Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris
Thématique : Conflit locatif et obligations contractuelles : enjeux de la clause résolutoire et de la régularisation des charges.
→ RésuméPropriétaires des locauxLa S.C.I. NOAH possède le lot n°2, qui comprend une boutique, une arrière-boutique et un sous-sol dans un immeuble situé à [Adresse 2] [Localité 6]. Monsieur [U] est le propriétaire des lots n°3, 4, 5 et 8, qui incluent une boutique sur rue, une réserve, un débarras et un local sur rue dans un immeuble à [Adresse 5] [Localité 6]. Les locaux de la S.C.I. NOAH et ceux de Monsieur [U] sont attenants et font l’objet de deux baux distincts. Renouvellement des bauxLe 5 novembre 2013, la S.C.I. NOAH a renouvelé le bail commercial de Monsieur [U] pour une durée de neuf ans à partir du 1er juillet 2017. Le 9 septembre 2021, Monsieur [U] a cédé son fonds de commerce à la société PHARMACIE DUROC, incluant le droit au bail sur les locaux. Le 22 juin 2022, la S.C.I. NOAH a renouvelé le bail commercial pour la PHARMACIE DUROC pour neuf ans à compter du 1er octobre 2021, avec un loyer annuel de 39.500 euros. Impayés et actions judiciairesDes loyers impayés ont conduit la S.C.I. NOAH à délivrer un commandement de payer le 23 janvier 2024, réclamant 23.785,02 euros. Le 9 février 2024, une saisie-conservatoire de ce montant a été effectuée sur le compte de la PHARMACIE DUROC. La S.C.I. NOAH a ensuite cité la PHARMACIE DUROC devant le tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire et demander l’expulsion. Développements judiciairesL’affaire a été renvoyée à plusieurs reprises, notamment le 17 mai 2024, où les parties ont été invitées à rencontrer un médiateur, mais ont refusé. Elle a été plaidée le 30 août 2024, et les débats ont été réouverts le 31 octobre 2024 pour respecter le principe du contradictoire. Lors de l’audience du 22 novembre 2024, la S.C.I. NOAH a demandé la constatation de l’apurement de la dette locative par la PHARMACIE DUROC. Arguments de la PHARMACIE DUROCLa PHARMACIE DUROC a contesté la validité de l’assignation, arguant de mentions erronées, et a demandé la suspension du paiement des loyers jusqu’à la réalisation de travaux nécessaires dans les locaux. Elle a également sollicité la mainlevée de la saisie conservatoire, affirmant que la S.C.I. NOAH avait agi de manière abusive. Décision du tribunalLe tribunal a donné acte à la S.C.I. NOAH de son désistement concernant la clause résolutoire et les demandes d’expulsion. Il a déclaré irrecevable l’exception de nullité de la PHARMACIE DUROC et a jugé qu’il n’y avait pas lieu à référé sur ses demandes reconventionnelles, y compris la suspension des loyers et la mainlevée de la saisie. La demande d’amende civile pour procédure abusive a également été rejetée. CondamnationsLa PHARMACIE DUROC a été condamnée aux dépens et à verser 1.500 euros à la S.C.I. NOAH au titre de l’article 700 du code de procédure civile. |
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 24/52406 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4JJ7
N° : 9
Assignation du :
07 Mars 2024
[1]
[1] 2 copies exécutoires
délivrées le :
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 31 décembre 2024
par Cristina APETROAIE, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Estelle FRANTZ, Greffier.
DEMANDERESSE
La société S.C.I. NOAH, Société Civile Immobilière
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître David FERTOUT, avocat au barreau de PARIS – #E1770
DEFENDERESSE
S.E.L.A.R.L. PHARMACIE DUROC
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Maître Mathilde BERNARDIN-HOCQUARD, avocat au barreau de PARIS – #E1947
DÉBATS
A l’audience du 22 Novembre 2024, tenue publiquement, présidée par Cristina APETROAIE, Juge, assistée de Estelle FRANTZ, Greffier,
Nous, Président,
Après avoir entendu les conseils des parties,
EXPOSE DU LITIGE
La S.C.I. NOAH est propriétaire du lot n°2, constitué d’une boutique, une arrière-boutique et un sous-sol au sein d’un immeuble sis [Adresse 2] [Localité 6].
Monsieur [U] est quant à lui propriétaire des lots n°3, 4, 5 et 8, constitués d’une boutique sur rue, une réserve, un débarras et un local sur rue au sein d’un immeuble sis [Adresse 5] [Localité 6].
Les locaux appartenant à la S.C.I. NOAH et ceux appartenant à Monsieur [U], qui sont attenants, ont été réunis au rez-de-chaussée et font l’objet de deux baux distincts.
Selon acte sous seing privé du 5 novembre 2013, la S.C.I. NOAH a renouvelé le contrat de bail commercial consenti à Monsieur [U], pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2017.
Aux termes d’un acte sous signature privée du 9 septembre 2021, Monsieur [U] a cédé son fonds de commerce d’officine à la société PHARMACIE DUROC (ci-après « la PHARMACIE DUROC ») à compter du 10 septembre 2021, comprenant le droit au bail sur les locaux sis [Adresse 2] et [Adresse 5] [Localité 4].
Par acte sous signature privée du 22 juin 2022, la S.C.I. NOAH a renouvelé le contrat de bail commercial consenti à la PHARMACIE DUROC pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 2021, moyennant le paiement d’un loyer annuel de 39.500 euros hors charges et hors taxes, payable mensuellement d’avance.
Des loyers étant demeurés impayés, la S.C.I. NOAH a fait délivrer au preneur, par exploit du 23 janvier 2024, un commandement de payer visant la clause résolutoire, portant sur la somme en principal de 23.785,02 euros au titre des loyers et charges échus à cette date.
La S.C.I. NOAH a fait pratiquer le 9 février 2024, une saisie-conservatoire de la somme de 23.785,02 euros sur le compte bancaire de la PHARMACIE DUROC ouvert dans les livres de la société CREDIT LYONNAIS.
Se prévalant de l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail, la S.C.I. NOAH a, par exploit délivré le 7 mars 2024, fait citer la PHARMACIE DUROC devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, aux fins de voir, au visa de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile :
« – CONSTATER l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire stipulée par le contrat de bail liant la Société SCI NOAH, d’une part, et la Société PHARMACIE DUROC, d’autre part, à l’expiration du délai d’un mois suivant la notification du commandement de payer visant la clause résolutoire du 23 janvier 2024, soit le 24 février 2024 ;
En conséquence,
– ORDONNER l’expulsion des lieux loués de la Société PHARMACIE DUROC et de tout occupant de son chef, et ce avec l’assistance de la force publique s’il y a lieu qu’ils occupent à [Localité 6], [Adresse 2] ;
– ORDONNER le transport et la séquestration des meubles conformément aux dispositions légales applicables ;
– AUTORISER la SCI NOAH à faire constater et estimer les réparations locatives par un huissier de justice qui sera commis à cet effet ;
– ORDONNER la conversion de la saisie conservatoire en saisie attribution ;
– CONDAMNER la Société PHARMACIE DUROC, à titre provisionnel, la somme de 20 195,16 € au titre des loyers, taxes et charges, éventuellement à parfaire au jour de la décision à intervenir ; cette somme devant être augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation ;
– CONDAMNER la Société PHARMACIE DUROC à payer à la SCI NOAH une indemnité d’occupation correspondant au double du montant journalier du loyer facturé, et ce jusqu’à la libération effective des lieux et la remise des clés,
– ORDONNER la capitalisation des intérêts ;
– CONDAMNER la Société PHARMACIE DUROC à payer à SCI NOAH la somme de 2600 Euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, qui comprendront notamment le coût de la présente assignation. ».
L’affaire, appelée pour la première fois à l’audience du 17 mai 2024, a fait l’objet d’un renvoi à la demande des parties, celles-ci ayant par ailleurs reçu injonction de rencontrer un médiateur.
Les parties n’ayant pas souhaité entrer en médiation, l’affaire a été plaidée à l’audience du 30 août 2024.
Par mention apposée au dossier le 31 octobre 2024, l’affaire a fait l’objet d’une réouverture des débats afin de respecter le principe du contradictoire et l’oralité des débats, les parties ayant transmis plusieurs notes en délibéré les 9 septembre, 2, 3 et 7 octobre 2024.
A l’audience de renvoi du 22 novembre 2024, par écritures déposées et oralement soutenues, la demanderesse, représentée, sollicite du juge des référés de :
« – CONSTATER que la société PHARMACIE DUROC a apuré sa dette locative au-delà du délai de 30 jours à compter du commandement de payer du 23 janvier 2024,
– DEBOUTER la société PHARMACIE DUROC de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
– ORDONNER la capitalisation des intérêts ;
– CONDAMNER la société PHARMACIE DUROC à payer à la SCI NOAH la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, qui comprendront notamment le coût de la présente assignation. ».
Elle indique cependant se désister de sa demande de capitalisation des intérêts.
En réplique, par écritures déposées et soutenues à l’audience, la défenderesse, par l’intermédiaire de son conseil, demande au juge des référés de :
« Recevoir la pharmacie DUROC, en ses conclusions,
Y faire droit,
Constater que :
– La nullité de l’assignation, du commandement de payer, ainsi que de la saisie conservatoire de la SCI NOAH ne justifiant pas d’un siège social, la comparution mentionnée étant donc erronée.
En conséquence, débouter purement et simplement la SCI NOAH de l’ensemble de ses demandes,
A titre subsidiaire,
Constater que :
– La dette de la Pharmacie DUROC a été totalement apurée depuis le 2 septembre 2024,
– La SCI NOAH ayant manqué à ses obligations de délivrance et d’entretien du local commercial et d’assureur à son locataire la jouissance paisible du local,
– La SCI NOAH a manqué à ses obligations au titre de la régularisation des charges récupérables sur le preneur,
– La Pharmacie DUROC a répondu à la mise en demeure ainsi qu’au commandement de payer qui lui ont été adressés par la SCI NOAH de sorte que ces derniers ont reçus exécution,
En conséquence, débouter purement et simplement la SCI NOAH de sa demande d’acquisition de la clause résolutoire et de sa demande d’expulsion, celle-ci étant non seulement irrecevable mais mal fondée,
A titre reconventionnel,
Ordonner la suspension du paiement des loyers jusqu’à la réalisation des travaux de reprise du mur, des travaux de ventilation et de mise en conformité du faux plafond et à défaut, ordonner la consignation des loyers entre les mains du bâtonnier et ce jusqu’à ce que le Tribunal judiciaire se soit prononcé dans le cadre de la procédure pendante devant la 18 ème chambre ou que la SCI NOAH justifie d’une comparution juste et conforme à la législation applicable,
Ordonner la main levée de la saisie conservatoire pratiquée dont l’ensemble des frais devront rester à la charge de la SCI NOAH et ce sous astreinte de 500€ par jour, et condamner la SCI NOAH a versé à la Pharmacie DUROC la somme de 5.000€ au titre du caractère abusif de la saisie pratiquée,
Condamner la SCI NOAH à demander la convocation d’une assemblée générale extraordinaire afin que soit voter la reprise du mur et ce sous astreinte de 500 € par jour à compter de la présente ordonnance,
Se réserver au besoin, la liquidation de l’astreinte qui aura couru à défaut de respect des condamnations prononcées ;
Condamner la SCI NOAH à verser la somme de 5.000€ sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile,
Condamner la SCI NOAH a versé à la Pharmacie DUROC la somme de 5.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens. ».
La défenderesse précise également maintenir sa demande afférente à la régularisation des charges.
Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.
PAR CES MOTIFS
Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort,
Donnons acte à la société S.C.I. NOAH de ce qu’elle se désiste de sa demande tendant à la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire ainsi que des demandes subséquentes en expulsion et condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation, mais également de sa demande de capitalisation des intérêts ;
Déclarons irrecevable la société PHARMACIE DUROC en son exception de nullité de l’assignation ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur les demandes reconventionnelles de suspension et consignation des loyers formulées par la société PHARMACIE DUROC ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnelle de mainlevée formée par la société PHARMACIE DUROC et sur la demande subséquente de condamnation au paiement d’une somme de 5.000 euros au titre du caractère abusif ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnelle de convocation d’une assemblée générale extraordinaire formulée par la société PHARMACIE DUROC ;
Rejetons la demande formée par la société PHARMACIE DUROC au titre de l’amende civile ;
Condamnons la société PHARMACIE DUROC aux dépens ;
Condamnons la société PHARMACIE DUROC à verser à la société S.C.I. NOAH la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Fait à Paris le 31 décembre 2024
Le Greffier, Le Président,
Estelle FRANTZ Cristina APETROAIE
Décision préparée avec le concours de [W] [C], juriste-assistante.
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