Tribunal judiciaire de Paris, 7 janvier 2025, RG n° 24/57665
Tribunal judiciaire de Paris, 7 janvier 2025, RG n° 24/57665

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Conflit sur la légitimité de l’occupation temporaire d’un bien immobilier et ses conséquences financières.

Résumé

Contexte de l’affaire

L’Assistance Publique des Hôpitaux de [Localité 7] (APHP) a signé, le 16 décembre 2022, une promesse unilatérale de bail à construction avec la SCCV [Adresse 9] pour la réhabilitation de son siège historique. En attendant le début des travaux, la SCCV a lancé un projet nommé “les Arches Citoyennes”, visant à transformer des locaux en “tiers lieux” pour des acteurs de l’économie sociale et solidaire, en collaboration avec la société Plateau Urbain.

Convention d’occupation précaire

En décembre 2022, la SCCV [Adresse 9] et la société Plateau Urbain ont établi une convention d’occupation précaire, prenant effet le 5 janvier 2023 et prolongée jusqu’au 31 décembre 2025. Dans ce cadre, Plateau Urbain a signé, le 5 octobre 2023, une convention de sous-occupation avec la SARL La Cantina pour une partie des locaux, destinée à la restauration, pour une durée d’un an.

Litige et demande d’expulsion

Après l’expiration de la convention de sous-occupation le 30 août 2024, Plateau Urbain a constaté que La Cantina occupait toujours les lieux. Par conséquent, le 8 novembre 2024, Plateau Urbain a assigné La Cantina en référé, demandant son expulsion et le paiement d’une indemnité pour occupation illégale.

Arguments de La Cantina

La Cantina a contesté la demande d’expulsion, arguant que Plateau Urbain n’avait pas qualité à agir en raison de l’absence de production du bail à construction et de la fin de la possibilité de sous-occupation. Elle a également soulevé des questions sur la légitimité de la convention de sous-occupation et a demandé des dommages-intérêts pour rupture des relations commerciales.

Décision du tribunal

Le tribunal a jugé que Plateau Urbain avait qualité pour agir, ayant un droit d’occupation précaire. Il a constaté que La Cantina occupait les locaux sans droit ni titre, ce qui constituait un trouble manifestement illicite. En conséquence, le tribunal a ordonné l’expulsion de La Cantina et a condamné cette dernière à payer une indemnité provisionnelle pour occupation illégale.

Conséquences financières

La Cantina a été condamnée à verser à Plateau Urbain une indemnité provisionnelle d’occupation à compter du 31 août 2024, ainsi qu’une somme pour les frais irrépétibles. La demande de La Cantina au titre de l’article 700 du Code de procédure civile a été rejetée.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/57665 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5XGD

N° : 10

Assignation du :
08 Novembre 2024

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 07 janvier 2025

par Fanny LAINÉ, Première vice-présidente adjointe au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Pascale GARAVEL, Greffier.
DEMANDERESSE

La Société PLATEAU URBAIN
Société coopérative d’intérêt collectif anonyme
[Adresse 3]
[Localité 6]

représentée par Me Guillaume RICHARD, avocat au barreau de PARIS – #D1594

DEFENDERESSE

La société LA CANTINA S.A.R.L.
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Maître Gaston GONZALEZ de l’AARPI GONZALEZ AVOCATS, avocats au barreau de PARIS – #E0543

DÉBATS

A l’audience du 25 Novembre 2024, tenue publiquement, présidée par Fanny LAINÉ, Première vice-présidente adjointe, assistée de Pascale GARAVEL, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Par acte notarié du 16 décembre 2022, l’Assistance Publique des Hôpitaux de [Localité 7] (l’APHP) a signé avec la SCCV [Adresse 9] une promesse unilatérale de bail à construction pour la réhabilitation de son siège historique situé [Adresse 1] à [Localité 7].

Dans l’attente du démarrage des travaux, la SCCV [Adresse 9] a mis en oeuvre un projet intitulé “les Arches Citoyennes” portant sur la transformation transitoire de locaux en “tiers lieux” accueillant temporairement des acteurs de l’économie sociale et solidaire, en faisant appel à la société Plateau Urbain.

La SCCV [Adresse 9] et la société Plateau Urbain ont ainsi conclu une convention d’occupation précaire en décembre 2022, prenant effet au 5 janvier 2023, et prolongée jusqu’au 31 décembre 2025 par avenant du 3 janvier 2023.

Dans ce cadre, la société Plateau Urbain a signé le 5 octobre 2023 avec la SARL La Cantina une convention de sous-occupation précaire portant sur une partie des locaux, à destination de restauration, pour une durée de douze mois, jusqu’au 30 août 2024.

Dénonçant le maintien de la société La Cantina dans les lieux malgré l’expiration du terme de la convention de sous-occupation, la société Plateau Urbain a, par acte en date du 8 novembre 2024, fait assigner en référé la SARL La Cantina, sollicitant de :

“Constater que la société LA CANTINA est occupante sans droit ni titre des locaux situés [Adresse 1], depuis le 30 août 2024 ;

Ordonner l’expulsion des lieux occupés par la société LA CANTINA ainsi que celle de tous occupants de son chef, si besoin avec l’assistance de la force publique, ainsi que la séquestration, à ses frais, risques et périls, des marchandises et objets garnissant les lieux ;

Condamner provisionnellement la société LA CANTINA à payer à la société PLATEAU URBAIN la somme de 46.000 euros au titre de son occupation au 16 octobre 2024 ;

Condamner la société LA CANTINA à payer à la société PLATEAU URBAIN la somme de 10.000 euros en application des dispositions de1’artic1e 700 du Code de procédure civile;

Condamner la société LA CANTINA aux entiers dépens de l’instance.”

Au soutien de ses prétentions, la société Plateau Urbain invoque l’existence d’un trouble manifestement illicite et une obligation non sérieusement contestable pour la défenderesse de libérer les locaux mis à sa disposition de manière temporaire, indiquant qu’elle a initié une procédure d’appel à candidatures en vue d’une nouvelle attribution du point de restauration.

Dans ses écritures déposées et développées oralement à l’audience, la société La Cantina demande de :

“• DEBOUTER la société PLATEAU URBAIN de l’intégralité de ses fins, moyens et prétentions,

En conséquence,

• DÉCLARER n’y avoir lieu à référé ;

• RENVOYER la société PLATEAU URBAIN à mieux se pourvoir;

• CONDAMNER la société PLATEAU URBAIN à verser la somme de 10.000 euros à la société LA CANTINA au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;”

Au soutien de ses prétentions, la société La Cantina invoque des contestations sérieuses, portant sur la qualité à agir de la société Plateau Urbain, en l’absence de production du bail à construction lui donnant faculté de consentir des sous-occupations précaires, et son défaut de capacité à représenter l’APHP. Elle fait encore valoir que la possibilité pour la SCCV [Adresse 9] de mettre à disposition d’un tiers une partie des biens immobiliers a pris fin avec la conclusion du bail à construction selon les statuts, et que la société Plateau Urbain n’a pas qualité à agir en justice pour le compte de l’APHP ou pour intenter une quelconque action en justice.

Elle conteste toute compétence à la demanderesse de consentir une activité de restauration ou buvette et souligne que celle-ci n’a pas obtenu l’accord de la SCCV [Adresse 9] pour solliciter la libération des lieux, contrairement aux stipulations de la convention.

La société La Cantina fait encore valoir que la convention de sous-occupation ne respecte pas les termes de l’appel d’offre initial du mois de mars 2023, prévoyant un terme au mois de décembre 2025, et qu’elle serait en droit de solliciter des dommages-intérêts du fait de la rupture des relations commerciales établies ; qu’il n’existe pas en l’espèce de motif légitime de précarité justifiant la conclusion d’une convention de sous-occupation précaire ; qu’une requalification de la convention litigieuse en bail de courte durée ou en bail commercial est envisageable ; que depuis l’arrivée du terme de la convention, elle subit des pressions, des coupures d’eau et d’électricité.

Elle conteste en conséquence l’existence d’un trouble manifestement illicite pouvant justifier la mesure d’expulsion sollicitée à son encontre.

Conformément aux articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées par les parties.

La décision a été mise en délibéré au 7 janvier 2025, date de la présente ordonnance.

Le société demanderesse a produit en cours de délibéré la promesse de bail signée le 16 décembre 2022 l’Assistance Publique des Hôpitaux de [Localité 7] (l’APHP) et la SCCV [Adresse 9], de façon contradictoire le 27 novembre 2024.

La société La Cantina a sollicité que cette pièce soit écartée des débats par note du 06 janvier 2025.

PAR CES MOTIFS

Statuant après débats en audience publique, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire, en premier ressort,

Ecartons des débats les notes reçues en cours de délibéré,

Déclarons la société Plateau Urbain recevable en son action,

Ordonnons l’expulsion de la société La Cantina et de tous occupants de son chef des locaux, objets de la convention de sous-occupation précaire signée le 5 octobre 2023, situés au sein de l’ensemble immobilier [Adresse 1] à [Localité 8], avec l’assistance de la force publique si nécessaire, à défaut de libération des lieux dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision,

Rappelons que le sort les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place est régi par les dispositions des articles L.433-1 et R.433-1 du code des procédures civiles d’exécution,

Condamnons la société La Cantina à payer à la société Plateau Urbain une indemnité provisionnelle d’occupation, à compter du 31 août 2024 et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, d’une somme égale au montant de la redevance courante, charges en sus, à laquelle la société Plateau Urbain pouvait prétendre en cas de poursuite de la convention d’occupation précaire,

Condamnons la société La Cantina à payer à la société Plateau Urbain la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Disons n’y avoir lieu à référé sur toute autre demande,

Rappelons que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit.

Fait à Paris le 07 janvier 2025

Le Greffier, Le Président,

Pascale GARAVEL Fanny LAINÉ

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon