Tribunal judiciaire de Paris, 5 novembre 2015
Tribunal judiciaire de Paris, 5 novembre 2015

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Film publicitaire dénigrant

Résumé

Dans l’affaire LABEYRIE c/ DELPEYRAT, un film publicitaire a été jugé dénigrant envers LABEYRIE. La publicité mettait en scène un baigneur couvert d’algues, symbolisant la qualité inférieure du saumon fumé de LABEYRIE, tandis que DELPEYRAT vantait ses propres produits. La voix off insinuait que la chair brune, moins appréciée, était dissimulée dans le saumon de LABEYRIE, dévalorisant ainsi la marque concurrente. Ce dénigrement, en imputant à LABEYRIE une tromperie sur la qualité, a été considéré comme un acte fautif, visant à discréditer un concurrent identifiable sur le marché du saumon fumé.

Affaire LABEYRIE c/ DELPEYRAT

Dans l’affaire soumise, un film publicitaire a été jugé dénigrant à l’égard d’un concurrent. Le film en cause mettait en scène une plage de carte postale sur laquelle une main ôte une pellicule invisible à la manière de celle qui recouvre un emballage et permet de découvrir un écriteau « baignade non surveillée ». Un baigneur couvert d’algues semble alors sortir de l’eau et retire son masque de plongée. Le film se poursuit avec l’ouverture d’un emballage de saumon fumé contenant de la chaire brune. Une voix off commente cette première partie en ces termes : « Dans la vie il y a ce qui se voit et ce qui ne se voit pas. C’est pareil avec le saumon fumé. Dans le produit le plus connu, la chair brune est bien cachée. ». La fin de la publicité est concentrée sur l’ouverture d’un emballage de saumon fumé sans chair brune porteur de la marque DELPEYRAT dont les mérites sont vantés.

S’il est certain qu’un téléspectateur normalement attentif ne peut percevoir le dessin de saumon visible sur le constat grâce à un arrêt sur image opportun mais pas sur les plans larges de l’emballage, il est également établi par cette pause que l’emballage utilisé est un de ceux commercialisés par un concurrent (la société LABEYRIE). Par ailleurs, la société DELPEYRAT ne pouvait prétendre vouloir faire référence au saumon fumé à chair brune en évoquant « le produit le plus connu » alors qu’elle reconnaît avoir remplacé dans le même film pixélisé ce membre de phrase par « certaines marques de saumon ».

Concurrent clairement visé et identifiable

D’ailleurs, le principe de la publicité n’est pas de positionner la société DELPEYRAT à l’égard d’un produit hors marché mais nécessairement de la distinguer de ses concurrents directs en valorisant ses produits par rapport à ceux qu’ils commercialisent : la connaissance évoquée, qui n’aurait aucun sens si elle s’appliquait à du saumon en général, est celle du saumon d’un concurrent déterminé et identifiable comme le leader du marché. Or, il ressort des études de notoriété que la marque « LABEYRIE » jouit d’un taux constant de notoriété spontanée pour les saumons fumés de 50% porté à 81% en notoriété assistée tous consommateurs confondus et à 89% pour les acheteurs de saumon fumé.

La société DELPEYRAT tendait donc à imputer à la société LABEYRIE une dissimulation de la chair brune des saumons dont il est constant qu’elle est une partie moins appréciée du consommateur, la société en faisant ainsi un argument de vente et un des critères justifiant l’usage du terme « supérieur » pour qualifier ses produits. Sont ainsi dépréciés le comportement du concurrent qui tente de tromper le consommateur, qui achète un produit d’une gamme inférieure à celle promise comme il se retrouve couvert d’algues alors qu’il espérait se baigner dans une mer idyllique dans le film, et la qualité de ses produits. Ce comportement, qui jette le discrédit sur les saumons fumés commercialisés par cette dernière, constitue un acte de dénigrement fautif.

 


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