Tribunal judiciaire de Paris, 27 novembre 2024, RG n° 23/15797
Tribunal judiciaire de Paris, 27 novembre 2024, RG n° 23/15797

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Paiements en ligne non autorisés : la responsabilité du client de la banque

Résumé

Contexte de l’affaire

Mme [K] [D] [S] est cliente de la Société Générale et conteste des opérations de paiement non autorisées sur son compte bancaire, totalisant 24 655 euros, effectuées entre le 26 avril et le 15 mai 2023. Elle a déposé une plainte le 16 mai 2023 après avoir constaté des transactions suspectes.

Opérations contestées

Les opérations contestées incluent un paiement en ligne de 8 500 euros à « COMMERCE ELECTRONIQUE KRONOS », quatre retraits en espèces totalisant 5 900 euros, ainsi qu’un achat de 1 700 euros chez Fendi et un autre de 8 555 euros chez Gucci, tous effectués sans son autorisation.

Interpellation des fraudeurs

Deux individus ont été interpellés en possession de la carte bancaire de Mme [D] [S] et des articles achetés chez Gucci. Les biens ont été restitués, et Mme [D] [S] a été remboursée de 8 555 euros. Cependant, les fraudeurs ont été relaxés pour les retraits d’espèces.

Demande de remboursement

Mme [D] [S] a exigé le remboursement de 16 100 euros de la Société Générale par courrier le 27 septembre 2023, mais sa demande a été refusée. Elle a ensuite assigné la banque devant le tribunal judiciaire de Paris.

Arguments de Mme [D] [S]

Dans ses conclusions, Mme [D] [S] demande le remboursement des sommes indûment prélevées, des dommages et intérêts pour résistance abusive, ainsi que des frais de justice. Elle affirme n’avoir jamais autorisé les paiements contestés et dénonce une négligence de la banque.

Réponse de la Société Générale

La Société Générale conteste les demandes de Mme [D] [S], affirmant qu’elle a validé les opérations en utilisant un code secret envoyé sur son téléphone. La banque soutient qu’il n’y a pas eu de dysfonctionnement et que Mme [D] [S] a commis une négligence en remettant sa carte à un tiers.

Décision du tribunal

Le tribunal a rejeté les demandes de Mme [D] [S], considérant qu’elle avait commis une négligence grave en remettant sa carte et en communiquant ses données personnelles. La banque n’est donc pas tenue de rembourser les opérations contestées.

Conséquences financières

Mme [D] [S] a été condamnée à payer les dépens et à verser 3 000 euros à la Société Générale pour couvrir ses frais de justice. Le jugement est exécutoire à titre provisoire.

Décision du 27 Novembre 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 23/15797 – N° Portalis 352J-W-B7H-C3KVM

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :

9ème chambre 1ère section

N° RG 23/15797

N° Portalis 352J-W-B7H-C3KVM

N° MINUTE :

Contradictoire

Assignation du :
07 décembre 2023

JUGEMENT
rendu le 27 novembre 2024
DEMANDERESSE

Madame [K] [D] [S]
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentée par Me Théophile TOUNY, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DÉFENDERESSE

S.A. SOCIETE GENERALE
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Dominique FONTANA de la SELARL DREYFUS FONTANA, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #K0139

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Anne-Cécile SOULARD, Vice-présidente,
Monsieur Patrick NAVARRI, Vice-président,
Madame Marine PARNAUDEAU, Vice-présidente,

assistés de Madame Sandrine BREARD, Greffière.

DÉBATS

A l’audience du 16 octobre 2024 tenue en audience publique devant Madame Anne-Cécile SOULARD, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [K] [D] [S] est titulaire d’un compte bancaire ouvert dans les livres de la Société Générale.
Elle conteste avoir autorisé des opérations de paiement effectuées entre le 26 avril 2023 et le 15 mai 2023 pour un montant total de 24 655 euros.
Mme [D] [S] conteste les opérations suivantes :
– un paiement en ligne du 26 avril 2023 pour un montant de 8 500 euros en faveur de « COMMERCE ELCTRONIQUE KRONOS »,
– quatre retraits auprès de distributeurs du 12 mai 2023 pour des montants respectifs de 900 euros, 2 000 euros, 2 000 euros et 1 000 euros,
– un achat de 1 700 euros effectué le 15 mai 2023 auprès de la boutique Fendi à [Localité 6],
– un achat de 8 555 euros effectué le 15 mai 2023 auprès de la boutique Gucci à [Localité 6].
Mme [D] [S] a déposé plainte le 16 mai 2023 auprès du commissariat de police de [Localité 7].
Deux personnes ont été interpellées en possession de la carte bancaire de Mme [D] [S] et des achats effectués auprès de l’enseigne Gucci. Les achats ont été restitués à cette enseigne et le compte de Mme [D] [S] a été recrédité de la somme de 8 555 euros.
Par jugement du 29 juin 2023 de la 23ème chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris, ces deux personnes ont été condamnées au titre des achats effectués auprès des enseignes Fendi et Gucci et relaxées pour les retraits d’espèces.
Mme [D] [S] a mis en demeure la Société Générale de lui rembourser la somme de 16 100 euros par courrier du 27 septembre 2023, ce que la Société Générale a refusé.
Par acte de commissaire de justice du 7 décembre 2023, Mme [D] [S] a fait assigner la société anonyme Société Générale devant le tribunal judiciaire de Paris.

Demandes et moyens de Mme [D] [S]
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 27 juin 2024, Mme [D] [S] demande au tribunal de :
« CONDAMNER la Société Générale à devoir verser à Madame [D] [S] la somme de 16.100 euros avec intérêts à taux légal à compter du 5 septembre 2023, en remboursement des sommes indument débitées de son compte bancaire n°[XXXXXXXXXX03] ;
− CONDAMNER la Société Générale à devoir verser à Madame [D] [S] la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts pour la résistance abusive dont elle a fait preuve ;
− CONDAMNER la Société Générale à devoir verser à Madame [D] [S] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
− RAPPELER que l’exécution provisoire est de droit. »
Mme [D] [S] relate qu’à la fin du mois d’avril 2023, elle a reçu un appel d’un interlocuteur se présentant comme le service fraude de la Société Générale et que cet interlocuteur lui a indiqué que son compte bancaire présentait des mouvements suspects et que sa carte allait être bloquée. Mme [D] [S] a constaté alors que sa carte était bloquée et qu’elle n’avait plus accès à son compte en ligne sans qu’elle n’ait effectué aucune démarche en ce sens.
Elle en a alors avisé son conseiller à la Société Générale, M. [G] [Z], en lui indiquant qu’un paiement non autorisé de 8 500 euros avait été effectué en ligne le 26 avril 2023 auprès de « COMMERCE ELECTRONIQUE KRONOS » et en lui demandant d’annuler ce débit. Cependant, malgré la promesse de son conseiller, ce débit n’a pas été annulé.
Mme [D] [S] expose ensuite qu’elle a de nouveau été contactée par téléphone le 12 mai 2023 par une personne se présentant comme une conseillère bancaire de la Société Générale pour l’aviser de l’existence de mouvements suspects et du blocage de sa carte. Sur les indications de cette personne, Mme [D] [S] a remis sa carte bancaire à un individu qui s’est présenté chez elle, sans toutefois lui remettre le code confidentiel de sa carte de paiement. Mme [D] [S] a ensuite constaté que des retraits avaient été effectués avec sa carte le 12 mai 2023 et des paiements effectués le 15 mai 2023 auprès des commerces Fendi et Gucci. Mme [D] [S] n’a retrouvé l’accès à son espace bancaire en ligne qu’à compter du 24 mai 2023.
Mme [D] [S] affirme qu’elle n’a validé aucun des paiements contestés, ni communiqué ses données d’identification et d’accès à son espace personnel ou ses données et codes de cartes bancaires.
Elle conteste avoir commis une quelconque négligence. Elle relève qu’il n’est pas justifié que les opérations auraient été authentifiées, dûment enregistrées et comptabilisées et qu’elles n’auraient pas été affectées par une déficience technique ou autre.
Elle reproche à la Société Générale d’avoir fait preuve d’une résistance injustifiée lors de leurs échanges en lui communiquant des informations contradictoires et évasives.

Demandes et moyens de la Société Générale
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 10 septembre 2024, la Société Générale demande au tribunal de :
« DECLARER Madame [K] [D] [S] mal fondée en ses demandes.
En conséquence,
L’EN DEBOUTER.
CONDAMNER Madame [K] [D] [S] à payer à SOCIETE GENERALE la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du C.P.C.
CONDAMNER Madame [K] [D] [S] aux entiers dépens en application de l’article 696 du C.P.C.
Subsidiairement,
ORDONNER la suspension de l’exécution provisoire de la décision à intervenir. » 
La Société Générale considère que, contrairement à ce qu’affirme Mme [D] [S], elle a communiqué spontanément ses données personnelles et a validé plusieurs opérations.
La Société Générale affirme que l’achat de 8 500 euros réalisé auprès de KRONOS le 26 avril 2023 a été validé au moyen d’un code secret aléatoire envoyé sur le téléphone de Mme [D] [S].
Elle souligne que cette opération a été validée au moyen d’une authentification forte.
La Société Générale conteste l’existence d’un dysfonctionnement de la banque à distance ou d’une faille de sécurité de son système.
Elle estime qu’elle ne pouvait rembourser cette opération puisqu’elle a été validée le 26 avril 2023 alors que Mme [D] [S] a fait opposition sur sa carte bancaire le 27 avril 2024.
La Société Générale observe que les retraits et les paiements contestés du mois de mai 2023 ont été effectués en utilisant la carte de Mme [D] [S] ainsi que son code confidentiel. Elle relève que ces opérations ont été réalisées après que Mme [D] [S] a remis sa carte aux fraudeurs et leur a donné l’accès à sa banque en ligne leur permettant de découvrir son code.
La Société Générale soutient que Mme [D] [S] a commis une négligence grave en remettant sa carte et en communiquant ses données personnelles.
* * *
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé des moyens et arguments venant au soutien de leurs demandes et de leurs défenses.
Le juge de la mise en état a clôturé l’instruction de l’affaire par ordonnance du 12 Septembre 2024 et fixé l’affaire pour être plaidée à l’audience tenue en juge rapporteur du 16 octobre 2024.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,
REJETTE l’ensemble des demandes de Mme [K] [D] [S] ;
CONDAMNE Mme [K] [D] [S] aux entiers dépens ;
CONDAMNE Mme [K] [D] [S] à payer à la Société Générale la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire ;
RAPPELLE que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.

Fait et jugé à Paris le 27 novembre 2024.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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