Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Frédéric FOURNIER de la SELARL REDLINK, avocat au barreau de PARIS
– Contrefaçon de marque : Acte de reproduire, d’imiter ou d’utiliser une marque déposée sans l’autorisation du propriétaire, en violation des droits exclusifs attachés à cette marque.
– Marque verbale internationale : Marque constituée exclusivement de mots ou de lettres, protégée dans plusieurs pays grâce à l’enregistrement via le système de Madrid.
– Marque de l’Union européenne : Marque qui offre une protection juridique dans tous les États membres de l’Union européenne grâce à un enregistrement unique effectué auprès de l’EUIPO.
– Code de la propriété intellectuelle : Ensemble des règles juridiques régissant les droits de propriété intellectuelle en France, incluant les droits d’auteur, les marques, les brevets, et les dessins et modèles.
– Contrefaçon de modèle international : Reproduction ou imitation non autorisée d’un modèle ou dessin enregistré internationalement, en violation des droits conférés par cet enregistrement.
– Arrangement de La Haye : Système international permettant l’enregistrement de dessins et modèles industriels dans les pays membres, facilitant la protection de ces créations à l’échelle internationale.
– Dessin ou modèle communautaire : Protection offerte à l’apparence d’un produit ou d’une partie de produit, valable dans toute l’Union européenne, pouvant être enregistrée ou non enregistrée.
– Droit d’auteur : Ensemble des prérogatives exclusives dont dispose un créateur sur ses œuvres de l’esprit (littéraires, artistiques, scientifiques), protégeant contre toute forme de reproduction ou d’exploitation non autorisée.
– Code civil : Texte législatif qui regroupe les lois relatives aux droits et obligations des personnes physiques et morales en France, notamment en matière de contrats et de responsabilité civile.
– Concurrence déloyale : Pratiques commerciales malhonnêtes ou trompeuses qui causent un préjudice à un concurrent ou perturbent le marché.
– Parasitisme économique : Pratique par laquelle une entreprise tire profit sans contrepartie des efforts et investissements d’une autre entreprise.
– Risque de confusion : Probabilité que le public cible puisse confondre deux marques, produits ou services en raison de leur similitude.
– Préjudice moral : Dommage causé à l’intégrité psychique ou à l’honneur d’une personne ou d’une entité.
– Préjudice patrimonial : Dommage causant une perte financière ou affectant le patrimoine d’une personne ou d’une entité.
– Mesures de réparation : Ensemble des dispositifs légaux visant à compenser les dommages subis par une victime, incluant réparations financières et autres formes de restitution.
– Interdiction : Mesure légale empêchant la continuation ou la répétition d’une activité jugée illégale ou nuisible.
– Destruction : Mesure consistant à éliminer physiquement les produits, outils ou supports impliqués dans une activité de contrefaçon ou autre infraction.
– Demande d’information : Procédure légale par laquelle une partie lésée peut exiger de l’information sur l’origine et le réseau de distribution des biens ou services contrefaits.
– Concurrence déloyale et parasitaire : Termes souvent utilisés conjointement pour décrire des pratiques commerciales qui nuisent à un concurrent par des moyens illégitimes ou sans compensation.
– Dépens : Frais de justice qui doivent être payés par une partie à une procédure judiciaire, généralement la partie perdante.
– Article 700 du code de procédure civile : Disposition permettant à un justiciable de demander une indemnisation pour les frais non couverts par les dépens, tels que les honoraires d’avocat.
SUR CE
12. Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. / Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».
Sur la contrefaçon de marque
Moyen soulevé
13. La demanderesse expose qu’en reproduisant sa marque verbale sur un présentoir sans autorisation la société BC Trading l’a contrefaite.
Appréciation du tribunal
S’agissant de la marque verbale internationale désignant l’Union européenne
14. En application de l’article 4 de l’Arrangement de Madrid du 14 avril 1891 concernant l’enregistrement international des marques, la protection de la marque dans chacun des pays contractants intéressés sera, à partir de son enregistrement au Bureau international, la même que si cette marque y avait été directement déposée.
15. Aux termes de l’article 9 du règlement 2017/1001 du 14 juin 2017 « 1. l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif. / 2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d’une marque de l’Union européenne, le titulaire de cette marque de l’Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour des produits ou services lorsque: a) ce signe est identique à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée; b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque; (…) / 3. Il peut notamment être interdit, en vertu du paragraphe 2: a) d’apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement; b) d’offrir les produits, de les mettre sur le marché ou de les détenir à ces fins sous le signe, ou d’offrir ou de fournir des services sous le signe; c)d’importer ou d’exporter les produits sous le signe; d) de faire usage du signe comme nom commercial ou dénomination sociale ou comme partie d’un nom commercial ou d’une dénomination sociale; e) ‘utiliser le signe dans les papiers d’affaires et la publicité de faire usage du signe dans des publicités comparatives d’une manière contraire à la directive 2006/114/CE ».
16. Aux termes de l’article L. 717-1 du code de la propriété intellectuelle : « constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues aux articles 9, 10, 13 et 15 du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne ».
S’agissant de la marque verbale française
17. Aux termes de l’article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle : « est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services : 1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ».
18. Selon l’article L. 713-3-1 du code de la propriété intellectuelle : « sont notamment interdits, en application des articles L. 713-2 et L. 713-3, les actes ou usages suivants : (…) 2° L’offre des produits, leur mise sur le marché ou leur détention à ces fins sous le signe, ou l’offre ou la fourniture des services sous le signe ; (… ) / 5° L’usage du signe dans les papiers d’affaires et la publicité ; (…) / 7° La suppression ou la modification d’une marque régulièrement apposée. ».
19. En l’espèce, le procès-verbal de saisie-contrefaçon rédigé Maître [C] [V], commissaire de justice, est daté du 20 décembre 2022 et autorisé par ordonnance du juge délégué par le président du tribunal judiciaire de Paris du 5 décembre 2022.
20. Il indique « au centre du magasin, je constate la présence d’un présentoir d’une hauteur de 1.65 mètre et d’un diamètre de 26 cm sur lequel figure en haut la marque « ADOPT’ » eau de parfum France ; sur lequel se trouvent 173 flacons se présentant de façon identique, de la marque « dear body » et portant 20 noms différents ; chaque flacon de 30 ml a une taille de 15 cm, de long avec bouchon argenté inclus ; les appellations des parfums sont « La vanilla / boetic blooms / holyday mood (…) / nous procédons à la saisie réelle de ces produits en achetant 2 exemplaires chacun de ces 20 flacons, suivant facture annexée : 20 flacons resteront annexés sous scellés à l’expédition de notre PV, et les 20 autres à la minute moyennant prix public de 200 euros (soit 6 euros pour un flacon et 10 euros pour 2). / Sur l’interpellation de notre part, Monsieur [L] et Madame [U], nous confirment que « le présentoir sur lequel se trouve les flacons leur a été précédemment fourni par la société « folies Douces » qui travaillait avec eux, avant d’être rachetée par la société Adopt’ qui par la suite a unilatéralement cessé toute collaboration ». Monsieur [L] me présente à ce sujet une ancienne facture datée du 24/6/2015, ci-après annexée. / Sur interpellation de notre part, Monsieur [L] et Madame [U] m’indiquent « qu’ils ignoraient totalement que la marque « Dear Boby » puisse être une marque qui contrefaisait la marque adopt’. / Sur interpellation de notre part, Monsieur [L] m’indique qu’il va contacter immédiatement son comptable, la société Cegeac se trouvant à [Localité 5] afin que me soit adressé rapidement la facture d’achat de son fournisseur Chinois ; la facture étant arrivée chez lui ». Suivent des photographies de l’installation litigieuse et un document partiellement reproduit émanant de la société SAS Folies Douces portant mention « Parfums Qté 216 ».
21. Il ressort de ces constatations que la marque verbale « Adopt ‘ » est reproduite sur le présentoir comportant 200 flacons de parfums.
22. En l’absence du défendeur, il est acquis que le présentoir litigieux a vocation à être le support de vente des parfums comportant la marque « Adopt ‘ » et non de marques tierces. Le signe est identique à celui de la marque litigieuse.
23. La marque n’est pas reproduite sur les flacons mais uniquement sur le présentoir qui n’est pas un produit identique, la classe 3 visée au certificat de dépôt visant les parfums et non un présentoir.
24. Les flacons de parfum sont eux, similaires à ceux visés au dépôt. Il est en revanche établi que le présentoir sert à la commercialisation d’un produit identique servant à la commercialisation d’un produit identique et participe à l’identification de l’origine de ce produit.
25. Les produits ainsi commercialisés créent donc un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, constitué d’un consommateur de parfums abordables d’attention moyenne car achetant un produit de consommation courante et peu couteux, qui pourra penser que les flacons achetés proviennent de la société Adopt’.
26. La contrefaçon de marque est ainsi établie et justifie d’indemniser la société Adopt’.
Sur la contrefaçon de modèle international désignant l’Union européenne
Moyen soulevé
27. La demanderesse rappelle qu’en utilisant un présentoir mis à disposition antérieurement par la société dont elle vient aux droits, la société BC Trading a contrefait son modèle ayant vocation à le préserver.
Appréciation du tribunal
28. Selon l’article 14 « Effets de l’enregistrement international » de l’Arrangement de La Haye dans sa rédaction résultant de l’Acte de Genève du 2 juillet 1999, auquel l’Union européenne est partie « 1) [Effets identiques à ceux d’une demande selon la législation applicable] À compter de la date de l’enregistrement international, l’enregistrement international produit dans chaque Partie contractante désignée au moins les mêmes effets qu’une demande régulièrement déposée en vue de l’obtention de la protection du dessin ou modèle industriel en vertu de la législation de cette Partie contractante (…) »
29. L’article 14, Droit au dessin ou modèle communautaire, paragraphe 1. du règlement 6/2002 du 12 décembre 2001 dispose que « le droit au dessin ou modèle communautaire appartient au créateur ou à son ayant droit (…) ».
30. Aux termes de l’article 10, Étendue de la protection du règlement 6/2002 du 12 décembre 2001, « 1. La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression visuelle globale différente.
2. Pour apprécier l’étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle ».
31. L’article 19, Droits conférés par le dessin ou modèle communautaire de ce même règlement énonce que : « 1. Le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l’utiliser et d’interdire à tout tiers de l’utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de la présente disposition, on entend en particulier la fabrication, l’offre, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation ou l’utilisation d’un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins.
2. Le dessin ou modèle communautaire non enregistré ne confère cependant à son titulaire le droit d’interdire les actes visés au paragraphe 1 que si l’utilisation contestée résulte d’une copie du dessin ou modèle protégé. / L’utilisation contestée n’est pas considérée comme résultant d’une copie du dessin ou modèle protégé si elle résulte d’un travail de création indépendant réalisé par un créateur dont on peut raisonnablement penser qu’il ne connaissait pas le dessin ou modèle divulgué par le titulaire.
3. Le paragraphe 2 s’applique également à un dessin ou modèle communautaire enregistré soumis à un ajournement de publication tant que les inscriptions pertinentes au registre et le dossier n’ont pas été divulgués au public conformément à l’article 50, paragraphe 4 ».
32. Selon l’article L. 515-1 du code de la propriété intellectuelle, toute atteinte aux droits définis par l’article 19 du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur.
33. Il est rappelé que la contrefaçon d’un modèle s’apprécie au regard des caractéristiques protégées telles que déterminées par les seules reproductions graphiques ou photographiques contenues dans le certificat d’enregistrement.
34. Aux termes de l’article L. 522-1 du code de la propriété intellectuelle les chapitres Ier et Ier bis du présent titre sont applicables aux atteintes portées aux droits du propriétaire d’un dessin ou modèle communautaire.
35. Aux termes de l’article L. 521-7 du code de la propriété intellectuelle « pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon (…) ».
36. En l’espèce, le modèle en litige est déposé au registre international visé par l’Arrangement de La Haye et produit les mêmes effets qu’une demande de dessins et modèles de l’Union européenne.
37. Selon le certificat de dépôt du 16 novembre 2022, le modèle est déposé le 6 novembre 2014 et bénéficie de la protection prévue par la convention depuis le 23 novembre 2014.
38. Il porte sur un « présentoir de vente de parfums » ainsi représenté :
39. Il est démontré par la comparaison des photographies jointe au procès-verbal de saisie-contrefaçon précité et de la représentation au dépôt du modèle qu’ils sont identiques à l’exception de l’apposition de la marque « adopt’ », de la mention « eau de parfum France » et de la couleur noire du présentoir.
40. Il est déclaré par la demanderesse que le présentoir a été régulièrement mis à la disposition de la société BC Trading puis a été utilisé pour vendre un autre parfum, ce qui ne peut être contesté en l’absence de la défenderesse.
41. A défaut de produire la convention ayant initialement prévu l’utilisation de ce présentoir, la contrefaçon n’est toutefois pas établie.
Sur la contrefaçon de droit d’auteur
Moyen soulevé
42. La demanderesse rappelle qu’en utilisant un présentoir mis à disposition antérieurement par la société dont elle vient aux droits, la société BC Trading a contrefait son présentoir protégé, selon elle par le droit d’auteur et ayant vocation à le préserver.
Appréciation du tribunal
43. Aux termes de l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. / Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres Ier et III du présent code (…) ».
44. Aux termes de l’article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque ».
45. En l’espèce, de la même manière que s’agissant du moyen fondé sur le droit des dessins et modèles, il est déclaré par la demanderesse que le présentoir a été régulièrement mis à la disposition de la société BC Trading puis a été utilisé pour vendre un autre parfum.
46. A défaut de produire la convention ayant initialement prévu l’utilisation de ce présentoir, sans qu’il soit besoin d’établir que l’originalité alléguée est démontrée la contrefaçon alléguée n’est pas établie.
47. La demande indemnitaire fondée sur la contrefaçon de droit d’auteur est rejetée.
Sur les mesures de réparation
Moyen soulevé
48. La société Adopt’ soutient qu’elle a souffert d’un préjudice moral spécifiquement réparable à hauteur de 5 000 euros et d’un préjudice patrimonial consécutif à la reproduction de sa marque sur le présentoir depuis 2020 indemnisable forfaitairement à hauteur de 15 000 euros.
Appréciation du tribunal
Les demandes indemnitaires :
49. Selon l’article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle « pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : 1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ; 3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon. / Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée ».
50. En l’espèce, la société demanderesse sollicite une condamnation forfaitaire pour indemniser son préjudice à hauteur de 20 000 euros. Elle distingue toutefois au sein de ses écritures une demande portant sur son préjudice moral à hauteur de 5 000 euros outre une demande portant sur 15 000 euros pour la réparation de son préjudice patrimonial.
51. Il appartient au juge de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Retenir la qualification de somme forfaitaire empêcherait l’indemnisation du préjudice moral. Il importe donc de traiter ces demandes séparément.
52. S’agissant de la demande d’indemnité forfaitaire, la société Adopt’ justifie de frais importants pour la promotion de sa marque. Elle justifie également d’un chiffre d’affaires représentant plusieurs millions d’euros par an au titre de la vente de parfums selon attestations comptables. Ces chiffres sont toutefois à mettre en rapport avec les faits de l’espèce où un seul présentoir est relevé dans une boutique de taille modeste, comportant 200 flacons d’une autre marque sans stock relevé sur les lieux. Aucun contrat n’est produit pour justifier du montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Il apparaît justifié, en conséquence de faire droit à la demande à hauteur de 2 000 euros à titre de somme forfaitaire.
53. S’agissant de la demande de préjudice moral, il est constant que le présentoir pourvu de la marque contrefaite est utilisé pour vendre des produits de fabricants concurrents de qualité moindre mais reproduisant le format utilisé par les flacons de la société Adopt’ ce qui génère un préjudice par la banalisation de sa marque qui sera indemnisé à hauteur de 1 000 euros.
Les demandes d’interdiction ou de destruction
54. Selon l’article L. 716-4-11 du code de la propriété intellectuelle « en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les produits reconnus comme produits contrefaisants et les matériaux et instruments ayant principalement servi à leur création ou fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée. / La juridiction peut aussi ordonner toute mesure appropriée de publicité du jugement, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu’elle désigne, selon les modalités qu’elle précise. / Les mesures mentionnées aux deux premiers alinéas sont ordonnées aux frais du contrefacteur ».
55. Sur le fondement de cette disposition, il sera interdit à la défenderesse de reproduire ou d’imiter la marque « Adopt’ » sur tout présentoir ou support de vente.
56. La contrefaçon ne s’étend pas à la reprise d’éléments d’emballage ou packaging des produits en cause, par ailleurs examinés sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire. La demande d’interdiction afférente sera, par voie de conséquence, rejetée avec le surplus.
La demande d’information
57. Aux termes de l’article L. 716-4-9 du code de la propriété intellectuelle « si la demande lui en est faite, la juridiction saisie au fond ou en référé d’une procédure civile prévue au présent titre peut ordonner, au besoin sous astreinte, afin de déterminer l’origine et les réseaux de distribution des produits argués de contrefaçon qui portent atteinte aux droits du demandeur, la production de tous documents ou informations détenus par le défendeur ou par toute personne qui a été trouvée en possession de produits argués de contrefaçon ou qui fournit des services utilisés dans de prétendues activités de contrefaçon ou encore qui a été signalée comme intervenant dans la production, la fabrication ou la distribution de ces produits ou la fourniture de ces services. / La production de documents ou d’informations peut être ordonnée s’il n’existe pas d’empêchement légitime ».
58. En l’espèce, la contrefaçon porte sur l’apposition de le marque de la demanderesse sur un présentoir unique dans une boutique afin de vendre des flacons de parfum. L’indemnisation forfaitaire portant réparation intégrale du préjudice, et le préjudice moral étant indemnisé par ailleurs, la demande d’information n’apparait pas justifiée.
Sur la concurrence déloyale et parasitaire
Moyen soulevé
59. La société Adopt’ soutient que les eaux de parfum proposées à la vente ont les mêmes caractéristiques que les siennes : même packaging par flacon vaporisateur de 30ml avec bouchon métallique, mêmes étiquettes de couleur vive avec bandeau noir et nom du parfum écrit à l’horizontal, noms de parfums ressemblants et distinction des fragrances par couleurs. Elle souligne que le prix est identique.
60. Elle expose que la vente de parfums concurrents sur le présentoir banalise et galvaude sa gamme d’eaux de parfum et capte sa clientèle. Elle souligne qu’un bon de commande porte sur 4 000 flacons de parfum et que des stocks importants sont relevés par le procès-verbal de saisie-contrefaçon.
Appréciation du tribunal
61. L’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
62. Selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
63. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce, ce qui implique qu’un signe ou un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l’absence de faute, laquelle peut être constituée par la création d’un risque de confusion sur l’origine du produit dans l’esprit de la clientèle, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce.
64. Le parasitisme économique se définit comme l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire.
65. L’appréciation de cette faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté de l’usage, l’originalité et la notoriété de la prestation copiée.
66. En l’espèce, il est établi par le procès-verbal de saisie-contrefaçon précité que des flacons de parfums reproduisant le volume, la forme, le bouchon métallique et des couleurs vives disposées de façon semblable sont vendus par la défenderesse dans un présentoir habituellement utilisé pour commercialiser les produits Adopt’.
66.1 Il est relevé que les bouchons et flacons saisis par le commissaire de justice sont identiques à ceux habituellement commercialisés par la société demanderesse et présentent des étiquettes utilisant des couleurs vives assimilables à celles de la société demanderesse.
67. Il résulte de ces circonstances un risque de confusion, pour le consommateur, qui profite à la société BC Trading qui bénéficie ainsi directement de ses efforts promotionnels et de l’image de ses produits confondus avec ceux effectivement vendus dans sa boutique.
68. Contrairement à l’argument en demande, il n’est pas démontré que 4 000 unités des flacons vendus soient commandés ni entreposés en l’état des débats.
69. Il résulte de ces circonstances et des documents financiers produits en demande portant sur le chiffre d’affaires réalisé au titre des parfums Adopt’ et des investissements faits, que le préjudice de la demanderesse doit être indemnisé à hauteur de 3 000 euros.
Sur les demandes accessoires
70. La défenderesse, partie perdante est condamnée aux dépens et à payer à la société Adopt’ la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
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