Tribunal judiciaire de Rennes, 16 janvier 2025, RG n° 24/08126
Tribunal judiciaire de Rennes, 16 janvier 2025, RG n° 24/08126

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Rennes

Thématique : Validité de la signification et contestation d’une saisie-attribution

Résumé

Contexte de l’affaire

Monsieur [B] [I] a accepté d’être caution pour le remboursement d’un prêt contracté par la société ONK TAVERN, dont il était co-gérant, auprès de la banque CIC via la SAS CAFES [W].

Décision du tribunal de commerce

Le 15 mai 2024, le tribunal de commerce de Paris a condamné solidairement monsieur [P] [I] et monsieur [B] [I] à payer une somme provisionnelle de 17.988,11 € avec intérêts légaux, ainsi qu’une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Monsieur [P] [I] a également été condamné aux dépens de l’instance.

Saisie-attribution

En exécution de cette décision, la SAS CAFES [W] a procédé à une saisie-attribution le 11 octobre 2024 sur les comptes de monsieur [B] [I] au Crédit mutuel Arkea, récupérant une somme de 21.984,79 €. La mesure a été dénoncée à monsieur [B] [I] le 14 octobre 2024.

Contestations de monsieur [B] [I]

Monsieur [B] [I] a assigné la SAS CAFES [W] devant le juge de l’exécution pour obtenir l’annulation de la saisie-attribution et la mainlevée de la mesure d’exécution forcée, arguant de l’irrégularité de la signification de l’ordonnance de référé. Il a soutenu que l’adresse utilisée pour la signification n’était plus la sienne depuis plusieurs années.

Arguments de la SAS CAFES [W]

La SAS CAFES [W] a répliqué que le commissaire de justice avait respecté les démarches nécessaires pour signifier l’ordonnance et que la responsabilité de fournir une adresse à jour incombait à monsieur [B] [I]. Elle a également contesté les demandes de nullité et de sursis à statuer.

Recevabilité de la contestation

Le juge a déclaré la contestation de monsieur [B] [I] recevable, ayant été formée dans le délai imparti et avec les notifications requises.

Validité de la saisie-attribution

Le juge a examiné la validité de la saisie-attribution, concluant que la signification de l’ordonnance de référé avait été effectuée correctement, rejetant ainsi la demande de nullité de monsieur [B] [I].

Montant des sommes dues

Le juge a validé la saisie-attribution, mais a limité le montant total à recouvrer à 20.726,27 €, en excluant certains frais que monsieur [B] [I] n’était pas tenu de payer.

Décision finale

Le juge a condamné monsieur [B] [I] à payer 1.200 € à la SAS CAFES [W] pour les frais non compris dans les dépens et a rejeté toutes les autres demandes de monsieur [B] [I]. L’exécution provisoire a été rappelée comme étant de droit.

Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
[Adresse 6] – tél : [XXXXXXXX02]
JUGE DE L’EXÉCUTION

Audience du 16 Janvier 2025
Affaire N° RG 24/08126 – N° Portalis DBYC-W-B7I-LIZR

RENDU LE : SEIZE JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ

Par Mélanie FRENEL, Juge chargé de l’exécution, statuant à Juge Unique.

Assistée de Annie PRETESEILLE, Greffier, lors des débats et lors du prononcé, qui a signé la présente décision.

ENTRE :

– Monsieur [B] [I]
né le [Date naissance 4] 1988 à [Localité 7], demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Rozenn GOASDOUE, avocat au barreau de RENNES

Partie(s) demanderesse(s)

ET :

– La société CAFES [W] – société anonyme immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro B 432 573 467, prise en la personne de son représentant légal, Monsieur [F] [W], en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 9].

Ayant pour avocat constitué Maître Mikaël LE ROLL, avocat au Barreau de Rennes et pour avocat plaidant Maître Olivier GUEZ avocat au Barreau du Val de Marne

Partie(s) défenderesse(s)

DEBATS :

L’affaire a été plaidée le 05 Décembre 2024, et mise en délibéré pour être rendue le 16 Janvier 2025 .

JUGEMENT :

En audience publique, par jugement Contradictoire
En PREMIER RESSORT, par mise à disposition au Greffe

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 28 juin 2024, monsieur [B] [I] s’est porté caution du remboursement par la société ONK TAVERN dont il était co-gérant, du prêt souscrit auprès de la banque CIC par l’intermédiaire de la SAS CAFES [W].

Suivant ordonnance du tribunal de commerce de Paris en date du 15 mai 2024, le juge des référés, saisi par la SAS CAFES [W], a condamné solidairement monsieur [P] [I] et monsieur [B] [I] au paiement de la somme provisionnelle de 17.988,11€ en principal, avec intérêts légaux à compter du 5 janvier 2024 outre celle de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, monsieur [P] [I] étant en outre condamné aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 58,92 € TTC.

En exécution de cette décision signifiée à monsieur [B] [I] le 19 juillet 2024, la SAS CAFES [W] a fait pratiquer le 11 octobre 2024 entre les mains du Crédit mutuel Arkea (caisse de Crédit mutuel [Localité 10] sud gare) dans les livres duquel le débiteur a ouvert des comptes, une saisie-attribution pour obtenir le règlement de la somme de 21.172,84 € en principal, frais et intérêts.

Dans ce cadre, une somme de 21.984,79 € a été appréhendée.

La mesure d’exécution forcée a été dénoncée à monsieur [B] [I] le 14 octobre 2024.

Par acte de commissaire de justice en date du 12 novembre 2024, monsieur [B] [I] a fait assigner la SAS CAFES [W] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Rennes aux fins d’obtenir principalement l’annulation du procès-verbal de saisie-attribution et la mainlevée de la mesure d’exécution forcée.

L’affaire a été retenue à l’audience du 5 décembre 2024, les conseils des parties s’en rapportant à leurs écritures.

Aux termes de conclusions notifiées par l’intermédiaire du réseau privé virtuel des avocats le 2 décembre 2024, monsieur [B] [I] demande au juge de l’exécution de :

“Vu l’article L111-2 et R211-11 du code des procédures civiles d’exécution
Vu l’article 503 du code de procédure civile

– Condamner la société CAFES [W] à verser au débat l’acte de signification de l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de PARIS du 15 mai 2024 ;
– Ordonner la nullité du procès-verbal de signification de l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de PARIS en date du 19 juillet 2024 (pièce adverse 7) ;
– Ordonner la nullité du procès-verbal de saisie attribution en date du 11 octobre 2024 dénoncée le 14 octobre 2024 ;
– Ordonner la main-levée de la saisie attribution pratiquée par la société CAFES [W] sur les comptes bancaires de Monsieur [I] le 11 octobre 2024 et dénoncée le 14 octobre 2024 ;
– Condamner la société CAFES [W] à justifier de l’absence d’atteinte par la prescription de sa créance ;
– Ordonner la main-levée des sommes saisies sur le compte joint n°[XXXXXXXXXX08] Soit 2.187,2 €
– Débouter la société CAFES [W] de toutes ses demandes relatives au paiement des dépens ;
– Réduire le montant des sommes dues à la société CAFES [W] du montant des dépens exigés, des frais non justifiés, des intérêts au taux de 4.92% ;
– Supprimer la majoration des intérêts ;
– Débouter la société CAFES [W] de toutes ses demandes fins et conclusions,

Subsidiairement,
– Ordonner le sursis à statuer dans l’attente de la décision à intervenir sur le fond suite à un recours à l’encontre de l’ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de PARIS du 15 mai 2024 ;
– Condamner la société CAFES [W] à payer à Monsieur [I] la somme de 3.000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens de la présente procédure.”

Monsieur [B] [I] se prévaut de l’irrégularité de la signification de l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de Paris, en faisant valoir que les diligences accomplies par le commissaire de justice pour vérifier son adresse lors de la signification de cette décision sont insuffisantes. Il soutient que les exigences des articles 654 et 655 du Code de procédure civile n’ont pas été respectées en ce que l’adresse à laquelle a été signifié l’acte n’était plus la sienne depuis plusieurs années et que l’assignation devant le juge des référés du tribunal de commerce ayant déjà été faite selon les modalités de l’article 659 du Code de procédure civile, le commissaire de justice aurait dû interroger le liquidateur de la société pour laquelle il s’était porté caution solidaire et consulter Ficoba pour être renseigné sur sa nouvelle domiciliation, comme ce fut le cas pour la saisie-attribution pratiquée de ce fait avec succès. Il estime par ailleurs que le commissaire de justice aurait dû, du fait de l’obtention de sa nouvelle adresse, procéder à une nouvelle signification de l’ordonnance de référé avant d’agir en exécution forcée. Considérant nul l’acte de signification de la décision sur le fondement de laquelle la saisie-attribution litigieuse a été effectuée, il conclut à la mainlevée de la mesure d’exécution forcée.

Subsidiairement, il sollicite un sursis à statuer, expliquant qu’il entend faire appel de l’ordonnance, le délai d’exercice de cette voie de recours n’ayant pu courir faute de signification valable de la décision, et détaille ensuite plusieurs moyens qu’il estime suffisamment sérieux pour remettre en cause la décision du juge des référés du tribunal de commerce.

Il demande par ailleurs qu’il soit procédé à la mainlevée de la mesure d’exécution forcée sur le compte joint ouvert à son nom et à celui de sa concubine.

A titre infiniment subsidiaire, s’agissant des sommes dues, il conteste être redevable des intérêts tels que calculés par la SAS CAFES [W] sur la base d’un taux de 4,92 % l’an qui n’est pas mentionné dans le dispositif de la décision et indique qu’en cas d’application du taux d’intérêt légal, aucune majoration ne pourra être appliquée à défaut de signification valable de l’ordonnance de référé. Il conteste le montant des frais de procédure qu’il affirme n’être pas justifiés et conteste que ceux-ci puissent être mis à sa charge, n’ayant pas été condamné au paiement des dépens.

Par conclusions en réplique notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 28 novembre 2024, la SAS CAFES [W] demande au juge de l’exécution de :

“Vu les articles L 111-2 du Code des procédures civiles d’exécution et 503 du Code de procédure civile ,

– Débouter M. [I] de toutes ses demandes ;
– Le condamner au paiement d’une somme de 2.000 €, en application de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.”

A propos de la demande de nullité de la saisie – attribution résultant de la nullité de la signification de l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de Paris du 15 mai 2024, la SAS CAFES [W] réplique que le commissaire de justice a bien entrepris toutes les démarches requises et que les éléments tirés du fichier Ficoba permettant d’établir la nouvelle adresse du débiteur n’ont été obtenus que postérieurement à la décision entreprise, soit après l’obtention d’un titre exécutoire. La défenderesse estime qu’il appartenait à monsieur [B] [I] de l’informer d’une adresse autre que celle qui figurait dans l’acte de cautionnement et dont seule elle disposait.
Pour ces mêmes motifs, elle conclut au rejet de la demande de sursis à statuer sollicitée au subsidiaire par le demandeur.

Aux contestations de monsieur [B] [I] sur les sommes qui lui sont réclamées, la SAS CAFES [W] répond que le taux d’intérêt de 4,92% correspond au taux légal en vigueur au 1er janvier 2024, sans majoration et elle donne le détail des frais de procédure. Elle affirme que le débiteur a bien été condamné au paiement des dépens par l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de Paris.

Pour un plus ample exposé des moyens en fait et en droit des parties, il est renvoyé au détail de leurs conclusions respectives conformément à l’article 455 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire mis à disposition au greffe et en premier ressort,

– DÉCLARE recevable la contestation formée à l’encontre de la saisie-attribution pratiquée le 11 octobre 2024 par la SAS CAFES [W] entre les mains du Crédit mutuel ARKEA sur les comptes ouverts par monsieur [B] [I] ;

– VALIDE la saisie-attribution pratiquée par la SAS CAFES [W] le 11 octobre 2024 entre les mains du Crédit mutuel ARKEA sur les comptes ouverts par monsieur [B] [I], sauf à cantonner la somme totale à recouvrer à la somme de 20.726,27 € ;

– REJETTE la demande de sursis à statuer ;

– REJETTE la demande tendant à voir ordonner la mainlevée de la saisie-attribution sur le compte n°[XXXXXXXXXX01] ;

– CONDAMNE monsieur [B] [I] à payer à la SAS CAFES [W] une somme de mille deux cents euros (1.200 €) au titre de l’article 70 du Code de procédure civile ;

– DÉBOUTE monsieur [B] [I] de sa demande au titre des frais non répétibles ;

– REJETTE toute autre demande ;

– CONDAMNE monsieur [B] [I] au paiement des dépens de la présente instance ;

– RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit en application de l’article R. 121-21 du Code des procédures civiles d’exécution.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an que dessus,

Le Greffier, Le Juge de l’Exécution,

 


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