Tribunal judiciaire de Paris, 26 novembre 2024, RG n° 21/12944
Tribunal judiciaire de Paris, 26 novembre 2024, RG n° 21/12944

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Impact des mesures sanitaires sur les obligations contractuelles en matière locative

Résumé

Contexte de l’affaire

La SCI [Adresse 6] a loué deux cellules à la SARL Société du Pressing du Baobab dans un centre commercial. La première cellule, dédiée à des activités de pressing, a été louée pour un loyer annuel de 25.500 euros, tandis que la seconde, utilisée pour la photographie, a été renouvelée pour une durée de 9 ans. En raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19, la bailleresse a accordé des remises de loyer pour certaines périodes de fermeture, mais un désaccord est survenu concernant les loyers dus pendant une troisième période de fermeture.

Assignation en justice

Le 18 octobre 2021, la société Pressing du Baobab a assigné la SCI devant le tribunal judiciaire de Paris, demandant le remboursement de 2.719,88 euros pour trop versés et, à titre subsidiaire, un échelonnement de son arriéré locatif. Elle a également demandé que les loyers ne soient pas dus pour la période de fermeture du 6 mars au 18 mai 2021, invoquant des principes de bonne foi et d’exception d’inexécution.

Demandes de la société Pressing du Baobab

Dans ses conclusions, la société Pressing du Baobab a demandé la réduction des loyers de 40 % pour une période soumise à un couvre-feu, ainsi qu’une franchise de loyers pour plusieurs mois. Elle a également sollicité des dommages et intérêts et le remboursement de 512,08 euros pour trop versés. En cas d’arriéré, elle a demandé un échelonnement sur 24 mois.

Réponse de la SCI [Adresse 6]

La SCI a demandé le débouté de toutes les demandes de la société Pressing du Baobab et a réclamé le paiement de 17.628,36 euros pour loyers impayés. Elle a soutenu que la fermeture du centre commercial n’était pas de son fait et que les aides d’État reçues par la locataire ne justifiaient pas son non-paiement des loyers.

Arguments des parties

La société Pressing du Baobab a fait valoir que la fermeture administrative des locaux constituait une impossibilité d’exécution de son contrat de bail, tandis que la SCI a affirmé qu’elle avait respecté son obligation de délivrance. La SCI a également souligné que la locataire avait des fonds disponibles, ce qui contredisait ses arguments de force majeure.

Décision du tribunal

Le tribunal a jugé que la société Pressing du Baobab n’était pas fondée à demander l’exonération de paiement des loyers pour la période de fermeture, considérant que la bailleresse avait respecté ses obligations. La demande de réduction des loyers pour la période de couvre-feu a également été rejetée. La société Pressing du Baobab a été condamnée à payer 17.628,36 euros à la SCI, avec intérêts, et sa demande de délais de paiement a été déboutée.

Conséquences financières

La société Pressing du Baobab a été condamnée à verser 4.000 euros à la SCI au titre des frais de justice, et les demandes de dommages et intérêts des deux parties ont été rejetées. L’exécution provisoire de la décision a été maintenue, compte tenu de l’ancienneté de la dette.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

18° chambre
1ère section

N° RG 21/12944
N° Portalis 352J-W-B7F-CVIMI

N° MINUTE : 6

contradictoire

Assignation du :
18 Octobre 2021

JUGEMENT
rendu le 26 Novembre 2024
DEMANDERESSE

S.A.R.L. SOCIETE DU PRESSING DU BAOBAB
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Rémy CONSEIL de la SELARL BARBIER ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C0987

DÉFENDERESSE

S.C.I. [Adresse 6]
[Adresse 3]
[Localité 2]

représentée par Me Anne MAS, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0286,
et par Maître Corinne ROUX, avocat au barreau de Versailles, avocat plaidant,

Décision du 26 Novembre 2024
18° chambre 1ère section
N° RG 21/12944 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVIMI

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Sophie GUILLARME, 1ère Vice-présidente adjointe,
Monsieur Jean-Christophe DUTON, Vice-président,
Madame Diana SANTOS CHAVES, Juge,

assistés de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,

Rédactrice : Diana SANTOS CHAVES,

DÉBATS

A l’audience du 10 Septembre 2024, tenue en audience publique, devant Madame Diana SANTOS CHAVES, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.
Avis a été donné aux avocats des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2024.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DES FAITS

La SCI [Adresse 6] a donné à bail à la SARL Société du Pressing du Baobab deux cellules dans le centre commercial du [5] situé [Adresse 1] à [Localité 7] :
– Une première cellule exploitée sous l’enseigne  » Pressing du Baobab  » pour l’activité de  » laverie, pressing, dépôt, clé minute, talon minute, gravure, retouche vêtements « , selon un bail renouvelé pour la dernière fois par acte sous seing privé du 23 novembre 2020, pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2019, moyennant un loyer en principal de 25.500 euros par an,
– Une seconde cellule exploitée sous l’enseigne  » Photo Express  » pour l’activité de photographie, renouvelé pour la dernière fois par acte sous seing privé du 6 novembre 2013 pour une durée de 9 ans, à compter du 1er juillet 2013.

Compte tenu de la crise sanitaire Covid-19 qui a entrainé des fermetures administratives du centre commercial, la bailleresse a accordé à la société du Pressing du Baobab une remise de loyer correspondant aux échéances d’avril, mai et novembre 2020.

Les parties ne sont pas parvenues à un accord concernant les échéances de loyers relatives à la troisième période de fermeture administrative, du 6 mars au 18 mai 2021.

Par acte extrajudiciaire en date du 18 octobre 2021, la société Pressing du Baobab a assigné la SCI [Adresse 6] devant le tribunal judiciaire de Paris en vue de solliciter à titre principal, sa condamnation à lui payer une somme de 2.719,88 euros au titre de trop versés de loyers, charges, taxes et accessoires, et à titre subsidiaire, en cas d’arriéré locatif, lui accorder un échelonnement sur 24 mois pour payer son arriéré.

Par conclusions notifiées par RPVA le 20 décembre 2022, la société Pressing du Baobab demande au tribunal, au visa des articles 1104, 1218, 1219, 1343-5, 1719, 1722 du code civil, de :
– Juger qu’en raison du principe de bonne foi, de la suspension du bail pour impossibilité d’exécuter le contrat, de l’exception d’inexécution et de la perte partielle de la chose louée, les loyers, charges, taxes et accessoires ne sont pas dus pour la période du 6 mars 2021 au 18 mai 2021,
– Juger qu’en raison de la perte partielle de la chose louée pour la période soumise à un couvre-feu, les loyers, charges, taxes et accessoires dus seront réduits de 40 % à compter du 15 décembre 2020 jusqu’au 5 mars 2021,
– À titre subsidiaire, juger que le bail conclu entre la Société du Pressing du Baobab et la SCI [Adresse 6] le 26 janvier 2011 doit être révisé suite à la crise sanitaire liée à la Covid-19,
– En conséquence :
• Accorder à la société Sephora (sic) une franchise de loyers et de charges de :
◦ 50 % pour mars 2020,
◦ 100 % pour avril 2020,
◦ 37 % pour mai 2020,
◦ 70 % pour novembre 2020,
– En conséquence, condamner la SCI [Adresse 6] à lui rembourser une somme de 512,08 euros au titre des trop versés de loyers, charges, taxes et accessoires,
– Condamner la SCI [Adresse 6] à lui verser 5.000 euros de dommages et intérêts,
– À titre subsidiaire, en cas d’arriéré locatif, lui accorder un échelonnement sur 24 mois pour payer son arriéré,
– En cas de non-respect de cet échéancier, juger que l’intégralité de l’éventuel arriéré ne sera dû que 15 jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception restée infructueuse,
– Débouter la SCI [Adresse 6] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– La condamner à lui verser une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la SCI [Adresse 6] aux entiers dépens et autoriser Maître Rémy Conseil (SELARL Barbier Associés) à les recouvrer directement conformément à l’article 699 du code de procédure civile,
– Si le Tribunal faisait droit à la demande de non-paiement des loyers pendant les périodes de fermeture du centre lié au Covid, l’exécution provisoire sera prononcée,
– Si elle devait être condamnée à payer l’arriéré locatif, l’exécution provisoire sera écartée.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 14 décembre 2022, la SCI [Adresse 6] demande au tribunal de :
– Débouter la société Pressing Du Baobab de l’ensemble de ses demandes,
– La condamner à lui verser la somme de 17.628,36 euros, se décomposant comme suit:
– 13.666,96 euros au titre des loyers et charges afférents au local affecté au fonds de commerce exploité sous l’enseigne  » PRESSING DU BAOBAB  » suivant décompte arrêté au 9 septembre 2024 ;
– 3.961,40 euros au titre des loyers et charges afférents au local affecté au fonds de commerce exploité sous l’enseigne  » PHOTO EXPRESS  » suivant décompte arrêté au 9 septembre 2024 ;
– dire et juger que les sommes dues en principal porteront intérêts au taux légal à compter de la date d’exigibilité de chacune des échéances locatives impayées,
– ordonner l’anatocisme,
– condamner la société Pressing Du Baobab à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts,
– la condamner à lui verser une somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Anne Mas conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Conformément à l’article 455 du code procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits de la cause, des prétentions et des moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 janvier 2023. L’affaire a été fixée pour être plaidée à l’audience tenue à juge rapporteur du 10 septembre 2024. A l’audience, l’affaire a été mise en délibéré au 26 novembre 2024, date à laquelle le jugement a été rendu par mise à disposition au greffe.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort :

Déboute la SARL Société Du Pressing du Baobab de sa demande en remboursement de loyers et charges afférents aux périodes de fermetures administratives et couvre-feu liées à la pandémie de Covid-19,

Condamne la SARL Société Du Pressing du Baobab à payer à la SCI [Adresse 6] la somme de 17.628,36 euros au titre d’arriérés de loyers et charges arrêtés au 9 septembre 2024, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Dit que les intérêts au taux légal dus au moins pour une année entière seront capitalisés en application de l’article 1343-2 du code civil,

Déboute la SARL Société Du Pressing du Baobab de sa demande de délais de paiement,

Déboute la SCI [Adresse 6] de sa demande de dommages et intérêts,

Déboute la SARL Société Du Pressing du Baobab de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne la SARL Société Du Pressing du Baobab à payer à la SCI [Adresse 6] la somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SARL Société Du Pressing du Baobab de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Société Du Pressing du Baobab aux entiers dépens de l’instance avec distraction au profit de Me Anne Mas,

Dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire,

Fait et jugé à Paris le 26 Novembre 2024.

Le Greffier La Présidente

Christian GUINAND Sophie GUILLARME

 


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