Tribunal judiciaire de Rennes, 31 janvier 2025, RG n° 22/00096
Tribunal judiciaire de Rennes, 31 janvier 2025, RG n° 22/00096

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Rennes

Thématique : Accident de travail : présomption d’imputabilité et contestation de l’employeur.

Résumé

Contexte de l’accident

Madame [X] [W]-[F], employée de la société SAS [5] ([6]) depuis 2012 en tant que caissière principale, a signalé un accident de travail survenu le 29 avril 2021. La déclaration de l’accident, complétée par l’employeur, mentionne des douleurs au bras droit sans préciser la nature de l’accident. L’employeur a émis des réserves, indiquant que la salariée avait déjà eu des problèmes avec ce bras suite à des accidents survenus en dehors du travail.

Certificat médical et prise en charge

Un certificat médical établi le 30 avril 2021 a décrit une douleur intense à l’épaule droite, entraînant une incapacité de mouvement. Un arrêt de travail a été prescrit jusqu’au 7 mai 2021. La Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) a ensuite décidé de prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle, décision contestée par l’employeur.

Procédures judiciaires

La société SAS [5] ([6]) a saisi la Commission de recours amiable de la CPAM, qui a rejeté sa contestation. Par la suite, l’employeur a déposé un recours auprès du tribunal judiciaire de Rennes contre la décision implicite de rejet de la commission. L’affaire a été examinée lors d’une audience en décembre 2024.

Arguments de l’employeur

L’employeur a soutenu qu’il n’avait pas été informé des circonstances de l’accident et qu’aucun témoin n’avait constaté l’incident. Il a également souligné que la salariée avait informé son responsable tardivement et qu’elle n’avait pas respecté les consignes de sécurité, ce qui aurait pu contribuer à l’accident. En conséquence, l’employeur a demandé l’annulation de la prise en charge de l’accident.

Réponse de la CPAM

La CPAM a défendu sa décision en affirmant que l’accident s’était produit pendant le temps de travail et que les lésions étaient en accord avec les constatations médicales. Elle a également mentionné que des témoins avaient observé la salariée souffrir du bras, renforçant ainsi la légitimité de la prise en charge.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué que la déclaration de l’accident était valide et que la présomption d’imputabilité au travail s’appliquait. Il a rejeté les arguments de l’employeur, qui n’a pas réussi à prouver que l’accident était dû à une cause étrangère. La société SAS [5] ([6]) a été déboutée de son recours et condamnée à verser des frais à la CPAM.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
PÔLE SOCIAL

MINUTE N°

AUDIENCE DU 31 Janvier 2025

AFFAIRE N° RG 22/00096 – N° Portalis DBYC-W-B7G-JUIY

89E

JUGEMENT

AFFAIRE :

S.A.S. [5] ([6])

C/

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE D’ILLE ET VILAINE

Pièces délivrées :

CCCFE le :

CCC le :

PARTIE DEMANDERESSE :

S.A.S. [5] ([6])
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Maître Jean-Christophe GOURET, avocat au barreau de RENNES, substitué à l’audience par Maître Nolwenn QUIGUER, avocate au barreau de RENNES

PARTIE DEFENDERESSE :

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE D’ILLE ET VILAINE
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Madame [L] [U], munie d’un pouvoir

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Présidente : Madame Guénaëlle BOSCHER
Assesseur : Monsieur Hervé BELLIARD, assesseur du pôle social du tribunal judiciaire de Rennes
Assesseur : Monsieur Laurent LE CORRE, assesseur du pôle social du tribunal judiciaire de Rennes
Greffière : Madame Rozenn LE CHAMPION

DEBATS :

Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 03 Décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré pour être rendu au 31 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe.

JUGEMENT : contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE
Madame [X] [W]-[F], salariée de la société SAS [5] ([6]) depuis le 21 août 2012 en qualité de caissière principale, a déclaré avoir été victime d’un accident de travail survenu le 29 avril 2021, dans des circonstances ainsi décrites aux termes de la déclaration complétée par l’employeur le 3 mai 2021 :
« Activité de la victime lors de l’accident : adjointe responsable caisse : caisse accueil
Nature de l’accident : je ne sais
Objet dont le contact a blessé la victime : je ne sais pas
Siège des lésions : bras droit
Nature des lésions : bras droit ».
Sur cette déclaration, l’employeur a fait état des réserves suivantes : « a déjà eu des problèmes avec ce bras suite à un accident de scooter (hors travail) et de trottinette (hors travail) »
Le certificat médical initial, établi le 30 avril 2021, fait état d’une « douleur brutale épaule droite lors d’un mouvement avec impotence. Mobilisation active et passive impossible ». Un arrêt de travail jusqu’au 7 mai 2021 a été prescrit.
La Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) d’Ille-et-Vilaine a procédé par voie de questionnaires, les deux parties ayant été informées du lancement des investigations par courrier du 25 mai 2021.
Par courrier du 3 août 2021, la CPAM d’Ille-et-Vilaine a notifié à la société SAS [5] ([6]) sa décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l’accident dont a été victime Madame [W]-[F] le 29 avril 2021.
Par courrier daté du 1er octobre 2021, la société SAS [5] ([6]) a saisi la Commission de recours amiable de la CPAM d’une contestation.
Par requête déposée au greffe le 3 février 2022, la société SAS [5] ([6]) a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Rennes d’un recours contre la décision implicite de rejet de la commission.
En sa séance du 29 novembre 2022, la commission a finalement rejeté la contestation de l’employeur.
Après mise en état, l’affaire a été évoquée à l’audience du 3 décembre 2024.
La société SAS [5] ([6]), dûment représentée, se référant expressément aux termes de sa requête, demande au tribunal de :
Déclarer inopposables les décisions rendues par la CPAM et la CRA d’Ille-et-Vilaine,annuler la décision implicite de rejet de la Commission de Recours Amiable de la CPAM d’Ille-et-Vilaine,annuler la décision du 3 août 2021 de prise en charge du sinistre déclaré par Madame [W]-[F] au titre de la législation sur les risques professionnels,condamner la CPAM d’Ille-et-Vilaine à verser à la société [5] la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir en substance qu’elle n’a été informée ni de l’heure ni des circonstances dans lesquelles serait intervenu l’accident de travail déclaré par Madame [W]-[F]. Elle ajoute qu’aucun témoin n’a visuellement constaté la scène qui serait à l’origine de la lésion. De plus, elle considère que Madame [W]-[F] a informé son responsable et sa collègue tardivement, soit plus de trois heures après les faits, alors qu’elle aurait pu leur faire constater immédiatement. Enfin, elle reproche à Madame [W]-[F] de ne pas respecter les consignes de sécurité imposées au sein de l’entreprise comme le démontrent les images de vidéosurveillance du 29 avril 2021 où l’on voit qu’elle n’utilise pas le code-barres détachable sur les packs d’eau, ce qui la conduit à se lever pour utiliser la douchette. La société [5] considère qu’en l’absence de tout fait accidentel qui se serait produit au temps et au lieu du travail, la décision de prise en charge d’un accident au titre de la législation sur les risques professionnels doit être annulée.
En réplique, la CPAM d’Ille-et-Vilaine, dûment représentée, se référant expressément à ses conclusions visées par le greffe à l’audience, prie le tribunal de :
Confirmer la décision de prise en charge de l’accident de Madame [X] [W]-[F] survenu le 29 avril 2021 au titre de la législation professionnelle par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie d’Ille-et-Vilaine ;Déclarer opposable à la société [5] ([6]) la décision de prise en charge de l’accident du travail du 29 avril 2021 de Madame [X] [W]-[F] par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie d’Ille-et-Vilaine ;Débouter la société [5] ([6]) de toutes ses demandes ;Rejeter la demande de condamnation de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie d’Ille-et-Vilaine au paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile formulée par la société ;Condamner la société [5] ([6]) au paiement de la somme de 1500 € à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie d’Ille-et-Vilaine sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;Condamner la société [5] ([6]) aux dépens de l’instanceA l’appui de ses demandes, la CPAM expose principalement que l’accident déclaré s’est produit alors que l’assurée se trouvait au temps et au lieu de travail habituel et que les lésions décrites par le certificat médical initial concordent avec la matérialité du fait accidentel décrit par celle-ci. Par ailleurs, la déclaration du fait accidentel à l’employeur ainsi que la constatation médicale des lésions ont eu lieu dans un temps proche de la survenance de l’accident. Enfin, lors de l’enquête administrative diligentée par la CPAM deux personnes ont vu que Madame [W]-[F] souffrait du bras.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs conclusions sus-citées, et ce en application de l’article 455 du Code de procédure civile.
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 31 janvier 2025 et rendue à cette date par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe de la juridiction,
DEBOUTE la société [5] ([6]) de son recours,
DEBOUTE la société [5] ([6]) de sa demande sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE la société [5] ([6]) à verser à la Caisse Primaire d’assurance Maladie d’Ille-et-Vilaine la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE la société [5] ([6]) aux dépens.

La Greffière La Présidente

 


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