Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Rennes
Thématique : Hypothèque judiciaire : Validité et conditions de mise en œuvre
→ RésuméContexte de l’affaireLe 8 octobre 2024, la SARL ARSN a notifié à madame [S] [W] épouse [J] l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire sur son bien immobilier, en vertu d’une ordonnance du 8 août 2024. Cette hypothèque a été établie pour garantir le paiement d’une créance de 195.689,18 €. Demande de contestationLe 8 novembre 2024, madame [S] [W] épouse [J] a saisi le juge de l’exécution pour contester la validité de l’acte de dénonciation de l’hypothèque. Elle a demandé la mainlevée de l’inscription, arguant que l’acte n’était pas conforme aux exigences légales et que la créance de la SARL ARSN n’était pas fondée. Arguments de la demanderesseMadame [S] [W] épouse [J] a soutenu que l’acte de dénonciation ne mentionnait pas clairement la possibilité de demander la mainlevée de l’hypothèque, comme l’exige la loi. Elle a également contesté l’apparence de la créance, affirmant que la SARL ARSN n’avait pas prouvé que les virements litigieux avaient été effectués sur ses comptes. Réponse de la SARL ARSNEn réponse, la SARL ARSN a demandé le rejet des demandes de madame [S] [W] épouse [J], affirmant que l’acte de dénonciation était conforme et que la créance était fondée. Elle a également rappelé le licenciement pour faute grave de madame [S] [W] épouse [J] en raison de détournements de fonds. Éléments de preuveLa SARL ARSN a produit des preuves, y compris un dépôt de plainte pour abus de confiance et des documents comptables, démontrant des détournements de fonds à son préjudice. Ces éléments ont été jugés suffisants pour établir l’apparence de la créance. Décision du jugeLe juge a rejeté la demande de nullité de l’acte de dénonciation, considérant que les informations requises y figuraient. Il a également jugé que la SARL ARSN avait démontré l’apparence d’une créance fondée et la menace sur le recouvrement, justifiant ainsi la mesure conservatoire. Conclusion sur les demandes de dommages et intérêtsLa demande de dommages et intérêts de madame [S] [W] épouse [J] a été rejetée, car aucun préjudice n’a été établi. Elle a également été condamnée à payer des frais à la SARL ARSN, ainsi qu’à supporter les dépens de la procédure. |
Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
[Adresse 4] – tél : [XXXXXXXX01]
JUGE DE L’EXÉCUTION
Audience du 16 Janvier 2025
Affaire N° RG 24/08045 – N° Portalis DBYC-W-B7I-LITL
RENDU LE : SEIZE JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ
Par Mélanie FRENEL, Juge chargé de l’exécution, statuant à Juge Unique.
Assistée de Annie PRETESEILLE, Greffier, lors des débats et lors du prononcé, qui a signé la présente décision.
ENTRE :
– Madame [S] [W] épouse [J], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Esmé BONI, avocat au barreau de RENNES
Partie(s) demanderesse(s)
ET :
– La société ARSN, Société à Responsabilité Limitée dont le siège social est [Adresse 9], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Rennes (35000) sous le numéro 492 957 055, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Ayant pour avocat constitué la SELARL d’Avocats Interbarreaux ([Localité 14]-[Localité 15]-[Localité 16]-[Localité 10]-[Localité 8]-[Localité 11]) [E] [Z] [N] (Maître Sebastien HAREL), substitué à l’audience par Me Brégé
Partie(s) défenderesse(s)
DEBATS :
L’affaire a été plaidée le 05 Décembre 2024, et mise en délibéré pour être rendue le 16 Janvier 2025 .
JUGEMENT :
En audience publique, par jugement Contradictoire
En PREMIER RESSORT, par mise à disposition au Greffe
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 8 octobre 2024, en exécution d’une ordonnance rendue par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Rennes en date du 8 août 2024, la SARL ARSN a dénoncé à madame [S] [W] épouse [J] l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire déposée le 3 octobre 2024 auprès du service de la publicité foncière de Rennes 1er bureau, portant sur l’immeuble lui appartenant situé à [Localité 13] [Adresse 2], cadastré A [Cadastre 3], A [Cadastre 5], A [Cadastre 6] et A [Cadastre 7] pour sûreté, conservation et paiement de la somme de 195.689,18€.
Par assignation en date du 8 novembre 2024, madame [S] [W] épouse [J] a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Rennes au visa des articles L. 512-1 et L. 512-2 du Code des procédures civiles d’exécution, ainsi que des articles R. 512-1 et suivants du même Code, aux fins de:
“A titre principal,
– Constater que l’acte de dénonciation n’est pas conforme aux prescriptions légale ;
– Dire et juger que la créance de la SARL ARSN n’est pas fondée en son principe ;
En conséquence,
– Ordonner la mainlevée immédiate de l’inscription d’hypothèque judiciaire pratiquée à titre conservatoire par la SARL ARSN sur le fondement de l’ordonnance du 8 août 2024;
– Condamner la SARL ARSN au paiement de la somme de 1.000 € en réparation du préjudice causé par la mesure conservatoire pratiquée à l’encontre du demandeur.
A titre subsidiaire :
– Ordonner le cantonnement de la mesure provisoire à la somme de 50.250€.
– Dire et juger qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de madame [S] [W] épouse [J] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts ;
En conséquence,
– Condamner la SARL ARSN au paiement de la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
– Condamner la SARL ARSN aux entiers dépens.”
L’affaire a été plaidée à l’audience du 5 décembre 2024.
A cette audience, madame [S] [W] épouse [J] représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son exploit introductif d’instance.
Madame [S] [W] épouse [J] se prévaut de la nullité de la dénonciation de l’inscription provisoire d’hypothèque au motif que l’acte n’indique pas de façon très apparente la possibilité pour le débiteur de solliciter la mainlevée de la mesure conservatoire comme l’exige l’article R. 532-5 du Code des procédures civiles d’exécution.
Elle fait ensuite valoir que les conditions prévues par l’article L. 511-1 du Code des procédures civiles d’exécution ne sont pas remplies faute d’apparence du principe de créance invoquée par la SARL ARSN, laquelle ne rapporte pas la preuve que les virements litigieux ont été effectués sur ses comptes.
A titre subsidiaire, madame [S] [W] épouse [J] réclame le cantonnement des effets de la mesure de sûreté à la somme de 50.250 € au motif que la SARL ARSN, qui a fait procéder à l’annulation de virements opérés sur le compte ouvert auprès de la banque HSBC pour obtenir la restitution d’une somme de 50.550 €, n’a pas fait cette même démarche auprès de la BNP PARIBAS, ce dont il doit être déduit que la société ne remet pas en cause le bien fondé des virements opérés à partir du compte BNP PARIBAS.
Elle soutient par ailleurs avoir subi un préjudice du fait de la mesure conservatoire irrégulière dont elle sollicite la réparation.
Par écritures en réplique notifiées par l’intermédiaire du réseau privé virtuel des avocats le 4 décembre 2024, la SARL ARSN représentée par son conseil demande au juge de l’exécution de :
“Vu les articles L. 512-1, L. 512-2 et R. 512-1 du Code des procédures civiles d’exécution,
Vu l’article 114 du Code de procédure civile,
– Débouter Madame [S] [J] de toutes ses demandes, fins et conclusions;
– Condamner Madame [S] [J] à payer à la société ARSN la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– La condamner en outre aux entiers dépens.”
La SARL ARSN rappelle avoir été contrainte de procéder au licenciement pour faute grave de madame [S] [W] épouse [J] qui occupait un poste de responsable comptable au sein de la société, à la suite de la découverte de détournements de fonds opérés entre le 29 mai 2018 et le 22 avril 2024 à son seul profit personnel et au préjudice de la société pour un montant chiffré à 195.689,18 €, agissements ayant donné lieu à un dépôt de plainte.
Sur la nullité de l’acte de dénonciation, la SARL ARSN affirme que l’acte comporte bien les informations permettant au débiteur de contester la mesure conservatoire. Subsidiairement, la société défenderesse observe que s’agissant d’un vice de forme, il appartient à la débitrice de prouver le grief que lui aurait causé l’irrégularité, ce qu’elle ne fait pas.
Sur le fond, elle considère que par les pièces qu’elle verse aux débats, l’apparence du principe de sa créance à l’encontre de la demanderesse est suffisamment établi.
Elle conclut au rejet de la demande de cantonnement, rétorquant à la partie adverse avoir bien effectué une demande de rappels de fonds tant auprès de la banque HSBC que de la BNP PARIBAS, lesquelles sont demeurées vaine dans la mesure où les fonds étaient déjà dissipés. Observant qu’une telle démarche n’a rien d’obligatoire, elle conteste que son défaut de réalisation puisse être interprété comme valant reconnaissance du bien fondé des transferts de fonds opérés à son préjudice.
Considérant que madame [S] [W] épouse [J] ne caractérise aucun préjudice découlant de l’inscription provisoire d’une hypothèque judiciaire, la SARL ARSN sollicite le rejet de sa demande indemnitaire.
Le juge a autorisé la SARL ARSN à produire en cours de délibéré le justificatif de l’échec de la demande de retour de fonds auprès de la BNP PARIBAS ainsi qu’un relevé d’état hypothécaire, la demanderesse ne s’y opposant pas.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l’exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire mis à disposition au greffe et en premier ressort,
– REJETTE la demande d’annulation de l’acte de dénonciation de l’inscription provisoire d’hypothèque en date du 8 octobre 2024 ;
– REJETTE la demande de mainlevée de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire par la SARL ARSN sur l’immeuble situé à [Localité 13] [Adresse 2], cadastré A [Cadastre 3], A [Cadastre 5], A [Cadastre 6] et A [Cadastre 7], appartenant à madame [S] [W] épouse [J], pour sûreté et conservation d’une créance évaluée provisoirement à la somme de 195.689,18 € en principal;
– REJETTE la demande de dommages et intérêts formée par madame [S] [W] épouse [J] ;
– CONDAMNE madame [S] [W] épouse [J] à payer à la SARL ARSN la somme de mille cinq cents euros (1.500 €) au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– CONDAMNE madame [S] [W] épouse [J] au paiement des dépens de la présente instance ;
– RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit en application de l’article R. 121-21 du Code des procédures civiles d’exécution.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an que dessus,
Le Greffier, Le Juge de l’Exécution,
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