de la mesure malgré ses explications auprès du commissaire de justice sur l’erreur de débiteur et que la somme appréhendée (7.625,28 €) ne lui a en conséquence pas encore été restituée.
Elle rétorque par ailleurs aux défendeurs que sa contestation, qui porte sur l’identité du débiteur condamné, relève bien de la compétence du juge de l’exécution.
Par conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 4 novembre 2024, monsieur [C] [M] et madame [K] [O]-[M] demandent au juge de l’exécution de :
“Vu les dispositions de l’article L 213-6 du Code de l’organisation judiciaire,
Vu l’autorité de chose jugée qui s’attache à l’arrêt n° 313 rendu par la quatrième chambre de la Cour d’appel de RENNES le 3 octobre 2019,
– Se déclarer incompétent pour remettre en cause le titre exécutoire définitif constitué par l’arrêt rendu par la quatrième chambre de la Cour d’Appel de RENNES le 3 octobre 2019,
– En tout état de cause, déclarer valable et efficace la saisie attribution pratiquée à l’encontre de la société GLET CONSTRUCTION pour le compte de Madame [O] et de Monsieur [M],
– Dire n’y avoir lieu à annuler la saisie attribution pratiquée à l’encontre de la société GLET CONSTRUCTION, ni à donner mainlevée de cette saisie attribution,
– Débouter la société GLET CONSTRUCTION de toutes ses conclusions, fins et prétentions à l’encontre de Madame [O] et de Monsieur [M],
– A titre subsidiaire et dans l’hypothèse impossible où Madame le Juge de l’exécution annulerait la saisie attribution pratiquée à l’encontre de la SARL GLET CONSTRUCTION, En tout état de cause, débouter celle-ci de sa prétention tendant à obtenir une indemnité de 7.000 €, ainsi qu’une somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
– En toute occurrence, condamner la société GLET CONSTRUCTION à verser à Madame [O] et Monsieur [M], chacun, une somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamner la société GLET CONSTRUCTION aux entiers dépens.”
Les défendeurs soutiennent qu’ils détiennent un titre exécutoire à l’encontre de la SARL GLET CONSTRUCTION. Ils observent que l’arrêt de la cour d’appel du 3 octobre 2019 a prononcé des condamnations à l’égard de “la société GLET CONSTRUCTION” dénomination renvoyant à“l’EURL GLET en liquidation amiable prise en la personne de son liquidateur domicilié en cette qualité audit siège, aux droits de laquelle vient la SARL GLET CONSTRUCTION” selon les indications figurant dans l’entête de la décision. Ils relèvent également que l’arrêt a été signifié à la SARL GLET CONSTRUCTION et à l’adresse du siège social de cette dernière et que bien que se prétendant tiers par rapport à l’EURL GLET, elle n’a pas fait tierce -opposition à cette décision. Ils en déduisent que la SARL GLET CONSTRUCTION est bien débitrice des sommes visées par la décision.
Ils affirment que la contestation de la SARL GLET CONSTRUCTION, en ce qu’elle tend à remettre en cause l’autorité de la chose jugée, ne relève pas de la compétence du juge de l’exécution.
Subsidiairement, ils font conclure au rejet de toute demande indemnitaire, reprochant à la SARL GLET CONSTRUCTION d’avoir créé une confusion par son inaction aux fins de mettre en lumière une éventuelle erreur de débiteur dans le cadre de la procédure d’appel. Ils ajoutent que la demanderesse n’apporte la preuve d’aucun préjudice.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, le juge de l’exécution se réfère aux conclusions susmentionnées des parties en application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l’exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire mis à disposition au greffe et en premier ressort,
– DÉCLARE recevable la contestation formée par la SARL GLET CONSTRUCTION à l’encontre de la mesure de saisie-attribution en date du 3 juillet 2024 ;
– REJETTE l’exception d’incompétence ;
– ORDONNE la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 3 juillet 2024 entre les mains de la BNP PARIBAS et à l’encontre de la SARL GLET CONSTRUCTION ;
– DÉBOUTE la SARL GLET CONSTRUCTION de sa demande de dommages et intérêts ;
– DÉBOUTE la SARL GLET CONSTRUCTION de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– CONDAMNE monsieur [C] [M] et madame [K] [O]-[M] au paiement des dépens de la présente instance ;
– RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit en application de l’article R. 121-21 du Code des procédures civiles d’exécution.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an que dessus,
Le Greffier, Le Juge de l’Exécution,
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