Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Poitiers
Thématique : Conditions de garantie et preuve de l’origine des fonds en matière d’assurance
→ RésuméM. [F] [T] a souscrit une assurance pour sa caravane FENDT le 5 mai 2022. En mai, il a déclaré un sinistre dû à la grêle, mais l’expert a jugé le véhicule économiquement irréparable. Bien qu’il ait accepté l’indemnisation de 23.000 euros, la SA PACIFICA a refusé de verser cette somme, arguant l’absence de justification de l’achat. M. [F] [T] a alors assigné la SA PACIFICA en justice, demandant des réparations pour préjudice moral et matériel. Le tribunal a finalement rejeté sa demande, considérant que l’assureur avait le droit de refuser l’indemnité en raison de documents manquants.
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MINUTE N° :
DOSSIER : N° RG 23/02039 – N° Portalis DB3J-W-B7H-GBFX
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE POITIERS
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
JUGEMENT DU 26 NOVEMBRE 2024
DEMANDEUR :
Monsieur [F] [T]
demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Guy DIBANGUE, avocat au barreau de POITIERS (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/005963 du 06/10/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de POITIERS)
DÉFENDERESSE :
S.A. PACIFICA
dont le siège social est sis [Adresse 2]
Représentée par Me Thomas DROUINEAU, avocat au barreau de POITIERS
LE :
Copie simple à :
– Me DIBANGUE
– Me DROUINEAU
Copie exécutoire à :
– Me DROUINEAU
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENT : Sébastien VANDROMME-DEWEINE, Juge
Statuant par application des articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile, avis préalablement donné aux avocats.
GREFFIER LORS DE L’AUDIENCE : Thibaut PAQUELIN
GREFFIER LORS DE LA MISE A DISPOSITION : Marie PALEZIS
Débats tenus publiquement à l’audience à juge unique du 01 octobre 2024.
EXPOSE DU LITIGE
M. [F] [T] a souscrit le 05 mai 2022 une assurance pour une caravane FENDT immatriculée [Immatriculation 3].
M. [F] [T] a déclaré un sinistre dû à la grêle en mai 2022, et l’expert d’assurance a déclaré le véhicule économiquement irréparable.
M. [F] [T] a accepté la proposition de l’assureur de céder le véhicule techniquement irréparable contre 23.000 euros avant déduction de la franchise pour 91 euros, mais la SA PACIFICA a refusé de payer l’indemnité en invoquant la circonstance que M. [F] [T] ne peut justifier de l’achat de la caravane.
Par acte d’huissier de justice du 21 juillet 2023, M. [F] [T] a fait assigner la SA PACIFICA devant le tribunal judiciaire de Poitiers (1ère chambre civile) en demandant de :
Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 22.909 en réparation de son préjudice matériel ;Déclarer que les sommes seront assorties des intérêts légaux à compter de l’assignation et jusqu’à parfait paiement en application de l’article 1154 du code civil ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec distraction ;Condamner la SA PACIFICA aux dépens.
En demande, M. [F] [T], suivant dernières conclusions notifiées par RPVA le 26 mars 2024, demande au tribunal de notamment :
Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 22.909 en réparation de son préjudice matériel ;Déclarer que les sommes seront assorties des intérêts légaux à compter de l’assignation et jusqu’à parfait paiement en application de l’article 1154 du code civil ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et faisant application de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle dont distraction ;Condamner la SA PACIFICA aux dépens.
Au soutien de sa position, M. [F] [T] expose que c’est à tort que la SA PACIFICA oppose, non au jour de la conclusion du contrat mais seulement au jour du paiement de l’indemnité, une condition nouvelle tenant à la justification par l’assuré de l’origine des fonds ayant permis d’acquérir le véhicule, de sorte que son refus de garantie fondé artificiellement sur l’objectif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme est invoqué de mauvaise foi et en violation de l’impératif de loyauté contractuelle.
En défense, la SA PACIFICA, suivant dernières conclusions notifiées par RPVA le 19 septembre 2023, demande au tribunal de notamment :
Débouter M. [F] [T] de toutes ses conclusions ;Condamner M. [F] [T] à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;Condamner M. [F] [T] aux dépens avec distraction.
Au soutien de sa position, la SA PACIFICA expose qu’elle a refusé sa garantie faute pour M. [F] [T] d’avoir produit deux documents suffisamment probants. Premièrement, sur l’origine des fonds ayant permis l’acquisition, la SA PACIFICA objecte que M. [F] [T] produit un certificat de cession auprès d’une personne mais ne peut justifier que d’un virement auprès d’une autre personne, et pour la somme de 15.000 euros seulement alors qu’il prétend avoir acquis la caravane pour 22.500 euros. Deuxièmement, la SA PACIFICA souligne qu’il n’a pas produit de justificatif de domicile à son nom qui soit conforme aux règles applicables, et qui permette notamment d’exclure que la caravane ait été utilisée à titre d’habitation permanente, ce qui ne permettrait pas l’indemnisation en exécution du contrat en cause. En conséquence, la SA PACIFICA estime que M. [F] [T] échoue à rapporter la preuve de la réunion des conditions contractuelles justifiant le paiement de l’indemnité d’assurance.
La clôture a été prononcée par ordonnance au 23 mai 2024 et l’affaire a été fixée à l’audience du 1er octobre 2024.
Avis a été donné que la décision était mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 26 novembre 2024.
MOTIFS DU JUGEMENT
1. Sur la demande principale de M. [F] [T] en exécution du contrat d’assurance souscrit auprès de la SA PACIFICA et paiement d’une indemnité en réparation de son préjudice matériel.
L’article 9 du code de procédure civile dispose que : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »
Il résulte de l’article L113-1 du code des assurances que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l’assuré sont à la charge de l’assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.
En l’espèce, il résulte des éléments mis dans les débats que la SA PACIFICA justifie être en droit de refuser le paiement de toute indemnité à M. [F] [T] en exécution du contrat d’assurance les liant au titre de la caravane de ce dernier, en ce que d’une part M. [F] [T] n’a pu justifier intégralement auprès de son assureur de l’origine des fonds ayant permis l’acquisition de cette caravane ce qui est susceptible de placer la SA PACIFICA dans l’illégalité au regard de son obligation légale de vigilances quant aux flux financiers, d’autre part M. [F] [T] n’a pu produire aucun élément suffisamment probant pour justifier que son domicile ne serait pas établi dans la caravane, ce qui vaut exclusion de garantie en exécution du contrat liant les parties (pièce défenderesse n°1, page 19).
En conséquence, la demande de M. [F] [T], en paiement d’une indemnité en exécution du contrat d’assurance pour réparer son préjudice matériel dû aux dommages à la caravane, est rejetée.
2. Sur la demande accessoire de M. [F] [T] en dommages et intérêts pour 3.000 euros.
L’article 1240 du code civil dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
En l’espèce, en considération du rejet de la demande principale de M. [F] [T] au titre du préjudice matériel, la SA PACIFICA était bien fondée à refuser d’exécuter le contrat les liant.
Par conséquent, la demande accessoire de M. [F] [T] en dommages et intérêts, manifestement liée à l’ancienneté du litige et à l’impossibilité de le régler par voie amiable, est à rejeter.
3. Sur les autres demandes et les dépens.
3.1. Sur les dépens.
M. [F] [T] supporte les dépens.
Le recouvrement direct est accordé au conseil de la SA PACIFICA dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
3.2. Sur l’article 700 du code de procédure civile.
M. [F] [T], tenu aux dépens, doit payer à la SA PACIFICA la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La propre demande de M. [F] [T] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 est nécessairement rejetée.
3.3. Sur l’exécution provisoire.
Rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de l’article 514-1 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, rendu après débats en audience publique par mise à disposition au greffe,
REJETTE toutes les demandes de M. [F] [T] contre la SA PACIFICA ;
CONDAMNE M. [F] [T] à payer à la SA PACIFICA la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE la demande de M. [F] [T] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
CONDAMNE M. [F] [T] aux dépens, avec recouvrement direct au profit du conseil de la SA PACIFICA dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande ;
MAINTIENT l’exécution provisoire en totalité.
Le Greffier Le Président
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